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« Charlie Chaplin » : différence entre les versions

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{{Infobox Cinéma (personnalité)
{{Infobox Cinéma (personnalité)
| nom = Charles Spencer Chaplin, Sir (GBE)
| nom = Charlie Chaplin
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| légende = Charlie Chaplin en 1915.
| légende = Charlie Chaplin dans les années {{date-|1920}}.
| alternative = Portrait photographique en noir et blanc d'un jeune homme, habillé d'un costume, coiffé avec une raie au mileu
| nom de naissance = Charles Spencer Chaplin
| nom de naissance = Charles Spencer Chaplin
| surnom = ''{{lang|en|The Tramp}}'' (en [[anglais]])<br />[[Charlot]] (en [[français]])
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| date de naissance = {{Date de naissance|16|4|1889}}
| date de naissance = 16 avril 1889
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| films notables = [[Filmographie de Charlie Chaplin|Filmographie]]
| films notables = [[Filmographie de Charlie Chaplin|Filmographie]]
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| site web = {{Lien web|langue=en|url=http://charliechaplin.com/|titre=Site Officiel}}
[[Fichier:Firma de Charles Chaplin.svg|150px]] <br /> Signature de Charlie Chaplin
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'''Charles Spencer Chaplin''', [[Nom de scène|dit]] '''Charlie Chaplin''' {{MSAPI|ˈt͡ʃɑːli ˈt͡ʃæplɪn}}<ref group="n">[[Prononciation de l'anglais|Prononciation]] en [[anglais britannique]] [[Transcription phonétique|retranscrite]] selon la [[alphabet phonétique international|norme API]].</ref>, est un [[acteur]], [[réalisateur]], [[scénariste]], [[Producteur de cinéma|producteur]] et [[compositeur]] [[Royaume-Uni|britannique]], né le {{Date de naissance|16|4|1889}}, probablement à [[Londres]] ([[Royaume-Uni]]), et mort le {{Date de décès|25|12|1977}} à [[Corsier-sur-Vevey]] ([[Suisse]]).


'''Charles Spencer Chaplin''', dit '''Charlie Chaplin''', le {{Date de naissance|16|4|1889}} et mort le {{Date de décès|25|12|1977}} à [[Corsier-sur-Vevey]] ([[Suisse]]), est un [[acteur]], [[réalisateur]], [[scénariste]], [[Producteur de cinéma|producteur]] et [[compositeur]] [[Royaume-Uni|britannique]] qui devint une idole du [[cinéma muet]] grâce à son personnage de [[Charlot]]. Durant une carrière longue de 65 ans, il joua dans plus de 80 films, et sa vie publique et privée a fait l'objet d'adulation comme de controverses.
Devenu une idole du [[cinéma muet]] à partir du milieu des [[années 1910]], et plus particulièrement du [[burlesque]], grâce à son personnage de [[Charlot]] (désigné simplement comme {{citation étrangère|langue=en|the tramp}} {{incise|le vagabond}} dans les versions originales), il acquiert ensuite une notoriété et une reconnaissance plus larges pour ses prestations d'acteur comme pour ses réalisations de films. Durant une carrière longue de {{nobr|65 ans}}, il joue dans plus de {{nobr|80 films}}. Sa vie publique et privée, ainsi que ses prises de position, font par ailleurs l'objet d'adulations comme de controverses.


Né peut-être à [[Londres]], Chaplin grandit dans la misère entre un père absent et une mère en grandes difficultés financières, tous deux artistes de music-hall, qui se séparèrent deux ans après sa naissance. Plus tard, sa mère fut internée à l'[[hôpital psychiatrique]] alors que son fils avait quatorze ans. À l'âge de cinq ans, il fait sa première apparition sur scène. Il commence très tôt à se produire dans des [[music-hall]]s et devient rapidement acteur. À 19 ans, il est remarqué par l'[[Agent artistique|imprésario]] [[Fred Karno]] et réalise une tournée aux [[États-Unis]]. Il joue au cinéma pour la première fois en 1914 dans le film ''[[Pour gagner sa vie]]'' et travaille avec les sociétés de production [[The Essanay Film Manufacturing Company|Essanay]], [[Mutual Film|Mutual]] et [[First National Pictures|First National]]. En 1918, il était devenu l'une des personnalités les plus connues au monde.
Chaplin grandit dans la misère entre un père absent et une mère en grande difficulté financière, tous deux artistes de [[music-hall]], qui se séparent deux ans après sa naissance. Plus tard, sa mère est internée à l'[[hôpital psychiatrique]] alors que son fils a {{nobr|14 ans}}. À l'âge de {{nobr|5 ans}}, il fait sa première apparition sur scène. Il commence très tôt à se produire dans des music-halls et devient rapidement acteur. À {{unité|19|ans}}, il est remarqué par l'[[Agent artistique|imprésario]] [[Fred Karno]] et réalise une tournée aux [[États-Unis]]. Il interprète son premier rôle au cinéma en {{date-|1914}} dans le film ''[[Pour gagner sa vie]]'' et travaille avec les sociétés de production [[The Essanay Film Manufacturing Company|Essanay]], [[Mutual Film|Mutual]] et [[First National Pictures|First National]]. En {{date-|1918}}, il est l'une des personnalités les plus connues au monde.


En 1919, Chaplin cofonde la société [[United Artists]] et obtient ainsi le contrôle total sur ses œuvres. Parmi ses premiers longs-métrages figurent ''[[Charlot soldat]]'' (1918), ''[[Le Kid]]'' (1921), ''[[L'Opinion publique]]'' (1923), ''[[La Ruée vers l'or]]'' (1925) et ''[[Le Cirque (film)|Le Cirque]]'' (1928). Il refuse de passer au [[cinéma sonore]] et continue de produire des films muets dans les années 1930, comme ''[[Les Lumières de la ville]]'' (1931) et ''[[Les Temps modernes (film)|Les Temps modernes]]'' (1936). Ses œuvres devinrent ensuite plus politiques, avec notamment ''[[Le Dictateur]]'' (1940), dans lequel il se moquait d'[[Adolf Hitler|Hitler]] et de [[Mussolini]]. Sa popularité décline dans les années 1940 en raison de controverses au sujet de ses liaisons avec des femmes bien plus jeunes que lui et d'un procès en reconnaissance de [[paternité]]. Chaplin fut également accusé de sympathies [[Communisme|communistes]] et les enquêtes du [[Federal Bureau of Investigation|FBI]] et du [[House Un-American Activities Committee|Congrès]] lui firent perdre son visa américain. Il choisit de s'établir en [[Suisse]] en 1952. Il abandonna son personnage de Charlot dans ses derniers films, dont ''[[Monsieur Verdoux]]'' (1947), ''[[Les Feux de la rampe]]'' (1952), ''[[Un roi à New York]]'' (1957) et ''[[La Comtesse de Hong-Kong]]'' (1967).
En [[1919 au cinéma|1919]], Chaplin cofonde la société [[United Artists]] et obtient ainsi le contrôle total sur ses œuvres. Parmi ses premiers [[Long métrage|longs métrages]] figurent ''[[Charlot soldat]]'' ([[1918 au cinéma|1918]]), ''[[Le Kid]]'' ([[1921 au cinéma|1921]]), ''[[L'Opinion publique]]'' ([[1923 au cinéma|1923]]), ''[[La Ruée vers l'or]]'' ([[1925 au cinéma|1925]]) et ''[[Le Cirque (film)|Le Cirque]]'' ([[1928 au cinéma|1928]]). Il refuse de passer au [[cinéma sonore]] et continue de produire des films muets dans les [[années 1930]], comme ''[[Les Lumières de la ville]]'' ([[1931 au cinéma|1931]]) et ''[[Les Temps modernes (film)|Les Temps modernes]]'' ([[1936 au cinéma|1936]]). Ses œuvres deviennent ensuite plus politiques, avec notamment ''[[Le Dictateur]]'' ([[1940 au cinéma|1940]]), dans lequel il se moque de [[Adolf Hitler|Hitler]] et de [[Benito Mussolini|Mussolini]]. Sa popularité décline dans les années 1940 en raison de controverses au sujet de ses liaisons avec des femmes bien plus jeunes que lui et d'un procès en reconnaissance de [[paternité]]. Chaplin est également accusé de sympathies [[Communisme|communistes]], et les enquêtes du [[Federal Bureau of Investigation|FBI]] et du [[House Un-American Activities Committee|Congrès]] lui font perdre son visa américain. Il choisit de s'établir en [[Suisse]] en {{date-|1952}}. Il abandonne son personnage de Charlot dans ses derniers films, dont ''[[Monsieur Verdoux]]'' ([[1947 au cinéma|1947]]), ''[[Les Feux de la rampe]]'' ([[1952 au cinéma|1952]]), ''[[Un roi à New York]]'' ([[1957 au cinéma|1957]]) et ''[[La Comtesse de Hong-Kong]]'' ([[1967 au cinéma|1967]]).


Chaplin écrivit, réalisa, produisit, composa la musique et joua dans la plupart de ses films. Il était perfectionniste et son indépendance financière lui permit de consacrer des années au développement de ses œuvres. Bien qu'étant des comédies de type [[slapstick]], ses films intégraient des éléments de [[pathos]] et étaient marqués par les thèmes sociaux et politiques ainsi que par des éléments autobiographiques. En 1972, l'{{lang|en|[[Academy of Motion Picture Arts and Sciences]]}} lui a remis un [[Oscar d'honneur]] pour sa contribution inestimable à l'industrie cinématographique et plusieurs de ses œuvres sont aujourd'hui considérées comme faisant partie des plus grands films de tous les temps.
Chaplin écrit, réalise et produit la plupart de ses films, en plus d'y jouer et d'en composer la musique. Il est perfectionniste et son indépendance financière lui permet de consacrer plusieurs années au développement de chacune de ses œuvres. Bien qu'étant des comédies de type {{anglais|[[slapstick]]}}, ses films intègrent des éléments de [[pathos]] et sont marqués par des thèmes sociaux et politiques ainsi que par des éléments autobiographiques. L'[[Academy of Motion Picture Arts and Sciences]] lui remet en [[1972 au cinéma|1972]] un [[Oscars d'honneur|Oscar d'honneur]] pour sa contribution inestimable à l'industrie cinématographique, et plusieurs de ses longs métrages sont aujourd'hui considérés comme faisant partie des plus grands films de l’histoire du cinéma.


== Biographie ==
== Biographie ==
=== Jeunesse (1889-1913) ===
=== Jeunesse (1889-1913) ===
==== Enfance ====
==== Enfance ====
{{article connexe|Famille Chaplin}}
[[Fichier:Hannah Chaplin.jpg|thumb|left|upright|[[Hannah Chaplin]] vers 1885]]
[[Fichier:Chaplin at Hanwell.jpg|vignette|gauche|upright|alt=Photo en noir et blanc de plusieurs enfants en uniformes regardant l'objectif.|Charlie Chaplin à {{unité|7|ans}} au foyer pour enfants [[pauvreté|pauvres]] (troisième rangée, au centre).]]
Charles Spencer Chaplin<ref>{{Lien web|langue=en|titre=Charlie Chaplin {{!}} Biography, Movies, & Facts|url=https://www.britannica.com/biography/Charlie-Chaplin|site=Encyclopedia Britannica|consulté le=2019-03-18}}</ref><sup>,</sup> <ref>{{Lien web|langue=en|titre=TSPDT - Charles Chaplin|url=http://www.theyshootpictures.com////chaplincharles.htm|site=TSPDT|consulté le=2019-03-18}}</ref> est né le 16 avril 1889 ; il était le deuxième enfant d'[[Hannah Chaplin]] née Hill (1865-1928) et de [[Charles Chaplin Sr.]] (1863-1901). Son acte de naissance n'a pas été retrouvé dans les registres de l'état civil, mais Chaplin considérait qu'il était né dans une maison d'East Street dans le quartier de [[Walworth (Londres)|Walworth]] du [[South London|sud de Londres]]{{sfn|Robinson|1986|p=10}}{{,}}{{#tag:ref|Une enquête de 1952 du [[Security Service|MI5]] ne parvint pas à trouver un quelconque document sur la naissance de Chaplin<ref>{{lien web |langue=anglais|url=https://www.telegraph.co.uk/news/uknews/defence/9086510/MI5-files-Was-Chaplin-really-a-Frenchman-and-called-Thornstein.html |titre=MI5 files: Was Chaplin really a Frenchman and called Thornstein? |jour=17 |mois=février |année=2012 |périodique=[[The Daily Telegraph]] |consulté le=11 avril 2012}}</ref>. Son biographe David Robinson indique qu'il n'est pas étonnant que ses parents n'aient pas fait officialiser sa naissance : {{citation|Il était facile, en particulier pour les artistes de music-hall constamment en déplacement d'une ville à l'autre, de reporter cela à plus tard et de finir d'oublier ces formalités, à une époque où les pénalités n'étaient ni strictes ni appliquées efficacement{{sfn|Robinson|1986|p=10}}}}. En 2011, une lettre de 1970 adressée à Chaplin fut redécouverte ; elle avançait qu'il était né dans une famille [[Roms|gitane]] à [[Smethwick]] dans le [[Staffordshire]] et le fils de Chaplin, [[Michael Chaplin|Michael]], a suggéré que l'information était suffisamment importante pour que son père conserve la missive<ref>{{lien web|langue=anglais|url=https://www.expressandstar.com/news/2011/02/18/charlie-chaplin-was-born-into-midland-gipsy-family/ |titre=Charlie Chaplin was 'born into a Midland gipsy family' |jour=18 |mois=février |année=2011 |périodique=Express and Star |consulté le=17 février 2012}}</ref>. Concernant sa date de naissance, Chaplin estimait qu'il était né le 16 avril mais une annonce dans l'édition du 11 mai 1889 du journal ''The Magnet'' indique le 15{{sfn|Robinson|1986|p=xxiv}}.|group="n"}}. Ses parents s'étaient mariés quatre ans plus tôt, après que Charles Sr. eut [[Reconnaissance (droit de la famille)|reconnu]] [[Sydney Chaplin (1885-1965)|Sydney John]], un fils issu d'une précédente relation d'Hannah avec un homme inconnu{{sfn|Robinson|1986|p=3-4, 19}}. Au moment de sa naissance, les parents de Chaplin étaient tous deux des artistes de [[music-hall]]. Sa mère, fille d'un cordonnier{{sfn|Robinson|1986|p=3}}, menait une carrière sans grand succès sous le [[nom de scène]] de Lily Harley{{sfn|Robinson|1986|p=5-7}}, tandis que son père, fils d'un boucher{{sfn|Weissman|2009|p=10}}, était un chanteur populaire{{sfn|Robinson|1986|p=9-10, 12}}. Ils se séparèrent vers 1891{{sfn|Robinson|1986|p=13}} et l'année suivante, Hannah donna naissance à son troisième fils, [[Wheeler Dryden]], issu d'une relation avec le chanteur de music-hall Leo Dryden ; l'enfant fut emmené par son père à l'âge de six mois et resta éloigné de Chaplin pendant trente ans{{sfn|Robinson|1986|p=15}}.
Charles Spencer Chaplin<ref>{{Lien web|langue=en|titre=Charlie Chaplin {{!}} Biography, Movies, & Facts|url=https://www.britannica.com/biography/Charlie-Chaplin|site=Encyclopedia Britannica|consulté le=2019-03-18}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=en|titre=TSPDT - Charles Chaplin|url=http://www.theyshootpictures.com////chaplincharles.htm|site=TSPDT|consulté le=2019-03-18}}.</ref> naît le {{Date de naissance-|16|4|1889}} ; il est le deuxième enfant d'[[Hannah Chaplin]] née Hill (1865-1928) et de [[Charles Chaplin, Sr.]] (1863-1901). Selon [[David Robinson (écrivain)|David Robinson]], le biographe officiel de Charlie Chaplin, sa branche paternelle serait d'origine [[huguenot]]e : {{Citation|La famille Chaplin a vécu pendant des générations dans le [[Suffolk]]. Le nom suggère qu'ils descendaient des huguenots, qui s'étaient installés en grand nombre en East Anglia depuis la fin du {{s-|XVII}}<ref>{{Ouvrage |langue=en |auteur1=David Robinson |titre=Chaplin |sous-titre=His Life and Art |lieu=London |éditeur=Penguin |année=2014 |pages totales=928 |isbn=9780141979182 |oclc=1004978418 |bnf=FRBNF37757382 |présentation en ligne=https://books.google.fr/books?id=ovzYAgAAQBAJ&pg=PP26&dq=%22The+Chaplin+family+lived+for+generations+in+Suffolk%22&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwiJnqOZ_MDuAhWk2eAKHRxhAzwQ6AEwAHoECAEQAg#v=onepage&q=%22The%20Chaplin%20family%20lived%20for%20generations%20in%20Suffolk%22&f=false |consulté le=29 janvier 2021 |passage=406 }}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Tout savoir sur le nom CHAPLIN |sous-titre=Les CHAPLIN, naissances en France |url=https://www.filae.com/nom-de-famille/Chaplin.html |site=filae.com |consulté le=30 mars 2023}}.</ref>.}} Son [[acte de naissance]] n'a pas été retrouvé dans les registres de l'[[état civil]], mais Chaplin considérait qu'il était né dans une maison d'East Street dans le quartier de [[Walworth (Londres)|Walworth]], dans le [[South London|sud de Londres]]{{sfn|Robinson|1986|p=10}}{{,}}{{#tag:ref|Une enquête de {{date-|1952}} du [[Security Service|MI5]] ne parvient pas à trouver un quelconque document sur la naissance de Chaplin<ref>{{lien web|langue=en|url=https://www.telegraph.co.uk/news/uknews/defence/9086510/MI5-files-Was-Chaplin-really-a-Frenchman-and-called-Thornstein.html |titre=MI5 files: Was Chaplin really a Frenchman and called Thornstein? |jour=17 |mois=février |année=2012 |périodique=[[The Daily Telegraph]] |consulté le=11 avril 2012}}.</ref>. Son biographe David Robinson indique qu'il n'est pas étonnant que ses parents n'aient pas fait officialiser sa naissance : {{citation|Il était facile, en particulier pour les artistes de music-hall constamment en déplacement d'une ville à l'autre, de reporter cela à plus tard et de finir d'oublier ces formalités, à une époque où les pénalités n'étaient ni strictes ni appliquées efficacement{{sfn|Robinson|1986|p=10}}.}}}}. En 2011, une lettre de 1970 adressée à Chaplin est redécouverte ; elle avance qu'il est né dans une famille [[Roms|gitane]] à [[Smethwick]] dans le [[Staffordshire]] et le fils de Chaplin, [[Michael Chaplin|Michael]], a suggéré que l'information est suffisamment importante pour que son père conserve la missive<ref>{{lien web|langue=en|url=https://www.expressandstar.com/news/2011/02/18/charlie-chaplin-was-born-into-midland-gipsy-family/ |titre=Charlie Chaplin was 'born into a Midland gipsy family' |jour=18 |mois=février |année=2011 |périodique=Express and Star |consulté le=17 février 2012}}.</ref>. Concernant sa date de naissance, Chaplin estimait qu'il était né le {{date-|16|04|}}, mais une annonce dans l'édition du {{date-|11|04|1889}} du journal ''The Magnet'' indique le 15{{sfn|Robinson|1986|p=xxiv}}. Quatre ans plus tôt, ses parents se marient et Charles Sr. [[Reconnaissance (droit de la famille)|reconnaît]] [[Sydney Chaplin (1885-1965)|Sydney John]], un fils issu d'une précédente relation d'Hannah avec un homme inconnu{{sfn|Robinson|1986|p=3-4, 19}}. Au moment de sa naissance, les parents de Chaplin sont tous deux des artistes de [[music-hall]]. Sa mère, fille d'un cordonnier{{sfn|Robinson|1986|p=3}}, mène une carrière sans grand succès sous le [[nom de scène]] de Lily Harley{{sfn|Robinson|1986|p=5-7}}, tandis que son père, fils d'un boucher{{sfn|Weissman|2009|p=10}}, est un chanteur populaire{{sfn|Robinson|1986|p=9-10, 12}}. Ils se séparent vers 1891{{sfn|Robinson|1986|p=13}} et, l'année suivante, Hannah donne naissance à son troisième fils, [[Wheeler Dryden]], issu d'une relation avec le chanteur de music-hall Leo Dryden ; l'enfant est emmené par son père à l'âge de six mois et reste éloigné de Chaplin pendant trente ans{{sfn|Robinson|1986|p=15}}.


L'enfance de Chaplin fut marquée par la misère et les privations, ce qui poussa son biographe officiel [[David Robinson (écrivain)|David Robinson]] à écrire que son parcours ultérieur fut {{citation|le plus spectaculaire de tous les récits jamais racontés sur l'ascension des haillons aux richesses}}{{sfn|Robinson|1986|p=xv}}. Il passa ses premières années avec sa mère et son frère Sydney dans le borough londonien de [[Kennington]] ; hormis quelques travaux de couture ou de nourrice, Hannah n'avait aucun revenu et Charles Sr. n'apporta aucun soutien à ses enfants{{sfn|Robinson|1986|p=16}}. Alors que la situation financière du foyer se détériorait, Chaplin fut envoyé dans une ''{{lang|en|[[workhouse]]}}'' à l'âge de sept ans{{#tag:ref|Hannah tomba malade en mai 1896 et fut admise à l'hôpital. Le comité de [[Borough londonien de Southwark|Southwark]] estima qu'il était nécessaire d'envoyer les enfants dans une ''{{lang|en|workhouse}}'' {{citation|du fait de l'absence de leur père et de l'indigence et de la maladie de leur mère{{sfn|Robinson|1986|p=19}}}}.|group="n"}}. Il indiqua par la suite qu'il y connut une {{citation|triste existence}}{{sfn|Chaplin|2003|p=29}} et fut brièvement rendu à sa mère 18 mois plus tard ; Hannah fut rapidement contrainte de se séparer à nouveau de ses enfants, qui furent envoyés dans une autre institution pour enfants indigents{{sfn|Robinson|1986|p=24-26}}.
L'enfance de Chaplin est marquée par la misère et les privations, ce qui conduit son biographe officiel David Robinson à décrire son parcours comme {{citation|le plus spectaculaire de tous les récits jamais racontés sur l'ascension des haillons aux richesses}}{{sfn|Robinson|1986|p=xv}}. Il passe ses premières années avec sa mère et son frère Sydney dans le [[Borough de Londres|borough londonien]] de [[Kennington]] ; hormis quelques travaux de couture ou de nourrice, Hannah n'a aucun revenu et Charles Sr. n'apporte aucun soutien à ses enfants{{sfn|Robinson|1986|p=16}}. Alors que la situation financière du foyer se détériore, Chaplin est envoyé dans une ''{{langue|en|[[workhouse]]}}'' à l'âge de sept ans{{#tag:ref|Hannah tombe malade en {{date-||05|1896}} et est admise à l'hôpital. Le comité de [[Borough londonien de Southwark|Southwark]] estime qu'il est nécessaire d'envoyer les enfants dans une ''{{langue|en|workhouse}}'' {{citation|du fait de l'absence de leur père et de l'indigence et de la maladie de leur mère}}{{sfn|Robinson|1986|p=19}}.|group="n"}}. Il indique par la suite qu'il y connaît une {{citation|triste existence}}{{sfn|Chaplin|2003|p=29}} et est brièvement rendu à sa mère {{nobr|18 mois}} plus tard ; Hannah est rapidement contrainte de se séparer à nouveau de ses enfants, qui sont envoyés dans une autre institution pour enfants indigents{{sfn|Robinson|1986|p=24-26}}.


En {{date-||09|1898}}, la mère de Chaplin est admise à l'[[Hôpital psychiatrique|asile psychiatrique]] de Cane Hill après avoir développé une [[psychose]] apparemment provoquée par la [[malnutrition]] et la [[syphilis]]{{sfn|Weissman|2009|p=49-50}}. Durant les deux mois de son hospitalisation, Chaplin et son frère sont envoyés vivre avec leur père qu'ils connaissent à peine{{sfn|Chaplin|2003|p=15, 33}}. Charles Sr. sombre alors dans l'[[alcoolisme]] et sa conduite entraîne la visite d'une organisation de [[protection de l'enfance]]{{sfn|Robinson|1986|p=27}}. Il meurt d'une [[cirrhose]] deux ans plus tard, à l'âge de {{nobr|38 ans}}{{sfn|Robinson|1986|p=36}}.
[[Fichier:Charles Chaplin Sr.jpg|thumb|upright|Charles Chaplin Sr. vers 1885]]
En septembre 1898, la mère de Chaplin fut admise à l'[[Hôpital psychiatrique|asile psychiatrique]] de Cane Hill après avoir développé une [[psychose]] apparemment provoquée par la [[malnutrition]] et la [[syphilis]]{{sfn|Weissman|2009|p=49-50}}. Durant les deux mois de son hospitalisation, Chaplin et son frère furent envoyés vivre avec leur père qu'ils connaissaient à peine{{sfn|Chaplin|2003|p=15, 33}}. Charles Sr. avait alors sombré dans l'[[alcoolodépendance|alcoolisme]] et sa conduite entraîna la visite d'une organisation de [[protection de l'enfance]]{{sfn|Robinson|1986|p=27}}. Il mourut deux ans plus tard, à l'âge de 38 ans, d'une [[cirrhose]]{{sfn|Robinson|1986|p=36}}.


L'état de santé d'Hannah s'améliora{{sfn|Robinson|1986|p=27}}, mais elle fit une rechute en mai 1903. Chaplin, alors âgé de 14 ans, l'emmena au dispensaire, d'où elle fut renvoyée à Cane Hill{{sfn|Robinson|1986|p=40}}. Il vécut seul pendant plusieurs jours et dormit dans la rue en attendant le retour de son frère qui s'était engagé dans la [[Royal Navy|Marine]] deux ans plus tôt{{sfn|Weissman|2009|p=6}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=71-74}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=35}}. Hannah quitta l'asile au bout de huit mois{{sfn|Robinson|1986|p=41}}, mais elle rechuta de manière permanente en mars 1905. Chaplin écrivit plus tard que {{citation|nous ne pouvions rien faire d'autre qu'accepter le triste destin de notre mère}}. En 1921, Charlie et son frère Sydney obtiennent qu'elle vienne les rejoindre à Hollywood. Charlie lui a acheté une maison en bord de mer, et Hannah y vivra ses sept dernières années, soignée à domicile. C'est là qu'elle pourra revoir son troisième fils, Wheeler Dryden, dont elle avait été séparée depuis trente ans, peu après sa naissance. Elle meurt le 28 août 1928<ref>{{lien web|url=http://charliechaplin.com/en/biography/articles/216-Charlie-s-Mother-Hannah-Chaplin|langue=anglais|titre=Charlie’s mother, Hannah Chaplin|éditeur=charliechaplin.com|consulté le=13 mai 2014}}</ref>.
L'état de santé d'Hannah s'améliore{{sfn|Robinson|1986|p=27}}, mais elle fait une rechute en {{date-||05|1903}}. Chaplin, alors âgé de {{nobr|14 ans}}, l’emmène au dispensaire, d'où elle est renvoyée à Cane Hill{{sfn|Robinson|1986|p=40}}. Il vit seul pendant plusieurs jours et dort dans la rue en attendant le retour de son frère qui s'est engagé dans la [[Royal Navy|Marine]] deux ans plus tôt{{sfn|Weissman|2009|p=6}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=71-74}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=35}}. Hannah quitte l'asile au bout de huit mois{{sfn|Robinson|1986|p=41}}, mais elle rechute de manière permanente en {{date-||03|1905}}. Chaplin écrit plus tard : {{citation|Nous ne pouvions rien faire d'autre que d'accepter le sort de notre pauvre mère.}} En {{date-|1921}}, Charlie et son frère Sydney obtiennent la permission de la prendre avec eux à Hollywood. Charlie lui achète une maison en bord de mer, et Hannah y vit ses sept dernières années, soignée à domicile. C'est là qu'elle peut revoir son troisième fils, Wheeler Dryden, dont elle est séparée depuis trente ans. Elle meurt le {{date-|28|08|1928}}<ref>{{lien web|langue=en|url=http://charliechaplin.com/en/biography/articles/216-Charlie-s-Mother-Hannah-Chaplin|titre=Charlie’s mother, Hannah Chaplin|site=charliechaplin.com|consulté le=13 mai 2014}}.</ref>.


==== Premières prestations ====
==== Premières prestations ====
[[Fichier:Chaplin in Sherlock Holmes.jpg|vignette|redresse|alt=Photo noire et blanc d'un enfant en costume devant une grande fenêtre.|Chaplin adolescent lors d'une représentation de ''[[Sherlock Holmes]]''.]]
[[Fichier:Charlie Chaplin circa 1916.jpg|vignette|Charlie Chaplin en 1916]]
Chaplin commença très tôt à se produire sur scène. Il réalisa sa première apparition à cinq ans en remplaçant Hannah lors d'un spectacle à [[Aldershot]]{{#tag:ref|Selon Chaplin, Hannah avait été huée et le responsable l'envoya sur scène pour la remplacer après qu'il l'eût vu dans les coulisses. Il se souvint que sa prestation avait été appréciée et accueillie par des applaudissements et des rires{{sfn|Robinson|1986|p=17}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=18}}.|group="n"}}. Cela fut une exception, mais sa mère l'encouragea dans cette voie, et il rapporta par la suite qu'{{citation|elle [l]'imprégna du sentiment [qu'il] avait une sorte de talent}}{{sfn|Chaplin|2003|p=41}}. Grâce aux relations de son père{{sfn|Marriot|2005|p=4}}, il devint membre de la troupe de danseurs Eight Lancashire Lads et se produisit dans les music-halls britanniques en 1899 et 1900{{#tag:ref|La troupe continua à se produire jusqu'en 1908 mais la date exacte du départ de Chaplin est inconnue ; l'historien A. J. Marriot estime que cela eut lieu en décembre 1900{{sfn|Marriot|2005|p=213}}.|group="n"}}. Chaplin travaillait dur et la troupe était populaire, mais il ne se satisfaisait pas de la danse et voulait se tourner vers la comédie{{sfn|Chaplin|2003|p=44}}.
Chaplin commence très tôt à se produire sur scène. Il y fait sa première apparition à cinq ans en remplaçant Hannah lors d'un spectacle à [[Aldershot]]{{#tag:ref|Selon Chaplin, Hannah est huée et le responsable l'a envoyé sur scène pour la remplacer après qu'il le voit dans les coulisses. Il se souvient que sa prestation avait été appréciée et accueillie par des applaudissements et des rires{{sfn|Robinson|1986|p=17}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=18}}.|group="n"}}. C'est une exception, mais sa mère l'encourage dans cette voie, et {{citation|elle [l]'imprègne du sentiment [qu'il] a une sorte de talent}}{{sfn|Chaplin|2003|p=41}}. Grâce aux relations de son père{{sfn|Marriot|2005|p=4}}, il devient membre de la troupe de danseurs Eight Lancashire Lads et se produit dans des music-halls britanniques en {{date-|1899}} et {{date-|1900}}{{#tag:ref|La troupe continue à se produire jusqu'en {{date-|1908}} mais la date exacte du départ de Chaplin est inconnue ; l'historien A. J. Marriot estime que cela s'est passé en {{date-||12|1900}}{{sfn|Marriot|2005|p=213}}.|group="n"}}. Chaplin travaille dur et la troupe est populaire, mais il ne se satisfait pas de la danse et veut se tourner vers la comédie{{sfn|Chaplin|2003|p=44}}.


Alors que Chaplin était en tournée avec les Eight Lancashire Lads, sa mère s'assura qu'il continuait à aller à l'école{{sfn|Louvish|2010|p=19}}, mais il abandonna vers treize ans{{sfn|Robinson|1986|p=39}}. Après une période de petits boulots{{sfn|Chaplin|2003|p=76}}, il s'inscrivit dans une agence artistique du [[West End]] de Londres à quatorze ans peu après la rechute de sa mère. Le responsable de l'agence discerna un potentiel chez Chaplin et lui offrit rapidement son premier rôle en tant que vendeur de journaux dans la [[Pièce de théâtre|pièce]] ''Jim, a Romance of Cockayne'' de [[Harry Arthur Saintsbury|Harry A. Saintsbury]]{{sfn|Robinson|1986|p=44-46}}. La première eut lieu en juillet 1903, mais le spectacle ne rencontra pas le succès et les représentations s'arrêtèrent au bout de deux semaines ; la performance comique de Chaplin fut néanmoins remarquée par les critiques{{sfn|Marriot|2005|p=42-44}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=46-47}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=26}}. Saintsbury lui obtint ensuite le rôle du groom Billy dans la pièce ''[[Sherlock Holmes (pièce de théâtre)|Sherlock Holmes]]'' de [[Charles Frohman]]{{sfn|Robinson|1986|p=45, 49-51, 53, 58}}. Son jeu fut si bien reçu qu'il fut appelé à Londres pour se produire aux côtés de [[William Gillette]], qui avait coécrit la pièce avec [[Arthur Conan Doyle]]{{sfn|Robinson|1986|p=59-60}}. Il fit sa dernière tournée de ''Sherlock Holmes'' au début de l'année 1906 après y avoir joué pendant plus de deux ans et demi{{sfn|Robinson|1986|p=63}}.
Lorsque Chaplin est en tournée avec les Eight Lancashire Lads, sa mère s'assure qu'il continue à aller à l'école{{sfn|Louvish|2010|p=19}}, mais il abandonne vers treize ans{{sfn|Robinson|1986|p=39}}. Passé une période de petits boulots{{sfn|Chaplin|2003|p=76}}, à quatorze ans et peu après la rechute de sa mère, il s'inscrit dans une agence artistique du [[West End]] de Londres. Le responsable de cette agence discerne un potentiel chez Chaplin et lui offre rapidement son premier rôle en tant que vendeur de journaux dans la [[Pièce de théâtre|pièce]] ''Jim, a Romance of Cockayne'' de [[Harry Arthur Saintsbury|Harry A. Saintsbury]]{{sfn|Robinson|1986|p=44-46}}. La première a lieu en {{date-||07|1903}}, mais le spectacle ne rencontre pas de succès et les représentations s'arrêtent au bout de deux semaines ; la performance comique de Chaplin est néanmoins remarquée par les critiques{{sfn|Marriot|2005|p=42-44}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=46-47}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=26}}. Saintsbury lui obtient ensuite le rôle du groom Billy dans la pièce ''[[Sherlock Holmes (pièce de théâtre)|Sherlock Holmes]]'' de [[Charles Frohman]]{{sfn|Robinson|1986|p=45, 49-51, 53, 58}}. Son jeu est si bien reçu qu'il est appelé à Londres pour se produire aux côtés de [[William Gillette]], qui a coécrit la pièce avec [[Arthur Conan Doyle]]{{sfn|Robinson|1986|p=59-60}}. Il fait sa dernière tournée de ''Sherlock Holmes'' au début de l'année {{date-|1906}} après y avoir joué pendant plus de deux ans et demi{{sfn|Robinson|1986|p=63}}.


==== Acteur comique ====
==== Acteur comique ====
[[Fichier:Chaplin Karno advert.jpg|thumb|alt=Page de journal avec deux photographies de Chaplin, l'une naturelle avec les cheveux lissés et l'autre dans son rôle avec une moustache et les cheveux en bataille.|Publicité pour la tournée américaine de la troupe de [[Fred Karno]] avec Chaplin en 1913]]
[[Fichier:Chaplin Karno advert.jpg|gauche|vignette|alt=Page de journal avec deux photographies de Chaplin, l'une naturelle avec les cheveux lissés et l'autre dans son rôle avec une moustache et les cheveux en bataille.|Publicité pour la tournée américaine de la troupe de [[Fred Karno]] avec Chaplin en {{date-|1913}}.]]
Chaplin rejoignit rapidement une autre compagnie et joua dans une comédie à [[sketch]]s, ''Repairs'', avec son frère Sydney qui s'était également lancé dans une carrière artistique{{sfn|Robinson|1986|p=63-64}}. En mai 1906, il participa au spectacle pour enfants ''Casey's Circus''{{sfn|Marriot|2005|p=71}} et développa son jeu [[burlesque]] qui lui permit de devenir rapidement la star de la pièce. À la fin de la tournée en juillet 1907, le jeune homme de 18 ans était devenu un comédien accompli{{sfn|Robinson|1986|p=64-68}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=94}}. Il eut néanmoins des difficultés à trouver du travail et une brève incursion dans le [[stand-up]] ne rencontra pas le succès escompté{{sfn|Robinson|1986|p=68}}{{,}}{{sfn|Marriot|2005|p=81-84}}.
Chaplin rejoint rapidement une autre compagnie et joue dans une comédie à [[sketch]]s, ''Repairs'', avec son frère Sydney qui s'est également lancé dans une carrière artistique{{sfn|Robinson|1986|p=63-64}}. En {{date-||05|1906}}, il participe au spectacle pour enfants ''Casey's Circus''{{sfn|Marriot|2005|p=71}} et développe son jeu [[burlesque]] qui lui permet de devenir rapidement la star de la pièce. À la fin de la tournée en {{date-||07|1907}}, le jeune homme de {{unité|18|ans}} est devenu un comédien accompli{{sfn|Robinson|1986|p=64-68}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=94}}. Il a néanmoins des difficultés à trouver du travail et une brève incursion dans le [[stand-up]] ne rencontre pas le succès escompté{{sfn|Robinson|1986|p=68}}{{,}}{{sfn|Marriot|2005|p=81-84}}.


Dans le même temps, Sydney Chaplin avait rejoint en 1906 la prestigieuse troupe comique de [[Fred Karno]], dont il était devenu l'un des acteurs principaux en 1908{{sfn|Robinson|1986|p=71}}{{,}}{{sfn|Kamin|2011|p=12}}{{,}}{{sfn|Marriot|2005|p=85}}. En février, il parvint à obtenir une période d'essai de deux semaines pour son frère cadet. Karno ne fut initialement pas convaincu et considérait Chaplin comme un {{citation|enfant à l'air renfrogné pâle et chétif}} qui {{citation|semblait bien trop timide pour faire quoi que ce soit de bien au théâtre}}{{sfn|Robinson|1986|p=76}}. Il fut cependant impressionné par sa première prestation au [[Coliseum Theatre|London Theatre]] et l'engagea immédiatement{{sfn|Robinson|1986|p=76-77}}. Après des rôles secondaires, Chaplin accéda aux rôles principaux en 1909{{sfn|Marriot|2005<!--|p=103-->|p=109}} et il fut l'acteur principal de la nouvelle comédie ''Jimmy the Fearless'' en avril 1910. Ce fut un grand succès qui attira l'attention de la presse sur le jeune artiste{{sfn|Marriot|2005|p=126-128}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=84-85}}.
Dans le même temps, Sydney Chaplin a rejoint en {{date-|1906}} la prestigieuse troupe comique de [[Fred Karno]], dont il est devenu l'un des acteurs principaux en {{date-|1908}}{{sfn|Robinson|1986|p=71}}{{,}}{{sfn|Kamin|2011|p=12}}{{,}}{{sfn|Marriot|2005|p=85}}. En février, il parvient à obtenir une période d'essai de deux semaines pour son frère cadet. Karno n'est initialement pas convaincu et considère Chaplin comme un {{citation|enfant à l'air renfrogné pâle et chétif}} qui {{citation|semble bien trop timide pour faire quoi que ce soit de bien au théâtre}}{{sfn|Robinson|1986|p=76}}. Il est cependant impressionné par sa première prestation au [[Coliseum Theatre|London Theatre]] et l'engage immédiatement{{sfn|Robinson|1986|p=76-77}}. Après des rôles secondaires, Chaplin accède aux rôles principaux en {{date-|1909}}{{sfn|Marriot|2005<!--|p=103-->|p=109}} et il est l'acteur principal de la nouvelle comédie ''Jimmy the Fearless'' en {{date-||04|1910}}. C'est un grand succès qui attire l'attention de la presse sur le jeune artiste{{sfn|Marriot|2005|p=126-128}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=84-85}}.


Karno choisit sa nouvelle vedette pour participer avec une partie de sa troupe à une tournée en [[Amérique du Nord]]{{sfn|Robinson|1986|p=88}}. Chaplin mena les spectacles de [[Vaudeville#Vaudeville américain|music-hall]] et impressionna les critiques qui le décrivirent comme {{citation|l'un des meilleurs artistes de [[pantomime]] jamais vu}}{{sfn|Robinson|1986|p=91-92}}. La tournée dura 21 mois et la troupe retourna en [[Grande-Bretagne]] en juin 1912{{sfn|Robinson|1986|p=95}}. Chaplin se souvint qu'il {{citation|eut le sentiment troublant de revenir aux platitudes déprimantes}} et fut ravi quand une nouvelle tournée commença en octobre{{sfn|Chaplin|2003|p=133-134}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=96}}.
Karno le choisit pour participer avec une partie de sa troupe à une tournée en [[Amérique du Nord]]{{sfn|Robinson|1986|p=88}}. Chaplin mène les spectacles de [[Vaudeville#Vaudeville américain|music-hall]] et impressionne les critiques qui le décrivent comme {{citation|l'un des meilleurs artistes de [[Mime#Pantomime|pantomime]] jamais vu}}{{sfn|Robinson|1986|p=91-92}}. La tournée dure {{unité|21|mois}} et la troupe retourne en [[Grande-Bretagne]] en {{date-||06|1912}}{{sfn|Robinson|1986|p=95}}. Chaplin a alors le sentiment troublant de {{citation|revenir aux platitudes déprimantes}}, et il est ravi quand une nouvelle tournée commence en octobre{{sfn|Chaplin|2003|p=133-134}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=96}}.


=== Débuts dans le cinéma (1914-1917) ===
=== Débuts dans le cinéma (1914-1917) ===
==== Keystone ====
==== Keystone ====
[[Fichier:Chaplin Making a Living 2.jpg|thumb|alt=Capture d'écran montrant deux hommes en costume dans une rue. Chaplin porte un haut-de-forme, une redingote et la moustache tombante.|Chaplin (à gauche) dans son premier rôle cinématographique, ''[[Pour gagner sa vie]]'' (1914)]]
[[Fichier:Chaplin Making a Living 2.jpg|vignette|alt=Capture d'écran montrant deux hommes en costume dans une rue. Chaplin porte un haut-de-forme, une redingote et la moustache tombante.|''[[Pour gagner sa vie]]'' ({{date-|1914}}) : premier rôle de Chaplin (à gauche) au cinéma.]]
Alors qu'il en est au sixième mois de sa tournée américaine, Chaplin est invité à rejoindre la New York Motion Picture Company ; un des responsables de la société a assisté à l'un de ses spectacles et pense qu'il peut remplacer [[Fred Mace]], la star du studio [[Keystone]], qui veut prendre sa retraite{{sfn|Robinson|1986|p=102}}. Chaplin considère les comédies de Keystone comme un {{citation|mélange grossier}}, mais apprécie la perspective d'une nouvelle carrière{{sfn|Chaplin|2003|p=138-139}} ; il signe en {{date-||09|1913}} un contrat d'un an avec un salaire hebdomadaire de {{unité|150|[[Dollar américain|dollars]]}} (environ {{unité|{{Inflation|US|150|1913|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}){{sfn|Robinson|1986|p=103}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=139}}.
[[Fichier:Chaplin Kid Auto Races.jpg|thumb|alt=Capture d'écran montrant Charlot devant une foule d'enfants.|Les débuts de [[Charlot]] dans ''[[Charlot est content de lui]]'' (1914)]]
Alors qu'il en était au sixième mois de sa tournée américaine, Chaplin fut invité à rejoindre la New York Motion Picture Company ; un des responsables de la société avait assisté à un de ses spectacles et pensait qu'il pourrait remplacer [[Fred Mace]], la star du studio [[Keystone]], qui voulait prendre sa retraite{{sfn|Robinson|1986|p=102}}. Chaplin considérait les comédies de Keystone comme un {{citation|mélange grossier}} mais appréciait la perspective d'une nouvelle carrière{{sfn|Chaplin|2003|p=138-139}} ; il signa en septembre 1913 un contrat d'un an avec un salaire hebdomadaire de {{unité|150|[[Dollar américain|$]]}} (environ {{unité|6810|$}} de 2012{{#tag:ref|Valeur calculée en [[parité de pouvoir d'achat]] (''value of consumer bundle'') en utilisant le site [http://www.measuringworth.com/index.php Measuring Worth].|group="n"|name="measuringworth"}}){{sfn|Robinson|1986|p=103}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=139}}.


Chaplin arriva dans les studios de [[Los Angeles]] au début du mois de décembre 1913{{sfn|Robinson|1986|p=107}} et rencontra son responsable [[Mack Sennett]], qui pensait que le jeune homme de 24 ans paraissait trop jeune{{sfn|Chaplin|2003|p=141}}. Il ne joua pas avant la fin du mois de février 1914 et profita de cette période pour se familiariser avec la réalisation cinématographique{{sfn|Robinson|1986|p=108}}. Il fit ses débuts dans le court-métrage ''[[Pour gagner sa vie]]'', sorti le 2 février 1914, mais détesta le film{{sfn|Robinson|1986|p=110}}. Dans ce premier film, il se présentait comme une sorte de dandy en redingote étriquée, chapeau haut-de-forme et grandes moustaches tombantes<ref>{{ouvrage|auteur=Francis Bordat|titre=Chaplin cinéaste|éditeur=Cerf|date=1998|passage=112}}</ref>. Pour son second rôle, Chaplin choisit le costume de Charlot (en [[anglais]], ''{{lang|en|The Tramp}}'' ou [[Vagabondage|vagabond]]) avec lequel il se fit connaître ; dans son autobiographie, il décrivit le processus :
Chaplin arrive dans les studios de [[Los Angeles]] au début du mois de {{date-||12|1913}}{{sfn|Robinson|1986|p=107}} et rencontre son responsable [[Mack Sennett]], qui pense que le jeune homme de {{unité|24|ans}} paraît trop jeune{{sfn|Chaplin|2003|p=141}}. Il ne joue pas avant la fin du mois de {{date-||02|1914}} et profite de cette période pour se familiariser avec la réalisation cinématographique{{sfn|Robinson|1986|p=108}}. Il fait ses débuts dans le court-métrage ''[[Pour gagner sa vie]]'', sorti le {{date-|2|2|1914}}, mais déteste le film{{sfn|Robinson|1986|p=110}}. Dans celui-ci, il se présente comme une sorte de dandy en redingote étriquée, chapeau haut-de-forme et grandes moustaches tombantes<ref>{{Ouvrage|auteur1=Francis Bordat|titre=Chaplin cinéaste|éditeur=Cerf|année=1998|passage=112|isbn=}}.</ref>. Pour son second rôle, Chaplin choisit le costume de Charlot (en [[anglais]], ''{{langue|en|The Tramp}}'' ou [[Vagabondage|vagabond]]) avec lequel il se fait connaître ; dans son autobiographie, il décrit le processus :
{{citation bloc|Je voulais que tout soit une contradiction : le pantalon ample, la veste étriquée, le chapeau étroit et les chaussures larges… J'ai ajouté une petite moustache qui, selon moi, me vieillirait sans affecter mon expression. Je n'avais aucune idée du personnage mais dès que j'étais habillé, les vêtements et le maquillage me faisaient sentir qui il était. J'ai commencé à le connaître et quand je suis entré sur le plateau, il était entièrement né{{sfn|Chaplin|2003|p=145}}{{,}}{{#tag:ref|Robinson note que {{citation|cela n'est pas parfaitement vrai : le personnage met un an ou plus pour atteindre sa pleine envergure et même après, ce qui fait sa principale force, il continue d'évoluer tout au long de sa carrière{{sfn|Robinson|1986|p=114}}}}.|group="n"}}.}}


[[Fichier:Chaplin Kid Auto Races.jpg|vignette|gauche|alt=Capture d'écran montrant Charlot devant une foule d'enfants.|Les débuts de [[Charlot]] dans ''[[Charlot est content de lui]]'' (1914).]]
{{citation bloc|Je voulais que tout soit une contradiction : le pantalon ample, la veste étriquée, le chapeau étroit et les chaussures larges… J'ai ajouté une petite moustache qui, selon moi, me vieillirait sans affecter mon expression. Je n'avais aucune idée du personnage mais dès que je fus habillé, les vêtements et le maquillage me firent sentir qui il était. J'ai commencé à le connaître et quand je suis entré sur le plateau, il était entièrement né{{sfn|Chaplin|2003|p=145}}{{,}}{{#tag:ref|Robinson note que {{citation|cela n'est pas parfaitement vrai : le personnage mit un an ou plus pour atteindre sa pleine envergure et même après, ce qui fut sa principale force, il continua d'évoluer tout au long de sa carrière{{sfn|Robinson|1986|p=114}}}}.|group="n"}}.}}


Ce film fut ''[[L'Étrange Aventure de Mabel]]'' mais le personnage de « [[Charlot]] » apparut pour la première fois dans ''[[Charlot est content de lui]]'' tourné peu après mais qui sortit deux jours plus tôt le 7 février 1914{{sfn|Robinson|1986|p=113}}. Chaplin adopta rapidement ce personnage et fit des suggestions pour les films dans lesquels il apparaissait mais elles furent rejetées par les réalisateurs{{sfn|Robinson|1986|p=120}}. Durant le tournage de son {{11e|film}}, ''[[Mabel au volant]]'', il affronta la réalisatrice [[Mabel Normand]] et l'incident faillit entraîner la résiliation de son contrat. Sennett le conserva néanmoins après avoir reçu des commandes pour de nouveaux films avec Chaplin. Il l'autorisa également à réaliser son prochain film après que Chaplin eut promis de payer {{unité|1500|$}} (environ {{unité|68000|$}} de 2012{{#tag:ref||group="n"|name="measuringworth"}}) s'il ne marchait pas{{sfn|Robinson|1986|p=121}}.
Ce film est ''[[L'Étrange Aventure de Mabel]]'', mais le personnage de « [[Charlot]] » apparaît pour la première fois dans ''[[Charlot est content de lui]]'', tourné peu après mais sorti deux jours auparavant, le 7 février 1914{{sfn|Robinson|1986|p=113}}. Chaplin adopte rapidement ce personnage et fait des suggestions pour les films dans lesquels il apparaît, suggestions qui sont rejetées par les réalisateurs{{sfn|Robinson|1986|p=120}}. Durant le tournage de son {{11e|film}}, ''[[Mabel au volant]]'', il affronte la réalisatrice [[Mabel Normand]] et l'incident entraîne presque la résiliation de son contrat. Sennett le conserve néanmoins après avoir reçu des commandes pour de nouveaux films avec Chaplin. Il l'autorise également à réaliser son prochain film après que Chaplin a promis de payer {{unité|1500|dollars}} (environ {{unité|{{Inflation|US|1500|1914|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}) s'il ne rencontre pas de succès{{sfn|Robinson|1986|p=121}}.


''[[Un béguin de Charlot]]'' sorti le 4 mai 1914 marqua les débuts de réalisateur de Chaplin et connut un grand succès{{sfn|Robinson|1986|p=123}}. Par la suite, il réalisa quasiment tous les courts-métrages de Keystone dans lesquels il joua{{sfn|Maland|1989|p=5}} ; Chaplin rapporta par la suite que cette période où il réalisait environ un film par semaine{{sfn|Kamin|2011|p=xi}} fut la plus excitante de sa carrière{{sfn|Chaplin|2003|p=153}}. Il introduisit une forme de comédie plus lente que les farces typiques de Keystone{{sfn|Robinson|1986|p=113}} et rassembla rapidement un grand nombre d'admirateurs{{sfn|Robinson|1986|p=125}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=8-9}}. En novembre 1914, il joua avec [[Marie Dressler]] dans le long-métrage ''[[Le Roman comique de Charlot et Lolotte]]'' réalisé par Sennet ; le film fut un succès et accrut sa popularité{{sfn|Robinson|1986|p=127-128}}. Lorsque le contrat de Chaplin expira à la fin de l'année, il demanda un salaire hebdomadaire de {{unité|1000|$}} (environ {{unité|45200|$}} de 2012{{#tag:ref||group="n"|name="measuringworth"}}), une somme que Sennett refusa car trop élevée{{sfn|Robinson|1986|p=131}}.
''[[Un béguin de Charlot]]'', sorti le 4 mai 1914, marque les débuts de réalisateur de Chaplin et connaît un grand succès{{sfn|Robinson|1986|p=123}}. Par la suite, il réalise quasiment tous les courts-métrages de Keystone dans lesquels il joue{{sfn|Maland|1989|p=5}} ; Chaplin rapporte par la suite que cette période, où il réalise environ un film par semaine{{sfn|Kamin|2011|p=xi}}, est la plus excitante de sa carrière{{sfn|Chaplin|2003|p=153}}. Il introduit une forme de comédie plus lente que les farces typiques de Keystone{{sfn|Robinson|1986|p=113}} et rassemble rapidement un grand nombre d'admirateurs{{sfn|Robinson|1986|p=125}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=8-9}}. En novembre 1914, il joue avec [[Marie Dressler]] dans le long-métrage ''[[Le Roman comique de Charlot et Lolotte]]'' réalisé par Sennett ; le film est un succès et accroît sa popularité{{sfn|Robinson|1986|p=127-128}}. Lorsque le contrat de Chaplin expire à la fin de l'année, il demande un salaire hebdomadaire de {{unité|1000|dollars}} (environ {{unité|{{Inflation|US|1000|1914|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}), une somme que Sennett refuse car jugée trop élevée{{sfn|Robinson|1986|p=131}}.


==== Essanay ====
==== Essanay ====
[[Fichier:Essanay Stars 1915.jpg|thumb|Les stars d'Essanay en 1915 : [[Francis X. Bushman]], Charlie Chaplin et [[Gilbert M. Anderson]], qui vient de convaincre Chaplin de le rejoindre.]]
[[Fichier:Essanay Stars 1915.jpg|vignette|alt=Photo noire et blanc de trois hommes en costumes avec des chapeaux melons.|Les stars d'Essanay en 1915 : [[Francis X. Bushman]], Charlie Chaplin et [[Gilbert M. Anderson]], qui vient de convaincre Chaplin de le rejoindre.]]
L'[[The Essanay Film Manufacturing Company|Essanay Film Manufacturing Company]] proposa à Chaplin un salaire hebdomadaire de {{unité|1250|$}} (environ {{unité|56500|$}} de 2012{{#tag:ref||group="n"|name="measuringworth"}}) avec une prime d'embauche de {{unité|10000|$}}. Il intégra le studio à la fin du mois de décembre 1914{{sfn|Robinson|1986|p=135}} et rejoignit d'autres acteurs comme [[Leo White]], [[Bud Jamison]], Paddy McGuire et Billy Armstrong. Alors qu'il était à la recherche d'un second rôle féminin pour son deuxième film, ''[[Charlot fait la noce]]'', il repéra une secrétaire appelée [[Edna Purviance]] dans un café à [[San Francisco]]. Il l'embaucha et elle tourna avec lui dans 35 films{{sfn|Robinson|1986|p=138-139}} ; ils eurent également une aventure sentimentale jusqu'en 1917{{sfn|Robinson|1986|p=141, 219}}.
L'[[The Essanay Film Manufacturing Company|Essanay Film Manufacturing Company]] propose à Chaplin un salaire hebdomadaire de {{unité|1250|dollars}} (environ {{unité|{{Inflation|US|1250|1915|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}) avec une prime d'embauche de {{unité|10000|dollars}}. Il intègre le studio à la fin du mois de {{date-||12|1914}}{{sfn|Robinson|1986|p=135}} et rejoint d'autres acteurs comme [[Leo White]], [[Bud Jamison]], Paddy McGuire et Billy Armstrong. Alors qu'il est à la recherche d'un second rôle féminin pour son deuxième film, ''[[Charlot fait la noce]]'', il repère une secrétaire appelée [[Edna Purviance]] dans un café à [[San Francisco]]. Il l'engage et elle tourne avec lui dans {{unité|35|films}}{{sfn|Robinson|1986|p=138-139}} ; ils ont également une aventure sentimentale jusqu'en {{date-|1917}}{{sfn|Robinson|1986|p=141, 219}}.


Chaplin exerçait un contrôle important sur ses films et il commença à consacrer beaucoup de temps et d'énergie dans chacune de ses réalisations{{sfn|Neibaur|2000|p=23}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=165}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=140, 143}}. Un mois sépara sa seconde production, ''Charlot fait la noce'', et sa troisième, ''[[Charlot boxeur]]''{{sfn|Robinson|1986|p=143}}, et il adopta ce rythme pour ses réalisations ultérieures avec Essenay{{sfn|Maland|1989|p=20}}. Il modifia également son personnage qui avait été critiqué par Keystone en raison de son caractère {{citation|malveillant, rustre et grossier}} pour lui donner une personnalité plus douce et romantique{{sfn|Maland|1989|p=21-24}}. Cette évolution fut illustrée par ''[[Le Vagabond (film, 1915)|Le Vagabond]]'' en avril 1915{{sfn|Robinson|1986|p=142}}{{,}}{{sfn|Neibaur|2000|p=23-24}} et ''[[Charlot garçon de banque]]'' en août qui comportaient un final plus [[Pathos|triste]]. Robinson note que cela était une innovation pour les films comiques et les critiques sérieux commencèrent à plus apprécier son travail{{sfn|Robinson|1986|p=146}}. L'historien du cinéma Simon Louvish indiqua qu'avec Essanay Chaplin {{citation|trouva les thèmes qui définirent le monde de Charlot}}{{sfn|Louvish|2010|p=87}}.
Chaplin exerce un contrôle important sur ses films et il commence à consacrer beaucoup de temps et d'énergie à chacune de ses réalisations{{sfn|Neibaur|2000|p=23}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=165}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=140, 143}}. Un mois sépare sa seconde production, ''Charlot fait la noce'', et sa troisième, ''[[Charlot boxeur]]''{{sfn|Robinson|1986|p=143}}, et il adopte ce rythme pour ses réalisations ultérieures avec Essenay{{sfn|Maland|1989|p=20}}. Il modifie également son personnage, critiqué par Keystone en raison de son caractère {{citation|malveillant, rustre et grossier}}, pour lui donner une personnalité plus douce et romantique{{sfn|Maland|1989|p=21-24}}. Cette évolution est illustrée par ''[[Le Vagabond (film, 1915)|Le Vagabond]]'' en {{date-||04|1915}}{{sfn|Robinson|1986|p=142}}{{,}}{{sfn|Neibaur|2000|p=23-24}} et ''[[Charlot garçon de banque]]'' en août, qui comportent un final plus [[Pathos|triste]]. C'est une innovation pour les films comiques et les critiques sérieux commencent à apprécier davantage son travail{{sfn|Robinson|1986|p=146}}. Avec Essanay, Chaplin trouve les thèmes qui définissent le monde de Charlot{{sfn|Louvish|2010|p=87}}.


Immédiatement après ses débuts cinématographiques, Chaplin devint un phénomène culturel. Les magasins vendaient des produits associés à son personnage de Charlot qui apparut dans des bandes dessinées et dans des chansons{{sfn|Robinson|1986|p=152-153}}{{,}}{{sfn|Kamin|2011|p=xi}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=10}}. En juillet 1915, un journaliste du magazine ''Motion Picture Magazine'' écrivit que la « chaplinite » se propageait en Amérique{{sfn|Maland|1989|p=8}}. Sa popularité s'étendit également à l'étranger et il devint la première star internationale du cinéma{{sfn|Louvish|2010|p=74}}{{,}}{{sfn|Sklar|2001|p=72}}. Alors que son contrat avec Essenay expirait en décembre 1915{{sfn|Robinson|1986|p=149}}, Chaplin, pleinement conscient de sa célébrité, demanda une prime d'embauche de {{unité|150000|$}} (environ sept millions de dollars de 2012{{#tag:ref||group="n"|name="measuringworth"}}) à son nouveau studio. Il reçut plusieurs propositions venant entre autres d'[[Universal Pictures|Universal]], de la [[20th Century Fox|Fox]] et de [[Vitagraph Company of America|Vitagraph]]{{sfn|Robinson|1986|p=156}}.
Immédiatement après ses débuts cinématographiques, Chaplin devient un phénomène culturel. Les magasins vendent des produits associés à son personnage de Charlot, qui apparaît dans des bandes dessinées et dans des chansons{{sfn|Robinson|1986|p=152-153}}{{,}}{{sfn|Kamin|2011|p=xi}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=10}}. En {{date-||07|1915}}, selon un journaliste du magazine ''Motion Picture Magazine'', la « chaplinite » se propage en Amérique{{sfn|Maland|1989|p=8}}. Sa popularité s'étend également à l'étranger et il devient la première star internationale du cinéma{{sfn|Louvish|2010|p=74}}{{,}}{{sfn|Sklar|2001|p=72}}. Alors que son contrat avec Essenay expire en {{date-||12|1915}}{{sfn|Robinson|1986|p=149}}, Chaplin, pleinement conscient de sa célébrité, demande une prime d'embauche de {{unité|150000|dollars}} (environ {{unité|{{Inflation|US|150000|1915|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}) à son nouveau studio. Il reçoit plusieurs propositions venant entre autres d'[[Universal Pictures|Universal]], [[20th Century Studios|Fox]] et [[Vitagraph Company of America|Vitagraph]]{{sfn|Robinson|1986|p=156}}.


==== Mutual (1916-1917) ====
==== Mutual ====
[[Fichier:Charlie Chaplin with doll.jpg|thumb|left|alt=Photographie de Charlie Chaplin debout et en costume tenant une poupée représentant Charlot|Chaplin devint rapidement un phénomène culturel avec des produits sur son personnage de Charlot, 1918.]]
[[Fichier:Charlie Chaplin with doll.jpg|vignette|gauche|alt=Photographie de Charlie Chaplin debout et en costume tenant une poupée représentant Charlot|Chaplin, en {{date-|1918}}, tenant une figurine à l'effigie de [[Charlot]].]]
Il fut finalement embauché par le studio [[Mutual Film|Mutual]], qui lui accorda un salaire annuel de {{unité|670000|$}}, faisant de Chaplin, alors âgé de 26 ans, l'une des personnes les mieux payées au monde{{sfn|Robinson|1986|p=160}}. Cette somme élevée choqua le public et fut largement reprise dans la presse{{sfn|Larcher|2011|p=29}}. Le président du studio, John R. Freuler, expliqua que : {{citation|Nous pouvons nous permettre de payer ce gros salaire annuel à {{M.}} Chaplin car le public veut Chaplin et paiera pour le voir}}{{sfn|Robinson|1986|p=159}}.
Il est finalement engagé par le studio [[Mutual Film|Mutual]], qui lui accorde un salaire annuel de {{unité|670000|dollars}} (environ {{unité|{{Inflation|US|670000|1915|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}), faisant de Chaplin, alors âgé de {{unité|26|ans}}, l'une des personnes les mieux payées au monde{{sfn|Robinson|1986|p=160}}. Cette somme élevée choque le public et est largement reprise dans la presse{{sfn|Larcher|2011|p=29}}. Le président du studio, John R. Freuler, explique qu'ils peuvent se permettre de payer ce salaire à Chaplin, car {{citation|le public veut Chaplin et paiera pour le voir}}{{sfn|Robinson|1986|p=159}}.


Mutual accorda à Chaplin son propre studio à Los Angeles, qui fut inauguré en mars 1916{{sfn|Robinson|1986|p=164}}. Il recruta deux nouveaux acteurs pour l'accompagner, [[Albert Austin]] et [[Eric Campbell (acteur)|Eric Campbell]]{{sfn|Robinson|1986|p=165-166}}, et réalisa une série de films plus élaborés et [[Mélodrame (cinéma)|mélodramatiques]] : ''[[Charlot chef de rayon]]'', ''[[Charlot pompier]]'', ''[[Charlot musicien]]'', ''[[Charlot rentre tard]]'', ''[[Charlot et le Comte]]''{{sfn|Robinson|1986|p=169-173}}. Pour ''[[Charlot usurier]]'', il embaucha l'acteur [[Henry Bergman]], qui travailla avec lui pendant 30 ans{{sfn|Robinson|1986|p=175}}. ''[[Charlot fait du ciné]]'' et ''[[Charlot patine]]'' furent ses dernières réalisations pour l'année 1916. Le contrat avec Mutual stipulait qu'il devait réaliser un court-métrage toutes les quatre semaines, ce qu'il avait fait{{sfn|Robinson|1986|p=179-180}}. Il commença néanmoins à demander plus de temps pour créer ses films et il n'en réalisa que quatre autres pour Mutual dans les dix premiers mois de l'année 1917 : ''[[Charlot policeman]]'', ''[[Charlot fait une cure]]'', ''[[L'Émigrant]]'' et ''[[Charlot s'évade]]''{{sfn|Robinson|1986|p=191}}. Du fait de leur réalisation méticuleuse et de leur construction soignée, ces films sont considérés comme parmi les meilleures œuvres de Chaplin par les spécialistes du cinéaste<ref>{{lien web |url=http://chaplin.bfi.org.uk/resources/bfi/biog/biog.php?fid=biog6 |titre="The Happiest Days of My Life": Mutual |éditeur=British Film Institute |consulté le=28 avril 2012}}</ref>{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=45}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=191}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=104}}. Plus tard, Chaplin indiqua que ses années à Mutual furent les plus heureuses de sa carrière{{sfn|Chaplin|2003|p=188}}.
Mutual accorde à Chaplin son propre studio à [[Los Angeles]], qui est inauguré en {{date-||03|1916}}{{sfn|Robinson|1986|p=164}}. Il recrute deux nouveaux acteurs pour l'accompagner, [[Albert Austin]] et [[Eric Campbell (acteur)|Eric Campbell]]{{sfn|Robinson|1986|p=165-166}}, et réalise une série de films plus élaborés et [[Mélodrame (cinéma)|mélodramatiques]] : ''[[Charlot chef de rayon]]'', ''[[Charlot pompier]]'', ''[[Charlot musicien]]'', ''[[Charlot rentre tard]]'', ''[[Charlot et le Comte]]''{{sfn|Robinson|1986|p=169-173}}. Pour ''[[Charlot usurier]]'', il embauche l'acteur [[Henry Bergman]], qui travaille avec lui pendant {{unité|30|ans}}{{sfn|Robinson|1986|p=175}}. ''[[Charlot fait du ciné]]'' et ''[[Charlot patine]]'' sont ses dernières réalisations pour l'année {{date-|1916}}. Le contrat avec Mutual stipule qu'il doit réaliser un court-métrage toutes les quatre semaines, engagement qu'il tient{{sfn|Robinson|1986|p=179-180}}. Il commence néanmoins à demander plus de temps pour créer ses films et il n'en réalise que quatre autres pour Mutual dans les dix premiers mois de l'année {{date-|1917}} : ''[[Charlot policeman]]'', ''[[Charlot fait une cure]]'', ''[[L'Émigrant]]'' et ''[[Charlot s'évade]]''{{sfn|Robinson|1986|p=191}}. Du fait de leur réalisation méticuleuse et de leur construction soignée, ces films sont considérés comme parmi les meilleures œuvres de Chaplin par les spécialistes du cinéaste<ref>{{lien web |langue=en |url=http://chaplin.bfi.org.uk/resources/bfi/biog/biog.php?fid=biog6 |titre="The Happiest Days of My Life": Mutual |site=British Film Institute |consulté le=28 avril 2012}}.</ref>{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=45}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=191}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=104}}. Pour Chaplin, ses années à Mutual sont les plus heureuses de sa carrière{{sfn|Chaplin|2003|p=188}}.


Chaplin fut critiqué par la presse britannique pour son absence de participation à la [[Première Guerre mondiale]]{{sfn|Robinson|1986|p=185}}. Il répondit qu'il se battrait pour le Royaume-Uni s'il y était appelé et qu'il avait répondu à la [[conscription]] américaine ; aucun des deux pays ne lui demanda de s'enrôler et l'ambassade britannique aux États-Unis publia une déclaration indiquant que {{citation|[Chaplin] est bien plus utile à la Grande-Bretagne en gagnant de l'argent et en achetant des [[obligations de guerre]] que dans les [[Guerre de tranchées|tranchées]]}}{{sfn|Robinson|1986|p=186}}. Malgré ces critiques, Chaplin était l'un des acteurs préférés des soldats{{sfn|Robinson|1986|p=187}}, et sa popularité continua de grandir dans le monde entier. Le magazine américain ''[[Harper's Weekly]]'' rapporta que le nom de Charlie Chaplin faisait {{citation|partie de la [[langue véhiculaire]] de presque tous les pays}} et que l'image de Charlot était {{citation|universellement familière}}{{sfn|Robinson|1986|p=210}}. En 1917, les imitateurs professionnels de Charlot étaient si répandus qu'il lança des actions en justice{{sfn|Robinson|1986|p=215-216}} et il fut rapporté que neuf hommes sur dix qui participaient à des soirées costumées reprenaient son accoutrement{{sfn|Robinson|1986|p=213}}. L'actrice [[Minnie Maddern Fiske|Minnie M. Fiske]] écrivit qu'un {{citation|nombre en constante augmentation de personnes cultivées commencent à considérer le jeune bouffon anglais, Charlie Chaplin comme un artiste extraordinaire et un génie comique}}{{sfn|Robinson|1986|p=210}}.
Chaplin est critiqué par la presse britannique pour son absence de participation à la [[Première Guerre mondiale]]{{sfn|Robinson|1986|p=185}}. Il répond qu'il est volontaire pour se battre pour le [[Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande|Royaume-Uni]] s'il est appelé et qu'il a déjà répondu à la [[conscription]] américaine ; aucun des deux pays ne lui demande de s'enrôler et l'ambassade britannique aux États-Unis publie une déclaration indiquant que Chaplin {{citation|est bien plus utile à la Grande-Bretagne en gagnant de l'argent et en achetant des [[Obligation de guerre|obligations de guerre]] que dans les [[Guerre de tranchées|tranchées]]}}{{sfn|Robinson|1986|p=186}}. Malgré ces critiques, Chaplin est l'un des acteurs préférés des soldats{{sfn|Robinson|1986|p=187}}, et sa popularité continue de grandir dans le monde entier. Le magazine américain ''[[Harper's Weekly]]'' rapporte que le nom de Charlie Chaplin fait {{citation|partie de la [[langue véhiculaire]] de presque tous les pays}} et que l'image de Charlot est {{citation|universellement familière}}{{sfn|Robinson|1986|p=210}}. En {{date-|1917}}, les imitateurs professionnels de Charlot sont si répandus qu'il lance des actions en justice{{sfn|Robinson|1986|p=215-216}} et il est rapporté que neuf hommes sur dix participant à des soirées costumées reprenaient son accoutrement{{sfn|Robinson|1986|p=213}}. L'actrice [[Minnie Maddern Fiske|Minnie M. Fiske]] écrit qu'un {{citation|nombre en constante augmentation de personnes cultivées commencent à considérer le jeune bouffon anglais, Charlie Chaplin comme un artiste extraordinaire et un génie comique}}{{sfn|Robinson|1986|p=210}}.


=== First National (1918-1922) ===
=== First National (1918-1922) ===
[[Fichier:Poster - A Dog's Life 01.jpg|thumb|left|alt=Affiche montrant Charlot l'air triste assis sur un muret en briques à côté d'un petit chien blanc.|''[[Une vie de chien (film, 1918)|Une vie de chien]]'' (1918), dans lequel Charlot commença à apparaître comme {{citation|une sorte de [[Pierrot (commedia dell'arte)|Pierrot]]}} ou « clown triste ».]]
[[Fichier:Poster - A Dog's Life 01.jpg|vignette|gauche|alt=Affiche montrant Charlot l'air triste assis sur un muret en briques à côté d'un petit chien blanc.|Affiche de ''[[Une vie de chien (film, 1918)|Une vie de chien]]'' ({{date-|1918}}).]]
Mutual ne se formalisa pas de la production réduite de Chaplin et le contrat se termina à l'amiable. Pour son nouveau studio, son principal objectif était d'avoir une plus large indépendance ; son frère Sydney, devenu son agent artistique, déclara à la presse que {{citation|Chaplin doit être autorisé à avoir tout le temps et l'argent nécessaire pour produire les films à sa manière… C'est la qualité, non la quantité, que nous voulons}}{{sfn|Robinson|1986|p=221}}. En juin 1917, Chaplin signa un contrat d'un million de dollars (environ 34 millions de dollars de 2012{{#tag:ref||group="n"|name="measuringworth"}}) pour huit films avec l'association de propriétaires de salles de cinéma [[First National Pictures]]{{sfn|Schickel|2006|p=8}}. Il décida de construire son propre studio sur un terrain de {{conversion|5|acre|sqm|-2|lk=1}} près de [[Sunset Boulevard]] avec les meilleures installations et équipements disponibles{{sfn|Chaplin|2003|p=203}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=225-226}}. Le studio fut inauguré en janvier 1918{{sfn|Robinson|1986|p=228}} et Chaplin reçut une grande liberté pour la réalisation de ses films<ref name="BFI first national">{{lien web |url=http://chaplin.bfi.org.uk/resources/bfi/biog/biog.php?fid=biog7 |titre=Independence Won: First National |éditeur=British Film Institute |consulté le=5 mai 2012}}</ref>.
Mutual ne se formalise pas de la production réduite de Chaplin et le contrat se termine à l'amiable. Pour son nouveau studio, son principal objectif est d'avoir une plus large indépendance ; son frère Sydney, devenu son [[agent artistique]], déclare à la presse que {{citation|Chaplin doit être autorisé à avoir tout le temps et l'argent nécessaire pour produire les films à sa manière… C'est la qualité, non la quantité, que nous voulons}}{{sfn|Robinson|1986|p=221}}. En {{date-||06|1917}}, Chaplin signe un contrat d'un million de dollars (environ {{unité|{{Inflation|US|1000000|1917|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}) pour huit films avec l'association de propriétaires de salles de cinéma {{langue|en|[[First National Pictures]]}}{{sfn|Schickel|2006|p=8}}. Il décide de construire son propre studio sur un terrain de {{conversion|5|acre|sqm|-2|lk=1}} près de [[Sunset Boulevard]] avec les meilleures installations et équipements disponibles{{sfn|Chaplin|2003|p=203}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=225-226}}. Le studio est inauguré en {{date-||1|1918}}{{sfn|Robinson|1986|p=228}} et Chaplin reçoit une grande liberté pour la réalisation de ses films<ref name="BFI first national">{{lien web |langue=en |url=http://chaplin.bfi.org.uk/resources/bfi/biog/biog.php?fid=biog7 |titre=Independence Won: First National |site=British Film Institute |consulté le=5 mai 2012}}.</ref>.


''[[Une vie de chien (film, 1918)|Une vie de chien]]'' distribué en avril 1918, fut son premier film sous ce nouveau contrat. Il y démontra une attention grandissante pour l'intrigue et son traitement de Charlot comme {{citation|une sorte de [[Pierrot (commedia dell'arte)|Pierrot]]{{sfn|Chaplin|2003|p=208}}}}. Le film fut décrit par le critique français [[Louis Delluc]] comme {{citation|la première [[œuvre d'art totale]] du cinéma}}{{sfn|Robinson|1986|p=229}}. Chaplin participa ensuite à l'[[effort de guerre]] en réalisant une tournée d'un mois aux États-Unis pour lever des fonds pour les [[Alliés de la Première Guerre mondiale|alliés]]{{sfn|Robinson|1986|p=237, 241}}. Il produisit également un court-métrage de [[propagande]] pour le gouvernement appelé ''[[The Bond]]''{{sfn|Robinson|1986|p=244}}. Son film suivant, ''[[Charlot soldat]]'', mit en scène Charlot dans les tranchées ; ses associés le mirent en garde contre une comédie sur la guerre, mais il indiqua par la suite que {{citation|dangereuse ou non, l'idée m'excitait}}{{sfn|Chaplin|2003|p=218}}. Le tournage dura quatre mois et le film de 45 minutes rencontra un grand succès à sa sortie, en octobre 1918{{sfn|Robinson|1986|p=241-245}}.
''[[Une vie de chien (film, 1918)|Une vie de chien]]'', distribué en {{date-||04|1918}}, est son premier film sous ce nouveau contrat. Il y démontre une attention grandissante pour l'intrigue et son traitement de Charlot comme une sorte de [[Pierrot (commedia dell'arte)|Pierrot]]{{sfn|Chaplin|2003|p=208}}. Le film est décrit par le critique français [[Louis Delluc]] comme {{citation|la première [[œuvre d'art totale]] du cinéma}}{{sfn|Robinson|1986|p=229}}. Chaplin participe ensuite à l'[[effort de guerre]] en réalisant une tournée d'un mois aux États-Unis afin de lever des fonds pour les [[Alliés de la Première Guerre mondiale|Alliés]]{{sfn|Robinson|1986|p=237, 241}}. Il produit également un court-métrage de [[propagande]] pour le gouvernement appelé ''[[The Bond]]''{{sfn|Robinson|1986|p=244}}. Son film suivant, ''[[Charlot soldat]]'', met en scène Charlot dans les tranchées ; ses associés le mettent en garde contre une comédie sur la guerre, mais il pense autrement : {{citation|dangereuse ou non, l'idée m'excitait}}{{sfn|Chaplin|2003|p=218}}. Le tournage dure quatre mois et le film de 45 minutes rencontre un grand succès à sa sortie, en {{date-||10|1918}}{{sfn|Robinson|1986|p=241-245}}.


Après la sortie de ''Charlot soldat'', Chaplin demanda plus de fonds à la First National, qui refusa. Frustré par le manque de considération du studio pour la qualité et inquiet des rumeurs d'une fusion avec Famous Players-Lasky{{sfn|Chaplin|2003|p=219-220}}{{,}}{{sfn|Balio|1979|p=12}}, il se rapprocha de ses collègues [[Douglas Fairbanks]], [[Mary Pickford]] et [[D. W. Griffith]] pour fonder une nouvelle société de distribution. La création d'[[United Artists]] en janvier 1919{{sfn|Robinson|1986|p=267}} fut une révolution pour l'industrie cinématographique, car les quatre fondateurs pouvaient personnellement financer leurs œuvres et avoir un contrôle total sur elles{{sfn|Robinson|1986|p=269}}. Chaplin était impatient de pouvoir commencer avec sa nouvelle entreprise et offrit de racheter son contrat avec la First National. Le studio refusa et insista pour qu'il livre les six derniers films qu'il avait promis{{sfn|Chaplin|2003|p=223}}.
Après la sortie de ''Charlot soldat'', Chaplin demande plus de fonds à la {{langue|en|First National}}, qui refuse. Frustré par le manque de considération du studio pour la qualité et inquiet des rumeurs d'une fusion avec Famous Players-Lasky{{sfn|Chaplin|2003|p=219-220}}{{,}}{{sfn|Balio|1979|p=12}}, il se rapproche de ses collègues [[Douglas Fairbanks]], [[Mary Pickford]] et [[D. W. Griffith]] pour fonder une nouvelle société de distribution. La création d'[[United Artists]] en {{date-||1|1919}}{{sfn|Robinson|1986|p=267}} est une révolution pour l'industrie cinématographique, car les quatre fondateurs peuvent dès lors personnellement financer leurs œuvres et avoir un contrôle total sur elles{{sfn|Robinson|1986|p=269}}. Chaplin est alors impatient de pouvoir commencer avec sa nouvelle entreprise et offre de racheter son contrat avec la {{langue|en|First National}}. Le studio refuse et insiste pour qu'il livre les six derniers films promis{{sfn|Chaplin|2003|p=223}}.


[[Fichier:Chaplin The Kid 2 crop.jpg|thumb|alt=Photographie de Charlot l'air énervé tenant la main à un petit garçon en haillons|''[[Le Kid]]'' (1921), avec [[Jackie Coogan]], associait la comédie et le drame, et fut le premier film de Chaplin à dépasser une heure.]]
[[Fichier:Chaplin The Kid 2 crop.jpg|vignette|alt=Photographie de Charlot l'air énervé tenant la main à un petit garçon en haillons|Chaplin avec [[Jackie Coogan]] dans ''[[Le Kid]]'' ({{date-|1921}}).]]
Avant la création d'United Artists, Chaplin se maria pour la première fois. L'actrice de 17 ans [[Mildred Harris]] avait révélé qu'elle était enceinte et ils se marièrent discrètement à Los Angeles en septembre 1918 pour éviter la controverse{{sfn|Robinson|1986|p=246}} ; la grossesse se révéla fausse{{sfn|Robinson|1986|p=248}}. Chaplin n'était pas heureux de cette union, qui selon lui affectait sa créativité, et la réalisation d{{'}}''[[Une idylle aux champs]]'' fut difficile{{sfn|Robinson|1986|p=246-249}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=141}}. Harris tomba ensuite réellement enceinte et elle accoucha d'un garçon le 7 juillet 1919. Le nouveau-né, Norman Spencer Chaplin, était cependant malformé et mourut trois jours plus tard{{sfn|Robinson|1986|p=251}}. Ils divorcèrent en avril 1920 et Chaplin expliqua dans son autobiographie qu'ils n'étaient {{citation|absolument pas faits l'un pour l'autre}}{{sfn|Chaplin|2003|p=235}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=259}}.


Avant la création d'United Artists, Chaplin se marie pour la première fois. L'actrice de {{unité|17|ans}} [[Mildred Harris]] est enceinte et ils se marient discrètement à [[Los Angeles]] en {{date-||09|1918}} pour éviter la controverse{{sfn|Robinson|1986|p=246}} ; la grossesse se révèle fausse{{sfn|Robinson|1986|p=248}}. Chaplin n'est pas heureux de cette union, qui selon lui affecte sa créativité, et la réalisation d’''[[Une idylle aux champs]]'' est difficile{{sfn|Robinson|1986|p=246-249}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=141}}. Harris tombe ensuite réellement enceinte et elle accouche d'un garçon le {{date-|7|07|1919}}. Le nouveau-né, Norman Spencer Chaplin, est cependant malformé et meurt trois jours plus tard{{sfn|Robinson|1986|p=251}}. Les époux divorcent en {{date-||04|1920}} et Chaplin explique dans son autobiographie qu'ils n'étaient {{citation|absolument pas faits l'un pour l'autre}}{{sfn|Chaplin|2003|p=235}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=259}}.
Cette tragédie personnelle influença l'œuvre de Chaplin, car il envisagea de faire de Charlot le tuteur d'un jeune garçon{{sfn|Robinson|1986|p=252}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=148}}. Le tournage du ''[[Le Kid|Kid]]'' commença en août 1919 avec le jeune [[Jackie Coogan]], alors âgé de quatre ans{{sfn|Robinson|1986|p=253}}. Chaplin réalisa que le projet était plus important que prévu et, pour apaiser la First National, arrêta sa production et tourna rapidement ''[[Une journée de plaisir]]''{{sfn|Chaplin|2003|p=255-253}}. La réalisation du ''Kid'' dura neuf mois, jusqu'en mai 1920, et sa durée de 68 minutes en faisait le plus long du cinéaste{{sfn|Robinson|1986|p=261}}. Marqué par les thèmes de la pauvreté et de la séparation, on considère que ''Le Kid'' fut influencé par la propre enfance de Chaplin<ref name="BFI first national"/> et il fut l'un des premiers films à associer la comédie et le drame{{sfn|Chaplin|2003|p=233-234}}. Le succès fut immédiat à sa sortie en janvier 1921 et il fut distribué dans plus de 50 pays dans les trois années qui suivirent{{sfn|Robinson|1986|p=265}}.


Cette tragédie personnelle influence l'œuvre de Chaplin, car il envisage de faire de Charlot le tuteur d'un jeune garçon{{sfn|Robinson|1986|p=252}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=148}}. Le tournage du ''[[Le Kid|Kid]]'' commence en {{date-||08|1919}} avec le jeune [[Jackie Coogan]], alors âgé de quatre ans{{sfn|Robinson|1986|p=253}}. Chaplin réalise que le projet est plus important que prévu et, pour apaiser la {{langue|en|First National}}, arrête sa production et tourne rapidement ''[[Une journée de plaisir]]''{{sfn|Chaplin|2003|p=255-253}}. La réalisation du ''Kid'' dure neuf mois, jusqu'en {{date-||05|1920}}, et sa durée de 68 minutes en fait le plus long du cinéaste jusque là{{sfn|Robinson|1986|p=261}}. Marqué par les thèmes de la pauvreté et de la séparation, on considère que ''Le Kid'' est influencé par la propre enfance de Chaplin<ref name="BFI first national"/> et il est l'un des premiers films à associer la comédie et le drame{{sfn|Chaplin|2003|p=233-234}}. Le succès est immédiat à sa sortie, en {{date-||01|1921}}, et il est distribué dans plus de 50 pays dans les trois années qui suivent{{sfn|Robinson|1986|p=265}}.
Chaplin consacra cinq mois à son film suivant de 31 minutes, ''[[Charlot et le Masque de fer]]''{{sfn|Robinson|1986|p=269}}. Après sa sortie en septembre 1921, il décida de retourner en Grande-Bretagne pour la première fois en près d'une décennie{{sfn|Robinson|1986|p=282}}. Il remplit ensuite son contrat avec la First National en réalisant ''[[Jour de paye]]'' en février 1922 et ''[[Le Pèlerin (film)|Le Pèlerin]]'' un an plus tard{{sfn|Robinson|1986|p=295-300}}.

Chaplin consacre cinq mois à son film suivant de 31 minutes, ''[[Charlot et le Masque de fer]]''{{sfn|Robinson|1986|p=269}}. Après sa sortie en {{date-||09|1921}}, il décide de retourner en Grande-Bretagne pour la première fois en près d'une décennie{{sfn|Robinson|1986|p=282}}. Il remplit ensuite son contrat avec la {{langue|en|First National}} en réalisant ''[[Jour de paye]]'' en {{date-||02|1922}} et ''[[Le Pèlerin (film)|Le Pèlerin]]'' un an plus tard{{sfn|Robinson|1986|p=295-300}}.


=== United Artists (1923-1938) ===
=== United Artists (1923-1938) ===
==== ''L'Opinion publique'' et ''La Ruée vers l'or'' ====
==== ''L'Opinion publique'' et ''La Ruée vers l'or'' ====
[[Fichier:Chaplin the gold rush boot.jpg|vignette|gauche|alt=Chaplin, assis à table, mangeant un bout de sa chaussure.|Charlot mangeant sa chaussure dans ''[[La Ruée vers l'or]]'' ({{date-|1925}}).]]
Ayant rempli ses obligations avec la First National, Chaplin était à présent libre de réaliser ses films en tant que producteur indépendant. En novembre 1922, il commença le tournage de ''[[L'Opinion publique]]''{{sfn|Robinson|1986|p=310}}. Il voulait que ce drame romantique lance la carrière d'Edna Purviance{{sfn|Robinson|1986|p=302}} et ne réalisa qu'un bref [[caméo]] non crédité dans cette production{{sfn|Robinson|1986|p=311-312}}. Il voulait que le film soit réaliste et demanda à ses acteurs de jouer de manière retenue, expliquant que dans la vie réelle {{citation|les hommes et les femmes essayent de dissimuler leurs émotions plutôt que de vouloir les montrer{{sfn|Robinson|1986|p=319-321}}}}. La première de ''L'Opinion publique'' en septembre 1923 fut acclamée par la critique pour son approche subtile, qui était alors une innovation{{sfn|Robinson|1986|p=318-321}}. Le public semblait cependant peu intéressé par un film de Chaplin sans Charlot et il fut un échec{{sfn|Louvish|2010|p=193}}. Le cinéaste fut affecté par ce revers, car il avait voulu réaliser un film dramatique et était fier du résultat ; il retira ''L'Opinion publique'' des salles aussi vite que possible{{sfn|Robinson|1986|p=302, 322}}.
Ayant rempli ses obligations avec la {{langue|en|First National}}, Chaplin est à présent libre de réaliser ses films en tant que producteur indépendant. En {{date-||11|1922}}, il commence le tournage de ''[[L'Opinion publique]]''{{sfn|Robinson|1986|p=310}}. Il veut que ce drame romantique lance la carrière d'Edna Purviance{{sfn|Robinson|1986|p=302}} et ne réalise qu'un bref [[caméo]] non crédité dans cette production{{sfn|Robinson|1986|p=311-312}}. Souhaitant que le film soit réaliste, il demande à ses acteurs de jouer de manière retenue, expliquant que dans la vie réelle {{citation|les hommes et les femmes essayent de dissimuler leurs émotions plutôt que de vouloir les montrer}}{{sfn|Robinson|1986|p=319-321}}. La première de ''L'Opinion publique'' en {{date-||09|1923}} est acclamée par la critique pour son approche subtile, qui est alors une innovation{{sfn|Robinson|1986|p=318-321}}. Le public semble cependant peu intéressé par un film de Chaplin sans Charlot et il sera un échec{{sfn|Louvish|2010|p=193}}. Fier de son film, le cinéaste est affecté par ce revers car il a voulu réaliser un film dramatique ; il retire ''L'Opinion publique'' des salles aussi vite que possible{{sfn|Robinson|1986|p=302, 322}}.


Chaplin revient à la comédie pour son prochain projet et il pense alors : {{citation|Ce prochain film doit être une [[épopée]] ! la plus grande !}}{{sfn|Louvish|2010|p=195}}. Inspiré par une photographie de la [[ruée vers l'or du Klondike]] de {{date-|1898}} et par le récit de l'[[expédition Donner]] de {{date-|1846}}-{{date-|1847}}, il réalise ce que le journaliste Geoffrey Macnab qualifie de {{citation|comédie épique sur un sujet grave}}{{sfn|Kemp|2011|p=64}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=299}}. Dans ''[[La Ruée vers l'or]]'', Charlot est représenté comme un [[Prospection (géologie)|prospecteur]] solitaire affrontant l'adversité et à la recherche de l'amour. Avec [[Georgia Hale]] comme partenaire, Chaplin commence le tournage dans les montagnes de l'ouest du [[Nevada]] en {{date-||02|1924}}{{sfn|Robinson|1986|p=337}}. La production est complexe, avec plus de 600 figurants, des décors extravagants et des [[effets spéciaux]]{{sfn|Robinson|1986|p=340-345}} ; la dernière scène n'est réalisée qu'en {{date-||05|1925}}, après {{unité|15|mois}} de tournage{{sfn|Robinson|1986|p=354}}.
[[Fichier:Chaplin the gold rush boot.jpg|thumb|Charlot mangeant sa chaussure dans ''[[La Ruée vers l'or]]'' (1925)]]
Chaplin revint à la comédie pour son prochain projet et il rapporta avoir pensé que : {{citation|Ce prochain film doit être une [[épopée]] ! la plus grande !{{sfn|Louvish|2010|p=195}}}} Inspiré par une photographie de la [[ruée vers l'or du Klondike]] de 1898 et par le récit de l'[[expédition Donner]] de 1846-1847, il réalisa ce que le journaliste Geoffrey Macnab qualifia de {{citation|comédie épique sur un sujet grave{{sfn|Kemp|2011|p=64}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=299}}}}. Dans ''[[La Ruée vers l'or]]'', Charlot est représenté comme un [[prospecteur]] solitaire affrontant l'adversité et à la recherche de l'amour. Avec [[Georgia Hale]] comme partenaire, Chaplin commença le tournage dans les montagnes de l'ouest du [[Nevada]] en février 1924{{sfn|Robinson|1986|p=337}}. La production fut complexe, avec plus de 600 figurants, des décors extravagants et des [[effets spéciaux]]{{sfn|Robinson|1986|p=340-345}} ; la dernière scène ne fut réalisée qu'en mai 1925, après 15 mois de tournage{{sfn|Robinson|1986|p=354}}.


Avec un coût de près d'un million de dollars{{sfn|Robinson|1986|p=358}}, Chaplin considérait que ''La Ruée vers l'or'' était le meilleur film qu'il ait réalisé jusque-là{{sfn|Robinson|1986|p=357}}. Après sa sortie en août 1925, il devint l'un des plus gros succès du cinéma muet, avec cinq millions de dollars (environ 132 millions de dollars de 2012{{#tag:ref||group="n"|name="measuringworth"}}) de recettes{{sfn|Robinson|1986|p=358}}{{,}}{{sfn|Kemp|2011|p=63}}. La comédie comporte certaines des scènes les plus célèbres de Chaplin, comme celle de Charlot mangeant sa chaussure ou celle dite de la « danse des petits pains »{{sfn|Kemp|2011|p=63-64}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=339, 353}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=200}}{{,}}{{sfn|Schickel|2006|p=19}}, et il déclara par la suite qu'il s'agissait du film duquel il aimerait que les gens se souviennent de lui{{sfn|Kemp|2011|p=64}}.
Avec un coût de près d'un million de dollars{{sfn|Robinson|1986|p=358}}, Chaplin considère que ''La Ruée vers l'or'' est le meilleur film qu'il a réalisé jusque-là{{sfn|Robinson|1986|p=357}}. Après sa sortie en {{date-||08|1925}}, il devient l'un des plus gros succès du cinéma muet, avec cinq millions de dollars (environ {{unité|{{Inflation|US|5000000|1925|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}) de recettes{{sfn|Robinson|1986|p=358}}{{,}}{{sfn|Kemp|2011|p=63}}. La comédie comporte certaines des scènes les plus célèbres de Chaplin, comme celle de Charlot mangeant sa chaussure ou celle dite de la « danse des petits pains »{{sfn|Kemp|2011|p=63-64}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=339, 353}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=200}}{{,}}{{sfn|Schickel|2006|p=19}}, et il déclare par la suite qu'il aimerait que les gens se souviennent de lui grâce à ce film{{sfn|Kemp|2011|p=64}}.


==== Lita Grey et ''Le Cirque'' ====
==== Lita Grey et ''Le Cirque'' ====
[[Fichier:Lita Grey 1929.jpg|thumb|left|alt=Photographie d'une jeune femme aux cheveux ondulés ramenés sur le coté et portant un foulard en dentelle|[[Lita Grey]], deux ans après son divorce houleux d'avec Chaplin]]
[[Fichier:Lita Grey 1927.jpg|vignette|gauche|redresse|alt=Photographie d'une jeune femme aux cheveux ondulés ramenés sur le côté et portant un foulard en dentelle|[[Lita Grey]], deux ans après son divorce houleux d'avec Chaplin.]]
Alors qu'il réalisait ''La Ruée vers l'Or'', Chaplin se maria pour la deuxième fois. Comme pour sa première union, [[Lita Grey]] était une jeune actrice qui devait apparaître dans le film et dont la grossesse imprévue obligea Chaplin à l'épouser. Elle avait 16 ans et lui 35, et selon la loi californienne cette relation aurait pu être qualifiée de viol sur mineure{{sfn|Robinson|1986|p=346}}. D'après les documents du divorce, Chaplin aurait voulu la faire avorter, mais celle-ci aurait refusé. La mère de Lita Grey aurait par ailleurs menacé Chaplin de le dénoncer à la police s'il n'épousait pas sa fille<ref>{{Lien web | auteur = Simon de Bruxelles | titre = Chaplin’s sex demands on teenage wife were revolting, papers claim | The Times | jour = 2 | mois = avril | année = 2015 | url = http://www.thetimes.co.uk/tto/arts/film/article4399600.ece | site = The Times | en ligne le = | consulté le = 2 avril 2015 }}</ref>. Il organisa donc une cérémonie discrète au [[Mexique]] le 24 novembre 1924{{sfn|Robinson|1986|p=348}}. Lita accoucha d'un premier fils, [[Charles Chaplin Jr.]], le 5 mai 1925, et d'un second, [[Sydney Chaplin (1926-2009)|Sydney Earle Chaplin]] le 30 mars 1926{{sfn|Robinson|1986|p=355, 368}}.
Alors qu'il réalise ''La Ruée vers l'Or'', Chaplin se marie pour la deuxième fois. Comme pour sa première union, [[Lita Grey]] est une jeune actrice qui doit apparaître dans le film et dont la grossesse imprévue oblige Chaplin à l'épouser. Elle a alors {{unité|16|ans}} et lui 35, et selon la loi californienne cette relation peut être qualifiée de viol sur mineure{{sfn|Robinson|1986|p=346}}. D'après les documents du divorce, Chaplin a voulu la faire avorter, mais celle-ci a refusé. La mère de Lita Grey a par ailleurs menacé Chaplin de le dénoncer à la police s'il n'épouse pas sa fille<ref>{{Lien web |langue=en | auteur = Simon de Bruxelles | titre = Chaplin’s sex demands on teenage wife were revolting, papers claim | url = http://www.thetimes.co.uk/tto/arts/film/article4399600.ece | site=The Times | date=2 avril 2015 | consulté le = 2 avril 2015 }}.</ref>. Il organise donc une cérémonie discrète au [[Mexique]], le {{date-|24|11|1924}}{{sfn|Robinson|1986|p=348}}. Lita accouche d'un premier fils, [[Charles Chaplin Jr.]], le {{date-|5|5|1925}}, et d'un second, [[Sydney Chaplin (1926-2009)|Sydney Earle Chaplin]], le {{date-|30|03|1926}}{{sfn|Robinson|1986|p=355, 368}}.


Cette union fut malheureuse et Chaplin passait beaucoup de temps en studio pour éviter de voir son épouse{{sfn|Robinson|1986|p=350. 368}}. En novembre 1926, Lita Grey quitta leur foyer avec leurs enfants{{sfn|Robinson|1986|p=371}}. Lors de la difficile procédure de divorce, les documents de Lita Grey accusant Chaplin d'infidélité, de violence et d'entretenir des {{citation|désirs sexuels pervers}} furent publiés par la presse{{sfn|Louvish|2010|p=220}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=372-374}}{{,}}{{#tag:ref|Dans ses mémoires, Lita Grey avança que beaucoup de ses plaintes furent {{citation|de façon habile et choquante exagérées et déformées}} par ses avocats{{sfn|Maland|1989|p=96}}.|group="n"}}. Il fut rapporté que Chaplin était au bord d'une [[crise de nerfs]], alors que l'histoire faisait la une des journaux et que des groupes furent créés pour demander l'interdiction de ses films{{sfn|Robinson|1986|p=372-374}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=220-221}}. Impatients de mettre un terme à l'affaire, les avocats de Chaplin acceptèrent en août 1927 de payer {{unité|600000|$}} (environ 15,3 millions de dollars de 2012{{#tag:ref||group="n"|name="measuringworth"}}), la plus grosse somme accordée lors d'un procès aux États-Unis jusqu'alors{{sfn|Robinson|1986|p=378}}. La popularité de Chaplin lui permit de surmonter l'incident, qui fut rapidement oublié, mais il en resta profondément affecté{{sfn|Maland|1989|p=99-105}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=383}}.
Cette union est malheureuse et Chaplin passe beaucoup de temps en studio pour éviter de voir son épouse{{sfn|Robinson|1986|p=350. 368}}. En {{date-||11|1926}}, Lita Grey quitte leur foyer avec leurs enfants{{sfn|Robinson|1986|p=371}}. Lors de la difficile procédure de divorce, les documents de Lita Grey accusant Chaplin d'infidélité, de violence et d'entretenir des {{citation|désirs sexuels pervers}} sont publiés par la presse{{sfn|Louvish|2010|p=220}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=372-374}}{{,}}{{#tag:ref|Dans ses mémoires, Lita Grey avance que beaucoup de ses plaintes sont {{citation|de façon habile et choquante exagérées et déformées}} par ses avocats{{sfn|Maland|1989|p=96}}.|group="n"}}. Il est rapporté que Chaplin est au bord d'une [[crise de nerfs]], alors que l'histoire fait la une des journaux et que des groupes sont créés pour demander l'interdiction de ses films{{sfn|Robinson|1986|p=372-374}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=220-221}}. Impatients de mettre un terme à l'affaire, les avocats de Chaplin acceptent en {{date-||08|1927}} de payer {{unité|600000|dollars}} (environ {{unité|{{Inflation|US|600000|1927|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}), la plus grosse somme accordée lors d'un procès aux États-Unis jusqu'alors{{sfn|Robinson|1986|p=378}}. La popularité de Chaplin lui permet de surmonter l'incident, qui est rapidement oublié, mais il en reste profondément affecté{{sfn|Maland|1989|p=99-105}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=383}}.


Avant le début de la procédure de divorce, Chaplin avait commencé à travailler sur un nouveau film, ''[[Le Cirque (film)|Le Cirque]]''{{sfn|Robinson|1986|p=360}}. Le tournage fut suspendu dix mois durant le scandale de son divorce{{sfn|Robinson|1986|p=371, 381}} et la production fut marquée par les difficultés{{sfn|Louvish|2010|p=215}}. Finalement terminé en octobre 1927, ''Le Cirque'' sortit en janvier 1928 et reçut un accueil positif{{sfn|Robinson|1986|p=382}}. Lors de la [[1re cérémonie des Oscars|{{1re|cérémonie}} des Oscars]], Chaplin reçut un [[Oscar d'honneur]] {{citation|pour sa polyvalence et son génie à jouer, écrire, mettre en scène et produire ''Le Cirque''<ref name="circus">{{lien web |url=http://www.britannica.com/EBchecked/topic/1319096/The-Circus |titre=The Circus |éditeur=[[Encyclopædia Britannica]] |consulté le={{1er}} novembre 2013}}</ref>}}. Malgré le succès du film, Chaplin l'associa avec le stress de sa production ; il ne le mentionna pas dans son autobiographie et eut du mal à travailler dessus quand il le [[Musique de film|resonorisa]] en 1967{{sfn|Brownlow|2010|p=73}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=224}}.
Avant le début de la procédure de divorce, Chaplin commence à travailler sur un nouveau film, ''[[Le Cirque (film)|Le Cirque]]''{{sfn|Robinson|1986|p=360}}. Le tournage est suspendu dix mois durant le scandale de son divorce{{sfn|Robinson|1986|p=371, 381}} et la production est marquée par les difficultés{{sfn|Louvish|2010|p=215}}. Finalement terminé en {{date-||10||1927}}, ''Le Cirque'' sort en {{date-||1|1928}} et reçoit un accueil positif{{sfn|Robinson|1986|p=382}}. Lors de la [[1re cérémonie des Oscars|{{1re|cérémonie}} des Oscars]], Chaplin reçoit un [[Oscar d'honneur]] {{citation|pour sa polyvalence et son génie à jouer, écrire, mettre en scène et produire ''Le Cirque''<ref name="circus">{{lien web |langue=en |url=http://www.britannica.com/EBchecked/topic/1319096/The-Circus |titre=The Circus |site=[[Encyclopædia Britannica]] |consulté le={{1er}} novembre 2013}}.</ref>}}. Malgré le succès du film, Chaplin l'associe avec le stress de sa production ; il ne le mentionne pas dans son autobiographie et a du mal à travailler dessus quand il le [[Musique de film|resonorisa]] en {{date-|1967}}{{sfn|Brownlow|2010|p=73}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=224}}.


==== ''Les Lumières de la ville'' ====
==== ''Les Lumières de la ville'' ====
{{encadré texte |align=left |width=25% |palign=justify |texte=« J'étais résolu à continuer la réalisation de films muets… J'étais un mime et dans ce registre j'étais unique et, sans fausse modestie, un maître. »|légende=Chaplin sur le cinéma parlant{{sfn|Chaplin|2003|p=322}}}}
{{encadré texte |align=left |width=15% |palign=justify |texte=« J'étais résolu à continuer la réalisation de films muets… J'étais un mime et dans ce registre j'étais unique et, sans fausse modestie, un maître. »|légende=Chaplin sur le cinéma parlant{{sfn|Chaplin|2003|p=322}}}}
[[Fichier:Chaplin City Lights still.jpg|thumb|alt=Capture d'écran montrant Charlot tendant la main à une jeune femme assise dans la rue à côté de bouquets de fleurs.|Chaplin et [[Virginia Cherrill]] dans ''[[Les Lumières de la ville]]'' ({{date-|1931}}).]]
Le [[cinéma sonore]] apparaissait à l'époque où sortait ''Le Cirque''. Chaplin était sceptique quant à cette nouvelle technique et estimait que les « parlants » ne valaient pas les films muets, du point de vue artistique{{sfn|Robinson|1986|p=389}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=321}}. Il était également réticent à l'idée de changer la formule qui avait fait son succès{{sfn|Robinson|1986|p=465}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=322}}{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=29}} et craignait que donner une voix à Charlot ne limite son attrait à l'international{{sfn|Robinson|1986|p=389}}{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=29}}. Il rejeta donc cette mode hollywoodienne et commença à travailler sur un nouveau film muet ; cette décision le rendit néanmoins anxieux et il le resta tout au long de la production de ce nouveau projet{{sfn|Robinson|1986|p=389}}{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=29}}.
Le [[cinéma sonore]] apparaît à l'époque où sortait ''Le Cirque''. Chaplin est sceptique quant à cette nouvelle technique et estime que les « parlants » ne valent pas les films muets, du point de vue artistique{{sfn|Robinson|1986|p=389}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=321}}. Il est également réticent à l'idée de changer la formule qui a fait son succès{{sfn|Robinson|1986|p=465}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=322}}{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=29}} et craint que donner une voix à Charlot ne limite son attrait à l'international{{sfn|Robinson|1986|p=389}}{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=29}}. Il rejette donc cette mode hollywoodienne et commence à travailler sur un nouveau film muet ; cette décision le rend néanmoins anxieux et il le reste tout au long de la production de ce nouveau projet{{sfn|Robinson|1986|p=389}}{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=29}}.


Lorsque le tournage commence à la fin de l'année {{date-|1928}}, Chaplin travaille sur l'histoire depuis près d'un an{{sfn|Robinson|1986|p=398}}{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=33-34, 41}}. ''[[Les Lumières de la ville]]'' met en scène l'amour de Charlot pour une fleuriste aveugle, jouée par [[Virginia Cherrill]], et ses efforts pour lever des fonds pour une opération destinée à lui rendre la vue. Chaplin a travaillé {{citation|jusqu'au bord de la folie pour obtenir la perfection}}{{sfn|Chaplin|2003|p=324}} et le tournage dure 21 mois, jusqu'en {{date-||09|1930}}{{sfn|Robinson|1986|p=409}}.
[[Fichier:Chaplin City Lights still.jpg|thumb|alt=Capture d'écran montrant Charlot tendant la main à une jeune femme assise dans la rue à côté de bouquets de fleurs.|''[[Les Lumières de la ville]]'' (1931) est considéré comme l'un des plus grands films de Chaplin.]]
Lorsque le tournage commença à la fin de l'année 1928, Chaplin travaillait sur l'histoire depuis près d'un an{{sfn|Robinson|1986|p=398}}{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=33-34, 41}}. ''[[Les Lumières de la ville]]'' mettait en scène l'amour de Charlot pour une fleuriste aveugle, jouée par [[Virginia Cherrill]], et ses efforts pour lever des fonds pour une opération destinée à lui rendre la vue. Chaplin rapporta qu'il {{citation|avait travaillé jusqu'au bord de la folie pour obtenir la perfection{{sfn|Chaplin|2003|p=324}}}} et le tournage dura 21 mois, jusqu'en septembre 1930{{sfn|Robinson|1986|p=409}}.


Chaplin finalisa ''Les Lumières de la ville'' en décembre 1930 à un moment où les films muets étaient devenus anachroniques{{sfn|Robinson|1986|p=410}}. Une pré-projection ne fut pas un succès{{sfn|Chaplin|2003|p=325}}, mais la presse fut séduite. Un journaliste écrivit : {{citation|Personne d'autre que Charlie Chaplin n'aurait pu le faire. Il est le seul à avoir ce quelque chose d'étrange appelé « attrait de l'audience » en quantité suffisante pour défier le penchant populaire pour les films qui parlent{{sfn|Robinson|1986|p=413}}}}. Lors de sa sortie officielle en janvier 1931, ''Les Lumières de la ville'' fut un succès populaire et financier qui rapporta plus de trois millions de dollars{{sfn|Maland|2007|p=108-110}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=328}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=415}}. Le [[British Film Institute]] le cite comme la plus grande réussite de Chaplin et le critique [[James Agee]] évoque son final comme {{citation|le meilleur jeu d'acteur et le plus grand moment de l'histoire du cinéma<ref name="bfi">{{lien web |url=http://chaplin.bfi.org.uk/resources/bfi/biog/biog.php?fid=biog9 |titre=United Artists and the Great Features |éditeur=British Film Institute |consulté le=21 juin 2012}}</ref>{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=10-11}}}}.
Chaplin finalise ''Les Lumières de la ville'' en {{date-||12|1930}} à un moment où les films muets sont devenus anachroniques{{sfn|Robinson|1986|p=410}}. Une pré-projection ne rencontre pas de succès{{sfn|Chaplin|2003|p=325}}, mais la presse est séduite. Un journaliste écrit : {{citation|Personne d'autre que Charlie Chaplin n'aurait pu le faire. Il est le seul à avoir ce quelque chose d'étrange appelé « attrait de l'audience » en quantité suffisante pour défier le penchant populaire pour les films qui parlent}}{{sfn|Robinson|1986|p=413}}. Lors de sa sortie officielle en {{date-||1|1931}}, ''Les Lumières de la ville'' est un succès populaire et financier qui rapporte plus de trois millions de dollars{{sfn|Maland|2007|p=108-110}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=328}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=415}}. Le [[British Film Institute]] le cite comme la plus grande réussite de Chaplin et le critique [[James Agee]] évoque son final comme {{citation|le meilleur jeu d'acteur et le plus grand moment de l'histoire du cinéma}}<ref name="bfi">{{lien web |langue=en |url=http://chaplin.bfi.org.uk/resources/bfi/biog/biog.php?fid=biog9 |titre=United Artists and the Great Features |site=[[British Film Institute]] |consulté le=21 juin 2012}}.</ref>{{,}}{{sfn|Maland|2007|p=10-11}}.


==== Paulette Goddard et ''Les Temps modernes'' ====
==== Paulette Goddard et ''Les Temps modernes'' ====
[[Fichier:Modern Times poster.jpg|gauche|vignette|alt=Affiche montrant Charlot avec un bleu de travail rayé. Il tourne le dos à un mur où sont fixés deux gros disjoncteurs manuels qu'il tient dans les mains à la hauteur de sa tête.|Affiche pour ''[[Les Temps modernes (film)|Les Temps modernes]]'' (1936).]]
''Les Lumières de la ville'' avait été un succès mais Chaplin n'était pas certain de pouvoir réaliser un nouveau film sans dialogues. Il restait convaincu que le son ne marcherait pas dans ses films, mais était également {{citation|obsédé par la peur déprimante d'être démodé}}{{sfn|Chaplin|2003|p=360}}. En raison de ces incertitudes, le comédien choisit au début de l'année 1931 de prendre des vacances et il arrêta de tourner pendant 16 mois{{sfn|Louvish|2010|p=243}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=420}}. Il visita l'Europe de l'Ouest, dont la [[France]] et la [[Suisse]], et décida spontanément de se rendre dans l'[[Empire du Japon]]{{sfn|Robinson|1986|p=429-441}}. La-bas, il fut témoin de l'[[incident du 15 mai]] 1932 durant lequel des officiers nationalistes tentèrent un [[coup d'État]], assassinant le [[premier ministre du Japon]] [[Tsuyoshi Inukai]]. Le plan initial incluait notamment de tuer Charlie Chaplin afin de déclencher une guerre avec les États-Unis<ref>''Générak Ishiwara, l'homme qui déclencha la guerre''de Bruno Birolli et Paul Jenkins, [[Arte France]], 2012</ref>. Quand le premier ministre fut tué, son fils [[Takeru Inukai]] assistait à une compétition de [[sumo]] avec Charlie Chaplin, ce qui leur a probablement sauvé la vie<ref>{{Lien web|langue=en |url=http://www.biographile.com/charlie-chaplins-tales-of-japan-read-like-film-noir/11551/ |titre=Charlie Chaplin’s Tales of Japan Read Like Film Noir |site= Biographile|auteur= Nathan Gelgud|année=3 janvier 2013 |consulté le= 7 janvier 2015}}.</ref>.
''Les Lumières de la ville'' est un succès mais Chaplin n'est pas certain de pouvoir réaliser un nouveau film sans dialogues. Il reste convaincu que le son ne marcherait pas dans ses films, mais est également {{citation|obsédé par la peur déprimante d'être démodé}}{{sfn|Chaplin|2003|p=360}}. En raison de ces incertitudes, le comédien choisit au début de l'année {{date-|1931}} de prendre des vacances et il arrête de tourner pendant 16 mois{{sfn|Louvish|2010|p=243}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=420}}. Il visite l'[[Europe de l'Ouest]], dont la [[France]] et la [[Suisse]], et décide spontanément de se rendre dans l'[[empire du Japon]]{{sfn|Robinson|1986|p=429-441}}. Là-bas, il est témoin de l'[[incident du 15 mai]] [[1932]], durant lequel des officiers nationalistes tentent un [[coup d'État]], assassinant le [[Premier ministre du Japon]] [[Inukai Tsuyoshi|Tsuyoshi Inukai]]. Le plan initial inclut notamment de tuer Charlie Chaplin afin de déclencher une guerre avec les États-Unis<ref>''Générak Ishiwara, l'homme qui déclencha la guerre'' de Bruno Birolli et Paul Jenkins, [[Arte France]], 2012.</ref>. Quand le Premier ministre est tué, son fils [[Takeru Inukai]] assiste à une compétition de [[sumo]] avec Charlie Chaplin, ce qui leur a probablement sauvé la vie<ref>{{Lien web|langue=en |url=https://www.thevintagenews.com/2017/02/20/charlie-chaplin-was-nearly-assassinated-in-japan-in-1932/ |titre=Charlie Chaplin was nearly assassinated in Japan in 1932 |site=The Vintage News |auteur=Domagoj Valjak |date=20 février 2017 |consulté le=14 mai 2020}}.</ref>.


Dans son autobiographie, il nota qu'à son retour à Los Angeles en juin 1932, {{citation|[il] était perdu et sans but, fatigué et conscient d'une extrême solitude}}. Il envisagea brièvement la possibilité de prendre sa retraite et de s'installer en Chine{{sfn|Chaplin|2003|p=372, 375}}.
Dans son autobiographie, il note qu'à son retour à [[Los Angeles]] en {{date-||06|1932}}, il se sent {{citation| perdu et sans but, fatigué et conscient d'une extrême solitude}}. Il envisage brièvement la possibilité de prendre sa retraite et de s'installer en [[République de Chine (1912-1949)|Chine]]{{sfn|Chaplin|2003|p=372, 375}}.


La solitude de Chaplin est apaisée quand il rencontre en juillet l'actrice de {{unité|21|ans}} [[Paulette Goddard]], avec qui il forme un couple heureux{{sfn|Robinson|1986|p=453}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=147}}. Hésitant encore sur l'opportunité d'un film, il écrit un [[roman-feuilleton]] sur ses voyages, qui est publié dans le magazine ''[[Woman's Home Companion]]''{{sfn|Robinson|1986|p=451}}. Son séjour à l'étranger, durant lequel il rencontre plusieurs personnages influents, a un effet très stimulant pour Chaplin, et il s'intéresse de plus en plus aux questions internationales{{sfn|Louvish|2010|p=256}}. L'état du monde du travail américain durant la [[Grande Dépression]] le trouble et il craint que le [[capitalisme]] et les machines ne provoquent un fort taux de chômage. Ce sont ces inquiétudes qui le motivent à développer son nouveau film{{sfn|Larcher|2011|p=63}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=457-458}}.
[[Fichier:Modern Times poster.jpg|thumb|alt=Affiche montrant Charlot avec un bleu de travail rayé. Il tourne le dos à un mur où sont fixés deux gros disjoncteurs manuels qu'il tient dans les mains à la hauteur de sa tête.|''[[Les Temps modernes (film)|Les Temps modernes]]'' (1936), que Jérôme Larcher décrivit comme {{citation|une triste réflexion sur l'automatisation de l'individu{{sfn|Larcher|2011|p=64}}}}.]]
La solitude de Chaplin fut apaisée quand il rencontra en juillet l'actrice de 21 ans, [[Paulette Goddard]], et ils formèrent un couple heureux{{sfn|Robinson|1986|p=453}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=147}}. Hésitant encore sur l'opportunité d'un film, il écrivit un [[roman-feuilleton]] sur ses voyages, qui fut publié dans le magazine ''[[Woman's Home Companion]]''{{sfn|Robinson|1986|p=451}}. Son séjour à l'étranger avait été très stimulant pour Chaplin, qui avait rencontré plusieurs personnages influents, et il s'intéressa de plus en plus aux questions internationales{{sfn|Louvish|2010|p=256}}. L'état du monde du travail américain durant la [[Grande Dépression]] le troubla et il craignait que le [[capitalisme]] et les machines ne provoquent un fort taux de chômage. Ce furent ces inquiétudes qui le motivèrent à développer son nouveau film{{sfn|Larcher|2011|p=63}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=457-458}}.


''[[Les Temps modernes (film)|Les Temps modernes]]'' fut présenté par Chaplin comme {{citation|une satire de certaines situations de notre vie industrielle{{sfn|Louvish|2010|p=257}}}}. Il envisagea d'en faire un film parlant, mais changea d'avis lors des répétitions. Comme ses prédécesseurs, ''Les Temps modernes'' utilisait des effets sonores synchronisés, mais presque aucune parole{{sfn|Robinson|1986|p=466}}. Dans le film, l'interprétation en « charabia » d'une chanson par Chaplin donna néanmoins pour la première fois une voix à Charlot{{sfn|Robinson|1986|p=468}}. Après l'enregistrement de la musique, le résultat fut présenté en février 1936{{sfn|Robinson|1986<!--|p=469-472-->|p=474}}. Il s'agissait de son premier film depuis ''Le Kid'' à intégrer des références politiques et sociales{{sfn|Maland|1989|p=150}} et ce facteur entraîna une forte couverture médiatique, même si Chaplin tenta de minimiser le sujet{{sfn|Maland|1989|p=144-147}}. Le film connut un succès moindre que ses précédents films et les critiques furent plus mitigées, certaines désapprouvant sa signification politique{{sfn|Maland|1989|p=157}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=473}}. ''Les Temps modernes'' est néanmoins devenu un classique du répertoire de Chaplin<ref name="bfi"/>{{,}}{{sfn|Schneider|2009|p=125}}.
''[[Les Temps modernes (film)|Les Temps modernes]]'' est présenté par Chaplin comme {{citation|une satire de certaines situations de notre vie industrielle}}{{sfn|Louvish|2010|p=257}}. Il envisage d'en faire un film parlant, mais change d'avis lors des répétitions. Comme ses prédécesseurs, ''Les Temps modernes'' utilise des effets sonores synchronisés, mais presque aucune parole{{sfn|Robinson|1986|p=466}}. Dans le film, l'interprétation en « charabia » d'une chanson par Chaplin donne néanmoins pour la première fois une voix à Charlot{{sfn|Robinson|1986|p=468}}. Après l'enregistrement de la musique, le résultat est présenté en {{date-||02|1936}}{{sfn|Robinson|1986<!--|p=469-472-->|p=474}}. Il s'agit de son premier film depuis ''Le Kid'' à intégrer des références politiques et sociales{{sfn|Maland|1989|p=150}} et cet aspect entraîne une forte couverture médiatique, même si Chaplin tente de minimiser le sujet{{sfn|Maland|1989|p=144-147}}. Le film connaît un succès moindre que ses précédents films et les critiques sont plus mitigées, certaines désapprouvant sa signification politique{{sfn|Maland|1989|p=157}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=473}}. ''Les Temps modernes'' est néanmoins devenu un classique du répertoire de Chaplin<ref name="bfi"/>{{,}}{{sfn|Schneider|2009|p=125}}.


À la suite de cette sortie, Chaplin se rendit en [[Extrême-Orient]] avec Goddard{{sfn|Robinson|1986|p=479}}. Le couple refusa tout commentaire sur la nature de leur relation et on ne savait alors pas vraiment s'ils étaient mariés ou non{{sfn|Robinson|1986|p=469}}. Quelque temps plus tard, Chaplin révéla qu'ils s'étaient mariés à [[Canton (Chine)|Canton]], en Chine, durant ce voyage{{sfn|Robinson|1986|p=483}}. Les deux s'éloignèrent cependant rapidement l'un de l'autre pour se consacrer à leur travail ; Goddard divorça finalement en 1942, en avançant qu'ils étaient séparés depuis plus d'un an{{sfn|Robinson|1986|p=509-510}}.
À la suite de cette sortie, Chaplin se rend en [[Extrême-Orient]] avec Goddard{{sfn|Robinson|1986|p=479}}. Le couple refuse tout commentaire sur la nature de leur relation et on ne sait alors pas vraiment s'ils sont mariés ou non{{sfn|Robinson|1986|p=469}}. Quelque temps plus tard, Chaplin révèle qu'ils se sont mariés à [[Canton (Chine)|Canton]], en [[Chine]], durant ce voyage{{sfn|Robinson|1986|p=483}}. Les deux s'éloignent cependant rapidement l'un de l'autre pour se consacrer à leur travail ; Goddard demande finalement le divorce en {{date-|1942}}, avançant qu'ils sont séparés depuis plus d'un an{{sfn|Robinson|1986|p=509-510}}.


=== Controverses et popularité déclinante (1939-1952) ===
=== Controverses et popularité déclinante (1939-1952) ===
==== ''Le Dictateur'' ====
==== ''Le Dictateur'' ====
[[Fichier:The Great Dictator (1940) poster.jpg|vignette|gauche|Affiche originale du film ''[[Le Dictateur]]'' ({{date-|1940}}).|alt=Affiche montrant Chaplin en tenue de dictateur, les yeux rivés sur un globe terrestre. Paulette Goddard est présent en bas de l'affiche portant un panier sur la tête.]]
{{Article détaillé|Le Dictateur}}
[[Fichier:The Great Dictator still cropped.jpg|thumb|left|alt=Capture d'écran montrant Chaplin en uniforme militaire avec une casquette à côté d'un large globe terrestre|Chaplin parodiant [[Adolf Hitler]] dans ''[[Le Dictateur]]'' (1940)]]
Chaplin fut profondément perturbé par les tensions politiques et la montée des nationalismes en Europe dans les années 1930{{sfn|Robinson|1986|p=485}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=159}} et estima qu'il ne pouvait en faire abstraction dans ses films{{sfn|Chaplin|2003|p=386}}. Les observateurs avaient déjà noté les ressemblances entre [[Adolf Hitler]] et lui : ils étaient nés à quatre jours d'écart, avaient tous deux accédé à la notoriété mondiale malgré leur origine modeste, et le dictateur allemand portait la même moustache que Charlot. Cette ressemblance physique fut à la base du film suivant de Chaplin, ''[[Le Dictateur]]'', qui se moquait directement d'Hitler et du [[fascisme]]{{sfn|Schickel|2006|p=28}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=165, 170}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=271}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=490}}{{,}}{{sfn|Larcher|2011|p=67}}{{,}}{{sfn|Kemp|2011|p=158}}.


Chaplin est profondément perturbé par les tensions politiques et la montée du nationalisme en Europe dans les années {{date-|1930}}{{sfn|Robinson|1986|p=485}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=159}} et estime qu'il ne peut en faire abstraction dans ses films{{sfn|Chaplin|2003|p=386}}. Les observateurs font des rapprochements avec [[Adolf Hitler]] : ils sont nés à quatre jours d'écart, ont tous deux accédé à la notoriété mondiale malgré leur origine modeste, et le dictateur allemand porte [[Moustache en brosse à dents|la même moustache que Charlot]]. Cette ressemblance physique devient la base du film suivant de Chaplin, ''[[Le Dictateur]]'', qui se moque directement d'Hitler et du [[fascisme]]{{sfn|Schickel|2006|p=28}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=165, 170}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=271}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=490}}{{,}}{{sfn|Larcher|2011|p=67}}{{,}}{{sfn|Kemp|2011|p=158}}.
Chaplin consacra deux années à la rédaction du scénario{{sfn|Chaplin|2003|p=388}} et commença le tournage en septembre 1939 alors que la [[Seconde Guerre mondiale]] venait d'éclater{{sfn|Robinson|1986|p=496}}. Chaplin décida de renoncer au film muet, car il estimait que c'était démodé et qu'il serait plus facile de délivrer un message politique avec la parole{{sfn|Maland|1989|p=165}}. Réaliser une comédie sur Hitler était très délicat, mais l'indépendance financière de Chaplin lui permit de prendre le risque{{sfn|Maland|1989|p=164}} : {{citation|J'étais déterminé à le faire car on doit se moquer d'Hitler{{sfn|Chaplin|2003|p=387}}{{,}}{{#tag:ref|Chaplin écrivit par la suite qu'il n'aurait pas fait ce film s'il avait connu l'ampleur des exactions [[Nazisme|nazies]] : {{citation|Si j'avais connu les horreurs des [[camps de concentration nazis]], je n'aurais pas réalisé ''Le Dictateur'' ; je n'aurais pas pu me moquer de la folie meurtrière des nazis{{sfn|Chaplin|2003|p=388}}}}.|group="n"}}}}. Dans le film, Chaplin s'éloigna de son personnage de Charlot, tout en conservant son accoutrement, en jouant un « [[Barbier (métier)|barbier]] [[juifs|juif]] » vivant dans une dictature européenne ressemblant considérablement à la dictature hitlérienne ; Chaplin répondait ainsi aux [[parti national-socialiste des travailleurs allemands|nazis]] qui prétendaient qu'il était juif{{#tag:ref|Dès le début de sa célébrité, des rumeurs avançaient que Chaplin était juif. Aucune preuve en ce sens n'a jamais été apportée et lorsqu'un journaliste lui demanda en 1915 si cela était vrai, il répondit : {{citation|Je n'ai pas cette chance}}{{sfn|Robinson|1986|p=154-155}}.|group="n"}}. Il joua également le dictateur « Adenoïd Hynkel », parodiant Hitler{{sfn|Maland|1989|p=172-173}}.


Chaplin consacre deux années à la rédaction du scénario{{sfn|Chaplin|2003|p=388}} et commence le tournage en {{date-||09|1939}} alors que la [[Seconde Guerre mondiale]] vient d'éclater{{sfn|Robinson|1986|p=496}}. Chaplin décide de renoncer au film muet, qu'il estime démodé et parce qu'il est plus facile de délivrer un message politique avec la parole{{sfn|Maland|1989|p=165}}. Réaliser une comédie sur Hitler est très délicat, mais l'indépendance financière de Chaplin lui permet de prendre le risque{{sfn|Maland|1989|p=164}} : {{citation|J'étais déterminé à le faire, car on doit se moquer d'Hitler{{sfn|Chaplin|2003|p=387}}{{,}}{{#tag:ref|Chaplin écrit par la suite qu'il n'aurait pas fait ce film s'il avait connu l'ampleur des exactions [[Nazisme|nazies]] : {{citation|Si j'avais connu les horreurs des [[camps de concentration nazis]], je n'aurais pas réalisé ''Le Dictateur'' ; je n'aurais pas pu me moquer de la folie meurtrière des nazis{{sfn|Chaplin|2003|p=388}}}}.|group="n"}}}}. Dans le film, Chaplin s'éloigne de son personnage de Charlot, tout en conservant son accoutrement, en jouant un « [[Barbier (métier)|barbier]] [[juifs|juif]] » vivant dans une dictature européenne ressemblant considérablement à la dictature hitlérienne ; Chaplin répond ainsi aux [[parti national-socialiste des travailleurs allemands|nazis]] qui prétendent qu'il est juif{{refn|Dès le début de sa célébrité, des rumeurs avancent que Chaplin est juif. Aucune preuve en ce sens n'a jamais été apportée et lorsqu'un journaliste lui demande en 1915 si c'est vrai, il répond : {{citation|Je n'ai pas cette chance}}{{sfn|Robinson|1986|p=154-155}}.|group="n"}}{{,}}{{refn|Par exemple, en 1927, les frères [[Jérôme Tharaud|Tharaud]] avaient présenté sa judéité comme quelque chose d'admis par tout le monde ; n'avaient-ils pas écrit dans leur ''Petite histoire des Juifs'' : {{citation|Charlie Chaplin est Juif, et tous les traits de son humour portent la marque juive. Rappelez-vous ''La Ruée vers l'or'', ce film si divertissant par lui-même, mais qui devient tout à fait admirable si l'on y voit ce qu'il est à mon sens (que Chaplin l'ait voulu ou non), un grand souvenir du ghetto}}<ref>{{Ouvrage |auteur1=Jérôme Tharaud |auteur2=Jean Tharaud |titre=Petite Histoire Des Juifs |passage=203-204 |éditeur=Saint-Remi |isbn=978-2845196636}}</ref>.|group="n"}}. Charlie Chaplin jouera également le dictateur « Adenoïd Hynkel », parodiant Hitler{{sfn|Maland|1989|p=172-173}}.
''Le Dictateur'' passa une année en [[postproduction]] et fut présenté au public en octobre 1940{{sfn|Robinson|1986|p=505, 507}}. Le film fit l'objet d'une importante campagne publicitaire et un critique du ''[[The New York Times|New York Times]]'' le qualifia de {{citation|film attendu avec le plus d'impatience de l'année}}{{sfn|Maland|1989|p=169, 178-179}}. Il connut un succès populaire considérable, même si le dénouement fut controversé{{sfn|Maland|1989|p=176}}{{,}}{{sfn|Schickel|2006|p=30-31}}. Dans ce final où son personnage de barbier juif a pris la place du dictateur, Chaplin prononce un discours de six minutes face à la caméra, dans lequel il expose ses opinions politiques personnelles{{sfn|Louvish|2010|p=282}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=504}}. Selon l'historien du cinéma Charles J. Maland, à une époque où le cinéma évitait les thèmes politiques controversés, cette prise de liberté a marqué le début du déclin de la popularité de Chaplin : {{citation|Dorénavant, aucun admirateur ne pourra séparer la dimension politique de sa star de cinéma}}{{sfn|Maland|1989|p=178-179}}. ''Le Dictateur'' fut nommé dans cinq catégories lors de la [[13e cérémonie des Oscars|{{13e|cérémonie}} des Oscars]], dont celles du [[Oscar du meilleur film|meilleur film]], du [[Oscar du meilleur acteur|meilleur acteur]] et du [[Oscar du meilleur scénario original|meilleur scénario]], même s'il ne remporta aucune statuette<ref>{{lien web |titre=The Great Dictator |url=http://www.britannica.com/EBchecked/topic/243180/The-Great-Dictator |éditeur=Encyclopaedia Britannica |consulté le=16 mars 2013}}</ref>.

''Le Dictateur'' passe une année en [[postproduction]] et est présenté au public en {{date-||10|1940}}{{sfn|Robinson|1986|p=505, 507}}. Le film est l'objet d'une importante campagne publicitaire et un critique du ''[[The New York Times|New York Times]]'' le qualifie de film le plus attendu de l'année{{sfn|Maland|1989|p=169, 178-179}}. Il connaît un succès populaire considérable, même si le dénouement est controversé{{sfn|Maland|1989|p=176}}{{,}}{{sfn|Schickel|2006|p=30-31}}. Dans ce final où son personnage de barbier juif prend la place du dictateur, Chaplin prononce un discours de six minutes face à la caméra, dans lequel il expose ses opinions politiques personnelles{{sfn|Louvish|2010|p=282}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=504}}. Selon l'historien du cinéma Charles J. Maland, à une époque où le cinéma évite les thèmes politiques controversés, cette prise de liberté a marqué le début du déclin de la popularité de Chaplin : {{citation|Dorénavant, aucun admirateur ne pourra séparer la dimension politique de la star de cinéma}}{{sfn|Maland|1989|p=178-179}}. ''Le Dictateur'' est nommé dans cinq catégories lors de la [[13e cérémonie des Oscars|{{13e|cérémonie}} des Oscars]], dont celles du [[Oscar du meilleur film|meilleur film]], du [[Oscar du meilleur acteur|meilleur acteur]] et du [[Oscar du meilleur scénario original|meilleur scénario]], même s'il ne remporte aucune statuette<ref>{{lien web |langue=en |titre=The Great Dictator |url=http://www.britannica.com/EBchecked/topic/243180/The-Great-Dictator |éditeur=Encyclopaedia Britannica |consulté le=16 mars 2013}}.</ref>.


==== Joan Barry et Oona O'Neill ====
==== Joan Barry et Oona O'Neill ====
[[Fichier:Oona O'Neill - 1943.jpg|vignette|alt=Photographie de Oona O'Neill souriante en robe de soirée assise à une table|[[Oona O'Neill]] en 1943. Elle est la quatrième et dernière épouse de Chaplin, avec qui elle a huit enfants.]]
Dans le milieu des années 1940, Chaplin fut impliqué dans une série de procès qui accaparèrent une grande partie de son temps et affectèrent son image publique{{sfn|Maland|1989|p=197-198}}. Ces derniers étaient liés à sa relation intermittente avec l'aspirante actrice Joan Barry, entre juin 1941 et l'été 1942{{sfn|Maland|1989|p=200}}. Ils se séparèrent après que cette dernière eut fait montre de troubles mentaux, et elle fut arrêtée à deux reprises pour harcèlement après cette rupture{{#tag:ref|En décembre 1942, Barry entra de nuit par effraction dans la résidence de Chaplin avec un pistolet et menaça de se suicider tout en lui pointant son arme dessus. Chaplin parvint à se saisir de son arme au matin mais elle fit à nouveau irruption dans sa maison plus tard dans le mois. Elle fut ensuite arrêtée pour divagation en janvier 1943 alors qu'elle errait droguée aux [[barbiturique]]s dans les rues de [[Beverly Hills]]{{sfn|Maland|1989|p=198-201}}.|group="n"}}. Elle réapparut l'année suivante en annonçant qu'elle était enceinte du réalisateur ; ce dernier nia et Barry entama une procédure en reconnaissance de [[paternité]]{{sfn|Maland|1989|p=198-201}}.
Dans le milieu des années {{date-|1940}}, Chaplin est impliqué dans une série de procès qui accaparent une grande partie de son temps et affectent son image publique{{sfn|Maland|1989|p=197-198}}. Ces derniers sont liés à sa relation intermittente avec l'aspirante actrice Joan Barry, entre {{date-||06|1941}} et l'été {{date-|1942}}{{sfn|Maland|1989|p=200}}. Ils se séparent après que cette dernière montre des troubles mentaux, et elle est arrêtée à deux reprises pour harcèlement après cette rupture{{#tag:ref|En {{date-||12|1942}}, Barry entre de nuit par effraction dans la résidence de Chaplin avec un pistolet et menace de se suicider tout en lui pointant son arme dessus. Chaplin parvient à se saisir de son arme au matin mais elle fait à nouveau irruption dans sa maison plus tard dans le mois. Elle est ensuite arrêtée pour divagation en {{date-||1|1943}} alors qu'elle erre droguée aux [[barbiturique]]s dans les rues de [[Beverly Hills]]{{sfn|Maland|1989|p=198-201}}.|group="n"}}. Elle réapparaît l'année suivante en annonçant être enceinte du réalisateur ; ce dernier nie et Barry entame une procédure en reconnaissance de [[paternité]]{{sfn|Maland|1989|p=198-201}}.


[[J. Edgar Hoover]], le directeur du [[Federal Bureau of Investigation]] (FBI), qui se méfie des tendances politiques de Chaplin, exploite l'opportunité de nuire à sa réputation. Dans le cadre d'une campagne de diffamation{{sfn|Nowell-Smith|1997|p=85}}, le FBI l'[[mise en examen|inculpe]] dans quatre affaires reliées à ce scandale. Chaplin est en particulier accusé d'avoir violé le ''[[Mann Act]]'' qui interdit le transport entre [[États des États-Unis|États]] de femmes à des fins sexuelles{{#tag:ref|Selon le procureur, Chaplin a violé la loi lorsqu'il a payé le voyage de Barry à New York en {{date-||10|1942}} alors qu'il visite également la ville. Les deux reconnaissent s'être rencontrés et Barry affirme qu'ils ont eu des relations sexuelles{{sfn|Maland|1989|p=204-205}}. Chaplin avance cependant qu'ils n'ont plus été intimes après {{date-||05|1942}}{{sfn|Robinson|1986|p=523-524}}.|group="n"}}. L'historien Otto Friedrich a soutenu qu'il s'agissait de « poursuites absurdes » en application d'un « ancien texte{{sfn|Friedrich|1986|p=190, 393}} », mais Chaplin risquait jusqu'à {{unité|23|ans}} de prison{{sfn|Maland|1989|p=215}}. Les preuves pour trois motifs d'accusation se révèlent insuffisantes pour aller jusqu'au procès, mais l'étude de la violation du ''Mann Act'' commence en {{date-||03|1944}}. Chaplin est [[Acquittement (droit)|acquitté]] deux semaines plus tard{{sfn|Maland|1989|p=204-205}}. L'affaire fait fréquemment la une des journaux et le journal ''[[Newsweek]]'' la qualifie de {{citation|plus grand scandale de relations publiques depuis le [[Affaire Roscoe Arbuckle|procès pour meurtre]] de [[Roscoe Arbuckle]] en {{date-|1921}}}}{{sfn|Maland|1989|p=214-215}}.
[[Fichier:Oona O'Neill - 1943.jpg|thumb|alt=Photographie d'une femme souriante en robe de soirée assise à une table|[[Oona O'Neill]] fut la quatrième et dernière épouse de Chaplin, avec qui il eut huit enfants.]]
[[J. Edgar Hoover]], le directeur du {{lang|en|[[Federal Bureau of Investigation]]}} (FBI), qui se méfiait des tendances politiques de Chaplin, exploita l'opportunité de nuire à sa réputation. Dans le cadre d'une campagne de diffamation{{sfn|Nowell-Smith|1997|p=85}}, le FBI l'[[mise en examen|inculpa]] dans quatre affaires reliées à ce scandale. Chaplin était en particulier accusé d'avoir violé le ''[[Mann Act]]'' qui interdisait le transport entre [[États des États-Unis|États]] de femmes à des fins sexuelles{{#tag:ref|Selon le procureur, Chaplin avait violé la loi lorsqu'il avait payé le voyage de Barry à New York en octobre 1942 alors qu'il visitait également la ville. Les deux reconnurent s'être rencontrés et Barry affirma qu'ils avaient eu des relations sexuelles{{sfn|Maland|1989|p=204-205}}. Chaplin avança cependant qu'ils n'avaient plus été intimes après mai 1942{{sfn|Robinson|1986|p=523-524}}.|group="n"}}. L'historien Otto Friedrich a soutenu qu'il s'agissait de « poursuites absurdes » en application d'un « ancien texte{{sfn|Friedrich|1986|p=190, 393}} », mais Chaplin risquait quand même jusqu'à 23 ans de prison{{sfn|Maland|1989|p=215}}. Les preuves pour trois motifs d'accusation se révélèrent insuffisantes pour aller jusqu'au procès, mais l'étude de la violation du ''Mann Act'' commença en mars 1944. Chaplin fut [[Acquittement (droit)|acquitté]] deux semaines plus tard{{sfn|Maland|1989|p=204-205}}. L'affaire fit fréquemment la une des journaux et le journal ''[[Newsweek]]'' la qualifia de {{citation|plus grand scandale de relations publiques depuis le [[Affaire Roscoe Arbuckle|procès pour meurtre]] de [[Roscoe Arbuckle]] en 1921{{sfn|Maland|1989|p=214-215}}}}.


Barry accoucha en octobre 1944 d'une fille, Carole Ann, et le procès en paternité débuta en février 1945. Après deux procès difficiles au cours desquels Chaplin fut accusé de « turpitude morale » par le procureur{{sfn|Louvish|2010|p=xiii}}, il fut déclaré être le père. Le juge refusa d'accepter les preuves médicales, et en particulier la différence de [[groupe sanguin]] qui infirmait cette conclusion, et il dut payer une pension à sa fille jusqu'à ses 21 ans{{sfn|Maland|1989|p=205-206}}. La couverture médiatique du procès fut influencée par le FBI, qui transmettait des informations à l'influente [[Presse people|journaliste à scandales]] [[Hedda Hopper]]{{sfn|Frost|2007|p=74-88}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=207-213}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=508}}{{,}}{{sfn|Friedrich|1986|p=393}}.
Barry accouche en {{date-||10|1944}} d'une fille, Carole Ann, et le procès en paternité débute en {{date-||2|1945}}. Après deux procès difficiles au cours desquels Chaplin est accusé de « turpitude morale » par le procureur{{sfn|Louvish|2010|p=xiii}}, il est déclaré être le père. Le juge refuse d'accepter les preuves médicales, et en particulier la différence de [[groupe sanguin]] qui infirme cette conclusion, et Chaplin est condamné à payer une pension à sa fille jusqu'à ses {{unité|21|ans}}{{sfn|Maland|1989|p=205-206}}. La couverture médiatique du procès est influencée par le FBI, qui transmet des informations à l'influente [[Presse people|journaliste à scandales]] [[Hedda Hopper]]{{sfn|Frost|2007|p=74-88}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=207-213}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=508}}{{,}}{{sfn|Friedrich|1986|p=393}}.


La controverse entourant Chaplin s'accrut encore quand le 16 juin 1943, deux semaines après le début de la procédure de reconnaissance de paternité, il fut annoncé qu'il épousait sa nouvelle jeune [[Mentorat|protégée]] de 18 ans, [[Oona O'Neill]], la fille du [[dramaturge]] américain [[Eugene O'Neill]]{{sfn|Louvish|2010|p=135}}. Chaplin, alors âgé de 54 ans, lui avait été présenté par un agent artistique sept mois plus tôt{{sfn|Chaplin|2003|p=423-444}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=670}}, et dans son autobiographie, il décrivit leur rencontre comme {{citation|l'événement le plus heureux de [sa] vie}} et indiqua qu'il avait découvert le « parfait amour »{{sfn|Chaplin|2003|p=423, 477}}. Ils restèrent mariés jusqu'à sa mort en 1977 et eurent huit enfants : [[Geraldine Chaplin|Geraldine Leigh]] (1944), [[Michael Chaplin|Michael John]] (1946), [[Josephine Chaplin|Josephine Hannah]] (1949), [[Victoria Chaplin Thierrée|Victoria]] (1951), [[Famille Chaplin|Eugene Anthony]] (1953), [[Jane Chaplin|Jane Cecil]] (1957), Annette Emily (1959) et [[Christopher Chaplin|Christopher James]] (1962){{sfn|Robinson|1986|p=671-675}}.
La controverse entourant Chaplin s'accroît encore quand le {{date-|16|6|1943}}, deux semaines après le début de la procédure de reconnaissance de paternité, un nouveau mariage est annoncé avec sa nouvelle jeune [[Mentorat|protégée]] de {{unité|18|ans}}, [[Oona O'Neill]], la fille du [[dramaturge]] américain [[Eugene O'Neill]]{{sfn|Louvish|2010|p=135}}. Chaplin, alors âgé de {{unité|54|ans}}, lui a été présenté par un agent artistique sept mois plus tôt{{sfn|Chaplin|2003|p=423-444}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=670}}, et dans son autobiographie, il décrit leur rencontre comme {{citation|l'événement le plus heureux de [sa] vie}} et indique qu'il avait découvert le « parfait amour »{{sfn|Chaplin|2003|p=423, 477}}. Ils restent mariés jusqu'à sa mort en {{date-|1977}} et ont huit enfants : [[Geraldine Chaplin|Geraldine Leigh]] ({{date-|1944}}), [[Michael Chaplin|Michael John]] ({{date-|1946}}), [[Josephine Chaplin|Josephine Hannah]] ({{date-|1949}}), [[Victoria Chaplin Thierrée|Victoria]] ({{date-|1951}}), [[Eugène Chaplin|Eugene Anthony]] ({{date-|1953}}), [[Jane Chaplin|Jane Cecil]] ({{date-|1957}}), [[Annette Emily Chaplin|Annette Emily]] ({{date-|1959}}) et [[Christopher Chaplin|Christopher James]] ({{date-|1962}}){{sfn|Robinson|1986|p=671-675}}.


==== ''Monsieur Verdoux'' et accusations communistes ====
==== ''Monsieur Verdoux'' et accusations de communisme ====
[[Fichier:Monsieur Verdoux poster.jpg|thumb|left|alt=Affiche de film montrant Chaplin l'air arrogant dans un élégant costume blanc|{{citation|Chaplin change ! Le pouvez-vous ?}} <br />''[[Monsieur Verdoux]]'' (1947) fut le premier film de Chaplin sans Charlot et fut également son premier échec critique et populaire aux États-Unis.]]
[[Fichier:Monsieur Verdoux poster.jpg|thumb|left|redresse|alt=Affiche de film montrant Chaplin l'air arrogant dans un élégant costume blanc|{{citation|Chaplin change ! Le pouvez-vous ?}} <br />Affiche de ''[[Monsieur Verdoux]]'' ({{date-|1947}}).]]
Chaplin avança que ces procès avaient {{citation|démoli [sa] créativité{{sfn|Chaplin|2003|p=426}}}} et en avril 1946, il commença le tournage d'un film sur lequel il travaillait depuis 1942{{sfn|Robinson|1986|p=520}}. ''[[Monsieur Verdoux]]'' était une [[Humour noir|comédie noire]] sur un employé de banque français, {{M.}} Verdoux joué par Chaplin, réduit au chômage et qui commence à épouser et à assassiner de riches veuves pour subvenir aux besoins de sa famille. L'idée lui avait été fournie par [[Orson Welles]], qui voulait qu'il joue dans un film sur le [[tueur en série]] français [[Henri Désiré Landru]]. Chaplin estima que ce concept {{citation|ferait une superbe comédie{{sfn|Chaplin|2003|p=412}}}} et acheta le scénario à Welles pour {{unité|5000|$}} (environ {{unité|130000|$}} de 2012{{#tag:ref||group="n"|name="measuringworth"}}){{sfn|Robinson|1986|p=519-520}}.
Chaplin avance que ces procès ont démoli sa créativité{{sfn|Chaplin|2003|p=426}} et en {{date-|avril 1946}}, il commence le tournage d'un film sur lequel il travaille depuis {{date-|1942}}{{sfn|Robinson|1986|p=520}}. ''[[Monsieur Verdoux]]'' est une [[Humour noir|comédie noire]] sur un employé de banque français, {{M.|Verdoux}} joué par Chaplin, réduit au chômage et qui commence à épouser et assassiner de riches veuves pour subvenir aux besoins de sa famille. L'idée lui est fournie par [[Orson Welles]], qui voulait qu'il joue dans un film sur le [[tueur en série]] français [[Henri Désiré Landru]]. Chaplin estime que ce concept {{citation|ferait une superbe comédie}}{{sfn|Chaplin|2003|p=412}} et achète le scénario à Welles pour {{unité|5000|dollars}} (environ {{unité|{{Inflation|US|5000|1946|r=0}}|dollars}} de {{CURRENTYEAR}}{{Inflation-info|US|name=infl|}}){{sfn|Robinson|1986|p=519-520}}.


Chaplin exprima à nouveau ses idées politiques dans ''Monsieur Verdoux'' en critiquant le capitalisme{{sfn|Louvish|2010|p=304}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=501}} et le film fut très controversé à sa sortie, en avril 1947{{sfn|Louvish|2010|p=296-297}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=538-543}}{{,}}{{sfn|Larcher|2011|p=77}}. Il fut hué lors de la première et certains demandèrent son interdiction{{sfn|Louvish|2010|p=296-297}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=503}}. Il s'agissait du premier film où son personnage n'avait aucun rapport avec Charlot et il fut également le premier à être un échec critique et commercial aux États-Unis{{sfn|Maland|1989|p=235-245, 250}}. Il fut mieux accueilli à l'étranger et fut nommé pour le meilleur scénario lors de la [[20e cérémonie des Oscars|{{20e|cérémonie}} des Oscars]]{{sfn|Louvish|2010|p=297}}. Chaplin était néanmoins fier de son œuvre et écrivit dans son autobiographie : {{citation|''Monsieur Verdoux'' est le plus intelligent et plus brillant des films que j'ai réalisés{{sfn|Chaplin|2003|p=444}}}}.
Chaplin exprime à nouveau ses idées politiques dans ''Monsieur Verdoux'' en critiquant le capitalisme{{sfn|Louvish|2010|p=304}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=501}} et le film est très controversé à sa sortie, en {{date-|avril 1947}}{{sfn|Louvish|2010|p=296-297}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=538-543}}{{,}}{{sfn|Larcher|2011|p=77}}. Il est hué lors de la première et certains demandent son interdiction{{sfn|Louvish|2010|p=296-297}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=503}}. Il s'agit du premier film où son personnage n'a aucun rapport avec Charlot ; il est également le premier à être un échec critique et commercial aux États-Unis{{sfn|Maland|1989|p=235-245, 250}}, il est mieux accueilli à l'étranger. Il est cité pour le meilleur scénario lors de la [[20e cérémonie des Oscars|{{20e|cérémonie}} des Oscars]]{{sfn|Louvish|2010|p=297}}. Chaplin est néanmoins fier de son œuvre et écrit dans son autobiographie : {{citation|''Monsieur Verdoux'' est le plus intelligent et le plus brillant des films que j'ai réalisés}}{{sfn|Chaplin|2003|p=444}}.


L'accueil négatif de ''Monsieur Verdoux'' était largement le résultat de l'évolution de l'image publique de Chaplin{{sfn|Maland|1989|p=251}}. En plus du scandale de l'affaire Joan Barry, il fut publiquement accusé d'être [[communiste]]{{sfn|Robinson|1986|p=538-539}}{{,}}{{sfn|Friedrich|1986|p=287}}. Ses actions politiques s'étaient intensifiées durant la Seconde Guerre mondiale et il avait fait campagne pour l'ouverture d'un [[Front de l'Ouest (Seconde Guerre mondiale)|second front]] pour [[Front de l'Est (Seconde Guerre mondiale)|soulager]] les [[Soviétique]]s{{sfn|Maland|1989|p=253}}. Il s'était rapproché de sympathisants communistes connus comme [[Hanns Eisler]] et [[Bertolt Brecht]] et il participa à des réceptions organisées par des diplomates soviétiques à Los Angeles{{sfn|Maland|1989|p=221-226, 253-254}}. Dans le contexte politique de « [[Peur rouge]] » qui prévalait à l'époque aux États-Unis, de telles activités faisaient que Chaplin était, selon Larcher, considéré comme {{citation|dangereusement [[progressisme|progressiste]] et amoral{{sfn|Larcher|2011|p=75}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=506}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=xiii}}}}. Le FBI était déterminé à lui faire quitter le pays{{sfn|Sbardellati|2012|p=152}} et il lança une enquête officielle à son encontre en 1947{{sfn|Maland|1989|p=265-266}}{{,}}{{#tag:ref|Le FBI s'était intéressé à Chaplin bien avant les années 1940 et la première mention de son nom dans ses documents date de 1922. J. Edgar Hoover demanda qu'un dossier spécial soit créé en septembre 1946 mais le bureau de Los Angeles ne commença ses enquêtes qu'au printemps suivant{{sfn|Maland|1989|p=265-266}}. Le FBI reçut également l'aide du MI5 britannique en particulier pour enquêter sur les allégations avançant qu'il serait né en Europe de l'Est. Le MI5 ne trouva aucune preuve de son implication dans le parti communiste<ref>{{lien web |url=http://www.guardian.co.uk/uk/2012/feb/17/mi5-spied-on-charlie-chaplin |titre=MI5 spied on Charlie Chaplin after the FBI asked for help to banish him from US |périodique=The Guardian |lieu=Londres |prénom1=Richard |nom1=Norton-Taylor |jour=17 |mois=février |année=2012|consulté le=17 }}</ref>.|group="n"}}.
L'accueil négatif de ''Monsieur Verdoux'' est largement le résultat de l'évolution de l'image publique de Chaplin{{sfn|Maland|1989|p=251}}. Outre le scandale de l'affaire Joan Barry, il est publiquement accusé d'être [[Communisme|communiste]]{{sfn|Robinson|1986|p=538-539}}{{,}}{{sfn|Friedrich|1986|p=287}}. Ses actions politiques se sont intensifiées durant la Seconde Guerre mondiale et il a fait campagne pour l'ouverture d'un [[Front de l'Ouest (Seconde Guerre mondiale)|second front]] afin de [[Front de l'Est (Seconde Guerre mondiale)|soulager]] les [[Union des républiques socialistes soviétiques|Soviétiques]]{{sfn|Maland|1989|p=253}}. Il se rapproche de sympathisants communistes connus comme [[Hanns Eisler]] et [[Bertolt Brecht]] et participe à des réceptions organisées par des diplomates soviétiques à Los Angeles{{sfn|Maland|1989|p=221-226, 253-254}}. Dans le contexte politique de « [[peur rouge]] » qui prévaut à l'époque aux États-Unis, de telles activités font que Chaplin est, selon Larcher, considéré comme {{citation|dangereusement [[progressisme|progressiste]] et amoral}}{{sfn|Larcher|2011|p=75}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=506}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=xiii}}. Le FBI, déterminé à lui faire quitter le pays{{sfn|Sbardellati|2012|p=152}}, lance une enquête officielle à son encontre en {{date-|1947}}{{sfn|Maland|1989|p=265-266}}{{,}}{{#tag:ref|Le FBI s'est intéressé à Chaplin bien avant les années {{date-|1940}} et la première mention de son nom dans ses documents date de {{date-|1922}}. J. Edgar Hoover demande la création d'un dossier spécial en {{date-|septembre 1946}} mais le bureau de Los Angeles ne commence ses enquêtes qu'au printemps suivant{{sfn|Maland|1989|p=265-266}}. Le FBI reçoit également l'aide du MI5 britannique en particulier pour enquêter sur les allégations avançant qu'il est en fait né en Europe de l'Est. Le MI5 ne trouve aucune preuve de son implication dans le parti communiste<ref>{{lien web |langue=en |url=http://www.guardian.co.uk/uk/2012/feb/17/mi5-spied-on-charlie-chaplin |titre=MI5 spied on Charlie Chaplin after the FBI asked for help to banish him from US |site=[[The Guardian]] |lieu=Londres |auteur1=Richard Norton-Taylor |date=17 février 2012|consulté le=14 mai 2020 }}.</ref>.|group="n"}}.


Chaplin nia être un communiste et se présenta comme un pacifiste{{sfn|Louvish|2010|p=xiv}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=458}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=310}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=238}} qui estimait que les actions du gouvernement américain pour réprimer une idéologie étaient une violation inacceptable des [[libertés publiques]]{{sfn|Robinson|1986|p=544}}. Refusant de se taire sur cette question, il protesta ouvertement contre les procès des membres du [[Parti communiste USA|parti communiste américain]] devant le ''{{lang|en|[[House Un-American Activities Committee]]}}'' (HUAC) et fut [[Subpoena|convoqué]] par ce dernier{{sfn|Maland|1989|p=255-256}}{{,}}{{sfn|Friedrich|1986|p=286}}. Alors que ses actions étaient largement relayées dans la presse et que la [[guerre froide]] gagnait en intensité, sa non-acquisition de la [[Nationalité américaine|citoyenneté américaine]] fut critiquée et certains demandèrent son expulsion{{sfn|Larcher|2011|p=80}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=510}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=xiii}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=545}}. Le [[Chambre des représentants des États-Unis|représentant]] du [[Mississippi (État)|Mississippi]] {{Lien|lang=en|fr=John E. Rankin}} déclara devant le [[Congrès des États-Unis|Congrès]] en juin 1947 : {{citation|Sa vie à Hollywood est nuisible au tissu moral des États-Unis. [S'il est expulsé], ses films répugnants pourront être gardés à l'écart des yeux de la jeunesse américaine. Nous devons l'expulser et nous en débarrasser une bonne fois pour toutes{{sfn|Robinson|1986|p=545}}.}}
Chaplin nie être communiste et se présente comme un pacifiste{{sfn|Louvish|2010|p=xiv}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=458}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=310}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=238}} qui estime que les actions du gouvernement américain pour réprimer une idéologie sont une violation inacceptable des [[libertés publiques]]{{sfn|Robinson|1986|p=544}}. Refusant de se taire sur cette question, il proteste ouvertement contre les procès des membres du [[Parti communiste des États-Unis d'Amérique|parti communiste américain]] devant le ''{{langue|en|[[House Un-American Activities Committee]]}}'' (HUAC) et est [[Subpoena|convoqué]] par ce dernier{{sfn|Maland|1989|p=255-256}}{{,}}{{sfn|Friedrich|1986|p=286}}. Alors que ses actions sont largement relayées dans la presse et que la [[guerre froide]] gagne en intensité, sa non-acquisition de la [[Nationalité américaine|citoyenneté américaine]] est critiquée et certains demandent son expulsion{{sfn|Larcher|2011|p=80}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=510}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=xiii}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=545}}. Le [[Chambre des représentants des États-Unis|représentant]] du [[Mississippi (État)|Mississippi]] {{Lien|lang=en|fr=John E. Rankin}} déclare devant le [[Congrès des États-Unis|Congrès]] en {{date-|juin 1947}} : {{citation|Sa vie à Hollywood est nuisible au tissu moral des États-Unis. [S'il est expulsé], ses films répugnants pourront être gardés à l'écart des yeux de la jeunesse américaine. Nous devons l'expulser et nous en débarrasser une fois pour toutes{{sfn|Robinson|1986|p=545}}.}}


==== ''Les Feux de la rampe'' et expulsion des États-Unis ====
==== ''Les Feux de la rampe'' et expulsion des États-Unis ====
[[Fichier:Limelight promo crop.jpg|thumb|alt=Capture d'écran montrant Chaplin l'air fatigué en pyjama blanc rayé assis dans son lit. Des photographies d'un personnage ressemblant à Charlot sont accrochées sur le mur derrière lui.|Dans ''[[Les Feux de la rampe]]'' (1952), Chaplin joue le rôle d'une ancienne star de music-hall devant faire face à sa perte de popularité.]]
[[Fichier:Limelight promo crop.jpg|thumb|alt=Capture d'écran montrant Chaplin l'air fatigué en pyjama blanc rayé assis dans son lit. Des photographies d'un personnage ressemblant à Charlot sont accrochées sur le mur derrière lui.|Dans ''[[Les Feux de la rampe]]'' ({{date-|1952}}), Chaplin joue le rôle d'une ancienne star de music-hall devant faire face à sa perte de popularité.]]
Même si Chaplin resta politiquement actif dans les années qui suivirent l'échec de ''Monsieur Verdoux''{{#tag:ref|En novembre 1947, Chaplin avait demandé à [[Pablo Picasso]] d'organiser une manifestation devant l'ambassade américaine à Paris pour protester contre l'expulsion d'Hanns Eisler et en décembre, il signa une pétition pour l'abandon de la procédure. En 1948, il soutint la campagne malheureuse du candidat [[Parti progressiste (États-Unis)#Parti progressiste de 1948|progressiste]] [[Henry Wallace]] ; l'année suivante, il défendit l'organisation de deux conférences pacifistes et protesta contre les émeutes anti-communistes de [[Peekskill]]{{sfn|Maland|1989|p=256-257}}.|group="n"}}, son film suivant sur un comédien de vaudeville oublié et une jeune [[Ballet|ballerine]] dans le Londres de l'[[époque édouardienne]] était dépourvu de toute signification politique. ''[[Les Feux de la rampe]]'' était largement autobiographique et faisait référence à l'enfance de Chaplin, à la vie de ses parents et à sa perte de popularité aux États-Unis{{sfn|Maland|1989|p=288-290}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=551-552}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=312}}. Parmi les acteurs figuraient plusieurs membres de sa famille, dont ses enfants les plus âgés et son demi-frère, Wheeler Dryden{{sfn|Maland|1989|p=293}}.
Même si Chaplin reste politiquement actif dans les années qui suivent l'échec de ''Monsieur Verdoux''{{#tag:ref|En {{date-||11|1947}}, Chaplin demande à [[Pablo Picasso]] d'organiser une manifestation devant l'ambassade américaine à Paris pour protester contre l'expulsion d'Hanns Eisler et en décembre, il signe une pétition pour l'abandon de la procédure. En {{date-|1948}}, il soutient la campagne malheureuse du candidat [[Parti progressiste (États-Unis, 1948)|progressiste]] [[Henry Wallace]] ; l'année suivante, il défend l'organisation de deux conférences pacifistes et proteste contre les [[émeutes de Peekskill]]{{sfn|Maland|1989|p=256-257}}.|group="n"}}, son film suivant sur un comédien de [[vaudeville]] oublié et une jeune [[Ballet|ballerine]] dans le [[Londres]] de l'[[époque édouardienne]] est dépourvu de toute signification politique. ''[[Les Feux de la rampe]]'' est largement autobiographique et fait référence à l'enfance de Chaplin, à la vie de ses parents et à sa perte de popularité aux États-Unis{{sfn|Maland|1989|p=288-290}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=551-552}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=312}}. Parmi les acteurs figurent plusieurs membres de sa famille, dont ses enfants les plus âgés et son demi-frère, Wheeler Dryden{{sfn|Maland|1989|p=293}}.


Après trois ans de préparation, le tournage commença en novembre 1951{{sfn|Louvish|2010|p=317}}. Il adopta un ton bien plus sérieux que dans ses précédents films et parlait régulièrement de « mélancolie » en expliquant le scénario à sa partenaire [[Claire Bloom]]{{sfn|Robinson|1986|p=562}}. Le film est également notable pour la présence de [[Buster Keaton]], qui fut la seule occasion les deux géniaux artistes travaillèrent ensemble{{sfn|Robinson|1986|p=567-568}}.
Après trois ans de préparation, le tournage commence en {{date-||11|1951}}{{sfn|Louvish|2010|p=317}}. Il adopte un ton bien plus sérieux que dans ses précédents films et parle régulièrement de « mélancolie » en expliquant le scénario à sa partenaire [[Claire Bloom]]{{sfn|Robinson|1986|p=562}}. Le film est également notable pour la présence de [[Buster Keaton]] {{incise|dont c'est l'unique collaboration avec Chaplin{{sfn|Robinson|1986|p=567-568}}|fin}}.


Chaplin décida d'organiser la première mondiale des ''Feux de la rampe'' à Londres, vu que le film s'y déroulait{{sfn|Louvish|2010|p=326}}. Quittant Los Angeles, il indiqua qu'il s'attendait à ne jamais pouvoir revenir, chassé par l'Amérique [[maccarthysme|maccarthyste]]{{sfn|Robinson|1986|p=570}}. À New York, il embarqua avec sa famille à bord du [[paquebot transatlantique]] [[RMS Queen Elizabeth|RMS ''Queen Elizabeth'']] le 18 septembre 1952{{sfn|Maland|1989|p=280}}. Le lendemain, le [[procureur général des États-Unis]], [[James McGranery]], révoqua le [[Visa (document)|visa]] de Chaplin et déclara qu'il devrait se soumettre à un entretien sur ses opinions politiques et sa moralité pour pouvoir revenir aux États-Unis{{sfn|Maland|1989|p=280}}. Même si McGranery indiqua à la presse qu'il avait {{citation|un dossier assez solide contre Chaplin}}, Maland conclut, en s'appuyant sur les documents du FBI rendus publics dans les années 1980, que le gouvernement américain n'avait pas réellement de preuves suffisantes pour empêcher le retour de Chaplin ; il est même probable qu'il aurait obtenu un visa s'il en avait fait la demande{{sfn|Maland|1989|p=280-287}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=520-521}}. Cependant, quand il reçut un [[câblogramme]] l'informant de cette décision, Chaplin décida de rompre tous ses liens avec les États-Unis :
Chaplin décide d'organiser la première mondiale des ''Feux de la rampe'' à Londres, se déroule l'action du film{{sfn|Louvish|2010|p=326}}. Quittant Los Angeles, il indique qu'il s'attend à ne jamais pouvoir revenir, chassé par l'Amérique [[maccarthysme|maccarthyste]]{{sfn|Robinson|1986|p=570}}. À New York, il embarque avec sa famille à bord du [[paquebot transatlantique]] [[RMS Queen Elizabeth|HMS ''Queen Elizabeth'']] le {{date-|18|09|1952}}{{sfn|Maland|1989|p=280}}. Le lendemain, le [[procureur général des États-Unis]], [[James McGranery]], révoque le [[Visa (document)|visa]] de Chaplin et déclare qu'il doit se soumettre à un entretien sur ses opinions politiques et sa moralité pour pouvoir revenir aux États-Unis{{sfn|Maland|1989|p=280}}. Même si McGranery indique à la presse qu'il a {{citation|un dossier assez solide contre Chaplin}}, Maland conclut, en s'appuyant sur les documents du FBI rendus publics dans les années {{date-|1980}}, que le gouvernement américain n'a pas réellement de preuves suffisantes pour empêcher le retour de Chaplin ; il est même probable qu'il aurait obtenu un visa s'il en avait fait la demande{{sfn|Maland|1989|p=280-287}}{{,}}{{sfn|Sbardellati|Shaw|2003|p=520-521}}. Cependant, quand il reçoit un [[câblogramme]] l'informant de cette décision, Chaplin décide de rompre tous ses liens avec les États-Unis :


{{citation bloc|Que je revienne ou non dans ce triste pays avait peu d'importance pour moi. J'aurais voulu leur dire que plus tôt je serais débarrassé de cette atmosphère haineuse, mieux je serais, que j'étais fatigué des insultes et de l'arrogance morale de l'Amérique{{sfn|Chaplin|2003|p=455}}.}}
{{citation bloc|Que je revienne ou non dans ce triste pays avait peu d'importance pour moi. J'aurais voulu leur dire que plus tôt je serais débarrassé de cette atmosphère haineuse, mieux je serais, que j'étais fatigué des insultes et de l'arrogance morale de l'Amérique{{sfn|Chaplin|2003|p=455}}.}}


Comme tous ses biens étaient aux États-Unis, Chaplin ne fit aucun commentaire négatif dans la presse{{sfn|Robinson|1986|p=573}}, mais l'affaire fit sensation{{sfn|Louvish|2010|p=330}}. Si Chaplin et son film furent bien accueillis en Europe{{sfn|Maland|1989|p=280}}, ''Les Feux de la rampe'' fut largement [[boycott]]é aux États-Unis malgré des critiques positives{{sfn|Maland|1989|p=295-298, 307-311}}. Maland écrivit que la chute de Chaplin d'un niveau de popularité inégalé {{citation|est peut-être la plus spectaculaire de toute l'histoire de la célébrité aux États-Unis{{sfn|Maland|1989|p=189}}}}.
Comme tous ses biens sont aux États-Unis, Chaplin ne fait aucun commentaire négatif dans la presse{{sfn|Robinson|1986|p=573}}, mais l'affaire fait sensation{{sfn|Louvish|2010|p=330}}. Si Chaplin et son film sont bien accueillis en Europe{{sfn|Maland|1989|p=280}}, ''Les Feux de la rampe'' sont largement [[boycott]]és aux États-Unis malgré des critiques positives{{sfn|Maland|1989|p=295-298, 307-311}}. Maland écrit que la chute de Chaplin d'un niveau de popularité inégalé {{citation|est peut-être la plus spectaculaire de toute l'histoire de la célébrité aux États-Unis}}{{sfn|Maland|1989|p=189}}.


=== Années européennes (1953-1977) ===
=== Années européennes (1953-1977) ===
==== Suisse et ''Un roi à New York'' ====
==== Suisse et ''Un roi à New York'' ====
{{encadré texte |align=left |width=30% |palign=justify |texte=J'ai fait l'objet de calomnies et d'une propagande orchestrée par de puissants groupes [[Réaction (politique)|réactionnaires]] qui, par leur influence et l'aide de la [[presse jaune]] américaine, ont créé une atmosphère malsaine dans laquelle les individus aux tendances libérales peuvent être persécutés. Dans ces conditions, j'ai trouvé qu'il était virtuellement impossible de continuer mon travail de réalisation cinématographique et j'ai par conséquent abandonné mon séjour aux États-Unis{{sfn|Larcher|2011|p=89}}.|légende=[[Communiqué de presse]] de Chaplin sur sa décision de ne pas revenir aux États-Unis.}}
{{encadré texte |width=29% |palign=justify |texte={{citation|J'ai fait l'objet de calomnies et d'une propagande orchestrée par de puissants groupes [[Réaction (politique)|réactionnaires]] qui, par leur influence et l'aide de la [[Journalisme jaune|presse jaune]] américaine, ont créé une atmosphère malsaine dans laquelle les individus aux tendances libérales peuvent être persécutés. Dans ces conditions, j'ai trouvé qu'il était virtuellement impossible de continuer mon travail de réalisation cinématographique et j'ai par conséquent abandonné mon séjour aux États-Unis}}{{sfn|Larcher|2011|p=89}}.|légende=[[Communiqué de presse]] de Chaplin sur sa décision de ne pas revenir aux États-Unis.}}
[[Fichier:ManoirdeBan.jpg|thumb|alt=Photographie d'une résidence bourgeoise à deux étages. Une large pelouse tondue se trouve devant et le haut de la photographie est masquée par des fleurs de merisier.|Le [[manoir de Ban]] où les Chaplin s'installent en {{date-|1953}}.]]
Chaplin ne tenta pas de revenir aux États-Unis après la révocation de son visa d'entrée et envoya sa femme à Los Angeles pour régler ses affaires{{sfn|Robinson|1986|p=580}}. Le couple se décida pour la [[Suisse]] et la famille s'installa en janvier 1953 au [[manoir de Ban]], une propriété de {{unité|15|hectares}} surplombant le [[lac Léman]] dans la [[Communes de Suisse|commune]] de [[Corsier-sur-Vevey]]{{sfn|Robinson|1986|p=580-581}}. Chaplin mit en vente sa résidence et son studio de Beverly Hills en mars et rendit son visa en avril. L'année suivante, sa femme renonça à sa nationalité américaine pour devenir [[Droit de la nationalité et de la citoyenneté britannique|Britannique]]{{sfn|Robinson|1986|p=584, 674}}. Il abandonna ses derniers liens professionnels avec les États-Unis en 1955 quand il vendit ses parts dans la [[United Artists]], qui était du reste en difficultés financières depuis le début des années 1940{{sfn|Lynn|1997|p=466-467}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=584}}{{,}}{{sfn|Balio|1979|p=17-21}}.
Chaplin ne tente pas de revenir aux États-Unis après la révocation de son visa d'entrée et envoie sa femme à [[Los Angeles]] pour régler ses affaires{{sfn|Robinson|1986|p=580}}. Le couple se décide pour la [[Suisse]] et la famille s'installe en {{date-||01|1953}} au [[manoir de Ban]], une propriété de {{unité|15|hectares}} surplombant le [[Léman|lac Léman]] dans la [[Commune (Suisse)|commune]] de [[Corsier-sur-Vevey]]{{sfn|Robinson|1986|p=580-581}}. Chaplin met en vente sa résidence et son studio de Beverly Hills en mars et rend son visa en avril. L'année suivante, sa femme renonce à sa nationalité américaine pour devenir [[Droit de la nationalité et de la citoyenneté britannique|Britannique]]{{sfn|Robinson|1986|p=584, 674}}. Il abandonne ses derniers liens professionnels avec les États-Unis en {{date-|1955}} quand il vend ses parts dans la [[United Artists]], qui est en difficultés financières depuis le début des années {{date-|1940}}{{sfn|Lynn|1997|p=466-467}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=584}}{{,}}{{sfn|Balio|1979|p=17-21}}.


Chaplin resta une figure controversée tout au long des années 1950, en particulier après qu'il eut reçu le [[prix international de la paix]] décerné par le [[Conseil mondial de la paix]], d'obédience communiste, et ses rencontres avec le Chinois [[Zhou Enlai]] et le Soviétique [[Nikita Khrouchtchev]]{{sfn|Maland|1989|p=318}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=584}}. Il commença à développer son premier film européen, ''[[Un roi à New York]]'', en 1954{{sfn|Robinson|1986|p=585}}. Jouant le rôle d'un roi exilé cherchant asile aux États-Unis, Chaplin exploita ses problèmes récents pour écrire le scénario. Son fils, Michael, est présenté comme un garçon dont les parents sont visés par le FBI, tandis que le personnage de Chaplin est accusé d'être un communiste{{sfn|Louvish|2010|p=xiv-xv}}. Cette satire politique parodiait les actions de l'HUAC ainsi que le [[consumérisme]] de la société américaine des années 1950{{sfn|Louvish|2010|p=341}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=320-321}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=588-589}}{{,}}{{sfn|Larcher|2011|p=89-90}}. Dans sa critique, le dramaturge [[John Osborne]] le qualifia de film le {{citation|plus acide… et de plus ouvertement personnel}} de Chaplin{{sfn|Robinson|1986|p=587-589}}.
Chaplin reste une figure controversée tout au long des années {{date-|1950}}, en particulier après avoir reçu le [[prix international de la paix]] décerné par le [[Conseil mondial de la paix]], d'obédience communiste, et en raison de ses rencontres avec le Chinois [[Zhou Enlai]] et le Soviétique [[Nikita Khrouchtchev]]{{sfn|Maland|1989|p=318}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=584}}. Il commence à développer son premier film européen, ''[[Un roi à New York]]'', en {{date-|1954}}{{sfn|Robinson|1986|p=585}}. Jouant le rôle d'un roi exilé cherchant asile aux États-Unis, Chaplin exploite ses problèmes récents pour écrire le scénario. Son fils, Michael, est présenté comme un garçon dont les parents sont visés par le FBI, tandis que le personnage de Chaplin est accusé d'être un communiste{{sfn|Louvish|2010|p=xiv-xv}}. Cette satire politique parodie les actions de l'[[House Un-American Activities Committee|HUAC]] ainsi que le [[consumérisme]] de la société américaine des années {{date-|1950}}{{sfn|Louvish|2010|p=341}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=320-321}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=588-589}}{{,}}{{sfn|Larcher|2011|p=89-90}}. Dans sa critique, le dramaturge [[John Osborne]] le qualifie comme film le {{citation|plus acide… et de plus ouvertement personnel}} de Chaplin{{sfn|Robinson|1986|p=587-589}}.


Chaplin fonde une nouvelle société de production appelée Attica et tourne dans les [[studios de Shepperton]], dans la banlieue de Londres{{sfn|Robinson|1986|p=585}}. Ce tournage est difficile car il est habitué à son studio et à ses équipes hollywoodiennes, et ne dispose plus d'une durée de production illimitée. Cela a un impact sur la qualité du film{{sfn|Epstein|1988|p=137}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=587}}, qui reçoit des critiques mitigées à sa sortie en {{date-||09|1957}}{{sfn|Lynn|1997|p=506}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=342}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=322}}. Chaplin empêche les journalistes américains d'assister à la première à Paris et décide de ne pas diffuser le film aux États-Unis. Cela nuit fortement à son succès commercial, même si le film obtient un succès d'estime en Europe{{sfn|Robinson|1986|p=591}}. ''Un roi à New York'' n'est présenté aux États-Unis qu'en {{date-|1973}}{{sfn|Louvish|2010|p=347}}.
[[Fichier:ManoirdeBan.jpg|thumb|alt=Photographie d'une résidence bourgeoise à deux étages. Une large pelouse tondue se trouve devant et le haut de la photographie est masquée par des fleurs de merisier.|Le [[manoir de Ban]] où les Chaplin s'installèrent en 1953.]]
Chaplin fonda une nouvelle société de production appelée Attica et tourna dans les [[studios de Shepperton]], dans la banlieue de Londres{{sfn|Robinson|1986|p=585}}. Ce tournage fut difficile car il était habitué à son studio et à ses équipes hollywoodiennes, et ne disposait plus d'une durée de production illimitée. Selon Robinson, cela eut un impact sur la qualité du film{{sfn|Epstein|1988|p=137}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=587}}, qui reçut des critiques mitigées à sa sortie en septembre 1957{{sfn|Lynn|1997|p=506}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=342}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=322}}. Chaplin empêcha les journalistes américains d'assister à la première à Paris et décida de ne pas diffuser le film aux États-Unis. Cela handicapa fortement son impact commercial, même s'il connut un succès modeste en Europe{{sfn|Robinson|1986|p=591}}. ''Un roi à New York'' ne fut présenté aux États-Unis qu'en 1973{{sfn|Louvish|2010|p=347}}.


==== Dernières années et regain d'intérêt ====
==== Dernières années et regain d'intérêt ====
À partir du milieu des années {{date-|1950}}, Chaplin se concentre sur la resonorisation et la réédition de ses anciens films, ainsi que sur la protection de ses droits d'auteur{{sfn|Maland|1989|p=326}}. La première de ces rééditions est ''La Revue de Charlot'' ({{date-|1959}}), comprenant de nouvelles versions d{{'}}''Une vie de chien'', de ''Charlot soldat'' et du ''[[Le Pèlerin (film)|Pèlerin]]''{{sfn|Robinson|1986|p=594-595}}.
[[Fichier:Charlie Chaplin and Oona ONeill 1965.jpg|thumb|left|alt=Photographie de Chaplin âgé et de son épouse au pied d'un avion|Chaplin, avec son épouse Oona, en 1965.]]
À partir du milieu des années 1950, Chaplin se concentra sur la resonorisation et la réédition de ses anciens films, ainsi que sur la protection de ses droits d'auteur{{sfn|Maland|1989|p=326}}. La première de ces rééditions fut ''La Revue de Charlot'' (1959), comprenant de nouvelles versions d{{'}}''Une vie de chien'', de ''Charlot soldat'' et du ''[[Le Pèlerin (film)|Pèlerin]]''{{sfn|Robinson|1986|p=594-595}}.


[[Fichier:Charlie Chaplin and Oona ONeill 1965.jpg|vignette|gauche|alt=Photographie de Chaplin âgé et de son épouse au pied d'un avion|Chaplin, avec son épouse Oona, en {{date-|1965}}.]]
Aux États-Unis, l'atmosphère politique commença à évoluer et l'attention du public se tourna à nouveau vers les films de Chaplin et non plus vers ses opinions{{sfn|Maland|1989|p=326}}. En juillet 1962, le ''New York Times'' publia un [[éditorial]] indiquant que {{citation|nous ne pensons pas que la République serait en danger si l'inoublié petit Charlot d'hier était autorisé à se promener sur la passerelle d'un navire ou d'un avion dans un port américain{{sfn|Lynn|1997|p=507-508}}}}. Le même mois, Chaplin reçut un [[Docteur honoris causa|doctorat honorifique]] en [[Doctorat ès lettres|Lettres]] des universités d'[[Université d'Oxford|Oxford]] et de [[Université de Durham|Durham]]{{sfn|Robinson|1986|p=598-599}}. En novembre 1963, le Plaza Theater de New York commença une rétrospective des films de Chaplin, dont ''Monsieur Verdoux'' et ''Les Feux de la rampe'' pour lesquels les critiques furent bien plus positives que dix ans plus tôt{{sfn|Lynn|1997|p=509}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=330}}. Septembre 1964 vit la publication de ses [[mémoires]], ''[[Histoire de ma vie (Chaplin)|Histoire de ma vie]]'', sur lesquels il travaillait depuis 1957{{sfn|Robinson|1986|p=602-605}}. Le livre de 500 pages mettant l'accent sur ses premières années et sa vie privée connut un succès mondial, même si les critiques pointèrent le manque d'informations sur sa carrière cinématographique{{sfn|Robinson|1986|p=605-607}}{{,}}{{sfn|Lynn|1997|p=510-512}}.


Aux États-Unis, l'atmosphère politique commence à évoluer et l'attention du public se tourne à nouveau vers les films de Chaplin et non plus vers ses opinions{{sfn|Maland|1989|p=326}}. En {{date-||07|1962}}, le ''New York Times'' publie un [[éditorial]] indiquant que {{citation|nous ne pensons pas que la République serait en danger si l'inoublié petit Charlot d'hier était autorisé à se promener sur la passerelle d'un navire ou d'un avion dans un port américain}}{{sfn|Lynn|1997|p=507-508}}. Le même mois, Chaplin reçoit un [[Doctorat honoris causa|doctorat honorifique]] en [[Doctorat ès lettres|Lettres]] des universités d'[[Université d'Oxford|Oxford]] et de [[Université de Durham|Durham]]{{sfn|Robinson|1986|p=598-599}}. En {{date-||11|1963}}, le Plaza Theater de New York commence une rétrospective des films de Chaplin, dont ''Monsieur Verdoux'' et ''Les Feux de la rampe'' pour lesquels les critiques sont bien plus positives que dix ans plus tôt{{sfn|Lynn|1997|p=509}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=330}}. {{date-||Septembre|1964}} voit la publication de ses [[mémoires]], ''[[Histoire de ma vie (Chaplin)|Histoire de ma vie]]'', sur lesquels il travaille depuis {{date-|1957}}{{sfn|Robinson|1986|p=602-605}}. Le livre de 500 pages mettant l'accent sur ses premières années et sa vie privée connaît un succès mondial, même si les critiques pointent le manque d'informations sur sa carrière cinématographique{{sfn|Robinson|1986|p=605-607}}{{,}}{{sfn|Lynn|1997|p=510-512}}.
Peu après la publication de ses mémoires, Chaplin commença à travailler sur ''[[La Comtesse de Hong-Kong]]'' (1967), une comédie romantique basée sur un scénario qu'il avait écrit dans les années 1930 pour Paulette Goddard{{sfn|Robinson|1986|p=608}}. Située sur un paquebot, l'action mettait en scène [[Marlon Brando]] jouant un ambassadeur américain et [[Sophia Loren]] dans le rôle d'une passagère clandestine{{sfn|Robinson|1986|p=608}}. Le film différait des précédentes productions de Chaplin sur plusieurs points : il était le premier à employer le [[Technicolor (procédé)|technicolor]] et la [[résolution écran large]], tandis que Chaplin se concentra sur la réalisation et n'apparut à l'écran que dans le rôle mineur d'un steward malade{{sfn|Robinson|1986|p=612}}. Il signa également un contrat avec le studio Universal Pictures pour le distribuer{{sfn|Robinson|1986|p=607}}. ''La Comtesse de Hong-Kong'' reçut des critiques négatives à sa sortie en janvier 1967 et fut un échec commercial{{sfn|Epstein|1988|p=192-196}}{{,}}{{sfn|Lynn|1997|p=518}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=335}}. Chaplin fut profondément affecté par ce revers et ce film fut son dernier{{sfn|Epstein|1988|p=192-196}}.


Peu après la publication de ses mémoires, Chaplin commence à travailler sur ''[[La Comtesse de Hong-Kong]]'' ({{date-|1967}}), une comédie romantique basée sur un scénario qu'il a écrit dans les années {{date-|1930}} pour Paulette Goddard{{sfn|Robinson|1986|p=608}}. Située sur un paquebot, l'action met en scène [[Marlon Brando]] jouant un ambassadeur américain et [[Sophia Loren]] dans le rôle d'une passagère clandestine{{sfn|Robinson|1986|p=608}}. Le film diffère des précédentes productions de Chaplin sur plusieurs points : il est le premier à employer le [[Technicolor (procédé)|technicolor]] et le [[format écran large]], tandis que Chaplin se concentre sur la réalisation et n’apparaît à l'écran que dans le rôle mineur d'un steward malade{{sfn|Robinson|1986|p=612}}. Il signe également un contrat avec le studio Universal Pictures pour le distribuer{{sfn|Robinson|1986|p=607}}. ''La Comtesse de Hong-Kong'' reçoit des critiques négatives à sa sortie en {{date-||1|1967}} et c'est un échec commercial{{sfn|Epstein|1988|p=192-196}}{{,}}{{sfn|Lynn|1997|p=518}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=335}}. Chaplin est profondément affecté par ce revers et ce film sera le dernier{{sfn|Epstein|1988|p=192-196}}.
[[Fichier:Chaplin oscar.JPG|thumb|alt=Photographie de Chaplin au visage bouffi et en costume de soirée derrière un pupitre où se trouve une statuette et deux micros|Chaplin (à droite) reçoit son [[Oscar d'honneur]] des mains de [[Jack Lemmon]] en 1972.]]
Chaplin fut victime de plusieurs [[Accident vasculaire cérébral|AVC]] mineurs à la fin des années 1950 et cela marqua le début d'un lent déclin de sa santé{{sfn|Robinson|1986|p=619}}. Malgré ces difficultés, il se mit rapidement à écrire le scénario de son nouveau projet de film, ''[[The Freak]]'', sur une jeune fille ailée découverte en Amérique du Sud, projet destiné à lancer la carrière de sa fille, [[Victoria Chaplin Thierrée|Victoria Chaplin]]{{sfn|Robinson|1986|p=619}}. Sa santé fragile l'empêcha néanmoins de mener à bien ce projet{{sfn|Epstein|1988|p=203}}, et au début des années 1970 Chaplin se concentra plutôt sur la réédition de ses anciens films, dont ''Le Kid'' et ''Le Cirque''{{sfn|Robinson|1986|p=620-621}}. En 1971, il fut fait [[commandeur]] de l'[[Ordre national de la Légion d'honneur]] lors du [[festival de Cannes]]{{sfn|Robinson|1986|p=621}} et l'année suivante il reçut un [[Lion d'or pour la carrière|Lion d'or pour sa carrière]] durant la [[mostra de Venise]]{{sfn|Robinson|1986|p=625}}.


Chaplin est victime de plusieurs [[Accident vasculaire cérébral|AVC]] mineurs à la fin des années {{date-|1950}} et cela marque le début d'un lent déclin de sa santé{{sfn|Robinson|1986|p=619}}. Malgré ces difficultés, il se met rapidement à écrire le scénario de son nouveau projet de film, ''[[The Freak]]'', sur une jeune fille ailée découverte en Amérique du Sud, projet destiné à lancer la carrière de sa fille, [[Victoria Chaplin Thierrée|Victoria Chaplin]]{{sfn|Robinson|1986|p=619}}. Sa santé fragile l'empêche néanmoins de mener à bien ce projet{{sfn|Epstein|1988|p=203}}, et au début des années {{date-|1970}} Chaplin se concentre plutôt sur la réédition de ses anciens films, dont ''Le Kid'' et ''Le Cirque''{{sfn|Robinson|1986|p=620-621}} dont il refait la bande-son. En {{date-|1971}}, il est fait [[commandeur]] de l'[[Ordre national de la Légion d'honneur]] lors du [[festival de Cannes]]{{sfn|Robinson|1986|p=621}} et l'année suivante il reçoit un [[Lion d'or pour la carrière|Lion d'or pour sa carrière]] durant la [[mostra de Venise]]{{sfn|Robinson|1986|p=625}}.
En 1972, l'{{lang|en|[[Academy of Motion Picture Arts and Sciences]]}} lui décerna un [[Oscar d'honneur]], ce que Robinson considère comme le premier signe que les États-Unis {{citation|voulaient se faire pardonner}}. Chaplin hésita à l'accepter, puis décida de se rendre à Los Angeles pour la première fois en vingt ans{{sfn|Robinson|1986|p=621}}. La visite fit l'objet d'une large couverture médiatique, et lors de la remise de la récompense il reçut une ovation de douze minutes, la plus longue de toute l'histoire des Oscars<ref>{{lien web |url=http://www.history.com/this-day-in-history/charlie-chaplin-prepares-for-return-to-united-states-after-two-decades |titre=Charlie Chaplin prepares for return to United States after two decades |éditeur=A&E Television Networks |consulté le=7 juin 2010}}</ref>{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=347}}. Visiblement ému, Chaplin accepta la statuette rendant hommage {{citation|à l'effet incalculable qu'il a eu en faisant des films de cinéma la forme d'art de ce siècle{{sfn|Robinson|1986|p=623-625}}}}.


En {{date-|1972}}, l'{{langue|en|[[Academy of Motion Picture Arts and Sciences]]}} lui décerne un [[Oscar d'honneur]], ce que Robinson considère comme le premier signe que les États-Unis {{citation|voulaient se faire pardonner}}. Chaplin hésite à l'accepter, puis décide de se rendre à [[Los Angeles]] pour la première fois en vingt ans{{sfn|Robinson|1986|p=621}}. La visite est l'objet d'une large couverture médiatique, et lors de la remise de la récompense il reçoit une ovation de douze minutes, la plus longue de toute l'histoire des Oscars<ref>{{lien web |url=https://www.rtbf.be/culture/cinema/detail_cinq-moments-memorables-des-oscars?id=9850422 |titre=Cinq moments mémorables des Oscars |date=26 février 2018 |site=[[RTBF]] |consulté le=14 mai 2020}}.</ref>{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=347}}. Visiblement ému, Chaplin accepte la statuette rendant hommage {{citation|à l'effet incalculable qu'il a eu en faisant des films de cinéma la forme d'art de ce siècle}}{{sfn|Robinson|1986|p=623-625}}.
Même si Chaplin avait encore des projets de film, sa santé devint très fragile dans le milieu des années 1970{{sfn|Robinson|1986|p=627-628}}. Plusieurs [[Accident vasculaire cérébral|AVC]] affectèrent son élocution et il dut utiliser un fauteuil roulant{{sfn|Robinson|1986|p=626}}{{,}}<ref name="EugeneChaplin">{{Article |nom1=Thomas |prénom1=David |url=https://www.telegraph.co.uk/culture/film/3587749/When-Chaplin-played-father.html |titre=When Chaplin Played Father|périodique=The Telegraph |jour=26 |mois=décembre |année=2002 |consulté le=26 juin 2012}}</ref>. Parmi ses dernières réalisations figurent la création d'une autobiographie en images, ''My Life in Pictures'' (1974) et la resonorisation de ''L'Opinion publique'' en 1976{{sfn|Robinson|1986|p=626-628}}. Il apparut également dans un documentaire sur sa vie, ''The Gentleman Tramp'' (1975), réalisé par Richard Patterson{{sfn|Lynn|1997|p=534-536}}. En 1975, la reine [[Élisabeth II]] le fit [[Knight Bachelor|chevalier]]{{sfn|Robinson|1986|p=626-628}}{{,}}{{#tag:ref|L'octroi de cette distinction avait déjà été proposé en 1931 et 1956 mais le [[bureau des Affaires étrangères et du Commonwealth]] s'y était opposé en raison de ses opinions politiques et de sa vie privée. Il craignait que cela n'affecte la réputation du [[Ordres, décorations et médailles du Royaume-Uni|système de distinctions britannique]] et n'endommage les relations avec les États-Unis<ref>{{lien web |url=http://news.bbc.co.uk/1/hi/uk/2141391.stm |titre=Chaplin knighthood blocked |éditeur=BBC |consulté le=15 février 2010 |jour=21 |mois=juillet |année=2002 |prénom1=Paul |nom1=Reynolds}}</ref>.|group="n"}}.

Même si Chaplin a encore des projets de film, sa santé devient très fragile dans le milieu des années {{date-|1970}}{{sfn|Robinson|1986|p=627-628}}. Plusieurs [[Accident vasculaire cérébral|AVC]] affectent son élocution et il doit utiliser un fauteuil roulant{{sfn|Robinson|1986|p=626}}{{,}}<ref name="EugeneChaplin">{{Article |nom1=Thomas |prénom1=David |url=https://www.telegraph.co.uk/culture/film/3587749/When-Chaplin-played-father.html |titre=When Chaplin Played Father|périodique=The Telegraph |jour=26 |mois=décembre |année=2002 |consulté le=26 juin 2012}}.</ref>. Parmi ses dernières réalisations figurent la création d'une autobiographie en images, ''My Life in Pictures'' ({{date-|1974}}) et la resonorisation de ''L'Opinion publique'' en {{date-|1976}}{{sfn|Robinson|1986|p=626-628}}. Il apparaît également dans un documentaire sur sa vie, ''The Gentleman Tramp'' ({{date-|1975}}), réalisé par Richard Patterson{{sfn|Lynn|1997|p=534-536}}. En {{date-|1975}}, la reine [[Élisabeth II]] le fait [[Knight Bachelor|chevalier]]{{sfn|Robinson|1986|p=626-628}}{{,}}{{#tag:ref|L'octroi de cette distinction est déjà proposé en {{date-|1931}} et {{date-|1956}} mais le [[bureau des Affaires étrangères et du Commonwealth]] s'y est opposé en raison de ses opinions politiques et de sa vie privée. Il craignait que cela n'affecte la réputation du [[Ordres, décorations et médailles du Royaume-Uni|système de distinctions britannique]] et n'endommage les relations avec les États-Unis<ref>{{lien web |langue=en |url=http://news.bbc.co.uk/1/hi/uk/2141391.stm |titre=Chaplin knighthood blocked |site=BBC |consulté le=15 février 2010 |date=21 juillet 2002 |auteur1=Paul Reynolds}}.</ref>.|group="n"}}.


==== Mort ====
==== Mort ====
[[Fichier:Charlie Chaplin grave.jpg|thumb|alt=Photographie d'un caveau en pierre où est inscrit « Charles Chaplin 1889-1977"|La tombe de Chaplin au cimetière de Corsier-sur-Vevey.]]
[[Fichier:Charlie Chaplin grave.jpg|vignette|alt=Photographie d'un caveau en pierre où est inscrit « Charles Chaplin 1889-1977"|La tombe de Chaplin au cimetière de Corsier-sur-Vevey.]]
En octobre 1977, la santé de Chaplin s'était détériorée au point qu'il demandait une attention de tous les instants{{sfn|Robinson|1986|p=629}}. Il mourut d'un [[Accident vasculaire cérébral|AVC]] dans son sommeil le matin du 25 décembre 1977, à l'âge de 88 ans<ref name="EugeneChaplin"/>. Selon ses dernières volontés, une petite cérémonie funéraire [[Anglicanisme|anglicane]] fut organisée le 27 décembre et il fut inhumé dans le cimetière de [[Corsier-sur-Vevey]]{{sfn|Robinson|1986|p=629}}. Parmi les hommages du monde du cinéma, le réalisateur [[René Clair]] écrivit qu'{{citation|il était un monument du cinéma{{sfn|Robinson|1986|p=631}}}} et l'acteur [[Bob Hope]] déclara : {{citation|nous avons eu de la chance de vivre à son époque{{sfn|Robinson|1986|p=632}}}}.
En {{date-||10|1977}}, la santé de Chaplin s'est détériorée au point qu'il demande une attention de tous les instants{{sfn|Robinson|1986|p=629}}. Il meurt d'un [[Accident vasculaire cérébral|AVC]] dans son sommeil le matin du {{date-|25|12|1977}}, à l'âge de {{unité|88|ans}}<ref name="EugeneChaplin"/>. Selon ses dernières volontés, une petite cérémonie funéraire [[Anglicanisme|anglicane]] est organisée le 27 décembre et il est inhumé dans le cimetière de [[Corsier-sur-Vevey]]{{sfn|Robinson|1986|p=629}}. Parmi les hommages du monde du cinéma, le réalisateur [[René Clair]] écrit : {{citation|il était un monument du cinéma}}{{sfn|Robinson|1986|p=631}} ; l'acteur [[Bob Hope]] a quant à lui déclaré : {{citation|nous avons eu de la chance de vivre à son époque}}{{sfn|Robinson|1986|p=632}}.


Le {{1er}} mars 1978, le cercueil de Chaplin fut exhumé et volé par deux [[mécanicien automobile|mécaniciens automobile]] [[immigrés]]<ref>{{lien web|lang=en |titre=Le corps de Charlie Chaplin retrouvé|url=http://news.bbc.co.uk/onthisday/hi/dates/stories/may/17/newsid_2512000/2512129.stm|éditeur=BBC On this day}}</ref>, un Polonais, Roman Wardas, et un Bulgare, Gantcho Ganev. Leur but était d'extorquer une [[Rançon (prix)|rançon]] de cent mille francs suisses à Oona Chaplin afin de pouvoir ouvrir plus tard un garage automobile. Ils furent arrêtés lors d'une vaste opération de police le 17 mai 1978 et le cercueil fut retrouvé enterré dans un champ de [[maïs]] près du village voisin de [[Noville (Vaud)|Noville]]. Il fut réenterré dans le cimetière de [[Corsier-sur-Vevey]] et un [[Caveau funéraire|caveau]] en [[béton armé]] fut ajouté pour empêcher tout nouvel incident<ref>{{lien web |url=https://www.bbc.co.uk/news/magazine-20507503 |titre=Yasser Arafat: 10 other people who have been exhumed |jour=27 |mois=novembre |année=2012 |consulté le=27 novembre 2012 |éditeur=BBC}}</ref>{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=629-631}}.<br />
Le {{date-|1|3|1978}}, le cercueil de Chaplin est exhumé et volé par deux [[mécanicien automobile|mécaniciens automobiles]]<ref>{{lien web|langue=en |titre=Le corps de Charlie Chaplin retrouvé|url=http://news.bbc.co.uk/onthisday/hi/dates/stories/may/17/newsid_2512000/2512129.stm|site=[[BBC]] |date=17 mai 1978 |consulté le=14 mai 2020}}.</ref>, un Polonais, Roman Wardas, et un Bulgare, Gantcho Ganev. Leur but est d'extorquer une [[Rançon (prix)|rançon]] de cent mille francs suisses à Oona Chaplin afin de pouvoir ouvrir plus tard un garage automobile. Ils sont arrêtés lors d'une vaste opération de police le {{date-|17|05|1978}} et le cercueil est retrouvé enterré dans un champ de [[maïs]] près du village de [[Noville (Vaud)|Noville]]. Il est réenterré dans le cimetière de Corsier-sur-Vevey et un [[Caveau funéraire|caveau]] en [[béton armé]] est ajouté pour empêcher tout nouvel incident<ref>{{lien web |langue=en |url=https://www.bbc.co.uk/news/magazine-20507503 |titre=Yasser Arafat: 10 other people who have been exhumed |date=27 novembre 2012 |consulté le=14 mai 2020 |site=BBC}}.</ref>{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=629-631}}.


== Œuvres ==
== Analyse de son œuvre ==
=== Influences ===
=== Influences ===
Chaplin considérait que sa première inspiration était sa mère qui l'amusait, alors qu'il était enfant, en s'asseyant à la fenêtre et en imitant les passants : {{citation|C'est grâce à elle que j'ai appris non seulement à exprimer des émotions avec mes mains et mon visage mais également à observer et à étudier les gens{{sfn|Robinson|1986|p=18}}}}. Les premières années de Chaplin dans le music-hall lui permirent d'observer le travail des comédiens ; il assista également aux spectacles de mime de [[Noël]] au [[théâtre de Drury Lane]], où il étudia l'art de la frivolité avec des artistes comme [[Dan Leno]]{{sfn|Robinson|1986|p=71-72}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=47-48}}{{,}}{{sfn|Weissman|2009|p=82-83, 88}}. Ses années dans la compagnie de Fred Karno eurent un effet formateur sur sa carrière d'acteur et de réalisateur. Il y apprit à associer le tragique avec la comédie et à utiliser des éléments absurdes qui devinrent récurrents dans ses œuvres{{sfn|Robinson|1986|p=86-87}}. Dans l'industrie cinématographique, Chaplin s'appuya sur les œuvres du comédien français [[Max Linder]], qu'il admirait{{sfn|Lynn|1997|p=99-100}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=22}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=122}}. En développant le costume et le jeu de Charlot, il s'inspira probablement de la scène de vaudeville américaine où les personnages de vagabond étaient courants{{sfn|Louvish|2010|p=48-49}}.
Chaplin considérait que sa première inspiration était sa mère qui l'amusait, alors qu'il était enfant, en s'asseyant à la fenêtre et en imitant les passants : {{citation|C'est grâce à elle que j'ai appris non seulement à exprimer des émotions avec mes mains et mon visage mais également à observer et à étudier les gens{{sfn|Robinson|1986|p=18}}.}} Les premières années de Chaplin dans le music-hall lui permettent d'observer le travail des comédiens ; il assiste également aux spectacles de mime de [[Noël]] au [[théâtre de Drury Lane]], où il étudie l'art de la frivolité avec des artistes comme [[Dan Leno]]{{sfn|Robinson|1986|p=71-72}}{{,}}{{sfn|Chaplin|2003|p=47-48}}{{,}}{{sfn|Weissman|2009|p=82-83, 88}}. Ses années dans la compagnie de Fred Karno ont un effet formateur sur sa carrière d'acteur et de réalisateur. Il y apprend à associer le tragique avec la comédie et à utiliser des éléments absurdes qui devinrent récurrents dans ses œuvres{{sfn|Robinson|1986|p=86-87}}. Dans l'industrie cinématographique, Chaplin s'appuie sur les œuvres du comédien français [[Max Linder]], qu'il admire{{sfn|Lynn|1997|p=99-100}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=22}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=122}}. En développant le costume et le jeu de Charlot, il s'inspire probablement de la scène de vaudeville américaine où les personnages de vagabond étaient courants{{sfn|Louvish|2010|p=48-49}}.


=== Méthodes ===
=== Méthodes ===
[[Fichier:Chaplin Studios postcard.jpg|thumb|left|alt=Photographie d'une rue bordée de bâtiments en brique à deux étages|Carte postale de 1922 sur les studios Charlie Chaplin, où tous ses films furent réalisés entre 1918 et 1952.]]
[[Fichier:Chaplin Studios postcard.jpg|thumb|left|alt=Photographie d'une rue bordée de bâtiments en brique à deux étages|Carte postale de {{date-|1922}} montrant les studios Charlie Chaplin, où tous ses films sont réalisés entre {{date-|1918}} et {{date-|1952}}.]]
Chaplin parlait assez peu de ses techniques de réalisation et avançait que cela était comme dévoiler ses secrets pour un magicien{{sfn|Robinson|1986|p=606}}. On sait donc peu de chose sur ses manières de travailler{{sfn|Brownlow|2010|p=7}}, mais elles ont été étudiées par [[Kevin Brownlow]] et David Gill et savamment exposées dans la série documentaire ''Unknown Chaplin'' (1983){{sfn|Louvish|2010|p=103}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=168}}.
Tout au long de sa carrière, Chaplin parle assez peu de ses techniques de réalisation et compare cela à dévoiler ses secrets pour un magicien{{sfn|Robinson|1986|p=606}}. On sait donc peu de chose sur ses manières de travailler{{sfn|Brownlow|2010|p=7}}, mais elles ont été étudiées par [[Kevin Brownlow]] et David Gill et savamment exposées dans la série documentaire ''Unknown Chaplin'' ({{date-|1983}}){{sfn|Louvish|2010|p=103}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=168}}.


Jusqu'à ce qu'il se mette à réaliser des films parlants avec ''Le Dictateur'', Chaplin ne commençait jamais un tournage avec un scénario achevé{{sfn|Robinson|1986|p=173, 197, 310, 489}}. Pour ses premiers films, il n'avait qu'une vague idée de départ comme « [[Charlot fait une cure|Charlot se rend dans une station thermale]] » ou « [[Charlot usurier|Charlot travaille comme prêteur sur gage]]{{sfn|Robinson|1986|p=169}} ». Il faisait ensuite réaliser les décors et travaillait avec les autres acteurs pour improviser des effets comiques tout en affinant le scénario tout au long de la production{{sfn|Louvish|2010|p=103}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=168}}. Alors que les idées étaient acceptées ou rejetées, une structure narrative émergeait et Chaplin était souvent obligé de retourner des scènes qui pouvaient aller à l'encontre de l'histoire{{sfn|Louvish|2010|p=168}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986<!--|p=166-170-->|p=489-490}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=187}}. À partir de ''L'Opinion publique'', Chaplin commença à réaliser le tournage à partir d'un scénario préétabli{{sfn|Louvish|2010|p=182}}, mais Robinson écrivit que tous ses films, jusqu'aux ''Temps modernes'', continuèrent à subir des modifications jusqu'à atteindre leur forme finale{{sfn|Robinson|1986|p=460}}.
Avant de réaliser des films parlants avec ''Le Dictateur'', Chaplin ne commence jamais un tournage avec un scénario achevé{{sfn|Robinson|1986|p=173, 197, 310, 489}}. Pour ses premiers films, il n'a qu'une vague idée de départ comme « [[Charlot fait une cure|Charlot se rend dans une station thermale]] » ou « [[Charlot usurier|Charlot travaille comme prêteur sur gage]]{{sfn|Robinson|1986|p=169}} ». Il fait ensuite réaliser les décors et travaille avec les autres acteurs pour improviser des effets comiques tout en affinant le scénario tout au long de la production{{sfn|Louvish|2010|p=103}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=168}}. Alors que les idées sont acceptées ou rejetées, une structure narrative émerge et Chaplin est souvent obligé de retourner des scènes qui vont à l'encontre de l'histoire{{sfn|Louvish|2010|p=168}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986<!--|p=166-170-->|p=489-490}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=187}}. À partir de ''L'Opinion publique'', Chaplin commence à réaliser le tournage à partir d'un scénario préétabli{{sfn|Louvish|2010|p=182}}, mais tous ses films, jusqu'aux ''Temps modernes'', continuent à subir des modifications jusqu'à atteindre leur forme finale{{sfn|Robinson|1986|p=460}}.


En réalisant des films de cette manière, Chaplin avait besoin de plus de temps que tout autre réalisateur de l'époque{{sfn|Louvish|2010|p=228}}. S'il était à court d'idées, il s'éloignait alors du studio pendant plusieurs jours, tout en maintenant ses équipes prêtes dès que l'inspiration reviendrait{{sfn|Robinson|1986|p=234-235}}{{,}}{{sfn|Cousins|2004|p=71}}. Le processus de réalisation était également ralenti par son [[Perfectionnisme (psychologie)|perfectionnisme]]{{sfn|Robinson|1986|p=172, 177, 235, 311, 381, 399}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=59, 75, 82, 92, 147}}. Selon son ami et réalisateur britannique [[Ivor Montagu]], {{citation|rien d'autre que la perfection n'était suffisant}} pour lui{{sfn|Brownlow|2010|p=82}}. Comme il finançait personnellement ses films, Chaplin avait toute liberté pour atteindre cet objectif et réaliser autant de [[Prise de vues cinématographique|prises]] que nécessaire{{sfn|Robinson|1986|p=235, 311, 223}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=82}}. Leur nombre était ainsi souvent excessif ; chaque prise terminée pour ''Le Kid'' en avait nécessité 53{{sfn|Robinson|1986|p=746}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=359}} tandis que pour réaliser les 20 minutes de ''L'Émigrant'', il utilisa plus de {{unité|12000|m}} de pellicule, une longueur suffisante pour faire un long-métrage{{sfn|Robinson|1986|p=201}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=192}}.
En réalisant des films de cette manière, Chaplin a besoin de plus de temps que tout autre réalisateur de l'époque{{sfn|Louvish|2010|p=228}}. S'il est à court d'idées, il s'éloigne alors du studio pendant plusieurs jours, tout en maintenant ses équipes prêtes dès que l'inspiration revient{{sfn|Robinson|1986|p=234-235}}{{,}}{{sfn|Cousins|2004|p=71}}. Le processus de réalisation est également ralenti par son [[Perfectionnisme (psychologie)|perfectionnisme]]{{sfn|Robinson|1986|p=172, 177, 235, 311, 381, 399}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=59, 75, 82, 92, 147}}. Selon son ami et réalisateur britannique [[Ivor Montagu]], {{citation|rien d'autre que la perfection n'était suffisant}} pour lui{{sfn|Brownlow|2010|p=82}}. Comme il finance personnellement ses films, Chaplin a toute liberté pour atteindre cet objectif et réaliser autant de [[Prise de vues cinématographique|prises]] que nécessaire{{sfn|Robinson|1986|p=235, 311, 223}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=82}}. Leur nombre est ainsi souvent excessif ; chaque prise terminée pour ''Le Kid'' en avait nécessité 53{{sfn|Robinson|1986|p=746}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=359}} tandis que pour réaliser les 20 minutes de ''L'Émigrant'', il utilisa plus de {{unité|12000|m}} de pellicule, une longueur suffisante pour faire un long-métrage{{sfn|Robinson|1986|p=201}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=192}}.


{{encadré texte |align=right |width=30% |palign=justify |texte=Aucun autre réalisateur n'a si complètement dominé tout aspect du travail et fait tous les métiers. S'il avait pu, Chaplin aurait joué tous les rôles et (comme son fils Sydney nota avec humour mais avec perspicacité) aurait cousu tous les costumes{{sfn|Robinson|1986|p=606}}.|légende=Biographe de Chaplin [[David Robinson (écrivain)|David Robinson]]}}
{{encadré texte |align=right |width=30% |palign=justify |texte={{citation|Aucun autre réalisateur n'a si complètement dominé tout aspect du travail et fait tous les métiers. S'il avait pu, Chaplin aurait joué tous les rôles et (comme son fils Sydney nota avec humour mais avec perspicacité) aurait cousu tous les costumes}}{{sfn|Robinson|1986|p=606}}.|légende=Biographe de Chaplin, [[David Robinson (écrivain)|David Robinson]]}}
Décrivant ses méthodes de production comme de la {{citation|pure détermination jusqu'au bord de la folie{{sfn|Louvish|2010|p=225}}}}, Chaplin était généralement complètement épuisé par les tournages{{sfn|Brownlow|2010|p=157}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=121, 469}}. Robinson écrivit que même dans ses dernières années, son travail {{citation|avait la priorité sur tout et tout le monde{{sfn|Robinson|1986|p=600}}}}. Le mélange d'improvisation et de perfectionnisme qui se traduisait par des jours d'efforts et des milliers de mètres de pellicule gâchés, se révélait éprouvant pour Chaplin qui pouvait se déchaîner contre ses acteurs et ses équipes{{sfn|Robinson|1986|p=371, 362, 469, 613}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=56, 136}}{{,}}{{sfn|Schickel|2006|p=8}}.
Décrivant ses méthodes de production comme de la {{citation|pure détermination jusqu'au bord de la folie}}{{sfn|Louvish|2010|p=225}}, Chaplin est généralement complètement épuisé par les tournages{{sfn|Brownlow|2010|p=157}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=121, 469}}. Même dans ses dernières années, son travail {{citation|avait la priorité sur tout et tout le monde}}{{sfn|Robinson|1986|p=600}}. Le mélange d'improvisation et de perfectionnisme qui se traduit par des jours d'efforts et des milliers de mètres de pellicule gâchés, se révèle éprouvant pour Chaplin, ce qui peut le mener à se déchaîner contre ses acteurs et ses équipes{{sfn|Robinson|1986|p=371, 362, 469, 613}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=56, 136}}{{,}}{{sfn|Schickel|2006|p=8}}.


Chaplin exerçait un contrôle complet sur ses œuvres{{sfn|Robinson|1986|p=606}}, au point qu'il mimait les autres rôles et voulait que ses acteurs l'imitent exactement{{sfn|Bloom|1982|p=101}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=59, 98, 138, 154}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=614}}. Il effectuait personnellement le montage de tous ses films et fouillait dans les grandes quantités de pellicules pour créer le film qu'il voulait{{sfn|Robinson|1986|p=140, 235, 236}}. Chaplin recevait néanmoins l'aide d'autres artistes, dont son ami et directeur de la photographie [[Roland Totheroh]], son frère Sydney Chaplin et divers [[Assistant réalisateur|assistants réalisateurs]], comme Harry Crocker, Dan James et [[Charles Reisner]]<ref>{{lien web |url=http://chaplin.bfi.org.uk/programme/essays/collaborators.html |titre=Chaplin's writing and directing collaborators |éditeur=British Film Institute |consulté le=27 juin 2012}}</ref>.
Chaplin a exercé un contrôle complet sur ses œuvres{{sfn|Robinson|1986|p=606}}, au point de mimer les autres rôles pour que ses acteurs l'imitent exactement{{sfn|Bloom|1982|p=101}}{{,}}{{sfn|Brownlow|2010|p=59, 98, 138, 154}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=614}}. Il a effectué personnellement le montage de tous ses films en fouillant dans les grandes quantités de pellicules pour créer le film voulu{{sfn|Robinson|1986|p=140, 235, 236}}. Chaplin a néanmoins reçu l'aide d'autres artistes, dont son ami et directeur de la photographie [[Roland Totheroh]], son frère Sydney Chaplin et divers [[Assistant réalisateur|assistants réalisateurs]], comme Harry Crocker, Dan James et [[Charles Reisner]]<ref>{{lien web |langue=en |url=http://chaplin.bfi.org.uk/programme/essays/collaborators.html |titre=Chaplin's writing and directing collaborators |site=British Film Institute |consulté le=27 juin 2012}}.</ref>.


=== Style et thèmes ===
=== Style et thèmes ===
[[Fichier:The Kid scenes.ogv|thumb|Scènes du film ''Le Kid'' démontrant l'association du [[slapstick]], du [[pathos]] et du commentaire social par Chaplin.]]
[[Fichier:The Kid scenes.ogv|vignette|Scènes du film ''Le Kid'' démontrant l'association du {{anglais|[[slapstick]]}}, du [[pathos]] et du commentaire social par Chaplin.]]
Si le style comique de Chaplin est généralement qualifié de [[slapstick]]{{sfn|Robinson|1986|p=212}}, il est considéré comme retenu et intelligent{{sfn|Brownlow|2010|p=30}}, et l'historien de cinéma Philip Kemp décrit son travail comme un mélange de {{citation|comédie physique gracieuse et de comique de situation bien réfléchi{{sfn|Kemp|2011|p=63}}}}. Chaplin s'éloigna du slapstick traditionnel en ralentissant le rythme de l'action et en se concentrant sur la relation du spectateur avec les personnages{{sfn|Robinson|1986|p=113}}{{,}}{{sfn|Mast|1985|p=83-92}}. Robinson avança que les effets comiques dans les films de Chaplin étaient centrés sur l'attitude de Charlot aux choses qui lui arrivaient : l'humour ne venait pas du fait que Charlot rentrait dans un arbre, mais qu'il soulève son chapeau pour s'excuser{{sfn|Robinson|1986|p=113}}. Son biographe Dan Kamin écrivit que les « manières excentriques » de Chaplin et son {{citation|comportement sérieux au cœur du slapstick}} sont d'autres aspects centraux de son style comique{{sfn|Kamin|2011|p=6-7}}.
Si le style comique de Chaplin est généralement qualifié de {{anglais|[[slapstick]]}}{{sfn|Robinson|1986|p=212}}, il est considéré comme retenu et intelligent{{sfn|Brownlow|2010|p=30}}, et l'historien de cinéma Philip Kemp décrit son travail comme un mélange de {{citation|comédie physique gracieuse et de comique de situation bien réfléchi}}{{sfn|Kemp|2011|p=63}}. Chaplin s'est éloigné du {{anglais|slapstick}} traditionnel en ralentissant le rythme de l'action et en se concentrant sur la relation du spectateur avec les personnages{{sfn|Robinson|1986|p=113}}{{,}}{{sfn|Mast|1985|p=83-92}}. Les effets comiques dans les films de Chaplin sont centrés sur la réaction de Charlot aux choses qui lui arrivent : l'humour ne vient pas du fait que Charlot rentre dans un arbre, mais qu'il soulève son chapeau pour s'excuser{{sfn|Robinson|1986|p=113}}. Son biographe Dan Kamin écrit que les « manières excentriques » de Chaplin et son {{citation|comportement sérieux au cœur du ''slapstick''}} sont d'autres aspects centraux de son style comique{{sfn|Kamin|2011|p=6-7}}.


Les films muets de Chaplin suivaient généralement les efforts de Charlot pour survivre dans un monde hostile{{sfn|Louvish|2010|p=60}}. Même s'il vit dans la pauvreté et est fréquemment maltraité, il reste gentil et optimiste{{sfn|Kemp|2011|p=63}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=211, 352}}{{,}}{{sfn|Hansmeyer|1999|p=4}} ; défiant sa position sociale, il s'efforce d'être vu comme un [[gentleman]]{{sfn|Robinson|1986|p=203}}. Charlot s'oppose aux figures de l'autorité{{sfn|Dale|2000|p=17}} et {{citation|donne autant qu'il reçoit{{sfn|Weissman|2009|p=47}}}}, ce qui poussa Robinson et Louvish à voir en lui un représentant des défavorisés : {{citation|Un [[Homme de la rue|Monsieur Tout-le-monde]] devenant un sauveur héroïque{{sfn|Robinson|1986|p=455, 485}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=138}}}}. Hansmeyer note que plusieurs des films de Chaplin se terminent avec {{citation|Charlot démuni et seul [marchant] avec optimisme… vers le soleil couchant… pour poursuivre son voyage{{sfn|Hansmeyer|1999|p=4}}}}.
Les films muets de Chaplin suivent généralement les efforts de Charlot pour survivre dans un monde hostile{{sfn|Louvish|2010|p=60}}. Même s'il vit dans la pauvreté et est fréquemment maltraité, il reste gentil et optimiste{{sfn|Kemp|2011|p=63}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=211, 352}}{{,}}{{sfn|Hansmeyer|1999|p=4}} ; défiant sa position sociale, il s'efforce d'être vu comme un [[gentleman]]{{sfn|Robinson|1986|p=203}}. Charlot s'oppose aux figures de l'autorité{{sfn|Dale|2000|p=17}} et {{citation|donne autant qu'il reçoit}}{{sfn|Weissman|2009|p=47}}, ce qui poussa Robinson et Louvish à voir en lui un représentant des défavorisés : {{citation|Un [[Homme de la rue|Monsieur Tout-le-monde]] devenant un sauveur héroïque}}{{sfn|Robinson|1986|p=455, 485}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=138}}. Hansmeyer note que plusieurs des films de Chaplin se terminent avec {{citation|Charlot démuni et seul [marchant] avec optimisme… vers le soleil couchant… pour poursuivre son voyage}}{{sfn|Hansmeyer|1999|p=4}}.


[[Fichier:Chaplin signed c1920.jpg|thumb|left|alt=Photographie de Chaplin en costume avec un nœud papillon prenant la pose|Chaplin dans les années 1920.]]
[[Fichier:Chaplin signed c1920.jpg|vignette|gauche|upright|alt=Photographie de Chaplin en costume avec un nœud papillon prenant la pose|Chaplin dans les années {{date-|1920}}.]]
L'emploi du [[pathos]] est un aspect bien connu de l'œuvre de Chaplin{{sfn|Dale|2000|p=9, 19, 20}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=203}} et Larcher note sa capacité à {{citation|[provoquer] les rires et les larmes{{sfn|Larcher|2011|p=75}}}}. Chaplin s'appuyait parfois sur des événements tragiques pour ses films comme dans ''La Ruée vers l'or'', qui fut inspirée par le destin malheureux de l'expédition Donner{{sfn|Robinson|1986|p=334-335}}. Différents thèmes étaient représentés dans ses premières comédies comme l'avarice (''La Ruée vers l'or''), l'abandon (''Le Kid''){{sfn|Kuriyama|1992|p=31}} et des sujets plus controversés comme l'immigration (''L'Émigrant'') ou la drogue (''Charlot policeman''){{sfn|Mast|1985|p=83-92}}.


L'emploi du [[pathos]] est un aspect bien connu de l'œuvre de Chaplin{{sfn|Dale|2000|p=9, 19, 20}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=203}} et Larcher note sa capacité à {{citation|[provoquer] les rires et les larmes}}{{sfn|Larcher|2011|p=75}}. Chaplin s'appuie parfois sur des événements tragiques pour ses films comme dans ''La Ruée vers l'or'', qui est inspirée par le destin malheureux de l'[[expédition Donner]]{{sfn|Robinson|1986|p=334-335}}. Différents thèmes sont représentés dans ses premières comédies comme l'avarice (''La Ruée vers l'or''), l'abandon (''Le Kid''){{sfn|Kuriyama|1992|p=31}} et des sujets plus controversés comme l'immigration (''L'Émigrant'') ou la drogue (''Charlot policeman''){{sfn|Mast|1985|p=83-92}}.
Les commentaires sociaux étaient également importants dans ses premiers films, car il représentait les démunis sous un jour positif et soulignait leurs difficultés{{sfn|Robinson|1986|p=599}}. Par la suite, il développa un grand intérêt pour l'économie et se sentit obligé de faire partager ses opinions dans ses films{{sfn|Robinson|1986|p=456}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=159}}. ''Les Temps modernes'' illustrait les conditions de travail difficiles des ouvriers de l'industrie, ''Le Dictateur'' parodiait Hitler et [[Benito Mussolini|Mussolini]] et se terminait par un discours contre le nationalisme, ''Monsieur Verdoux'' critiquait la guerre et le nationalisme tandis qu{{'}}''Un roi à New York'' attaquait le [[maccarthysme]]{{sfn|Larcher|2011|p=62-89}}.


Les commentaires sociaux sont également importants dans ses premiers films, car il représente les démunis sous un jour positif et souligne leurs difficultés{{sfn|Robinson|1986|p=599}}. Par la suite, il développe un grand intérêt pour l'économie et se sent obligé de faire partager ses opinions dans ses films{{sfn|Robinson|1986|p=456}}{{,}}{{sfn|Maland|1989|p=159}}. ''Les Temps modernes'' illustre les conditions de travail difficiles des ouvriers de l'industrie, ''Le Dictateur'' parodie Hitler et [[Benito Mussolini|Mussolini]] et se termine par un discours contre le nationalisme, ''Monsieur Verdoux'' critique la guerre et le nationalisme tandis qu’''Un roi à New York'' attaque le [[maccarthysme]]{{sfn|Larcher|2011|p=62-89}}.
Chaplin intégra plusieurs éléments autobiographiques dans ses films et le psychologue [[Sigmund Freud]] considérait qu'il {{citation|se représentait toujours comme il était dans sa triste enfance{{sfn|Weissman|1999|p=439-445}}}}. Il est généralement admis que ''Le Kid'' reflète le traumatisme qu'il a subi dans un orphelinat{{sfn|Weissman|1999|p=439-445}}, tandis que le personnage principal des ''Feux de la rampe'' fait référence à la vie de ses parents{{sfn|Bloom|1982|p=107}} et que ''Un roi à New York'' renvoie à son expulsion des États-Unis{{sfn|Robinson|1986|p=588-589}}. Son biographe Stephen M. Weissman nota que sa relation difficile avec sa mère souffrant de troubles mentaux est souvent reflétée dans les personnages féminins de ses films et par le désir de Charlot de les sauver{{sfn|Weissman|1999|p=439-445}}.


En ce qui concerne la structure de ses films, l'historien du cinéma Gerald Mast les voit comme une série de sketchs reliés par une même trame plutôt que comme une suite ordonnée par un scénario précis{{sfn|Mast|1985|p=123-128}}. Visuellement, ils sont simples et économiques{{sfn|Louvish|2010|p=298}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=592}}, avec des scènes jouées comme au théâtre{{sfn|Epstein|1988|p=84-85}}{{,}}{{sfn|Mast|1985|p=83-92}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=185}}. Dans son autobiographie, Chaplin écrivit que {{citation|la simplicité est préférable… les effets pompeux ralentissent l'action, sont ennuyeux et désagréables… La caméra ne doit pas faire irruption{{sfn|Chaplin|2003|p=250}}}}. Cette approche n'a pas fait l'unanimité et elle a été qualifiée de démodée depuis les années 1940{{sfn|Brownlow|2010|p=91}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=298}}{{,}}{{sfn|Kamin|2011|p=35}}, tandis que l'historien du cinéma Donald McCaffrey y voit une indication que Chaplin n'a jamais complètement compris le [[média]] cinématographique{{sfn|McCaffrey|1971|p=82-95}}. Kamin avança néanmoins que le talent comique de Chaplin n'aurait jamais été suffisant pour qu'il reste drôle à l'écran s'il n'avait pas eu {{citation|la capacité de concevoir et de diriger des scènes spécifiquement pour le cinéma{{sfn|Kamin|2011|p=29}}}}.
Chaplin intègre plusieurs éléments autobiographiques dans ses films et le psychologue [[Sigmund Freud]] considère qu'il {{citation|se représent[e] toujours comme il était dans sa triste enfance}}{{sfn|Weissman|1999|p=439-445}}. Il est généralement admis que ''Le Kid'' reflète le traumatisme qu'il a subi dans un orphelinat{{sfn|Weissman|1999|p=439-445}}, tandis que le personnage principal des ''Feux de la rampe'' fait référence à la vie de ses parents{{sfn|Bloom|1982|p=107}} et que ''Un roi à New York'' renvoie à son expulsion des États-Unis{{sfn|Robinson|1986|p=588-589}}. Sa relation difficile avec sa mère souffrant de troubles mentaux est souvent reflétée dans les personnages féminins de ses films et par le désir de Charlot de les sauver{{sfn|Weissman|1999|p=439-445}}.
En ce qui concerne la structure de ses films, l'historien du cinéma Gerald Mast les voit comme une série de sketchs reliés par une même trame plutôt que comme une suite ordonnée par un scénario précis{{sfn|Mast|1985|p=123-128}}. Visuellement, ils sont simples et économiques{{sfn|Louvish|2010|p=298}}{{,}}{{sfn|Robinson|1986|p=592}}, avec des scènes jouées comme au théâtre{{sfn|Epstein|1988|p=84-85}}{{,}}{{sfn|Mast|1985|p=83-92}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=185}}. Dans son autobiographie, Chaplin écrit que {{citation|la simplicité est préférable… les effets pompeux ralentissent l'action, sont ennuyeux et désagréables… La caméra ne doit pas faire irruption}}{{sfn|Chaplin|2003|p=250}}. Cette approche n'a pas fait l'unanimité et elle est qualifiée de démodée depuis les années {{date-|1940}}{{sfn|Brownlow|2010|p=91}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=298}}{{,}}{{sfn|Kamin|2011|p=35}}, tandis que l'historien du cinéma Donald McCaffrey y voit une indication que Chaplin n'a jamais complètement compris le [[média]] cinématographique{{sfn|McCaffrey|1971|p=82-95}}. Kamin avance néanmoins que le talent comique de Chaplin n'aurait jamais été suffisant pour qu'il reste drôle à l'écran s'il n'avait pas eu {{citation|la capacité de concevoir et de diriger des scènes spécifiquement pour le cinéma}}{{sfn|Kamin|2011|p=29}}.


=== Musique ===
=== Musique ===
[[Fichier:Charlie Chaplin playing the cello 1915.jpg|thumb|Chaplin jouant du [[violoncelle]] en 1915.]]
[[Fichier:Charlie Chaplin playing the cello 1915.jpg|thumb|alt=Chaplin, de profil et la tête en bas, assis sur un tabouret, jouant un violoncelle entre ses jambes|upright|Chaplin jouant du [[violoncelle]] en {{date-|1915}}.]]
Chaplin développa dès l'enfance une passion pour la musique et apprit seul à jouer du [[piano]], du [[violon]] et du [[violoncelle]]{{sfn|Robinson|1986|p=411}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=17-18}}. Il considérait que l'accompagnement musical faisait partie intégrante du film{{sfn|Robinson|1986|p=382}} et à partir de ''L'Opinion publique'' il consacra beaucoup de temps à ce domaine{{sfn|Robinson|1986|p=411}}. Il composa lui-même la bande-son des ''Lumières de la ville'' et fit de même pour tous ses films suivants ; à partir de la fin des années 1950 et jusqu'à sa mort, il resonorisa tous ses anciens courts-métrages silencieux<ref name="VarietyVance">{{Article |nom1=Vance |prénom1=Jeffrey |jour=4 |mois=août |année=2003 |titre=Chaplin the Composer: An Excerpt from Chaplin: Genius of the Cinema |périodique=Variety Special Advertising Supplement |passage=20-21}}</ref>.
Chaplin développe dès l'enfance une passion pour la musique et apprend seul à jouer du [[piano]], du [[violon]] et du [[violoncelle]]{{sfn|Robinson|1986|p=411}}{{,}}{{sfn|Louvish|2010|p=17-18}}. Il considère que l'accompagnement musical fait partie intégrante du film{{sfn|Robinson|1986|p=382}} et à partir de ''L'Opinion publique'' il consacre beaucoup de temps à ce domaine{{sfn|Robinson|1986|p=411}}. Il compose lui-même la bande-son des ''Lumières de la ville'' et fait de même pour tous ses films suivants ; à partir de la fin des années {{date-|1950}} et jusqu'à sa mort, il sonorise tous ses anciens courts-métrages silencieux<ref name="VarietyVance">{{Article|langue=en|nom1=Vance |prénom1=Jeffrey |jour=4 |mois=août |année=2003 |titre=Chaplin the Composer: An Excerpt from Chaplin: Genius of the Cinema |périodique=Variety Special Advertising Supplement |passage=20-21}}.</ref>.


Comme il n'avait reçu aucune éducation musicale, Chaplin ne savait pas lire ou écrire des [[Partition (musique)|partitions]]. Il fit donc appel à des compositeurs professionnels comme [[David Raksin]], Raymond Rasch et Eric James pour mettre en forme ses idées. Certains critiques ont ainsi avancé que la musique de ses films devait être attribuée aux compositeurs ayant travaillé avec lui ; Raksin, qui participa à la mise en musique des ''Temps Modernes'', a néanmoins souligné le rôle créatif et moteur de Chaplin dans le processus de composition{{sfn|Raksin|Berg|1979|p=47-50}}. Au début de ce travail, qui pouvait durer des mois, Chaplin décrivait exactement ce qu'il voulait aux compositeurs et jouait les éléments qu'il avait improvisés au piano{{sfn|Raksin|Berg|1979|p=47-50}}. Ces mélodies étaient ensuite développées en étroite collaboration{{sfn|Raksin|Berg|1979|p=47-50}}. Pour l'historien du cinéma Jeffrey Vance, {{citation|même s'il s'appuyait sur ses associés pour mettre en forme des instrumentations complexes, les consignes musicales étaient les siennes, et pas une note n'était placée sans son accord<ref name="VarietyVance"/>}}.
Comme il n'a reçu aucune éducation musicale, Chaplin n'a jamais su lire ou écrire des [[Partition (musique)|partitions]]. Il fait donc appel à des compositeurs professionnels comme [[David Raksin]], Raymond Rasch et Eric James pour mettre en forme ses idées. Certains critiques ont ainsi avancé que la musique de ses films devait être attribuée aux compositeurs ayant travaillé avec lui ; Raksin, qui participe à la mise en musique des ''Temps Modernes'', a néanmoins souligné le rôle créatif et moteur de Chaplin dans le processus de composition{{sfn|Raksin|Berg|1979|p=47-50}}. Au début de ce travail, qui peut durer des mois, Chaplin décrit exactement ce qu'il veut aux compositeurs et joue les éléments qu'il a improvisés au piano{{sfn|Raksin|Berg|1979|p=47-50}}. Ces mélodies sont ensuite développées en étroite collaboration{{sfn|Raksin|Berg|1979|p=47-50}}. Pour l'historien du cinéma Jeffrey Vance, {{citation|même s'il s'appuyait sur ses associés pour mettre en forme des instrumentations complexes, les consignes musicales étaient les siennes, et pas une note n'était placée sans son accord}}<ref name="VarietyVance"/>.


Les compositions de Chaplin donnèrent lieu à trois chansons populaires. ''[[Smile (chanson)|Smile]]'', composée pour ''Les Temps modernes'', fut par la suite mise en paroles par John Turner et Geoffrey Parsons, puis interprétée par [[Nat King Cole]] en 1954<ref name="VarietyVance"/>. Pour ''Les Feux de la rampe'', Chaplin composa ''Terry's Theme'', qui fut popularisée par Jimmy Young sous le titre ''Eternally'' en 1952{{sfn|Kamin|2011|p=198}}. Enfin, la chanson ''This Is My Song'', chantée par [[Petula Clark]] pour ''La Comtesse de Hong-Kong'', connut un grand succès commercial et atteignit la première place du [[hit-parade|palmarès]] britannique en 1967<ref>{{Article |nom1=Hennessy |prénom1=Mike |jour=22 |mois=avril |année=1967 |titre=Chaplin's 'Song' Catches Fire in Europe |périodique=[[Billboard]] |passage=60}}</ref>. En dehors de ses deux récompenses d'honneur, le seul Oscar que Chaplin remporta fut celui de la [[oscar de la meilleure musique de film|meilleure musique de film]] à l'occasion de la réédition des ''Feux de la rampe'' en 1973<ref name="VarietyVance"/>{{,}}{{#tag:ref|Même si le film avait été présenté en 1952, il ne resta qu'une semaine à l'affiche à Los Angeles en raison de son boycott. Il ne remplit donc pas les critères pour une nomination avant sa réédition en 1972<ref>{{lien web |nom1=Weston |prénom1=Jay |titre=Charlie Chaplin's Limelight at the Academy After 60 Years |url=http://www.huffingtonpost.com/jay-weston/charlie-chaplin-limelight_b_1938236.html |éditeur=The Huffington Post |jour=10 |mois=avril |année=2012 |consulté le=2 février 2013}}</ref>.|group="n"}}.
Les compositions de Chaplin donnent lieu à trois chansons populaires. ''[[Smile (chanson)|Smile]]'', composée pour ''Les Temps modernes'', est par la suite mise en paroles par John Turner et Geoffrey Parsons, puis interprétée par [[Nat King Cole]] en {{date-|1954}}<ref name="VarietyVance"/>. Pour ''Les Feux de la rampe'', Chaplin compose ''Terry's Theme'', qui est popularisée par Jimmy Young sous le titre ''Eternally'' en {{date-|1952}}{{sfn|Kamin|2011|p=198}}. Enfin, la chanson ''This Is My Song'', chantée par [[Petula Clark]] pour ''La Comtesse de Hong-Kong'', connaît un grand succès commercial et atteint la première place du [[hit-parade|palmarès]] britannique en 1967<ref>{{Article |nom1=Hennessy |prénom1=Mike |jour=22 |mois=avril |année=1967 |titre=Chaplin's 'Song' Catches Fire in Europe |périodique=[[Billboard]] |passage=60}}.</ref>. En dehors de ses deux récompenses d'honneur, le seul Oscar que Chaplin remporte est celui de la [[oscar de la meilleure musique de film|meilleure musique de film]] à l'occasion de la réédition des ''Feux de la rampe'' en 1973<ref name="VarietyVance"/>{{,}}{{#tag:ref|Même si le film est présenté en 1952, il ne reste qu'une semaine à l'affiche à Los Angeles en raison de son boycott. Il ne remplit donc pas les critères pour une nomination avant sa réédition en 1972<ref>{{lien web |auteur1=Jay Weston |titre=Charlie Chaplin's Limelight at the Academy After 60 Years |url=http://www.huffingtonpost.com/jay-weston/charlie-chaplin-limelight_b_1938236.html |site=[[The Huffington Post]] |date=10 avril 2012 |consulté le=2 février 2013}}.</ref>.|group="n"}}.


== Héritage ==
== Filmographie ==
{{Article détaillé|Filmographie de Charlie Chaplin}}
[[Fichier:The Tramp Essanay.jpg|thumb|left|alt=Photographie en pied de Charlot souriant|Chaplin dans son rôle de Charlot en 1915. Ce personnage est considéré comme {{citation|l'icône la plus universelle}} du cinéma.]]
[[Fichier:Charlie Chaplin walk of fame.jpg|thumb|alt=Étoile rouge avec un liseré d'or sur un trotoir noir. « Charlie Chaplin » est écrit en lettres dorées au-dessus d'un emblème circulaire en laiton représentant une caméra.|Étoile de Chaplin sur le ''{{langue|en|[[Hollywood Walk of Fame]]}}''.]]
En 1998, le critique Andrew Sarris écrivit que Chaplin est {{citation|sans doute le plus grand artiste que le cinéma ait créé, certainement son interprète le plus extraordinaire et probablement encore son icône la plus universelle}}{{sfn|Sarris|1998|p=139}}. Il est décrit par le {{lang|en|British Film Institute}} comme {{citation|une figure tutélaire de la culture mondiale<ref>{{lien web |url=http://chaplin.bfi.org.uk/ |titre=Charlie Chaplin |éditeur=British Film Institute |consulté le=7 octobre 2012}}</ref>}}, et le magazine ''[[Time (magazine)|Time]]'' le lista parmi les 100 personnes les plus importantes du {{s-|XX|e}} pour {{citation|les rires [qu'il a apportés] à des millions de personnes}} et parce qu'il a {{citation|plus ou moins inventé la célébrité mondiale et aidé à transformer une industrie en un art}}<ref>{{Article|langue=en|auteur1=|prénom1=Joshua|nom1=Quittner|titre=TIME 100: Charlie Chaplin|périodique=[[Time (magazine)|Time]]|date=08-06-1998|issn=|url=https://web.archive.org/web/20110523194732/http://www.time.com/time/time100/artists/profile/chaplin.html|consulté le=11 novembre 2013|pages=}}</ref>.


À l'occasion de la publication de son autobiographie, Chaplin a établi sa filmographie, qui se compose alors de {{nb|80 films}} (''La Comtesse de Hong-Kong,'' réalisé trois ans plus tard, s'y est par la suite ajouté). En 2010, une copie de ''[[La Course au voleur]]'', réalisé en {{date-|1914}} et jusqu'alors considéré comme [[Film perdu|perdu]], est découverte chez un antiquaire du [[Michigan]], portant ainsi sa filmographie à {{nb|82 films}}<ref>{{lien web |langue=en |url=http://criterioncast.com/2010/06/08/charlie-chaplin-film-found-at-an-antique-sale-once-thought-lost/ |titre=Charlie Chaplin Film Found at an Antique Sale, Once Thought Lost |auteur=Joshua Brunsting |site=The Criterion Cast |date=8 juin 2010 |consulté le=9 juin 2010}}.</ref>.
L'historien du cinéma Christian Hansmeyer a noté que l'image de Charlot fait partie de l'histoire culturelle{{sfn|Hansmeyer|1999|p=3}} ; selon Simon Louvish, ce personnage est connu même dans les endroits où ses films n'ont jamais été projetés{{sfn|Louvish|2010|p=xvii}}. Le critique [[Richard Schickel]] suggère que les films de Chaplin avec Charlot présentent {{citation|les expressions comiques de l'esprit humain les plus éloquentes et les plus riches}} de l'histoire du cinéma{{sfn|Schickel|2006|p=41}}. Les objets associés au personnage continuent de fasciner le public et en 2006, un chapeau melon et une canne en bambou ayant appartenu à Chaplin furent achetés {{unité|140000|$}} lors d'une vente aux enchères à Los Angeles<ref>{{lien web |url=http://news.bbc.co.uk/1/hi/entertainment/5116474.stm|titre=Record price for Chaplin hat set |éditeur=BBC |consulté le=7 octobre 2012}}</ref>.


Les films de Chaplin, jusqu'au ''Cirque'' inclus, sont muets, même si certains ont été réédités avec des [[Bande-son|bandes-son]]. ''Les Lumières de la ville'' et ''Les Temps modernes'' sont muets, mais intègrent des bandes-son composées de musique, de [[bruitage]]s et de séquences parlées pour le second. Les cinq derniers films de Chaplin sont parlants. Hormis ''La Comtesse de Hong-Kong'', tous les films de Chaplin sont tournés en [[format 35 mm]], [[noir et blanc]].
En tant que réalisateur, Chaplin est considéré comme un pionnier et l'une des figures les plus influentes du début du {{s-|XX|e}}{{sfn|Cousins|2004|p=72}}{{,}}{{sfn|Kemp|2011|p=8, 22}}{{,}}{{sfn|Hansmeyer|1999|p=3}}{{,}}{{sfn|Sarris|1998|p=139}}. L'historien du cinéma Mark Cousins a écrit que Chaplin {{citation|a changé non seulement l'imagerie du cinéma mais également sa sociologie et sa grammaire}} et avance qu'il joua un rôle important dans l'établissement de la comédie en tant que genre, parallèlement à ce qu'avait fait [[D. W. Griffith]] pour le drame{{sfn|Cousins|2004|p=70}}. Il fut le premier à populariser les longs-métrages comiques et à ralentir le rythme de l'action pour y ajouter de la finesse et du pathos{{sfn|Schickel|2006|p=7, 13}}{{,}}<ref name="silent clowns">{{citation épisode |titre=Charlie Chaplin |série=Silent Clowns |crédits=présenté par Paul Merton, réalisé par Tom Cholmondeley |réseau=[[British Broadcasting Corporation]] |chaîne=[[BBC Four]] |diffusion={{1er}} juin 2006}}</ref>. Pour Robinson, les innovations de Chaplin furent {{citation|rapidement assimilées et devinrent les pratiques de base de la réalisation cinématographique}}{{sfn|Robinson|1986|p=321}}. [[Federico Fellini]] (qui définit Chaplin comme {{citation|une sorte d'[[Adam]] duquel nous sommes tous issus}}{{sfn|Robinson|1986|p=632}}), [[Jacques Tati]] ({{citation|sans lui, je n'aurais jamais fait un film}}{{sfn|Robinson|1986|p=632}}), René Clair ({{citation|il a inspiré pratiquement tous les réalisateurs}}{{sfn|Robinson|1986|p=631}}), [[Michael Powell]]{{sfn|Brownlow|2010|p=77}}, [[Billy Wilder]]<ref name="story of film">{{citation épisode |titre=Episode 2 |série=The Story of Film: An Odyssey |crédits=Mark Cousins |réseau=[[Channel 4]] |chaîne=[[More4]] |diffusion=10 septembre 2012}}</ref> et [[Richard Attenborough]]<ref>{{lien web |titre=Attenborough introduction |url=http://chaplin.bfi.org.uk/programme/attenborough.html |éditeur=British Film Institute |consulté le=11 février 2013}}</ref> figurent parmi les réalisateurs ayant affirmé avoir été influencés par Chaplin.


En français, [[Jacques Dumesnil]] double Chaplin dans ''[[Monsieur Verdoux]]'', ''[[Les Feux de la rampe]]'' et ''[[Un roi à New York]]''. Chaplin est également doublé par [[Henri Virlogeux]] dans la version sonorisée de [[1942 au cinéma|1942]] de ''[[La Ruée vers l'or]]'', en [[1968 au cinéma|1968]] par [[Roger Carel]] dans ''[[Le Dictateur]]'' et par [[Jean-Henri Chambois]] dans ''[[La Comtesse de Hong-Kong]]''.
Chaplin inspira également de futurs comédiens, comme [[Marcel Marceau]], qui indiqua qu'il se décida à devenir mime après l'avoir vu<ref name="silent clowns"/>, ou [[Raj Kapoor]], qui basa son jeu sur celui de Charlot<ref name="story of film" />. Mark Cousins a également identifié le style comique de Chaplin chez les personnages français de [[Monsieur Hulot]] et italien de [[Totò]]<ref name="story of film" />, sans oublier qu'il a également influencé des personnages de dessin animé comme [[Félix le Chat]]{{sfn|Canemaker|1996|p=38, 78}} ou [[Mickey Mouse]]{{sfn|Jackson|2003|p=439-444}}. En tant que membre fondateur de la United Artists, Chaplin eut un rôle important dans le développement de l'industrie cinématographique. Gerald Mast a noté que même si cette société ne rivalisa jamais avec la [[Metro-Goldwyn-Mayer|MGM]] ou la [[Paramount Pictures|Paramount]], l'idée que des réalisateurs puissent produire leurs propres films était {{citation|très en avance sur son temps}}{{sfn|Mast|1985|p=100}}.


'''Longs métrages :'''
À l'occasion de l'exposition universelle de Bruxelles, en 1958, un jury international de 117 critiques établit un classement des meilleurs films de tous les temps : ''[[La Ruée vers l'or]]'' (1925) fut classé deuxième derrière ''[[Le Cuirassé « Potemkine »]]'' de [[Sergueï Eisenstein]] (1925) et devant ''[[Le Voleur de bicyclette]]'' de [[Vittorio De Sica]] (1948). Plusieurs des films de Chaplin restent encore aujourd'hui considérés comme parmi les plus grands jamais réalisés. Le palmarès 2012 de la revue britannique ''[[Sight and Sound]]'', mené auprès de critiques de cinéma sur les meilleurs films de l'histoire, liste respectivement ''Les Lumières de la ville'', ''Les Temps modernes'', ''Le Dictateur'' et ''La Ruée vers l'or'' aux {{50e}}, {{63e}}, {{144e}} et {{154e}} places<ref>{{lien web |titre=The Greatest Films Poll: Critics Top 250 Films |url=http://explore.bfi.org.uk/sightandsoundpolls/2012/critics/ |périodique=Sight & Sound |éditeur=British Film Institute |consulté le=31 janvier 2013}}</ref> ; la même étude réalisée auprès de réalisateurs situe ''Les Temps modernes'' à la {{22e}} place, ''Les Lumières de la ville'' à la {{30e}} et ''La Ruée vers l'or'' à la {{91e}}<ref>{{lien web |titre=Directors' Top 100 Films |url=http://explore.bfi.org.uk/sightandsoundpolls/2012/directors/ |éditeur=British Film Institute |consulté le=8 février 2013}}</ref>. En 2007, l'{{lang|en|[[American Film Institute]]}} nomma ''Les Lumières de la ville'' le {{11e}} [[AFI's 100 Years...100 Movies|plus grand film américain de tous les temps]], tandis que ''La Ruée vers l'or'' et ''Les Temps modernes'' figuraient dans le top 100<ref>{{lien web |titre=AFI's 100 Years … 100 Movies - 10th Anniversary Edition |url=http://www.afi.com/100Years/movies10.aspx |éditeur=American Film Institute |consulté le=8 février 2013}}</ref>.
* [[1921 au cinéma|1921]] : ''[[Le Kid]]''
* [[1923 au cinéma|1923]] : ''[[L'Opinion publique]]''
* [[1925 au cinéma|1925]] : ''[[La Ruée vers l'or]]''
* [[1928 au cinéma|1928]] : ''[[Le Cirque (film)|Le Cirque]]''
* [[1931 au cinéma|1931]] : ''[[Les Lumières de la ville]]''
* [[1936 au cinéma|1936]] : ''[[Les Temps modernes (film)|Les Temps modernes]]''
* [[1940 au cinéma|1940]] : ''[[Le Dictateur]]''
* [[1947 au cinéma|1947]] : ''[[Monsieur Verdoux]]''
* [[1952 au cinéma|1952]] : ''[[Les Feux de la rampe]]''
* [[1957 au cinéma|1957]] : ''[[Un roi à New York]]''
* [[1967 au cinéma|1967]] : ''[[La Comtesse de Hong-Kong]]''


== Hommages ==
== Reconnaissance ==
=== Distinctions ===
[[Fichier:Charlie Chaplin-Leicester Square-London.jpg|thumb|alt=Statue en bronze de Charlot dans un parc devant un cinéma|Statue de Chaplin réalisée en 1981 par John Doubleday et vue sur la [[Leicester Square|place Leicester]] à Londres (maintenant installée sur Leicester Place, face au Prince Charles Cinéma, quelques pas plus loin). ]][[Fichier:Stele of Charles Chaplin.JPG|thumb|Stèle de Charles Chaplin dans le parc Chaplin, à [[Corsier-sur-Vevey]], où il vécut de [[1953]] jusqu'à sa mort en [[1977]].]]
[[Fichier:Chaplin oscar.JPG|thumb|alt=Photographie de Chaplin au visage bouffi et en costume de soirée avec Jack Lemmon à sa droite derrière un pupitre où se trouve une statuette et deux micros|Chaplin (à droite) reçoit son [[Oscar d'honneur]] des mains de [[Jack Lemmon]] en {{date-|1972}}.]]
Chaplin a reçu de nombreuses récompenses et distinctions, particulièrement à la fin de sa vie. En {{date-|1962}}, les universités de Durham et d'Oxford lui décernent un diplôme honorifique de docteur ès Lettres{{sfn|Robinson|1986|p=598-599}}. En {{date-|1965}}, il partage le [[prix Érasme]] avec [[Ingmar Bergman]]{{sfn|Robinson|1986|p=610}}, et en {{date-|1971}}, il est fait commandeur de l'[[Ordre national de la Légion d'honneur]] par le gouvernement [[France|français]]<ref>{{lien web|langue=fr|url=https://fresques.ina.fr/festival-de-cannes-en/fiche-media/Cannes00416/homage-to-charlie-chaplin.html|titre=Homage to Charlie Chaplin |site=[[Institut national de l'audiovisuel|INA]]|consulté le=14 mai 2020}}.</ref>. En {{date-|1975}}, il est anobli par la reine [[Élisabeth II]] et fait [[Ordre de l'Empire britannique|chevalier commandeur de l'Ordre de l'Empire britannique]], devenant {{citation|[[Sir (noblesse)|sir]] Charles Chaplin}}<ref>{{lien web|langue=en|url=http://news.bbc.co.uk/onthisday/hi/dates/stories/march/4/newsid_2794000/2794107.stm |titre=Comic genius Chaplin is knighted |éditeur=[[BBC]] |consulté le=15 février 2010 |date=4 mars 1975}}.</ref>.


L'industrie cinématographique le récompense avec un [[Lion d'or]] spécial à la [[Mostra de Venise 1972]]{{sfn|Robinson|1986|p=625-626}}, ainsi qu'une étoile sur le [[Hollywood Walk of Fame]] en {{date-|1970}} (cette inscription lui est auparavant refusée en raison de ses opinions politiques{{sfn|Williams|2006|p=311}}).
En avril 2016, le [[manoir de Ban]] à [[Corsier-sur-Vevey]] en Suisse, où il a passé les vingt-cinq dernières années de son existence, est devenu un musée consacré à sa vie et son œuvre. Le musée, appelé « ''{{lang|en|Chaplin's World}}'' »<ref>[http://www.chaplinsworld.com Site du musée "Chaplin's World"]</ref>, est le fruit d'un partenariat entre la Compagnie des Alpes (CDA), Genii Capital et Chaplin Museum Development (CMD)<ref>[http://www.rts.ch/info/regions/vaud/5583154-la-signature-d-un-accord-concretise-le-musee-chaplin-a-corsier-sur-vevey.html La signature d'un accord concrétise le musée Chaplin à Corsier-sur-Vevey], 4 février 2014 [[Radio télévision suisse]]</ref>. La commune de [[Corsier-sur-Vevey]] a donné son nom à un parc et une stèle y rappelle la mémoire de l'illustre résident.


Chaplin reçoit au total trois [[Oscars du cinéma|Oscars]] : un premier [[Oscar d'honneur]] en [[1re cérémonie des Oscars|1929]] {{citation|pour sa polyvalence et son génie à jouer, écrire, mettre en scène et produire ''Le Cirque''<ref name="circus"/>}}, un second en [[44e cérémonie des Oscars|1972]] {{citation|pour l'effet incalculable qu'il a eu en faisant des films de cinéma la forme d'art de ce siècle}}{{sfn|Robinson|1986|p=623-625}} et un troisième en [[45e cérémonie des Oscars|1973]] pour [[Oscar de la meilleure musique de film|la meilleure musique originale]] (conjointement avec Ray Rasch et Larry Russell), pour ''Les Feux de la Rampe''<ref name="VarietyVance"/>. Il est également nommé dans les catégories du [[Oscar du meilleur acteur|meilleur acteur]], du [[Oscar du meilleur film|meilleur film]] et du [[Oscar du meilleur scénario original|meilleur scénario]] pour ''Le Dictateur'', ainsi que dans celle du meilleur scénario pour ''Monsieur Verdoux''<ref>{{lien web |langue=en |url=https://www.oscars.org/oscars/ceremonies/1941 |titre= The 13TH Academy Awards |éditeur=Academy of Motion Picture Arts and Sciences |consulté le=14 mai 2020}}.</ref>.
La ville voisine de [[Vevey]] a nommé en son honneur un square{{sfn|Robinson|1986|p=677}} sur le quai Perdonnet, au bord du lac Léman, et y a édifié en 1982 une statue de Chaplin, œuvre du sculpteur britannique John Doubleday<ref>[http://www.vevey.ch/N226/notes-historiques.html Notes historiques], [http://www.vevey.ch vevey.ch], consulté le 16 février 2014.</ref>. Au nord de la ville, à quelques centaines de mètres du [[Manoir de Ban]], deux immeubles de 14 étages ont été décorés de fresques évoquant la carrière de l'artiste<ref>{{lien web |url=http://www.rts.ch/info/suisse/3490412-vevey-les-tours-chaplin-ont-ete-inaugurees.html |titre=Vevey: les tours "Chaplin" ont été inaugurées |jour=8 |mois=octobre |année=2011 |éditeur=RTS.ch |consulté le=22 juillet 2012}}</ref>.


Six des films de Chaplin ont été sélectionnés pour être préservés dans le {{langue|en|[[National Film Registry]]}} de la [[Bibliothèque du Congrès]] américaine : ''L'Émigrant'' ({{date-|1917}}), ''Le Kid'' ({{date-|1921}}), ''La Ruée vers l'or'' ({{date-|1925}}), ''Les Lumières de la ville'' ({{date-|1931}}), ''Les Temps modernes'' ({{date-|1936}}) et ''Le Dictateur'' ({{date-|1940}})<ref>{{lien web |langue=en |titre=National Film Registry |url=https://www.loc.gov/programs/national-film-preservation-board/film-registry/complete-national-film-registry-listing/ |éditeur=Library of Congress |consulté le=14 mai 2020}}.</ref>.
La ville [[Irlande (île)|irlandaise]] de [[Waterville (Irlande)|Waterville]], où Chaplin passa plusieurs étés en famille dans les années 1960, accueille chaque année depuis 2011 le {{lang|en|Charlie Chaplin Comedy Film Festival}} destiné à honorer l'héritage du comédien et à découvrir de nouveaux talents<ref>{{lien web |url=http://chaplinfilmfestival.com/the-story/ |titre=The Story |éditeur=Charlie Chaplin Comedy Film Festival |consulté le=22 juillet 2012}}</ref>. Parmi les autres hommages, un [[planète mineure|objet mineur]], [[(3623) Chaplin]], a été nommé en son honneur en 1981 par l'astronome soviétique [[Lioudmila Karatchkina]]{{sfn|Schmadel|2003|p=305}} et de très nombreux pays ont émis des [[Timbre postal|timbres]] portant son effigie<ref>{{lien web |titre=Charlie Chaplin Stamps |url=http://chaplinstamps.blogspot.co.uk/ |éditeur=Blogger |consulté le=8 février 2013}}</ref>.


=== Postérité ===
L'héritage de Chaplin est géré par l'Association Chaplin, fondée par plusieurs de ses enfants, et qui possède les droits d'auteur sur son image, son nom et sur la plupart des films réalisés après 1918<ref>{{lien web |url=http://www.charliechaplin.com/fr/contacts/articles/148-Association-Chaplin |titre=Association Chaplin |éditeur=Association Chaplin |consulté le=13 juillet 2013}}</ref>{{,}}<ref>{{lien web |url=http://www.thelittlefellow.org/newsletter.html |titre=Interview with Kate Guyonvarch |éditeur=Lisa K. Stein |consulté le=24 juillet 2013}}</ref>. La [[Cinémathèque de Bologne]], en [[Italie]], abrite les principales archives de l'Association, dont {{formatnum:86630}} images, 976 manuscrits et {{formatnum:7756}} lettres<ref>{{lien web |titre=Charlie Chaplin Archive |url=http://www.charliechaplinarchive.org/sito/cerca/596/ |éditeur=[[Cineteca di Bologna|Cineteca Bologna]] |consulté le=11 février 2013}}</ref>. Plus de {{formatnum:10000}} photographies sur sa vie et sa carrière sont également entreposées au [[Musée de l'Élysée]] à [[Lausanne]], en Suisse<ref>{{lien web |url=http://www.elysee.ch/en/collections/chaplin-at-the-musee-de-lelysee/ |titre=Chaplin at the Musée de l'Elysée |éditeur=Musée de l'Élysée |consulté le=12 juillet 2013}}</ref>. Au Royaume-Uni, le {{lang|en|British Film Institute}} accueille depuis 2010 une exposition permanente intitulée ''{{lang|en|Charlie Chaplin - The Great Londoner}}''<ref>{{lien web |url=http://www.londonfilmmuseum.com/south-bank/about-us/ |titre=London Film Museum: About Us |éditeur=London Film Museum |consulté le=22 juillet 2012}}</ref>, et il a fondé le {{lang|en|Charles Chaplin Research Foundation}}, qui a organisé la première conférence internationale sur le cinéaste à Londres, en juillet 2005<ref>{{lien web |titre=The BFI Charles Chaplin Conference juillet 2005 |url=http://chaplin.bfi.org.uk/programme/conference/ |éditeur=British Film Institute |consulté le=11 février 2013}}</ref>.
[[Fichier:The Tramp Essanay.jpg|thumb|upright|alt=Photographie en pied de Charlot souriant|Chaplin dans son rôle de [[Charlot]] en {{date-|1915}}.]]


En {{date-|1998}}, le critique Andrew Sarris écrivit que Chaplin est {{citation|sans doute le plus grand artiste que le cinéma ait créé, certainement son interprète le plus extraordinaire et probablement encore son icône la plus universelle}}{{sfn|Sarris|1998|p=139}}. Il est décrit par le {{langue|en|British Film Institute}} comme {{citation|une figure tutélaire de la culture mondiale}}<ref>{{lien web |langue=en |url=http://chaplin.bfi.org.uk/ |titre=Charlie Chaplin |éditeur=British Film Institute |consulté le=7 octobre 2012}}.</ref>, et le magazine ''[[Time (magazine)|Time]]'' le lista parmi les 100 personnes les plus importantes du {{s-|XX|e}} pour {{citation|les rires [qu'il a apportés] à des millions de personnes}} et parce qu'il a {{citation|plus ou moins inventé la célébrité mondiale et aidé à transformer une industrie en un art}}<ref>{{Article|langue=en|prénom1=Joshua|nom1=Quittner|titre=TIME 100: Charlie Chaplin|périodique=[[Time (magazine)|Time]]|date=08-06-1998|url=https://web.archive.org/web/20110523194732/http://www.time.com/time/time100/artists/profile/chaplin.html|consulté le=11 novembre 2013|pages=}}.</ref>.
Chaplin a fait l'objet d'un [[film biographique]] réalisé par Richard Attenborough, ''[[Chaplin (film, 1992)|Chaplin]]'', en 1992 ; il y est personnifié par [[Robert Downey Jr.]], qui fut nommé à l'Oscar du meilleur acteur et remporta le [[British Academy Film Award du meilleur acteur|BAFTA du meilleur acteur]]<ref>{{lien web |titre=Robert Downey, Jr. profile |série=Finding Your Roots |url=https://www.pbs.org/wnet/finding-your-roots/profiles/robert-downey-jr/ |éditeur=[[Public Broadcasting Service|PBS]] |consulté le=9 février 2013}}</ref>. Il fut également joué par [[Eddie Izzard]] dans le film ''[[Un parfum de meurtre]]'' (2001)<ref>{{lien web |titre=The Cat's Meow - Cast |url=https://www.nytimes.com/movies/movie/251894/The-Cat-s-Meow/cast |éditeur=Movies - The New York Times |consulté le=9 novembre 2013}}</ref>. Une série télévisée sur l'enfance de Chaplin, ''{{lang|en|Young Charlie Chaplin}}'', fut diffusée par [[Public Broadcasting Service|PBS]] en 1989 et fut nommée pour l'[[Emmy Awards|Emmy Award]] de meilleur programme pour enfants<ref>{{lien web |titre=Young Charlie Chaplin Wonderworks |url=http://www.emmys.com/shows/young-charlie-chaplin-wonderworks |éditeur=Emmys |consulté le=9 novembre 2013}}</ref>.


L'historien du cinéma Christian Hansmeyer a noté que l'image de Charlot fait partie de l'histoire culturelle{{sfn|Hansmeyer|1999|p=3}} ; selon Simon Louvish, ce personnage est connu même dans les endroits où ses films n'ont jamais été projetés{{sfn|Louvish|2010|p=xvii}}. Le critique [[Richard Schickel]] suggère que les films de Chaplin avec Charlot présentent {{citation|les expressions comiques de l'esprit humain les plus éloquentes et les plus riches}} de l'histoire du cinéma{{sfn|Schickel|2006|p=41}}. Les objets associés au personnage continuent de fasciner le public et en 2006, un chapeau melon et une canne en bambou ayant appartenu à Chaplin sont achetés {{unité|140000|dollars}} lors d'une vente aux enchères à Los Angeles<ref>{{lien web |langue=en |url=http://news.bbc.co.uk/1/hi/entertainment/5116474.stm|titre=Record price for Chaplin hat set |site=news.bbc.co.uk|consulté le=7 octobre 2012}}.</ref>.
''[[La Rançon de la gloire (film, 2014)|La Rançon de la gloire]]'' ([[2014 au cinéma|2014]]), de [[Xavier Beauvois]], évoque par ailleurs le vol de la dépouille de Charlie Chaplin en 1978.


En tant que réalisateur, Chaplin est considéré comme un pionnier et l'une des figures les plus influentes du début du {{s-|XX|e}}{{sfn|Cousins|2004|p=72}}{{,}}{{sfn|Kemp|2011|p=8, 22}}{{,}}{{sfn|Hansmeyer|1999|p=3}}{{,}}{{sfn|Sarris|1998|p=139}}. L'historien du cinéma Mark Cousins a écrit que Chaplin {{citation|a changé non seulement l'imagerie du cinéma mais également sa sociologie et sa grammaire}} et avance qu'il joua un rôle important dans l'établissement de la comédie en tant que genre, parallèlement à ce qu'avait fait [[D. W. Griffith]] pour le drame{{sfn|Cousins|2004|p=70}}. Il est le premier à populariser les longs-métrages comiques et à ralentir le rythme de l'action pour y ajouter de la finesse et du pathos{{sfn|Schickel|2006|p=7, 13}}{{,}}<ref name="silent clowns">{{citation épisode |titre=Charlie Chaplin |série=Silent Clowns |crédits=présenté par Paul Merton, réalisé par Tom Cholmondeley |réseau=[[British Broadcasting Corporation]] |chaîne=[[BBC Four]] |airdate={{1er}} juin 2006}}</ref>. Pour Robinson, les innovations de Chaplin sont {{citation|rapidement assimilées et deviennent les pratiques de base de la réalisation cinématographique}}{{sfn|Robinson|1986|p=321}}. [[Federico Fellini]] (qui définit Chaplin comme {{citation|une sorte d'[[Adam]] duquel nous sommes tous issus}}{{sfn|Robinson|1986|p=632}}), [[Jacques Tati]] ({{citation|sans lui, je n'aurais jamais fait un film}}{{sfn|Robinson|1986|p=632}}), [[René Clair]] ({{citation|il a inspiré pratiquement tous les réalisateurs}}{{sfn|Robinson|1986|p=631}}), [[Michael Powell]]{{sfn|Brownlow|2010|p=77}}, [[Billy Wilder]]<ref name="story of film">{{citation épisode |titre=Episode 2 |série=The Story of Film: An Odyssey |crédits=Mark Cousins |réseau=[[Channel 4]] |chaîne=[[More4]] |airdate=10 septembre 2012}}</ref> et [[Richard Attenborough]]<ref>{{lien web |langue=en |titre=Attenborough introduction |url=http://chaplin.bfi.org.uk/programme/attenborough.html |éditeur=British Film Institute |consulté le=11 février 2013}}.</ref> figurent parmi les réalisateurs ayant affirmé avoir été influencés par Chaplin.
== Récompenses et distinctions ==
[[Fichier:Charlie Chaplin walk of fame.jpg|thumb|alt=Étoile rouge avec un liseré d'or sur un trotoir noir. « Charlie Chaplin » est écrit en lettres dorées au-dessus d'un emblème circulaire en laiton représentant une caméra.|Étoile de Chaplin sur le {{lang|en|[[Walk of Fame (Hollywood)|Walk of Fame]]}} d'Hollywood.]]
Chaplin reçut de nombreuses récompenses et distinctions, particulièrement à la fin de sa vie. En 1962, les universités de Durham et d'Oxford lui décernèrent un diplôme honorifique de docteur ès Lettres{{sfn|Robinson|1986|p=598-599}}. En 1965, il partagea le [[prix Érasme]] avec [[Ingmar Bergman]]{{sfn|Robinson|1986|p=610}}, et en 1971, il fut fait commandeur de l'[[Ordre national de la Légion d'honneur]] par le gouvernement français<ref>{{lien web |url=http://www.festival-cannes.com/en/article/57899.html|titre=Tribute to Charlie Chaplin |éditeur=Festival de Cannes |consulté le=25 juin 2012}}</ref>. En 1975, il fut anobli par la reine [[Élisabeth II]] et fait [[Ordre de l'Empire britannique|chevalier commandeur de l'Ordre de l'Empire britannique]]<ref>{{lien web |url=http://news.bbc.co.uk/onthisday/hi/dates/stories/march/4/newsid_2794000/2794107.stm |titre=Comic genius Chaplin is knighted |éditeur=BBC |consulté le=15 février 2010 |date=4 mars 1975}}</ref>.


Chaplin inspire également les [[poésie|poètes]] [[avant-garde (poésie)|avant-gardistes]] du {{s-|XX}}<ref>{{Article|langue=fr|auteur1=Sandrine Montin|responsabilité1=dir.|titre=Charlot, ce poète ? Chaplin et la poésie|périodique=Loxias|numéro=49|date=juin 2015|lire en ligne=https://www.fabula.org/actualites/loxias-n-49-charlot-ce-poete-s-montin-dir_69160.php|consulté le=15 mai 2020}}.</ref>, mais aussi de futurs comédiens, comme [[Marcel Marceau]], qui a indiqué s'être décidé à devenir mime après l'avoir vu<ref name="silent clowns"/>, ou [[Raj Kapoor]], qui base son jeu sur celui de Charlot<ref name="story of film" />. Mark Cousins a également identifié le style comique de Chaplin chez les personnages français de [[Monsieur Hulot]] et italien de [[Totò]]<ref name="story of film" />, sans oublier qu'il a également influencé des personnages de dessin animé comme [[Félix le Chat]]{{sfn|Canemaker|1996|p=38, 78}} ou [[Mickey Mouse]]{{sfn|Jackson|2003|p=439-444}}. En tant que membre fondateur de la United Artists, Chaplin a un rôle important dans le développement de l'industrie cinématographique. Gerald Mast a noté que même si cette société n'a jamais rivalisé avec la [[Metro-Goldwyn-Mayer|MGM]] ou la [[Paramount Pictures|Paramount]], l'idée que des réalisateurs puissent produire leurs propres films était {{citation|très en avance sur son temps}}{{sfn|Mast|1985|p=100}}.
L'industrie cinématographie le récompensa avec un [[Lion d'or]] spécial à la [[Mostra de Venise]] de 1972{{sfn|Robinson|1986|p=625-626}}, ainsi qu'une étoile sur le {{lang|en|[[Walk of Fame (Hollywood)|Walk of Fame]]}} d'Hollywood en 1970 (cette inscription lui avait auparavant été refusée en raison de ses opinions politiques{{sfn|Williams|2006|p=311}}).


À l'occasion de l'[[Exposition universelle de 1958|exposition universelle de Bruxelles]], en {{date-|1958}}, un jury international de 117 critiques a établi un classement des meilleurs films de tous les temps : ''[[La Ruée vers l'or]]'' ({{date-|1925}}) est classé deuxième derrière ''[[Le Cuirassé Potemkine]]'' de [[Sergueï Eisenstein]] ({{date-|1925}}) et devant ''[[Le Voleur de bicyclette]]'' de [[Vittorio De Sica]] ({{date-|1948}}). Plusieurs des films de Chaplin restent encore aujourd'hui considérés comme parmi les plus grands jamais réalisés. Le palmarès 2012 de la revue britannique ''[[Sight and Sound]]'', mené auprès de critiques de cinéma sur les meilleurs films de l'histoire, liste respectivement ''Les Lumières de la ville'', ''Les Temps modernes'', ''Le Dictateur'' et ''La Ruée vers l'or'' aux {{50e}}, {{63e}}, {{144e}} et {{154e}} places<ref>{{lien web |langue=en |titre=Sight And Sound Top 250 By The Numbers: And The Auteur With The Most Films Is… |url=https://www.indiewire.com/2012/08/sight-and-sound-top-250-by-the-numbers-and-the-auteur-with-the-most-films-is-107028/ |site=IndieWire |date=17 août 2012 |consulté le=14 mai 2020}}.</ref> ; la même étude réalisée auprès de réalisateurs situe ''Les Temps modernes'' à la {{22e}} place, ''Les Lumières de la ville'' à la {{30e}} et ''La Ruée vers l'or'' à la {{91e}}<ref>{{lien web |langue=en |titre=Directors' Top 100 Films |url=https://www.bfi.org.uk/films-tv-people/sightandsoundpoll2012/directors |éditeur=British Film Institute |consulté le=14 mai 2020}}.</ref>. En 2007, l'{{langue|en|[[American Film Institute]]}} nomme ''Les Lumières de la ville'' le {{11e}} [[AFI's 100 Years...100 Movies|plus grand film américain de tous les temps]], tandis que ''La Ruée vers l'or'' et ''Les Temps modernes'' figurent dans le {{nobr|top 100}}<ref>{{lien web |langue=en |titre=AFI's 100 Years … 100 Movies - 10th Anniversary Edition |url=http://www.afi.com/100Years/movies10.aspx |site=American Film Institute |consulté le=8 février 2013}}.</ref>.
Chaplin reçut au total trois [[Oscars du cinéma|Oscars]] : un premier Oscar d'honneur en 1929 {{citation|pour sa polyvalence et son génie à jouer, écrire, mettre en scène et produire ''Le Cirque''<ref name="circus"/>}}, un second en 1972 {{citation|pour l'effet incalculable qu'il a eu en faisant des films de cinéma la forme d'art de ce siècle{{sfn|Robinson|1986|p=623-625}}}} et un troisième en 1973 pour la meilleure musique originale (conjointement avec Ray Rasch et Larry Russell), pour ''Les Feux de la Rampe''<ref name="VarietyVance"/>. Il fut également nommé dans les catégories du meilleur acteur, du meilleur film et du meilleur scénario pour ''Le Dictateur'', ainsi que dans celle du meilleur scénario pour ''Monsieur Verdoux''<ref>{{lien web |url=http://www.oscars.org/awards/academyawards/legacy/ceremony/13th-winners.html |titre= The 13th Academy Awards: Nominees and Winners |éditeur=Academy of Motion Picture Arts and Sciences |consulté le=25 juin 2012}}</ref>.


=== Hommages ===
Six des films de Chaplin ont été sélectionnés pour être préservés dans le {{lang|en|[[National Film Registry]]}} de la [[Bibliothèque du Congrès]] américaine : ''L'Émigrant'' (1917), ''Le Kid'' (1921), ''La Ruée vers l'or'' (1925), ''Les Lumières de la ville'' (1931), ''Les Temps modernes'' (1936) et ''Le Dictateur'' (1940)<ref>{{lien web |titre=National Film Registry |url=https://www.loc.gov/film/registry_titles.php? |éditeur=Library of Congress |consulté le=5 novembre 2013}}</ref>.
[[Fichier:Charlie Chaplin-Leicester Square-London.jpg|thumb|alt=Statue en bronze de Charlot dans un parc devant un cinéma|Statue de Chaplin réalisée en {{date-|1981}} par [[John Doubleday]] et vue sur la [[Leicester Square|place Leicester]] à Londres (maintenant installée sur Leicester Place, face au {{lien|Prince Charles Cinema}}, quelques pas plus loin).]]


[[Fichier:Stele of Charles Chaplin.JPG|thumb|alt=Stèle en bronze dans le Parc Charlie Chaplin|Stèle de bronze réalisée par le sculpteur Frédéric Müller installée dans le Parc Chaplin à [[Corsier-sur-Vevey]] non loin du Manoir de Ban où vécut l'artiste avec sa famille.]]
== Filmographie ==
{{Article détaillé|Filmographie de Charlie Chaplin}}
À l'occasion de la publication de son autobiographie, Chaplin a établi sa filmographie, qui se composait alors de 80 films (''La Comtesse de Hong-Kong,'' réalisé trois ans plus tard, s'y est par la suite ajouté). En 2010, une copie de ''[[La Course au voleur]]'', réalisé en 1914 et jusqu'alors considéré comme [[Film perdu|perdu]], fut découverte chez un antiquaire du [[Michigan]], portant ainsi sa filmographie à 82 films<ref>{{lien web |url=http://criterioncast.com/2010/06/08/charlie-chaplin-film-found-at-an-antique-sale-once-thought-lost/ |titre=Charlie Chaplin Film Found at an Antique Sale, Once Thought Lost |prénom1=Joshua |nom1=Brunsting |éditeur=The Criterion Cast |date=8 juin 2010 |consulté le=9 juin 2010}}</ref>.


En avril 2016, le [[manoir de Ban]] à [[Corsier-sur-Vevey]] en Suisse, où il a passé les vingt-cinq dernières années de son existence, est devenu un musée consacré à sa vie et son œuvre. Le musée, appelé « ''{{langue|en|Chaplin's World}}'' »<ref>{{lien web|url=https://www.24heures.ch/culture/chaplin-musee/story/29443077|titre=Chaplin est entré au musée|site=[[24 Heures (Suisse)|24 Heures]]|auteur=Gérald Cordonier|date=17 avril 2016|consulté=14 mai 2020}}.</ref>, est le fruit d'un partenariat entre la Compagnie des Alpes (CDA), Genii Capital et Chaplin Museum Development (CMD)<ref>{{lien web|url=http://www.rts.ch/info/regions/vaud/5583154-la-signature-d-un-accord-concretise-le-musee-chaplin-a-corsier-sur-vevey.html|titre=La signature d'un accord concrétise le musée Chaplin à Corsier-sur-Vevey|date=4 février 2014|site=[[Radio télévision suisse]]|consulté=14 mai 2020}}.</ref>. La commune de [[Corsier-sur-Vevey]] a donné son nom à un parc et une stèle y rappelle la mémoire de l'illustre résident.
Tous les films de Chaplin, jusqu'au ''Cirque'' inclus, sont muets, même si certains ont été réédités avec des [[Bande-son|bandes-son]]. ''Les Lumières de la ville'' et ''Les Temps modernes'' sont muets, mais intègrent des bandes-son composées de musique, de [[bruiteur|bruitages]] et de séquences parlées pour le second. Les cinq derniers films de Chaplin sont parlants. Hormis ''La Comtesse de Hong-Kong'', tous les films de Chaplin furent tournés en [[format 35 mm]], [[noir et blanc]].


La ville voisine de [[Vevey]] a nommé en son honneur un square{{sfn|Robinson|1986|p=677}} sur le quai Perdonnet, au bord du lac Léman, et y a édifié en {{date-|1982}} une statue de Chaplin, œuvre du sculpteur britannique [[John Doubleday]]<ref>{{lien web|url=http://www.vevey.ch/N226/notes-historiques.html|titre=Notes historiques|site=Ville de Vevey|consulté le=16 février 2014}}.</ref>. Au nord de la ville, à quelques centaines de mètres du [[Manoir de Ban]], deux immeubles de {{nb|14 étages}} ont été décorés de fresques évoquant la carrière de l'artiste<ref>{{lien web |url=http://www.rts.ch/info/suisse/3490412-vevey-les-tours-chaplin-ont-ete-inaugurees.html |titre=Vevey: les tours "Chaplin" ont été inaugurées |jour=8 |mois=octobre |année=2011 |site=RTS.ch |consulté le=22 juillet 2012}}.</ref>.
=== Longs métrages ===


La ville [[Irlande (île)|irlandaise]] de [[Waterville (Irlande)|Waterville]], où Chaplin passa plusieurs étés en famille dans les années {{date-|1960}}, accueille chaque année depuis 2011 le {{langue|en|Charlie Chaplin Comedy Film Festival}} destiné à honorer l'héritage du comédien et à découvrir de nouveaux talents<ref>{{lien web |langue=en |url=http://chaplinfilmfestival.com/the-story/ |titre=The Story |site=Charlie Chaplin Comedy Film Festival |consulté le=22 juillet 2012}}.</ref>.
* ''[[Le Kid]]'' (1921)
* ''[[L'Opinion publique]]'' (1923)
* ''[[La Ruée vers l'or]]'' (1925)
* ''[[Le Cirque (film)|Le Cirque]]'' (1928)
* ''[[Les Lumières de la ville]]'' (1931)
* ''[[Les Temps modernes (film)|Les Temps modernes]]'' (1936)
* ''[[Le Dictateur]]'' (1940)
* ''[[Monsieur Verdoux]]'' (1947)
* ''[[Les Feux de la rampe]]'' (1952)
* ''[[Un roi à New York]]'' (1957)
* ''[[La Comtesse de Hong-Kong]]'' (1967)


Parmi les autres hommages, une [[planète mineure]], [[(3623) Chaplin]], a été nommée en son honneur en {{date-|1981}} par l'astronome soviétique [[Lioudmila Karatchkina]]{{sfn|Schmadel|2003|p=305}} et de très nombreux pays ont émis des [[Timbre postal|timbres]] portant son effigie<ref>{{lien web |langue=en |titre=Charlie Chaplin Stamps |url=http://chaplinstamps.blogspot.co.uk/ |site=Chaplin stamps |consulté le=8 février 2013}}.</ref>.
== Distinctions ==

=== Récompenses ===
L'héritage de Chaplin est géré par l'Association Chaplin, fondée par plusieurs de ses enfants, et qui possède les droits d'auteur sur son image, son nom et sur la plupart des films réalisés après {{date-|1918}}<ref>{{lien web |langue=en |url=http://www.charliechaplin.com/fr/contacts/articles/148-Association-Chaplin |titre=Association Chaplin |éditeur=Association Chaplin |consulté le=13 juillet 2013}}.</ref>. La [[Cinémathèque de Bologne]], en [[Italie]], abrite les principales archives de l'Association, dont des images, des manuscrits et des lettres<ref>{{lien web |langue=en |titre=Fondazione Cineteca di Bologna |url=http://www.charliechaplinarchive.org/en/about/chi-siamo/la-fondazione-cineteca-di-bologna |site=[[Cineteca di Bologna|Cineteca Bologna]] |consulté le=14 mai 2020}}.</ref>. Plus de {{formatnum:10000}} photographies sur sa vie et sa carrière sont également entreposées au [[Musée de l'Élysée]] à [[Lausanne]], en Suisse<ref>{{lien web |url=http://www.elysee.ch/collections-et-bibliotheque/les-collections/fonds-photographiques/le-fonds-chaplin-au-musee-de-lelysee/ |titre=Le Fonds Chaplin au Musée de l'Elysée |site=Musée de l'Élysée |consulté le=14 mai 2020}}.</ref>. Au Royaume-Uni, le {{langue|en|Cinema Museum}} au sud de [[Londres]] est considéré comme {{citation|la chose la plus proche d'un musée Chaplin que la Grande-Bretagne possède}} par la famille de Charlie Chaplin<ref>{{lien web |langue=en |auteur=Dalya Alberge |url=https://www.theguardian.com/culture/2017/dec/13/charlie-chaplin-family-join-fight-to-save-cinema-museum-london-workhouse-letter |titre=Charlie Chaplin family join fight to save Cinema Museum in London |site=[[The Guardian]] |consulté le=14 mai 2020}}.</ref>. La [[British Film Institute]] a fondé la {{langue|en|Charles Chaplin Research Foundation}}, qui a organisé la première conférence internationale sur le cinéaste à Londres, en juillet 2005<ref>{{lien web |langue=en |titre=The BFI Charles Chaplin Conference juillet 2005 |url=http://chaplin.bfi.org.uk/programme/conference/ |site=British Film Institute |consulté le=11 février 2013}}.</ref>.
* [[1re cérémonie des Oscars|{{1re|cérémonie}} des Oscars 1929]] : Lauréat de l'[[Oscar d'honneur]] - Pour sa polyvalence et son génie à jouer, écrire, mettre en scène et produire ''[[Le Cirque (film)|Le Cirque]] (The Circus)'' (1928) - Chaplin fut nommé dans la catégorie Meilleur Acteur, mais l'Académie l'a mis hors compétition, de sorte qu'il n'a pu recevoir l'Oscar d'honneur.

* [[44e cérémonie des Oscars|{{44e|cérémonie}} des Oscars 1972]] : Lauréat de l'[[Oscar d'honneur]] - « pour l'effet incalculable qu’il a eu en faisant des films de cinéma la forme d'art de ce siècle. » (« for the incalculable effect he has had in making motion pictures the art form of this century. »).
Chaplin a fait l'objet d'un [[film biographique]] réalisé par Richard Attenborough, ''[[Chaplin (film, 1992)|Chaplin]]'', en {{date-|1992}} ; il y est personnifié par [[Robert Downey Jr.]], qui est nommé à l'Oscar du meilleur acteur et remporta le [[British Academy Film Award du meilleur acteur|BAFTA du meilleur acteur]]<ref>{{lien web |titre=Robert Downey Jr. fête ses 55 ans ! |url=https://www.eonline.com/fr/shows/peoples_choice_awards/news/1137165/robert-downey-jr-fete-ses-55-ans#photo-929744 |site=Entertainment News |consulté le=14 avril 2020}}.</ref>. Il est également joué par [[Eddie Izzard]] dans le film ''[[Un parfum de meurtre]]'' (2001)<ref>{{lien web |langue=en |auteur= Mike Goodridge|titre=Eddie Izzard plays Charlie Chaplin for Bogdanovich |url=https://www.screendaily.com/eddie-izzard-plays-charlie-chaplin-for-bogdanovich/404035.article |site=Screen Daily |date=29 octobre 2000|consulté le=14 mai 2020}}.</ref>. Une série télévisée sur l'enfance de Chaplin, ''{{langue|en|Young Charlie Chaplin}}'', est diffusée par [[Public Broadcasting Service|PBS]] en {{date-|1989}} et est nommée pour l'[[Emmy Awards|Emmy Award]] de meilleur programme pour enfants<ref>{{lien web |langue=en |titre=Young Charlie Chaplin Wonderworks |url=http://www.emmys.com/shows/young-charlie-chaplin-wonderworks |site=Emmys |consulté le=9 novembre 2013}}.</ref>.
* [[45e cérémonie des Oscars|{{45e|cérémonie}} des Oscars 1973]] : Lauréat de l'[[Oscar de la meilleure musique de film]] pour ''[[Les Feux de la rampe]]'' (''Limelight'') (réalisé en 1952, mais sorti en 1972), partagé avec {{Lien|langue=en|fr=Raymond Rasch}} et {{Lien|langue=en|fr=Larry Russell}}.

Le film ''[[La Rançon de la gloire (film, 2014)|La Rançon de la gloire]]'' de [[Xavier Beauvois]], sorti en [[2014 au cinéma|2014]] avec [[Benoît Poelvoorde]] et [[Roschdy Zem]], s'inspire très librement du vol de la dépouille de Charlie Chaplin en {{date-|1978}}<ref>{{Lien web |langue=fr|titre=La Rançon de la gloire, de Xavier Beauvois |url=https://www.rts.ch/fiction/7721207-la-rancon-de-la-gloire-de-xavier-beauvois.html |date=13 mai 2016 |site=rts.ch |consulté le=30 avril 2020}}.</ref>. [[Bernard Swysen]] raconte sa vie en [[bande dessinée]] intitulée ''Charlie Chaplin, les étoiles de l’histoire'', dessinée par [[Bruno Bazile]] et parue en {{date-|octobre 2019|en bande dessinée}}<ref>{{lien web|titre=Charlie Chaplin, les étoiles de l’histoire|url=https://www.dupuis.com/les-etoiles-de-l-histoire/bd/les-etoiles-de-l-histoire-tome-1-charlie-chaplin/71065|site=[[Dupuis]]|consulté le=10 octobre 2019}}.</ref>. En 2021, François Aymé et [[Yves Jeuland]] réalisent le documentaire ''[[Charlie Chaplin, le génie de la liberté]]''<ref>{{Article|langue=fr|titre=« Charlie Chaplin, le génie de la liberté », sur France 5 : Charlot, ce visionnaire des temps modernes|périodique=Le Monde.fr|date=2022-01-07|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/culture/article/2022/01/07/charlie-chaplin-le-genie-de-la-liberte-sur-france-5-charlot-ce-visionnaire-des-temps-modernes_6108625_3246.html|consulté le=2022-05-19}}</ref>.

En 2023, il apparait brièvement, sous les traits de [[Joe Sheridan]], dans le film français ''[[L'Abbé Pierre (film)|L'Abbé Pierre : Une vie de combats]]'' de [[Frédéric Tellier]].


== Notes et références ==
== Notes et références ==
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=== Notes ===
=== Notes ===
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=== Références ===
=== Références ===
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== Voir aussi ==
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== Bibliographie ==
=== Bibliographie ===
* {{Article |langue=en|auteur1=|prénom1=Tino |nom1=Balio |titre=Charles Chaplin, Entrepreneur: A United Artist |périodique=Journal of the University Film Association |volume=31 |numéro=1 |éditeur=University of Illinois Press |année=1979|date=|issn=|lire en ligne=|pages=}}
* {{Article |langue=en|auteur1=Tino Balio |titre=Charles Chaplin, Entrepreneur: A United Artist |périodique=Journal of the University Film Association |volume=31 |numéro=1 |éditeur=University of Illinois Press |année=1979|lire en ligne=|pages=}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Claire |nom1=Bloom |lien auteur1=Claire Bloom|titre=Limelight and After |passage=|lieu=[[Londres]] |éditeur=[[Weidenfeld & Nicolson]] |année=1982 |date=|pages totales=|isbn=0-297-78051-4 |lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=[[Claire Bloom]] |titre=Limelight and After |sous-titre=the education of an actress |éditeur=[[Weidenfeld & Nicolson]] |lieu=Londres |année=1982 |pages totales=187 |isbn=0-297-78051-4}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Kevin |nom1=Brownlow |lien auteur1=Kevin Brownlow|titre=The Search for Charlie Chaplin |passage=|lieu=Londres |éditeur=UKA Press |année=2010 |date=|année première édition=2005 |pages totales=|isbn=978-1-905796-24-3 |lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=[[Kevin Brownlow]] |titre=The Search for Charlie Chaplin |éditeur=UKA Press |lieu=Londres |année=2010 |année première édition=2005 |pages totales=217 |isbn=978-1-905796-24-3}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=John |nom1=Canemaker |lien auteur1=John Canemaker|titre=Felix: The Twisted Tale of the World's Most Famous Cat |passage=|lieu=[[Cambridge (Massachusetts)|Cambridge]] |éditeur=Da Capo Press |année=1996 |date=|pages totales=|isbn=0-306-80731-9 |lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=[[John Canemaker]] |titre=Felix |sous-titre=The Twisted Tale of the World's Most Famous Cat |éditeur=Da Capo Press |lieu=Cambridge |année=1996 |pages totales=177 |isbn=0-306-80731-9}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Charles |nom1=Chaplin |titre=[[Histoire de ma vie (Chaplin)|My Autobiography]] |passage=|lieu=Londres |éditeur=Penguin Classics |année=2003 |date=|année première édition=1964 |pages totales=|isbn=0-14-101147-5|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Charles Chaplin |titre=[[Histoire de ma vie (Chaplin)|My Autobiography]] |éditeur=Penguin Classics |lieu=Londres |année=2003 |année première édition=1964 |pages totales=493 |isbn=0-14-101147-5}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Mark |nom1=Cousins |titre=The Story of Film: An Odyssey |passage=|lieu=Londres |éditeur=Pavilion Books |année=2004 |date=|pages totales=|isbn=978-1-86205-574-2|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Mark Cousins |titre=The Story of Film |sous-titre=An Odyssey |éditeur= [[Pavilion Books]] |lieu=Londres |année=2004 |isbn=978-1-86205-574-2}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Alan S. |nom1=Dale |titre=Comedy is a Man in Trouble: Slapstick in American Movies |passage=|lieu=[[Minneapolis]] |éditeur=University of Minnesota Press |année=2000 |date=|pages totales=|isbn=0-8166-3658-3|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Alan S. Dale |titre=Comedy is a Man in Trouble |sous-titre=Slapstick in American Movies |éditeur=University of Minnesota Press |lieu=Minneapolis |année=2000 |pages totales=270 |isbn=0-8166-3658-3}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Jerry |nom1=Epstein |titre=Remembering Charlie |passage=|lieu=Londres |éditeur=[[Bloomsbury Publishing|Bloomsbury]] |année=1988 |date=|pages totales=|isbn=0-7475-0266-8|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Jerry Epstein |titre=Remembering Charlie |éditeur=[[Bloomsbury Publishing|Bloomsbury]] |lieu=Londres |année=1988 |isbn=0-7475-0266-8}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Otto |nom1=Friedrich |titre=City of Nets: A Portrait of Hollywood in the 1940's |passage=|lieu=[[Berkeley (Californie)|Berkeley]] |éditeur=[[University of California Press]] |année=1986 |date=|pages totales=|isbn=978-0-520-20949-7|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Otto Friedrich |titre=City of Nets |sous-titre=A Portrait of Hollywood in the 1940's |éditeur=[[University of California Press]] |lieu=Berkeley |année=1986 |pages totales=495 |isbn=978-0-520-20949-7 |lire en ligne=https://books.google.com/books?id=oaQwDwAAQBAJ&printsec=frontcover}}.
* {{Article |langue=en|auteur1=|prénom1=Jennifer |nom1=Frost |titre='Good Riddance to Bad Company': Hedda Hopper, Hollywood Gossip, and the Campaign against Charlie Chaplin, 1940-1952 |périodique=Australasian Journal of American Studies |volume=26 |numéro=2 |éditeur=Australia and New Zealand American Studies Association |année=2007|date=|issn=|lire en ligne=|pages=}}
* {{Article |langue=en|auteur=Jennifer Frost |titre=Good Riddance to Bad Company: Hedda Hopper, Hollywood Gossip, and the Campaign against Charlie Chaplin, 1940-1952 |périodique= Australasian Journal of American Studies |volume=26 |numéro=2 |éditeur=Australia and New Zealand American Studies Association |année=2007|lire en ligne=|pages=}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Christian |nom1=Hansmeyer |titre=Charlie Chaplin's Techniques for the Creation of Comic Effect in his Films |passage=|lieu=[[Portsmouth]] |éditeur=University of Portsmouth |année=1999 |date=|pages totales=|isbn=978-3-638-78719-2|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Christian Hansmeyer |titre=Charlie Chaplin's Techniques for the Creation of Comic Effect in his Films |éditeur=University of Portsmouth |lieu=Portsmouth |année=1999 |pages totales=32 |isbn=978-3-638-78719-2 |lire en ligne=https://books.google.com/books?id=1VyIn25tkBAC&printsec=frontcover}}.
* {{Article |langue=en|auteur1=|prénom1=Kathy M. |nom1=Jackson |titre=Mickey and the Tramp: Walt Disney's Debt to Charlie Chaplin |périodique=The Journal of American Culture |volume=26 |numéro=1 |année=2003 |date=|issn=|doi=10.1111/1542-734X.00104|lire en ligne=|pages=}}
* {{Article |langue=en|prénom1=Kathy M. |nom1=Jackson |titre=Mickey and the Tramp: Walt Disney's Debt to Charlie Chaplin |périodique=The Journal of American Culture |volume=26 |numéro=1 |année=2003 |date=|doi=10.1111/1542-734X.00104|lire en ligne=|pages=| issn = 1542-7331 }}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Dan |nom1=Kamin |titre=The Comedy of Charlie Chaplin: Artistry in Motion |passage=|lieu=[[Lanham (Maryland)|Lanham]] |éditeur=Scarecrow Press |année=2011 |date=|année première édition=2008 |pages totales=|isbn=978-0-8108-7780-1|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Dan Kamin |titre=The Comedy of Charlie Chaplin |sous-titre=Artistry in Motion |éditeur=Scarecrow Press |lieu=Lanham |année=2011 |année première édition=2008 |pages totales=227 |isbn=978-0-8108-7780-1}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Philip |nom1=Kemp |titre=Cinema: The Whole Story |passage=|lieu=Londres |éditeur=[[Thames & Hudson]] |année=2011 |date=|pages totales=|isbn=978-0-500-28947-1|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Philip Kemp |titre=Cinema |sous-titre=The Whole Story |éditeur=[[Thames & Hudson]] |lieu=Londres |année=2011 |pages totales=576 |isbn=978-0-500-28947-1}}.
* {{Article |langue=en|auteur1=|prénom1=Constance B. |nom1=Kuriyama |titre=Chaplin's Impure Comedy: The Art of Survival |périodique=Film Quarterly |volume=45 |numéro=3 |éditeur=University of California Press |année=1992 |date=|issn=|doi=10.2307/1213221|lire en ligne=|pages=}}
* {{Article |langue=en|auteur=Constance B. Kuriyama |titre=Chaplin's Impure Comedy: The Art of Survival |périodique=Film Quarterly |volume=45 |numéro=3 |éditeur=University of California Press |année=1992|doi=10.2307/1213221|lire en ligne=|pages=}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Jérôme |nom1=Larcher |titre=Masters of Cinema: Charlie Chaplin |passage=|lieu=Londres |éditeur=[[Cahiers du cinéma]] |année=2011 |date=|pages totales=|isbn=978-2-86642-606-4|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Jérôme Larcher |titre=Masters of Cinema |sous-titre=Charlie Chaplin |éditeur=[[Cahiers du cinéma]] |lieu=Londres |année=2011 |pages totales=103 |isbn=978-2-86642-606-4}}.
* [[Jacques Lorcey]], ''Charlot ou sir Charles Chaplin'', Paris, PAC, coll. « Têtes d'affiche », 1978.
* [[Jacques Lorcey]], ''Charlot ou sir Charles Chaplin'', Paris, PAC, coll. « Têtes d'affiche », 1978.
* Jacques Lorcey, Charlot, Paris, PAC/Delmas, 1983.
* Jacques Lorcey, Charlot, Paris, PAC/Delmas, 1983.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Simon |nom1=Louvish |titre=Chaplin: The Tramp's Odyssey |passage=|lieu=Londres |éditeur=[[Faber & Faber]] |année=2010 |date=|année première édition=2009 |pages totales=|isbn=978-0-571-23769-2|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Simon Louvish |titre=Chaplin |sous-titre=The Tramp's Odyssey |éditeur=[[Faber and Faber]] |lieu=Londres |année=2010 |année première édition=2009 |pages totales=412 |isbn=978-0-571-23769-2}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Kenneth S. |nom1=Lynn |titre=Charlie Chaplin and His Times |passage=|lieu=[[New York]] |éditeur=[[Simon & Schuster]] |année=1997 |date=|pages totales=|isbn=0-684-80851-X|lire en ligne=}}
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* {{Article |langue=en|auteur1=John Sbardellati |auteur2=Tony Shaw |titre=Booting a Tramp: Charlie Chaplin, the FBI, and the Construction of the Subversive Image in Red Scare America |périodique=[[Pacific Historical Review]] |volume=72 |numéro=4 |éditeur=University of California Press |année=2003|doi=10.1525/phr.2003.72.4.495|lire en ligne=|pages=}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Richard |nom1=Schickel |lien auteur1=Richard Schickel|titre=The Essential Chaplin - Perspectives on the Life and Art of the Great Comedian |passage=|lieu=[[Chicago]] |éditeur=Ivan R. Dee |année=2006 |date=|pages totales=|isbn=1-56663-682-5 |lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=[[Richard Schickel]] |titre=The Essential Chaplin |sous-titre=Perspectives on the Life and Art of the Great Comedian |éditeur=Ivan R. Dee |lieu=Chicago |année=2006 |pages totales=315 |isbn=1-56663-682-5}}.
* {{Ouvrage |langue=en|auteur1=|prénom1=Lutz D. |nom1=Schmadel |lien auteur1=Lutz Dieter Schmadel |titre=Dictionary of Minor Planet Names |passage=|lieu=New York |éditeur=[[Springer Science+Business Media|Springer Verlag]] |année=2003 |date=|numéro d'édition=5 |pages totales=|isbn=978-3-540-00238-3|url=https://books.google.com/books?q=3623+Chaplin+1981+TC2 }}
* {{Ouvrage |langue=en |auteur=[[Lutz Dieter Schmadel]] |titre=Dictionary of Minor Planet Names |éditeur=[[Springer Science+Business Media|Springer Verlag]] |lieu=New York |année=2003 |numéro d'édition=5 |pages totales=992 |isbn=978-3-540-00238-3 |lire en ligne=https://books.google.com/books?q=3623+Chaplin+1981+TC2}}.
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* {{Ouvrage |langue=fr |auteur=Steven J. Schneider |titre=[[1001 films à voir avant de mourir]] |éditeur=Quintessence |lieu=Londres |année=2009 |pages totales=960 |isbn=978-1-84403-680-6}}.
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* {{Ouvrage |langue=en |auteur=Robert Sklar |titre=Film : An International History of the Medium (Second edition) |éditeur=Prentice Hall |lieu=Upper Saddle River |année=2001 |pages totales=600 |isbn=978-0-13-034049-8}}.
* {{Ouvrage |langue=fr|auteur1=|prénom1=Pierre |nom1=Smolik |préface=Federico Fellini|titre=Chaplin après Charlot, 1952-1977 |passage=|lieu=[[Paris]] |éditeur=Champion |année=1995 |date=|pages totales=|isbn=978-2-85-203715-1|lire en ligne=}}
* {{Ouvrage |langue=fr |auteur=Pierre Smolik |préface=[[Federico Fellini]] |titre=Chaplin après Charlot, 1952-1977 |éditeur=Champion |lieu=Paris |année=1995 |isbn=978-2-85203-715-1}}.
* {{Article |langue=en|auteur1=|prénom1=Kristin |nom1=Thompson |titre=Lubitsch, Acting and the Silent Romantic Comedy |périodique=Film History |volume=13 |numéro=4 |éditeur=Indiana University Press |année=2001 |date=|issn=|doi=10.2979/FIL.2001.13.4.390|lire en ligne=|pages=}}
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* {{Article |langue=en|auteur=Stephen M. Weissman |titre=Charlie Chaplin's Film Heroines |périodique=Film History |volume=8 |numéro=4 |éditeur=Indiana University Press |année=1999|lire en ligne=|pages=}}.
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== Liens externes ==
=== Article connexe ===
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* {{Site officiel|fr,en|http://www.charliechaplin.fr}} de l'Association Chaplin
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* {{en}} [https://archive.org/search.php?query=-contributor%3Agutenberg%20AND%20(subject%3A%22Chaplin%2C%20Charlie%2C%201889-1977%22%20OR%20creator%3A%22Chaplin%2C%20Charlie%2C%201889-1977%22%20OR%20creator%3A%22Charlie%20Chaplin%22%20OR%20title%3A%22Charlie%20Chaplin%22%20OR%20description%3A%22Charlie%20Chaplin%22)%20AND%20mediatype%3Amovies Premiers films avec Charlie Chaplin] sur l'{{langue|en|[[Internet Archive]]}}''
* {{en}} [http://chaplin.bfi.org.uk/ Charlie Chaplin] sur le site du {{lang|en|[[British Film Institute]]}}
* {{fr}} [http://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_liste_key/1468 Liste des documentaires consacrés à Charlie Chaplin] sur le Portail du film documentaire
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Dernière version du 14 juillet 2024 à 11:18

Charlie Chaplin
Portrait photographique en noir et blanc d'un jeune homme, habillé d'un costume, coiffé avec une raie au mileu
Charlie Chaplin dans les années .
Nom de naissance Charles Spencer Chaplin
Surnom The Tramp (en anglais)
Charlot (en français)
Naissance
Londres (Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande)
Nationalité Britannique
Décès (à 88 ans)
Corsier-sur-Vevey (Suisse)
Profession Acteur, réalisateur, compositeur, scénariste et producteur
Films notables Filmographie
Site internet (en) « Site Officiel »
Signature de la personnalité

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Charles Spencer Chaplin, dit Charlie Chaplin [ˈt͡ʃɑːli ˈt͡ʃæplɪn][n 1], est un acteur, réalisateur, scénariste, producteur et compositeur britannique, né le , probablement à Londres (Royaume-Uni), et mort le à Corsier-sur-Vevey (Suisse).

Devenu une idole du cinéma muet à partir du milieu des années 1910, et plus particulièrement du burlesque, grâce à son personnage de Charlot (désigné simplement comme « the tramp » — le vagabond — dans les versions originales), il acquiert ensuite une notoriété et une reconnaissance plus larges pour ses prestations d'acteur comme pour ses réalisations de films. Durant une carrière longue de 65 ans, il joue dans plus de 80 films. Sa vie publique et privée, ainsi que ses prises de position, font par ailleurs l'objet d'adulations comme de controverses.

Chaplin grandit dans la misère entre un père absent et une mère en grande difficulté financière, tous deux artistes de music-hall, qui se séparent deux ans après sa naissance. Plus tard, sa mère est internée à l'hôpital psychiatrique alors que son fils a 14 ans. À l'âge de 5 ans, il fait sa première apparition sur scène. Il commence très tôt à se produire dans des music-halls et devient rapidement acteur. À 19 ans, il est remarqué par l'imprésario Fred Karno et réalise une tournée aux États-Unis. Il interprète son premier rôle au cinéma en dans le film Pour gagner sa vie et travaille avec les sociétés de production Essanay, Mutual et First National. En , il est l'une des personnalités les plus connues au monde.

En 1919, Chaplin cofonde la société United Artists et obtient ainsi le contrôle total sur ses œuvres. Parmi ses premiers longs métrages figurent Charlot soldat (1918), Le Kid (1921), L'Opinion publique (1923), La Ruée vers l'or (1925) et Le Cirque (1928). Il refuse de passer au cinéma sonore et continue de produire des films muets dans les années 1930, comme Les Lumières de la ville (1931) et Les Temps modernes (1936). Ses œuvres deviennent ensuite plus politiques, avec notamment Le Dictateur (1940), dans lequel il se moque de Hitler et de Mussolini. Sa popularité décline dans les années 1940 en raison de controverses au sujet de ses liaisons avec des femmes bien plus jeunes que lui et d'un procès en reconnaissance de paternité. Chaplin est également accusé de sympathies communistes, et les enquêtes du FBI et du Congrès lui font perdre son visa américain. Il choisit de s'établir en Suisse en . Il abandonne son personnage de Charlot dans ses derniers films, dont Monsieur Verdoux (1947), Les Feux de la rampe (1952), Un roi à New York (1957) et La Comtesse de Hong-Kong (1967).

Chaplin écrit, réalise et produit la plupart de ses films, en plus d'y jouer et d'en composer la musique. Il est perfectionniste et son indépendance financière lui permet de consacrer plusieurs années au développement de chacune de ses œuvres. Bien qu'étant des comédies de type slapstick, ses films intègrent des éléments de pathos et sont marqués par des thèmes sociaux et politiques ainsi que par des éléments autobiographiques. L'Academy of Motion Picture Arts and Sciences lui remet en 1972 un Oscar d'honneur pour sa contribution inestimable à l'industrie cinématographique, et plusieurs de ses longs métrages sont aujourd'hui considérés comme faisant partie des plus grands films de l’histoire du cinéma.

Biographie

Jeunesse (1889-1913)

Enfance

Photo en noir et blanc de plusieurs enfants en uniformes regardant l'objectif.
Charlie Chaplin à 7 ans au foyer pour enfants pauvres (troisième rangée, au centre).

Charles Spencer Chaplin[1],[2] naît le  ; il est le deuxième enfant d'Hannah Chaplin née Hill (1865-1928) et de Charles Chaplin, Sr. (1863-1901). Selon David Robinson, le biographe officiel de Charlie Chaplin, sa branche paternelle serait d'origine huguenote : « La famille Chaplin a vécu pendant des générations dans le Suffolk. Le nom suggère qu'ils descendaient des huguenots, qui s'étaient installés en grand nombre en East Anglia depuis la fin du XVIIe siècle[3],[4]. » Son acte de naissance n'a pas été retrouvé dans les registres de l'état civil, mais Chaplin considérait qu'il était né dans une maison d'East Street dans le quartier de Walworth, dans le sud de Londres[5],[7]. En 2011, une lettre de 1970 adressée à Chaplin est redécouverte ; elle avance qu'il est né dans une famille gitane à Smethwick dans le Staffordshire et le fils de Chaplin, Michael, a suggéré que l'information est suffisamment importante pour que son père conserve la missive[8]. Concernant sa date de naissance, Chaplin estimait qu'il était né le , mais une annonce dans l'édition du du journal The Magnet indique le 15[9]. Quatre ans plus tôt, ses parents se marient et Charles Sr. reconnaît Sydney John, un fils issu d'une précédente relation d'Hannah avec un homme inconnu[10]. Au moment de sa naissance, les parents de Chaplin sont tous deux des artistes de music-hall. Sa mère, fille d'un cordonnier[11], mène une carrière sans grand succès sous le nom de scène de Lily Harley[12], tandis que son père, fils d'un boucher[13], est un chanteur populaire[14]. Ils se séparent vers 1891[15] et, l'année suivante, Hannah donne naissance à son troisième fils, Wheeler Dryden, issu d'une relation avec le chanteur de music-hall Leo Dryden ; l'enfant est emmené par son père à l'âge de six mois et reste éloigné de Chaplin pendant trente ans[16].

L'enfance de Chaplin est marquée par la misère et les privations, ce qui conduit son biographe officiel David Robinson à décrire son parcours comme « le plus spectaculaire de tous les récits jamais racontés sur l'ascension des haillons aux richesses »[17]. Il passe ses premières années avec sa mère et son frère Sydney dans le borough londonien de Kennington ; hormis quelques travaux de couture ou de nourrice, Hannah n'a aucun revenu et Charles Sr. n'apporte aucun soutien à ses enfants[18]. Alors que la situation financière du foyer se détériore, Chaplin est envoyé dans une workhouse à l'âge de sept ans[n 2]. Il indique par la suite qu'il y connaît une « triste existence »[20] et est brièvement rendu à sa mère 18 mois plus tard ; Hannah est rapidement contrainte de se séparer à nouveau de ses enfants, qui sont envoyés dans une autre institution pour enfants indigents[21].

En , la mère de Chaplin est admise à l'asile psychiatrique de Cane Hill après avoir développé une psychose apparemment provoquée par la malnutrition et la syphilis[22]. Durant les deux mois de son hospitalisation, Chaplin et son frère sont envoyés vivre avec leur père qu'ils connaissent à peine[23]. Charles Sr. sombre alors dans l'alcoolisme et sa conduite entraîne la visite d'une organisation de protection de l'enfance[24]. Il meurt d'une cirrhose deux ans plus tard, à l'âge de 38 ans[25].

L'état de santé d'Hannah s'améliore[24], mais elle fait une rechute en . Chaplin, alors âgé de 14 ans, l’emmène au dispensaire, d'où elle est renvoyée à Cane Hill[26]. Il vit seul pendant plusieurs jours et dort dans la rue en attendant le retour de son frère qui s'est engagé dans la Marine deux ans plus tôt[27],[28],[29]. Hannah quitte l'asile au bout de huit mois[30], mais elle rechute de manière permanente en . Chaplin écrit plus tard : « Nous ne pouvions rien faire d'autre que d'accepter le sort de notre pauvre mère. » En , Charlie et son frère Sydney obtiennent la permission de la prendre avec eux à Hollywood. Charlie lui achète une maison en bord de mer, et Hannah y vit ses sept dernières années, soignée à domicile. C'est là qu'elle peut revoir son troisième fils, Wheeler Dryden, dont elle est séparée depuis trente ans. Elle meurt le [31].

Premières prestations

Photo noire et blanc d'un enfant en costume devant une grande fenêtre.
Chaplin adolescent lors d'une représentation de Sherlock Holmes.

Chaplin commence très tôt à se produire sur scène. Il y fait sa première apparition à cinq ans en remplaçant Hannah lors d'un spectacle à Aldershot[n 3]. C'est une exception, mais sa mère l'encourage dans cette voie, et « elle [l]'imprègne du sentiment [qu'il] a une sorte de talent »[34]. Grâce aux relations de son père[35], il devient membre de la troupe de danseurs Eight Lancashire Lads et se produit dans des music-halls britanniques en et [n 4]. Chaplin travaille dur et la troupe est populaire, mais il ne se satisfait pas de la danse et veut se tourner vers la comédie[37].

Lorsque Chaplin est en tournée avec les Eight Lancashire Lads, sa mère s'assure qu'il continue à aller à l'école[38], mais il abandonne vers treize ans[39]. Passé une période de petits boulots[40], à quatorze ans et peu après la rechute de sa mère, il s'inscrit dans une agence artistique du West End de Londres. Le responsable de cette agence discerne un potentiel chez Chaplin et lui offre rapidement son premier rôle en tant que vendeur de journaux dans la pièce Jim, a Romance of Cockayne de Harry A. Saintsbury[41]. La première a lieu en , mais le spectacle ne rencontre pas de succès et les représentations s'arrêtent au bout de deux semaines ; la performance comique de Chaplin est néanmoins remarquée par les critiques[42],[43],[44]. Saintsbury lui obtient ensuite le rôle du groom Billy dans la pièce Sherlock Holmes de Charles Frohman[45]. Son jeu est si bien reçu qu'il est appelé à Londres pour se produire aux côtés de William Gillette, qui a coécrit la pièce avec Arthur Conan Doyle[46]. Il fait sa dernière tournée de Sherlock Holmes au début de l'année après y avoir joué pendant plus de deux ans et demi[47].

Acteur comique

Page de journal avec deux photographies de Chaplin, l'une naturelle avec les cheveux lissés et l'autre dans son rôle avec une moustache et les cheveux en bataille.
Publicité pour la tournée américaine de la troupe de Fred Karno avec Chaplin en .

Chaplin rejoint rapidement une autre compagnie et joue dans une comédie à sketchs, Repairs, avec son frère Sydney qui s'est également lancé dans une carrière artistique[48]. En , il participe au spectacle pour enfants Casey's Circus[49] et développe son jeu burlesque qui lui permet de devenir rapidement la star de la pièce. À la fin de la tournée en , le jeune homme de 18 ans est devenu un comédien accompli[50],[51]. Il a néanmoins des difficultés à trouver du travail et une brève incursion dans le stand-up ne rencontre pas le succès escompté[52],[53].

Dans le même temps, Sydney Chaplin a rejoint en la prestigieuse troupe comique de Fred Karno, dont il est devenu l'un des acteurs principaux en [54],[55],[56]. En février, il parvient à obtenir une période d'essai de deux semaines pour son frère cadet. Karno n'est initialement pas convaincu et considère Chaplin comme un « enfant à l'air renfrogné pâle et chétif » qui « semble bien trop timide pour faire quoi que ce soit de bien au théâtre »[57]. Il est cependant impressionné par sa première prestation au London Theatre et l'engage immédiatement[58]. Après des rôles secondaires, Chaplin accède aux rôles principaux en [59] et il est l'acteur principal de la nouvelle comédie Jimmy the Fearless en . C'est un grand succès qui attire l'attention de la presse sur le jeune artiste[60],[61].

Karno le choisit pour participer avec une partie de sa troupe à une tournée en Amérique du Nord[62]. Chaplin mène les spectacles de music-hall et impressionne les critiques qui le décrivent comme « l'un des meilleurs artistes de pantomime jamais vu »[63]. La tournée dure 21 mois et la troupe retourne en Grande-Bretagne en [64]. Chaplin a alors le sentiment troublant de « revenir aux platitudes déprimantes », et il est ravi quand une nouvelle tournée commence en octobre[65],[66].

Débuts dans le cinéma (1914-1917)

Keystone

Capture d'écran montrant deux hommes en costume dans une rue. Chaplin porte un haut-de-forme, une redingote et la moustache tombante.
Pour gagner sa vie () : premier rôle de Chaplin (à gauche) au cinéma.

Alors qu'il en est au sixième mois de sa tournée américaine, Chaplin est invité à rejoindre la New York Motion Picture Company ; un des responsables de la société a assisté à l'un de ses spectacles et pense qu'il peut remplacer Fred Mace, la star du studio Keystone, qui veut prendre sa retraite[67]. Chaplin considère les comédies de Keystone comme un « mélange grossier », mais apprécie la perspective d'une nouvelle carrière[68] ; il signe en un contrat d'un an avec un salaire hebdomadaire de 150 dollars (environ 3 880 dollars de 2024[69])[70],[71].

Chaplin arrive dans les studios de Los Angeles au début du mois de [72] et rencontre son responsable Mack Sennett, qui pense que le jeune homme de 24 ans paraît trop jeune[73]. Il ne joue pas avant la fin du mois de et profite de cette période pour se familiariser avec la réalisation cinématographique[74]. Il fait ses débuts dans le court-métrage Pour gagner sa vie, sorti le , mais déteste le film[75]. Dans celui-ci, il se présente comme une sorte de dandy en redingote étriquée, chapeau haut-de-forme et grandes moustaches tombantes[76]. Pour son second rôle, Chaplin choisit le costume de Charlot (en anglais, The Tramp ou vagabond) avec lequel il se fait connaître ; dans son autobiographie, il décrit le processus :

« Je voulais que tout soit une contradiction : le pantalon ample, la veste étriquée, le chapeau étroit et les chaussures larges… J'ai ajouté une petite moustache qui, selon moi, me vieillirait sans affecter mon expression. Je n'avais aucune idée du personnage mais dès que j'étais habillé, les vêtements et le maquillage me faisaient sentir qui il était. J'ai commencé à le connaître et quand je suis entré sur le plateau, il était entièrement né[77],[n 5]. »

Capture d'écran montrant Charlot devant une foule d'enfants.
Les débuts de Charlot dans Charlot est content de lui (1914).

Ce film est L'Étrange Aventure de Mabel, mais le personnage de « Charlot » apparaît pour la première fois dans Charlot est content de lui, tourné peu après mais sorti deux jours auparavant, le 7 février 1914[79]. Chaplin adopte rapidement ce personnage et fait des suggestions pour les films dans lesquels il apparaît, suggestions qui sont rejetées par les réalisateurs[80]. Durant le tournage de son 11e film, Mabel au volant, il affronte la réalisatrice Mabel Normand et l'incident entraîne presque la résiliation de son contrat. Sennett le conserve néanmoins après avoir reçu des commandes pour de nouveaux films avec Chaplin. Il l'autorise également à réaliser son prochain film après que Chaplin a promis de payer 1 500 dollars (environ 38 287 dollars de 2024[69]) s'il ne rencontre pas de succès[81].

Un béguin de Charlot, sorti le 4 mai 1914, marque les débuts de réalisateur de Chaplin et connaît un grand succès[82]. Par la suite, il réalise quasiment tous les courts-métrages de Keystone dans lesquels il joue[83] ; Chaplin rapporte par la suite que cette période, où il réalise environ un film par semaine[84], est la plus excitante de sa carrière[85]. Il introduit une forme de comédie plus lente que les farces typiques de Keystone[79] et rassemble rapidement un grand nombre d'admirateurs[86],[87]. En novembre 1914, il joue avec Marie Dressler dans le long-métrage Le Roman comique de Charlot et Lolotte réalisé par Sennett ; le film est un succès et accroît sa popularité[88]. Lorsque le contrat de Chaplin expire à la fin de l'année, il demande un salaire hebdomadaire de 1 000 dollars (environ 25 525 dollars de 2024[69]), une somme que Sennett refuse car jugée trop élevée[89].

Essanay

Photo noire et blanc de trois hommes en costumes avec des chapeaux melons.
Les stars d'Essanay en 1915 : Francis X. Bushman, Charlie Chaplin et Gilbert M. Anderson, qui vient de convaincre Chaplin de le rejoindre.

L'Essanay Film Manufacturing Company propose à Chaplin un salaire hebdomadaire de 1 250 dollars (environ 31 591 dollars de 2024[69]) avec une prime d'embauche de 10 000 dollars. Il intègre le studio à la fin du mois de [90] et rejoint d'autres acteurs comme Leo White, Bud Jamison, Paddy McGuire et Billy Armstrong. Alors qu'il est à la recherche d'un second rôle féminin pour son deuxième film, Charlot fait la noce, il repère une secrétaire appelée Edna Purviance dans un café à San Francisco. Il l'engage et elle tourne avec lui dans 35 films[91] ; ils ont également une aventure sentimentale jusqu'en [92].

Chaplin exerce un contrôle important sur ses films et il commence à consacrer beaucoup de temps et d'énergie à chacune de ses réalisations[93],[94],[95]. Un mois sépare sa seconde production, Charlot fait la noce, et sa troisième, Charlot boxeur[96], et il adopte ce rythme pour ses réalisations ultérieures avec Essenay[97]. Il modifie également son personnage, critiqué par Keystone en raison de son caractère « malveillant, rustre et grossier », pour lui donner une personnalité plus douce et romantique[98]. Cette évolution est illustrée par Le Vagabond en [99],[100] et Charlot garçon de banque en août, qui comportent un final plus triste. C'est une innovation pour les films comiques et les critiques sérieux commencent à apprécier davantage son travail[101]. Avec Essanay, Chaplin trouve les thèmes qui définissent le monde de Charlot[102].

Immédiatement après ses débuts cinématographiques, Chaplin devient un phénomène culturel. Les magasins vendent des produits associés à son personnage de Charlot, qui apparaît dans des bandes dessinées et dans des chansons[103],[84],[104]. En , selon un journaliste du magazine Motion Picture Magazine, la « chaplinite » se propage en Amérique[105]. Sa popularité s'étend également à l'étranger et il devient la première star internationale du cinéma[106],[107]. Alors que son contrat avec Essenay expire en [108], Chaplin, pleinement conscient de sa célébrité, demande une prime d'embauche de 150 000 dollars (environ 3 790 954 dollars de 2024[69]) à son nouveau studio. Il reçoit plusieurs propositions venant entre autres d'Universal, Fox et Vitagraph[109].

Mutual

Photographie de Charlie Chaplin debout et en costume tenant une poupée représentant Charlot
Chaplin, en , tenant une figurine à l'effigie de Charlot.

Il est finalement engagé par le studio Mutual, qui lui accorde un salaire annuel de 670 000 dollars (environ 16 932 928 dollars de 2024[69]), faisant de Chaplin, alors âgé de 26 ans, l'une des personnes les mieux payées au monde[110]. Cette somme élevée choque le public et est largement reprise dans la presse[111]. Le président du studio, John R. Freuler, explique qu'ils peuvent se permettre de payer ce salaire à Chaplin, car « le public veut Chaplin et paiera pour le voir »[112].

Mutual accorde à Chaplin son propre studio à Los Angeles, qui est inauguré en [113]. Il recrute deux nouveaux acteurs pour l'accompagner, Albert Austin et Eric Campbell[114], et réalise une série de films plus élaborés et mélodramatiques : Charlot chef de rayon, Charlot pompier, Charlot musicien, Charlot rentre tard, Charlot et le Comte[115]. Pour Charlot usurier, il embauche l'acteur Henry Bergman, qui travaille avec lui pendant 30 ans[116]. Charlot fait du ciné et Charlot patine sont ses dernières réalisations pour l'année . Le contrat avec Mutual stipule qu'il doit réaliser un court-métrage toutes les quatre semaines, engagement qu'il tient[117]. Il commence néanmoins à demander plus de temps pour créer ses films et il n'en réalise que quatre autres pour Mutual dans les dix premiers mois de l'année  : Charlot policeman, Charlot fait une cure, L'Émigrant et Charlot s'évade[118]. Du fait de leur réalisation méticuleuse et de leur construction soignée, ces films sont considérés comme parmi les meilleures œuvres de Chaplin par les spécialistes du cinéaste[119],[120],[118],[121]. Pour Chaplin, ses années à Mutual sont les plus heureuses de sa carrière[122].

Chaplin est critiqué par la presse britannique pour son absence de participation à la Première Guerre mondiale[123]. Il répond qu'il est volontaire pour se battre pour le Royaume-Uni s'il est appelé et qu'il a déjà répondu à la conscription américaine ; aucun des deux pays ne lui demande de s'enrôler et l'ambassade britannique aux États-Unis publie une déclaration indiquant que Chaplin « est bien plus utile à la Grande-Bretagne en gagnant de l'argent et en achetant des obligations de guerre que dans les tranchées »[124]. Malgré ces critiques, Chaplin est l'un des acteurs préférés des soldats[125], et sa popularité continue de grandir dans le monde entier. Le magazine américain Harper's Weekly rapporte que le nom de Charlie Chaplin fait « partie de la langue véhiculaire de presque tous les pays » et que l'image de Charlot est « universellement familière »[126]. En , les imitateurs professionnels de Charlot sont si répandus qu'il lance des actions en justice[127] et il est rapporté que neuf hommes sur dix participant à des soirées costumées reprenaient son accoutrement[128]. L'actrice Minnie M. Fiske écrit qu'un « nombre en constante augmentation de personnes cultivées commencent à considérer le jeune bouffon anglais, Charlie Chaplin comme un artiste extraordinaire et un génie comique »[126].

First National (1918-1922)

Affiche montrant Charlot l'air triste assis sur un muret en briques à côté d'un petit chien blanc.
Affiche de Une vie de chien ().

Mutual ne se formalise pas de la production réduite de Chaplin et le contrat se termine à l'amiable. Pour son nouveau studio, son principal objectif est d'avoir une plus large indépendance ; son frère Sydney, devenu son agent artistique, déclare à la presse que « Chaplin doit être autorisé à avoir tout le temps et l'argent nécessaire pour produire les films à sa manière… C'est la qualité, non la quantité, que nous voulons »[129]. En , Chaplin signe un contrat d'un million de dollars (environ 19 955 844 dollars de 2024[69]) pour huit films avec l'association de propriétaires de salles de cinéma First National Pictures[130]. Il décide de construire son propre studio sur un terrain de acres (20 200 m2) près de Sunset Boulevard avec les meilleures installations et équipements disponibles[131],[132]. Le studio est inauguré en [133] et Chaplin reçoit une grande liberté pour la réalisation de ses films[134].

Une vie de chien, distribué en , est son premier film sous ce nouveau contrat. Il y démontre une attention grandissante pour l'intrigue et son traitement de Charlot comme une sorte de Pierrot[135]. Le film est décrit par le critique français Louis Delluc comme « la première œuvre d'art totale du cinéma »[136]. Chaplin participe ensuite à l'effort de guerre en réalisant une tournée d'un mois aux États-Unis afin de lever des fonds pour les Alliés[137]. Il produit également un court-métrage de propagande pour le gouvernement appelé The Bond[138]. Son film suivant, Charlot soldat, met en scène Charlot dans les tranchées ; ses associés le mettent en garde contre une comédie sur la guerre, mais il pense autrement : « dangereuse ou non, l'idée m'excitait »[139]. Le tournage dure quatre mois et le film de 45 minutes rencontre un grand succès à sa sortie, en [140].

Après la sortie de Charlot soldat, Chaplin demande plus de fonds à la First National, qui refuse. Frustré par le manque de considération du studio pour la qualité et inquiet des rumeurs d'une fusion avec Famous Players-Lasky[141],[142], il se rapproche de ses collègues Douglas Fairbanks, Mary Pickford et D. W. Griffith pour fonder une nouvelle société de distribution. La création d'United Artists en [143] est une révolution pour l'industrie cinématographique, car les quatre fondateurs peuvent dès lors personnellement financer leurs œuvres et avoir un contrôle total sur elles[144]. Chaplin est alors impatient de pouvoir commencer avec sa nouvelle entreprise et offre de racheter son contrat avec la First National. Le studio refuse et insiste pour qu'il livre les six derniers films promis[145].

Photographie de Charlot l'air énervé tenant la main à un petit garçon en haillons
Chaplin avec Jackie Coogan dans Le Kid ().

Avant la création d'United Artists, Chaplin se marie pour la première fois. L'actrice de 17 ans Mildred Harris est enceinte et ils se marient discrètement à Los Angeles en pour éviter la controverse[146] ; la grossesse se révèle fausse[147]. Chaplin n'est pas heureux de cette union, qui selon lui affecte sa créativité, et la réalisation d’Une idylle aux champs est difficile[148],[149]. Harris tombe ensuite réellement enceinte et elle accouche d'un garçon le . Le nouveau-né, Norman Spencer Chaplin, est cependant malformé et meurt trois jours plus tard[150]. Les époux divorcent en et Chaplin explique dans son autobiographie qu'ils n'étaient « absolument pas faits l'un pour l'autre »[151],[152].

Cette tragédie personnelle influence l'œuvre de Chaplin, car il envisage de faire de Charlot le tuteur d'un jeune garçon[153],[154]. Le tournage du Kid commence en avec le jeune Jackie Coogan, alors âgé de quatre ans[155]. Chaplin réalise que le projet est plus important que prévu et, pour apaiser la First National, arrête sa production et tourne rapidement Une journée de plaisir[156]. La réalisation du Kid dure neuf mois, jusqu'en , et sa durée de 68 minutes en fait le plus long du cinéaste jusque là[157]. Marqué par les thèmes de la pauvreté et de la séparation, on considère que Le Kid est influencé par la propre enfance de Chaplin[134] et il est l'un des premiers films à associer la comédie et le drame[158]. Le succès est immédiat à sa sortie, en , et il est distribué dans plus de 50 pays dans les trois années qui suivent[159].

Chaplin consacre cinq mois à son film suivant de 31 minutes, Charlot et le Masque de fer[144]. Après sa sortie en , il décide de retourner en Grande-Bretagne pour la première fois en près d'une décennie[160]. Il remplit ensuite son contrat avec la First National en réalisant Jour de paye en et Le Pèlerin un an plus tard[161].

United Artists (1923-1938)

L'Opinion publique et La Ruée vers l'or

Chaplin, assis à table, mangeant un bout de sa chaussure.
Charlot mangeant sa chaussure dans La Ruée vers l'or ().

Ayant rempli ses obligations avec la First National, Chaplin est à présent libre de réaliser ses films en tant que producteur indépendant. En , il commence le tournage de L'Opinion publique[162]. Il veut que ce drame romantique lance la carrière d'Edna Purviance[163] et ne réalise qu'un bref caméo non crédité dans cette production[164]. Souhaitant que le film soit réaliste, il demande à ses acteurs de jouer de manière retenue, expliquant que dans la vie réelle « les hommes et les femmes essayent de dissimuler leurs émotions plutôt que de vouloir les montrer »[165]. La première de L'Opinion publique en est acclamée par la critique pour son approche subtile, qui est alors une innovation[166]. Le public semble cependant peu intéressé par un film de Chaplin sans Charlot et il sera un échec[167]. Fier de son film, le cinéaste est affecté par ce revers car il a voulu réaliser un film dramatique ; il retire L'Opinion publique des salles aussi vite que possible[168].

Chaplin revient à la comédie pour son prochain projet et il pense alors : « Ce prochain film doit être une épopée ! la plus grande ! »[169]. Inspiré par une photographie de la ruée vers l'or du Klondike de et par le récit de l'expédition Donner de -, il réalise ce que le journaliste Geoffrey Macnab qualifie de « comédie épique sur un sujet grave »[170],[171]. Dans La Ruée vers l'or, Charlot est représenté comme un prospecteur solitaire affrontant l'adversité et à la recherche de l'amour. Avec Georgia Hale comme partenaire, Chaplin commence le tournage dans les montagnes de l'ouest du Nevada en [172]. La production est complexe, avec plus de 600 figurants, des décors extravagants et des effets spéciaux[173] ; la dernière scène n'est réalisée qu'en , après 15 mois de tournage[174].

Avec un coût de près d'un million de dollars[175], Chaplin considère que La Ruée vers l'or est le meilleur film qu'il a réalisé jusque-là[176]. Après sa sortie en , il devient l'un des plus gros succès du cinéma muet, avec cinq millions de dollars (environ 72 893 738 dollars de 2024[69]) de recettes[175],[177]. La comédie comporte certaines des scènes les plus célèbres de Chaplin, comme celle de Charlot mangeant sa chaussure ou celle dite de la « danse des petits pains »[178],[179],[180],[181], et il déclare par la suite qu'il aimerait que les gens se souviennent de lui grâce à ce film[170].

Lita Grey et Le Cirque

Photographie d'une jeune femme aux cheveux ondulés ramenés sur le côté et portant un foulard en dentelle
Lita Grey, deux ans après son divorce houleux d'avec Chaplin.

Alors qu'il réalise La Ruée vers l'Or, Chaplin se marie pour la deuxième fois. Comme pour sa première union, Lita Grey est une jeune actrice qui doit apparaître dans le film et dont la grossesse imprévue oblige Chaplin à l'épouser. Elle a alors 16 ans et lui 35, et selon la loi californienne cette relation peut être qualifiée de viol sur mineure[182]. D'après les documents du divorce, Chaplin a voulu la faire avorter, mais celle-ci a refusé. La mère de Lita Grey a par ailleurs menacé Chaplin de le dénoncer à la police s'il n'épouse pas sa fille[183]. Il organise donc une cérémonie discrète au Mexique, le [184]. Lita accouche d'un premier fils, Charles Chaplin Jr., le , et d'un second, Sydney Earle Chaplin, le [185].

Cette union est malheureuse et Chaplin passe beaucoup de temps en studio pour éviter de voir son épouse[186]. En , Lita Grey quitte leur foyer avec leurs enfants[187]. Lors de la difficile procédure de divorce, les documents de Lita Grey accusant Chaplin d'infidélité, de violence et d'entretenir des « désirs sexuels pervers » sont publiés par la presse[188],[189],[n 6]. Il est rapporté que Chaplin est au bord d'une crise de nerfs, alors que l'histoire fait la une des journaux et que des groupes sont créés pour demander l'interdiction de ses films[189],[191]. Impatients de mettre un terme à l'affaire, les avocats de Chaplin acceptent en de payer 600 000 dollars (environ 8 831 034 dollars de 2024[69]), la plus grosse somme accordée lors d'un procès aux États-Unis jusqu'alors[192]. La popularité de Chaplin lui permet de surmonter l'incident, qui est rapidement oublié, mais il en reste profondément affecté[193],[194].

Avant le début de la procédure de divorce, Chaplin commence à travailler sur un nouveau film, Le Cirque[195]. Le tournage est suspendu dix mois durant le scandale de son divorce[196] et la production est marquée par les difficultés[197]. Finalement terminé en octobre, Le Cirque sort en et reçoit un accueil positif[198]. Lors de la 1re cérémonie des Oscars, Chaplin reçoit un Oscar d'honneur « pour sa polyvalence et son génie à jouer, écrire, mettre en scène et produire Le Cirque[199] ». Malgré le succès du film, Chaplin l'associe avec le stress de sa production ; il ne le mentionne pas dans son autobiographie et a du mal à travailler dessus quand il le resonorisa en [200],[201].

Les Lumières de la ville

« J'étais résolu à continuer la réalisation de films muets… J'étais un mime et dans ce registre j'étais unique et, sans fausse modestie, un maître. »

Chaplin sur le cinéma parlant[202]

Capture d'écran montrant Charlot tendant la main à une jeune femme assise dans la rue à côté de bouquets de fleurs.
Chaplin et Virginia Cherrill dans Les Lumières de la ville ().

Le cinéma sonore apparaît à l'époque où sortait Le Cirque. Chaplin est sceptique quant à cette nouvelle technique et estime que les « parlants » ne valent pas les films muets, du point de vue artistique[203],[204]. Il est également réticent à l'idée de changer la formule qui a fait son succès[205],[202],[206] et craint que donner une voix à Charlot ne limite son attrait à l'international[203],[206]. Il rejette donc cette mode hollywoodienne et commence à travailler sur un nouveau film muet ; cette décision le rend néanmoins anxieux et il le reste tout au long de la production de ce nouveau projet[203],[206].

Lorsque le tournage commence à la fin de l'année , Chaplin travaille sur l'histoire depuis près d'un an[207],[208]. Les Lumières de la ville met en scène l'amour de Charlot pour une fleuriste aveugle, jouée par Virginia Cherrill, et ses efforts pour lever des fonds pour une opération destinée à lui rendre la vue. Chaplin a travaillé « jusqu'au bord de la folie pour obtenir la perfection »[209] et le tournage dure 21 mois, jusqu'en [210].

Chaplin finalise Les Lumières de la ville en à un moment où les films muets sont devenus anachroniques[211]. Une pré-projection ne rencontre pas de succès[212], mais la presse est séduite. Un journaliste écrit : « Personne d'autre que Charlie Chaplin n'aurait pu le faire. Il est le seul à avoir ce quelque chose d'étrange appelé « attrait de l'audience » en quantité suffisante pour défier le penchant populaire pour les films qui parlent »[213]. Lors de sa sortie officielle en , Les Lumières de la ville est un succès populaire et financier qui rapporte plus de trois millions de dollars[214],[215],[216]. Le British Film Institute le cite comme la plus grande réussite de Chaplin et le critique James Agee évoque son final comme « le meilleur jeu d'acteur et le plus grand moment de l'histoire du cinéma »[217],[218].

Paulette Goddard et Les Temps modernes

Affiche montrant Charlot avec un bleu de travail rayé. Il tourne le dos à un mur où sont fixés deux gros disjoncteurs manuels qu'il tient dans les mains à la hauteur de sa tête.
Affiche pour Les Temps modernes (1936).

Les Lumières de la ville est un succès mais Chaplin n'est pas certain de pouvoir réaliser un nouveau film sans dialogues. Il reste convaincu que le son ne marcherait pas dans ses films, mais est également « obsédé par la peur déprimante d'être démodé »[219]. En raison de ces incertitudes, le comédien choisit au début de l'année de prendre des vacances et il arrête de tourner pendant 16 mois[220],[221]. Il visite l'Europe de l'Ouest, dont la France et la Suisse, et décide spontanément de se rendre dans l'empire du Japon[222]. Là-bas, il est témoin de l'incident du 15 mai 1932, durant lequel des officiers nationalistes tentent un coup d'État, assassinant le Premier ministre du Japon Tsuyoshi Inukai. Le plan initial inclut notamment de tuer Charlie Chaplin afin de déclencher une guerre avec les États-Unis[223]. Quand le Premier ministre est tué, son fils Takeru Inukai assiste à une compétition de sumo avec Charlie Chaplin, ce qui leur a probablement sauvé la vie[224].

Dans son autobiographie, il note qu'à son retour à Los Angeles en , il se sent « perdu et sans but, fatigué et conscient d'une extrême solitude ». Il envisage brièvement la possibilité de prendre sa retraite et de s'installer en Chine[225].

La solitude de Chaplin est apaisée quand il rencontre en juillet l'actrice de 21 ans Paulette Goddard, avec qui il forme un couple heureux[226],[227]. Hésitant encore sur l'opportunité d'un film, il écrit un roman-feuilleton sur ses voyages, qui est publié dans le magazine Woman's Home Companion[228]. Son séjour à l'étranger, durant lequel il rencontre plusieurs personnages influents, a un effet très stimulant pour Chaplin, et il s'intéresse de plus en plus aux questions internationales[229]. L'état du monde du travail américain durant la Grande Dépression le trouble et il craint que le capitalisme et les machines ne provoquent un fort taux de chômage. Ce sont ces inquiétudes qui le motivent à développer son nouveau film[230],[231].

Les Temps modernes est présenté par Chaplin comme « une satire de certaines situations de notre vie industrielle »[232]. Il envisage d'en faire un film parlant, mais change d'avis lors des répétitions. Comme ses prédécesseurs, Les Temps modernes utilise des effets sonores synchronisés, mais presque aucune parole[233]. Dans le film, l'interprétation en « charabia » d'une chanson par Chaplin donne néanmoins pour la première fois une voix à Charlot[234]. Après l'enregistrement de la musique, le résultat est présenté en [235]. Il s'agit de son premier film depuis Le Kid à intégrer des références politiques et sociales[236] et cet aspect entraîne une forte couverture médiatique, même si Chaplin tente de minimiser le sujet[237]. Le film connaît un succès moindre que ses précédents films et les critiques sont plus mitigées, certaines désapprouvant sa signification politique[238],[239]. Les Temps modernes est néanmoins devenu un classique du répertoire de Chaplin[217],[240].

À la suite de cette sortie, Chaplin se rend en Extrême-Orient avec Goddard[241]. Le couple refuse tout commentaire sur la nature de leur relation et on ne sait alors pas vraiment s'ils sont mariés ou non[242]. Quelque temps plus tard, Chaplin révèle qu'ils se sont mariés à Canton, en Chine, durant ce voyage[243]. Les deux s'éloignent cependant rapidement l'un de l'autre pour se consacrer à leur travail ; Goddard demande finalement le divorce en , avançant qu'ils sont séparés depuis plus d'un an[244].

Controverses et popularité déclinante (1939-1952)

Le Dictateur

Affiche montrant Chaplin en tenue de dictateur, les yeux rivés sur un globe terrestre. Paulette Goddard est présent en bas de l'affiche portant un panier sur la tête.
Affiche originale du film Le Dictateur ().

Chaplin est profondément perturbé par les tensions politiques et la montée du nationalisme en Europe dans les années [245],[246] et estime qu'il ne peut en faire abstraction dans ses films[247]. Les observateurs font des rapprochements avec Adolf Hitler : ils sont nés à quatre jours d'écart, ont tous deux accédé à la notoriété mondiale malgré leur origine modeste, et le dictateur allemand porte la même moustache que Charlot. Cette ressemblance physique devient la base du film suivant de Chaplin, Le Dictateur, qui se moque directement d'Hitler et du fascisme[248],[249],[250],[251],[252],[253].

Chaplin consacre deux années à la rédaction du scénario[254] et commence le tournage en alors que la Seconde Guerre mondiale vient d'éclater[255]. Chaplin décide de renoncer au film muet, qu'il estime démodé et parce qu'il est plus facile de délivrer un message politique avec la parole[256]. Réaliser une comédie sur Hitler est très délicat, mais l'indépendance financière de Chaplin lui permet de prendre le risque[257] : « J'étais déterminé à le faire, car on doit se moquer d'Hitler[258],[n 7] ». Dans le film, Chaplin s'éloigne de son personnage de Charlot, tout en conservant son accoutrement, en jouant un « barbier juif » vivant dans une dictature européenne ressemblant considérablement à la dictature hitlérienne ; Chaplin répond ainsi aux nazis qui prétendent qu'il est juif[n 8],[n 9]. Charlie Chaplin jouera également le dictateur « Adenoïd Hynkel », parodiant Hitler[261].

Le Dictateur passe une année en postproduction et est présenté au public en [262]. Le film est l'objet d'une importante campagne publicitaire et un critique du New York Times le qualifie de film le plus attendu de l'année[263]. Il connaît un succès populaire considérable, même si le dénouement est controversé[264],[265]. Dans ce final où son personnage de barbier juif prend la place du dictateur, Chaplin prononce un discours de six minutes face à la caméra, dans lequel il expose ses opinions politiques personnelles[266],[267]. Selon l'historien du cinéma Charles J. Maland, à une époque où le cinéma évite les thèmes politiques controversés, cette prise de liberté a marqué le début du déclin de la popularité de Chaplin : « Dorénavant, aucun admirateur ne pourra séparer la dimension politique de la star de cinéma »[268]. Le Dictateur est nommé dans cinq catégories lors de la 13e cérémonie des Oscars, dont celles du meilleur film, du meilleur acteur et du meilleur scénario, même s'il ne remporte aucune statuette[269].

Joan Barry et Oona O'Neill

Photographie de Oona O'Neill souriante en robe de soirée assise à une table
Oona O'Neill en 1943. Elle est la quatrième et dernière épouse de Chaplin, avec qui elle a huit enfants.

Dans le milieu des années , Chaplin est impliqué dans une série de procès qui accaparent une grande partie de son temps et affectent son image publique[270]. Ces derniers sont liés à sa relation intermittente avec l'aspirante actrice Joan Barry, entre et l'été [271]. Ils se séparent après que cette dernière montre des troubles mentaux, et elle est arrêtée à deux reprises pour harcèlement après cette rupture[n 10]. Elle réapparaît l'année suivante en annonçant être enceinte du réalisateur ; ce dernier nie et Barry entame une procédure en reconnaissance de paternité[272].

J. Edgar Hoover, le directeur du Federal Bureau of Investigation (FBI), qui se méfie des tendances politiques de Chaplin, exploite l'opportunité de nuire à sa réputation. Dans le cadre d'une campagne de diffamation[273], le FBI l'inculpe dans quatre affaires reliées à ce scandale. Chaplin est en particulier accusé d'avoir violé le Mann Act qui interdit le transport entre États de femmes à des fins sexuelles[n 11]. L'historien Otto Friedrich a soutenu qu'il s'agissait de « poursuites absurdes » en application d'un « ancien texte[276] », mais Chaplin risquait jusqu'à 23 ans de prison[277]. Les preuves pour trois motifs d'accusation se révèlent insuffisantes pour aller jusqu'au procès, mais l'étude de la violation du Mann Act commence en . Chaplin est acquitté deux semaines plus tard[274]. L'affaire fait fréquemment la une des journaux et le journal Newsweek la qualifie de « plus grand scandale de relations publiques depuis le procès pour meurtre de Roscoe Arbuckle en  »[278].

Barry accouche en d'une fille, Carole Ann, et le procès en paternité débute en . Après deux procès difficiles au cours desquels Chaplin est accusé de « turpitude morale » par le procureur[279], il est déclaré être le père. Le juge refuse d'accepter les preuves médicales, et en particulier la différence de groupe sanguin qui infirme cette conclusion, et Chaplin est condamné à payer une pension à sa fille jusqu'à ses 21 ans[280]. La couverture médiatique du procès est influencée par le FBI, qui transmet des informations à l'influente journaliste à scandales Hedda Hopper[281],[282],[283],[284].

La controverse entourant Chaplin s'accroît encore quand le , deux semaines après le début de la procédure de reconnaissance de paternité, un nouveau mariage est annoncé avec sa nouvelle jeune protégée de 18 ans, Oona O'Neill, la fille du dramaturge américain Eugene O'Neill[285]. Chaplin, alors âgé de 54 ans, lui a été présenté par un agent artistique sept mois plus tôt[286],[287], et dans son autobiographie, il décrit leur rencontre comme « l'événement le plus heureux de [sa] vie » et indique qu'il avait découvert le « parfait amour »[288]. Ils restent mariés jusqu'à sa mort en et ont huit enfants : Geraldine Leigh (), Michael John (), Josephine Hannah (), Victoria (), Eugene Anthony (), Jane Cecil (), Annette Emily () et Christopher James ()[289].

Monsieur Verdoux et accusations de communisme

Affiche de film montrant Chaplin l'air arrogant dans un élégant costume blanc
« Chaplin change ! Le pouvez-vous ? »
Affiche de Monsieur Verdoux ().

Chaplin avance que ces procès ont démoli sa créativité[290] et en , il commence le tournage d'un film sur lequel il travaille depuis [291]. Monsieur Verdoux est une comédie noire sur un employé de banque français, M. Verdoux joué par Chaplin, réduit au chômage et qui commence à épouser et assassiner de riches veuves pour subvenir aux besoins de sa famille. L'idée lui est fournie par Orson Welles, qui voulait qu'il joue dans un film sur le tueur en série français Henri Désiré Landru. Chaplin estime que ce concept « ferait une superbe comédie »[292] et achète le scénario à Welles pour 5 000 dollars (environ 65 555 dollars de 2024[69])[293].

Chaplin exprime à nouveau ses idées politiques dans Monsieur Verdoux en critiquant le capitalisme[294],[295] et le film est très controversé à sa sortie, en [296],[297],[298]. Il est hué lors de la première et certains demandent son interdiction[296],[299]. Il s'agit du premier film où son personnage n'a aucun rapport avec Charlot ; il est également le premier à être un échec critique et commercial aux États-Unis[300], il est mieux accueilli à l'étranger. Il est cité pour le meilleur scénario lors de la 20e cérémonie des Oscars[301]. Chaplin est néanmoins fier de son œuvre et écrit dans son autobiographie : « Monsieur Verdoux est le plus intelligent et le plus brillant des films que j'ai réalisés »[302].

L'accueil négatif de Monsieur Verdoux est largement le résultat de l'évolution de l'image publique de Chaplin[303]. Outre le scandale de l'affaire Joan Barry, il est publiquement accusé d'être communiste[304],[305]. Ses actions politiques se sont intensifiées durant la Seconde Guerre mondiale et il a fait campagne pour l'ouverture d'un second front afin de soulager les Soviétiques[306]. Il se rapproche de sympathisants communistes connus comme Hanns Eisler et Bertolt Brecht et participe à des réceptions organisées par des diplomates soviétiques à Los Angeles[307]. Dans le contexte politique de « peur rouge » qui prévaut à l'époque aux États-Unis, de telles activités font que Chaplin est, selon Larcher, considéré comme « dangereusement progressiste et amoral »[308],[309],[279]. Le FBI, déterminé à lui faire quitter le pays[310], lance une enquête officielle à son encontre en [311],[n 12].

Chaplin nie être communiste et se présente comme un pacifiste[313],[314],[315],[316] qui estime que les actions du gouvernement américain pour réprimer une idéologie sont une violation inacceptable des libertés publiques[317]. Refusant de se taire sur cette question, il proteste ouvertement contre les procès des membres du parti communiste américain devant le House Un-American Activities Committee (HUAC) et est convoqué par ce dernier[318],[319]. Alors que ses actions sont largement relayées dans la presse et que la guerre froide gagne en intensité, sa non-acquisition de la citoyenneté américaine est critiquée et certains demandent son expulsion[320],[321],[279],[322]. Le représentant du Mississippi John E. Rankin (en) déclare devant le Congrès en  : « Sa vie à Hollywood est nuisible au tissu moral des États-Unis. [S'il est expulsé], ses films répugnants pourront être gardés à l'écart des yeux de la jeunesse américaine. Nous devons l'expulser et nous en débarrasser une fois pour toutes[322]. »

Les Feux de la rampe et expulsion des États-Unis

Capture d'écran montrant Chaplin l'air fatigué en pyjama blanc rayé assis dans son lit. Des photographies d'un personnage ressemblant à Charlot sont accrochées sur le mur derrière lui.
Dans Les Feux de la rampe (), Chaplin joue le rôle d'une ancienne star de music-hall devant faire face à sa perte de popularité.

Même si Chaplin reste politiquement actif dans les années qui suivent l'échec de Monsieur Verdoux[n 13], son film suivant sur un comédien de vaudeville oublié et une jeune ballerine dans le Londres de l'époque édouardienne est dépourvu de toute signification politique. Les Feux de la rampe est largement autobiographique et fait référence à l'enfance de Chaplin, à la vie de ses parents et à sa perte de popularité aux États-Unis[324],[325],[326]. Parmi les acteurs figurent plusieurs membres de sa famille, dont ses enfants les plus âgés et son demi-frère, Wheeler Dryden[327].

Après trois ans de préparation, le tournage commence en [328]. Il adopte un ton bien plus sérieux que dans ses précédents films et parle régulièrement de « mélancolie » en expliquant le scénario à sa partenaire Claire Bloom[329]. Le film est également notable pour la présence de Buster Keaton — dont c'est l'unique collaboration avec Chaplin[330].

Chaplin décide d'organiser la première mondiale des Feux de la rampe à Londres, où se déroule l'action du film[331]. Quittant Los Angeles, il indique qu'il s'attend à ne jamais pouvoir revenir, chassé par l'Amérique maccarthyste[332]. À New York, il embarque avec sa famille à bord du paquebot transatlantique HMS Queen Elizabeth le [333]. Le lendemain, le procureur général des États-Unis, James McGranery, révoque le visa de Chaplin et déclare qu'il doit se soumettre à un entretien sur ses opinions politiques et sa moralité pour pouvoir revenir aux États-Unis[333]. Même si McGranery indique à la presse qu'il a « un dossier assez solide contre Chaplin », Maland conclut, en s'appuyant sur les documents du FBI rendus publics dans les années , que le gouvernement américain n'a pas réellement de preuves suffisantes pour empêcher le retour de Chaplin ; il est même probable qu'il aurait obtenu un visa s'il en avait fait la demande[334],[335]. Cependant, quand il reçoit un câblogramme l'informant de cette décision, Chaplin décide de rompre tous ses liens avec les États-Unis :

« Que je revienne ou non dans ce triste pays avait peu d'importance pour moi. J'aurais voulu leur dire que plus tôt je serais débarrassé de cette atmosphère haineuse, mieux je serais, que j'étais fatigué des insultes et de l'arrogance morale de l'Amérique[336]. »

Comme tous ses biens sont aux États-Unis, Chaplin ne fait aucun commentaire négatif dans la presse[337], mais l'affaire fait sensation[338]. Si Chaplin et son film sont bien accueillis en Europe[333], Les Feux de la rampe sont largement boycottés aux États-Unis malgré des critiques positives[339]. Maland écrit que la chute de Chaplin d'un niveau de popularité inégalé « est peut-être la plus spectaculaire de toute l'histoire de la célébrité aux États-Unis »[340].

Années européennes (1953-1977)

Suisse et Un roi à New York

« J'ai fait l'objet de calomnies et d'une propagande orchestrée par de puissants groupes réactionnaires qui, par leur influence et l'aide de la presse jaune américaine, ont créé une atmosphère malsaine dans laquelle les individus aux tendances libérales peuvent être persécutés. Dans ces conditions, j'ai trouvé qu'il était virtuellement impossible de continuer mon travail de réalisation cinématographique et j'ai par conséquent abandonné mon séjour aux États-Unis »[341].

Communiqué de presse de Chaplin sur sa décision de ne pas revenir aux États-Unis.

Photographie d'une résidence bourgeoise à deux étages. Une large pelouse tondue se trouve devant et le haut de la photographie est masquée par des fleurs de merisier.
Le manoir de Ban où les Chaplin s'installent en .

Chaplin ne tente pas de revenir aux États-Unis après la révocation de son visa d'entrée et envoie sa femme à Los Angeles pour régler ses affaires[342]. Le couple se décide pour la Suisse et la famille s'installe en au manoir de Ban, une propriété de 15 hectares surplombant le lac Léman dans la commune de Corsier-sur-Vevey[343]. Chaplin met en vente sa résidence et son studio de Beverly Hills en mars et rend son visa en avril. L'année suivante, sa femme renonce à sa nationalité américaine pour devenir Britannique[344]. Il abandonne ses derniers liens professionnels avec les États-Unis en quand il vend ses parts dans la United Artists, qui est en difficultés financières depuis le début des années [345],[346],[347].

Chaplin reste une figure controversée tout au long des années , en particulier après avoir reçu le prix international de la paix décerné par le Conseil mondial de la paix, d'obédience communiste, et en raison de ses rencontres avec le Chinois Zhou Enlai et le Soviétique Nikita Khrouchtchev[348],[346]. Il commence à développer son premier film européen, Un roi à New York, en [349]. Jouant le rôle d'un roi exilé cherchant asile aux États-Unis, Chaplin exploite ses problèmes récents pour écrire le scénario. Son fils, Michael, est présenté comme un garçon dont les parents sont visés par le FBI, tandis que le personnage de Chaplin est accusé d'être un communiste[350]. Cette satire politique parodie les actions de l'HUAC ainsi que le consumérisme de la société américaine des années [351],[352],[353],[354]. Dans sa critique, le dramaturge John Osborne le qualifie comme film le « plus acide… et de plus ouvertement personnel » de Chaplin[355].

Chaplin fonde une nouvelle société de production appelée Attica et tourne dans les studios de Shepperton, dans la banlieue de Londres[349]. Ce tournage est difficile car il est habitué à son studio et à ses équipes hollywoodiennes, et ne dispose plus d'une durée de production illimitée. Cela a un impact sur la qualité du film[356],[357], qui reçoit des critiques mitigées à sa sortie en [358],[359],[360]. Chaplin empêche les journalistes américains d'assister à la première à Paris et décide de ne pas diffuser le film aux États-Unis. Cela nuit fortement à son succès commercial, même si le film obtient un succès d'estime en Europe[361]. Un roi à New York n'est présenté aux États-Unis qu'en [362].

Dernières années et regain d'intérêt

À partir du milieu des années , Chaplin se concentre sur la resonorisation et la réédition de ses anciens films, ainsi que sur la protection de ses droits d'auteur[363]. La première de ces rééditions est La Revue de Charlot (), comprenant de nouvelles versions d'Une vie de chien, de Charlot soldat et du Pèlerin[364].

Photographie de Chaplin âgé et de son épouse au pied d'un avion
Chaplin, avec son épouse Oona, en .

Aux États-Unis, l'atmosphère politique commence à évoluer et l'attention du public se tourne à nouveau vers les films de Chaplin et non plus vers ses opinions[363]. En , le New York Times publie un éditorial indiquant que « nous ne pensons pas que la République serait en danger si l'inoublié petit Charlot d'hier était autorisé à se promener sur la passerelle d'un navire ou d'un avion dans un port américain »[365]. Le même mois, Chaplin reçoit un doctorat honorifique en Lettres des universités d'Oxford et de Durham[366]. En , le Plaza Theater de New York commence une rétrospective des films de Chaplin, dont Monsieur Verdoux et Les Feux de la rampe pour lesquels les critiques sont bien plus positives que dix ans plus tôt[367],[368]. voit la publication de ses mémoires, Histoire de ma vie, sur lesquels il travaille depuis [369]. Le livre de 500 pages mettant l'accent sur ses premières années et sa vie privée connaît un succès mondial, même si les critiques pointent le manque d'informations sur sa carrière cinématographique[370],[371].

Peu après la publication de ses mémoires, Chaplin commence à travailler sur La Comtesse de Hong-Kong (), une comédie romantique basée sur un scénario qu'il a écrit dans les années pour Paulette Goddard[372]. Située sur un paquebot, l'action met en scène Marlon Brando jouant un ambassadeur américain et Sophia Loren dans le rôle d'une passagère clandestine[372]. Le film diffère des précédentes productions de Chaplin sur plusieurs points : il est le premier à employer le technicolor et le format écran large, tandis que Chaplin se concentre sur la réalisation et n’apparaît à l'écran que dans le rôle mineur d'un steward malade[373]. Il signe également un contrat avec le studio Universal Pictures pour le distribuer[374]. La Comtesse de Hong-Kong reçoit des critiques négatives à sa sortie en et c'est un échec commercial[375],[376],[377]. Chaplin est profondément affecté par ce revers et ce film sera le dernier[375].

Chaplin est victime de plusieurs AVC mineurs à la fin des années et cela marque le début d'un lent déclin de sa santé[378]. Malgré ces difficultés, il se met rapidement à écrire le scénario de son nouveau projet de film, The Freak, sur une jeune fille ailée découverte en Amérique du Sud, projet destiné à lancer la carrière de sa fille, Victoria Chaplin[378]. Sa santé fragile l'empêche néanmoins de mener à bien ce projet[379], et au début des années Chaplin se concentre plutôt sur la réédition de ses anciens films, dont Le Kid et Le Cirque[380] dont il refait la bande-son. En , il est fait commandeur de l'Ordre national de la Légion d'honneur lors du festival de Cannes[381] et l'année suivante il reçoit un Lion d'or pour sa carrière durant la mostra de Venise[382].

En , l'Academy of Motion Picture Arts and Sciences lui décerne un Oscar d'honneur, ce que Robinson considère comme le premier signe que les États-Unis « voulaient se faire pardonner ». Chaplin hésite à l'accepter, puis décide de se rendre à Los Angeles pour la première fois en vingt ans[381]. La visite est l'objet d'une large couverture médiatique, et lors de la remise de la récompense il reçoit une ovation de douze minutes, la plus longue de toute l'histoire des Oscars[383],[384]. Visiblement ému, Chaplin accepte la statuette rendant hommage « à l'effet incalculable qu'il a eu en faisant des films de cinéma la forme d'art de ce siècle »[385].

Même si Chaplin a encore des projets de film, sa santé devient très fragile dans le milieu des années [386]. Plusieurs AVC affectent son élocution et il doit utiliser un fauteuil roulant[387],[388]. Parmi ses dernières réalisations figurent la création d'une autobiographie en images, My Life in Pictures () et la resonorisation de L'Opinion publique en [389]. Il apparaît également dans un documentaire sur sa vie, The Gentleman Tramp (), réalisé par Richard Patterson[390]. En , la reine Élisabeth II le fait chevalier[389],[n 14].

Mort

Photographie d'un caveau en pierre où est inscrit « Charles Chaplin 1889-1977"
La tombe de Chaplin au cimetière de Corsier-sur-Vevey.

En , la santé de Chaplin s'est détériorée au point qu'il demande une attention de tous les instants[392]. Il meurt d'un AVC dans son sommeil le matin du , à l'âge de 88 ans[388]. Selon ses dernières volontés, une petite cérémonie funéraire anglicane est organisée le 27 décembre et il est inhumé dans le cimetière de Corsier-sur-Vevey[392]. Parmi les hommages du monde du cinéma, le réalisateur René Clair écrit : « il était un monument du cinéma »[393] ; l'acteur Bob Hope a quant à lui déclaré : « nous avons eu de la chance de vivre à son époque »[394].

Le , le cercueil de Chaplin est exhumé et volé par deux mécaniciens automobiles[395], un Polonais, Roman Wardas, et un Bulgare, Gantcho Ganev. Leur but est d'extorquer une rançon de cent mille francs suisses à Oona Chaplin afin de pouvoir ouvrir plus tard un garage automobile. Ils sont arrêtés lors d'une vaste opération de police le et le cercueil est retrouvé enterré dans un champ de maïs près du village de Noville. Il est réenterré dans le cimetière de Corsier-sur-Vevey et un caveau en béton armé est ajouté pour empêcher tout nouvel incident[396],[397].

Analyse de son œuvre

Influences

Chaplin considérait que sa première inspiration était sa mère qui l'amusait, alors qu'il était enfant, en s'asseyant à la fenêtre et en imitant les passants : « C'est grâce à elle que j'ai appris non seulement à exprimer des émotions avec mes mains et mon visage mais également à observer et à étudier les gens[398]. » Les premières années de Chaplin dans le music-hall lui permettent d'observer le travail des comédiens ; il assiste également aux spectacles de mime de Noël au théâtre de Drury Lane, où il étudie l'art de la frivolité avec des artistes comme Dan Leno[399],[400],[401]. Ses années dans la compagnie de Fred Karno ont un effet formateur sur sa carrière d'acteur et de réalisateur. Il y apprend à associer le tragique avec la comédie et à utiliser des éléments absurdes qui devinrent récurrents dans ses œuvres[402]. Dans l'industrie cinématographique, Chaplin s'appuie sur les œuvres du comédien français Max Linder, qu'il admire[403],[404],[405]. En développant le costume et le jeu de Charlot, il s'inspire probablement de la scène de vaudeville américaine où les personnages de vagabond étaient courants[406].

Méthodes

Photographie d'une rue bordée de bâtiments en brique à deux étages
Carte postale de montrant les studios Charlie Chaplin, où tous ses films sont réalisés entre et .

Tout au long de sa carrière, Chaplin parle assez peu de ses techniques de réalisation et compare cela à dévoiler ses secrets pour un magicien[407]. On sait donc peu de chose sur ses manières de travailler[408], mais elles ont été étudiées par Kevin Brownlow et David Gill et savamment exposées dans la série documentaire Unknown Chaplin ()[409],[410].

Avant de réaliser des films parlants avec Le Dictateur, Chaplin ne commence jamais un tournage avec un scénario achevé[411]. Pour ses premiers films, il n'a qu'une vague idée de départ comme « Charlot se rend dans une station thermale » ou « Charlot travaille comme prêteur sur gage[412] ». Il fait ensuite réaliser les décors et travaille avec les autres acteurs pour improviser des effets comiques tout en affinant le scénario tout au long de la production[409],[410]. Alors que les idées sont acceptées ou rejetées, une structure narrative émerge et Chaplin est souvent obligé de retourner des scènes qui vont à l'encontre de l'histoire[413],[414],[415]. À partir de L'Opinion publique, Chaplin commence à réaliser le tournage à partir d'un scénario préétabli[416], mais tous ses films, jusqu'aux Temps modernes, continuent à subir des modifications jusqu'à atteindre leur forme finale[417].

En réalisant des films de cette manière, Chaplin a besoin de plus de temps que tout autre réalisateur de l'époque[418]. S'il est à court d'idées, il s'éloigne alors du studio pendant plusieurs jours, tout en maintenant ses équipes prêtes dès que l'inspiration revient[419],[420]. Le processus de réalisation est également ralenti par son perfectionnisme[421],[422]. Selon son ami et réalisateur britannique Ivor Montagu, « rien d'autre que la perfection n'était suffisant » pour lui[423]. Comme il finance personnellement ses films, Chaplin a toute liberté pour atteindre cet objectif et réaliser autant de prises que nécessaire[424],[423]. Leur nombre est ainsi souvent excessif ; chaque prise terminée pour Le Kid en avait nécessité 53[425],[426] tandis que pour réaliser les 20 minutes de L'Émigrant, il utilisa plus de 12 000 m de pellicule, une longueur suffisante pour faire un long-métrage[427],[428].

« Aucun autre réalisateur n'a si complètement dominé tout aspect du travail et fait tous les métiers. S'il avait pu, Chaplin aurait joué tous les rôles et (comme son fils Sydney nota avec humour mais avec perspicacité) aurait cousu tous les costumes »[407].

Biographe de Chaplin, David Robinson

Décrivant ses méthodes de production comme de la « pure détermination jusqu'au bord de la folie »[429], Chaplin est généralement complètement épuisé par les tournages[430],[431]. Même dans ses dernières années, son travail « avait la priorité sur tout et tout le monde »[432]. Le mélange d'improvisation et de perfectionnisme qui se traduit par des jours d'efforts et des milliers de mètres de pellicule gâchés, se révèle éprouvant pour Chaplin, ce qui peut le mener à se déchaîner contre ses acteurs et ses équipes[433],[434],[130].

Chaplin a exercé un contrôle complet sur ses œuvres[407], au point de mimer les autres rôles pour que ses acteurs l'imitent exactement[435],[436],[437]. Il a effectué personnellement le montage de tous ses films en fouillant dans les grandes quantités de pellicules pour créer le film voulu[438]. Chaplin a néanmoins reçu l'aide d'autres artistes, dont son ami et directeur de la photographie Roland Totheroh, son frère Sydney Chaplin et divers assistants réalisateurs, comme Harry Crocker, Dan James et Charles Reisner[439].

Style et thèmes

Scènes du film Le Kid démontrant l'association du slapstick, du pathos et du commentaire social par Chaplin.

Si le style comique de Chaplin est généralement qualifié de slapstick[440], il est considéré comme retenu et intelligent[441], et l'historien de cinéma Philip Kemp décrit son travail comme un mélange de « comédie physique gracieuse et de comique de situation bien réfléchi »[177]. Chaplin s'est éloigné du slapstick traditionnel en ralentissant le rythme de l'action et en se concentrant sur la relation du spectateur avec les personnages[79],[442]. Les effets comiques dans les films de Chaplin sont centrés sur la réaction de Charlot aux choses qui lui arrivent : l'humour ne vient pas du fait que Charlot rentre dans un arbre, mais qu'il soulève son chapeau pour s'excuser[79]. Son biographe Dan Kamin écrit que les « manières excentriques » de Chaplin et son « comportement sérieux au cœur du slapstick » sont d'autres aspects centraux de son style comique[443].

Les films muets de Chaplin suivent généralement les efforts de Charlot pour survivre dans un monde hostile[444]. Même s'il vit dans la pauvreté et est fréquemment maltraité, il reste gentil et optimiste[177],[445],[446] ; défiant sa position sociale, il s'efforce d'être vu comme un gentleman[447]. Charlot s'oppose aux figures de l'autorité[448] et « donne autant qu'il reçoit »[449], ce qui poussa Robinson et Louvish à voir en lui un représentant des défavorisés : « Un Monsieur Tout-le-monde devenant un sauveur héroïque »[450],[451]. Hansmeyer note que plusieurs des films de Chaplin se terminent avec « Charlot démuni et seul [marchant] avec optimisme… vers le soleil couchant… pour poursuivre son voyage »[446].

Photographie de Chaplin en costume avec un nœud papillon prenant la pose
Chaplin dans les années .

L'emploi du pathos est un aspect bien connu de l'œuvre de Chaplin[452],[453] et Larcher note sa capacité à « [provoquer] les rires et les larmes »[308]. Chaplin s'appuie parfois sur des événements tragiques pour ses films comme dans La Ruée vers l'or, qui est inspirée par le destin malheureux de l'expédition Donner[454]. Différents thèmes sont représentés dans ses premières comédies comme l'avarice (La Ruée vers l'or), l'abandon (Le Kid)[455] et des sujets plus controversés comme l'immigration (L'Émigrant) ou la drogue (Charlot policeman)[442].

Les commentaires sociaux sont également importants dans ses premiers films, car il représente les démunis sous un jour positif et souligne leurs difficultés[456]. Par la suite, il développe un grand intérêt pour l'économie et se sent obligé de faire partager ses opinions dans ses films[457],[246]. Les Temps modernes illustre les conditions de travail difficiles des ouvriers de l'industrie, Le Dictateur parodie Hitler et Mussolini et se termine par un discours contre le nationalisme, Monsieur Verdoux critique la guerre et le nationalisme tandis qu’Un roi à New York attaque le maccarthysme[458].

Chaplin intègre plusieurs éléments autobiographiques dans ses films et le psychologue Sigmund Freud considère qu'il « se représent[e] toujours comme il était dans sa triste enfance »[459]. Il est généralement admis que Le Kid reflète le traumatisme qu'il a subi dans un orphelinat[459], tandis que le personnage principal des Feux de la rampe fait référence à la vie de ses parents[460] et que Un roi à New York renvoie à son expulsion des États-Unis[353]. Sa relation difficile avec sa mère souffrant de troubles mentaux est souvent reflétée dans les personnages féminins de ses films et par le désir de Charlot de les sauver[459].

En ce qui concerne la structure de ses films, l'historien du cinéma Gerald Mast les voit comme une série de sketchs reliés par une même trame plutôt que comme une suite ordonnée par un scénario précis[461]. Visuellement, ils sont simples et économiques[462],[463], avec des scènes jouées comme au théâtre[464],[442],[465]. Dans son autobiographie, Chaplin écrit que « la simplicité est préférable… les effets pompeux ralentissent l'action, sont ennuyeux et désagréables… La caméra ne doit pas faire irruption »[466]. Cette approche n'a pas fait l'unanimité et elle est qualifiée de démodée depuis les années [467],[462],[468], tandis que l'historien du cinéma Donald McCaffrey y voit une indication que Chaplin n'a jamais complètement compris le média cinématographique[469]. Kamin avance néanmoins que le talent comique de Chaplin n'aurait jamais été suffisant pour qu'il reste drôle à l'écran s'il n'avait pas eu « la capacité de concevoir et de diriger des scènes spécifiquement pour le cinéma »[470].

Musique

Chaplin, de profil et la tête en bas, assis sur un tabouret, jouant un violoncelle entre ses jambes
Chaplin jouant du violoncelle en .

Chaplin développe dès l'enfance une passion pour la musique et apprend seul à jouer du piano, du violon et du violoncelle[471],[472]. Il considère que l'accompagnement musical fait partie intégrante du film[198] et à partir de L'Opinion publique il consacre beaucoup de temps à ce domaine[471]. Il compose lui-même la bande-son des Lumières de la ville et fait de même pour tous ses films suivants ; à partir de la fin des années et jusqu'à sa mort, il sonorise tous ses anciens courts-métrages silencieux[473].

Comme il n'a reçu aucune éducation musicale, Chaplin n'a jamais su lire ou écrire des partitions. Il fait donc appel à des compositeurs professionnels comme David Raksin, Raymond Rasch et Eric James pour mettre en forme ses idées. Certains critiques ont ainsi avancé que la musique de ses films devait être attribuée aux compositeurs ayant travaillé avec lui ; Raksin, qui participe à la mise en musique des Temps Modernes, a néanmoins souligné le rôle créatif et moteur de Chaplin dans le processus de composition[474]. Au début de ce travail, qui peut durer des mois, Chaplin décrit exactement ce qu'il veut aux compositeurs et joue les éléments qu'il a improvisés au piano[474]. Ces mélodies sont ensuite développées en étroite collaboration[474]. Pour l'historien du cinéma Jeffrey Vance, « même s'il s'appuyait sur ses associés pour mettre en forme des instrumentations complexes, les consignes musicales étaient les siennes, et pas une note n'était placée sans son accord »[473].

Les compositions de Chaplin donnent lieu à trois chansons populaires. Smile, composée pour Les Temps modernes, est par la suite mise en paroles par John Turner et Geoffrey Parsons, puis interprétée par Nat King Cole en [473]. Pour Les Feux de la rampe, Chaplin compose Terry's Theme, qui est popularisée par Jimmy Young sous le titre Eternally en [475]. Enfin, la chanson This Is My Song, chantée par Petula Clark pour La Comtesse de Hong-Kong, connaît un grand succès commercial et atteint la première place du palmarès britannique en 1967[476]. En dehors de ses deux récompenses d'honneur, le seul Oscar que Chaplin remporte est celui de la meilleure musique de film à l'occasion de la réédition des Feux de la rampe en 1973[473],[n 15].

Filmographie

Étoile rouge avec un liseré d'or sur un trotoir noir. « Charlie Chaplin » est écrit en lettres dorées au-dessus d'un emblème circulaire en laiton représentant une caméra.
Étoile de Chaplin sur le Hollywood Walk of Fame.

À l'occasion de la publication de son autobiographie, Chaplin a établi sa filmographie, qui se compose alors de 80 films (La Comtesse de Hong-Kong, réalisé trois ans plus tard, s'y est par la suite ajouté). En 2010, une copie de La Course au voleur, réalisé en et jusqu'alors considéré comme perdu, est découverte chez un antiquaire du Michigan, portant ainsi sa filmographie à 82 films[478].

Les films de Chaplin, jusqu'au Cirque inclus, sont muets, même si certains ont été réédités avec des bandes-son. Les Lumières de la ville et Les Temps modernes sont muets, mais intègrent des bandes-son composées de musique, de bruitages et de séquences parlées pour le second. Les cinq derniers films de Chaplin sont parlants. Hormis La Comtesse de Hong-Kong, tous les films de Chaplin sont tournés en format 35 mm, noir et blanc.

En français, Jacques Dumesnil double Chaplin dans Monsieur Verdoux, Les Feux de la rampe et Un roi à New York. Chaplin est également doublé par Henri Virlogeux dans la version sonorisée de 1942 de La Ruée vers l'or, en 1968 par Roger Carel dans Le Dictateur et par Jean-Henri Chambois dans La Comtesse de Hong-Kong.

Longs métrages :

Reconnaissance

Distinctions

Photographie de Chaplin au visage bouffi et en costume de soirée avec Jack Lemmon à sa droite derrière un pupitre où se trouve une statuette et deux micros
Chaplin (à droite) reçoit son Oscar d'honneur des mains de Jack Lemmon en .

Chaplin a reçu de nombreuses récompenses et distinctions, particulièrement à la fin de sa vie. En , les universités de Durham et d'Oxford lui décernent un diplôme honorifique de docteur ès Lettres[366]. En , il partage le prix Érasme avec Ingmar Bergman[479], et en , il est fait commandeur de l'Ordre national de la Légion d'honneur par le gouvernement français[480]. En , il est anobli par la reine Élisabeth II et fait chevalier commandeur de l'Ordre de l'Empire britannique, devenant « sir Charles Chaplin »[481].

L'industrie cinématographique le récompense avec un Lion d'or spécial à la Mostra de Venise 1972[482], ainsi qu'une étoile sur le Hollywood Walk of Fame en (cette inscription lui est auparavant refusée en raison de ses opinions politiques[483]).

Chaplin reçoit au total trois Oscars : un premier Oscar d'honneur en 1929 « pour sa polyvalence et son génie à jouer, écrire, mettre en scène et produire Le Cirque[199] », un second en 1972 « pour l'effet incalculable qu'il a eu en faisant des films de cinéma la forme d'art de ce siècle »[385] et un troisième en 1973 pour la meilleure musique originale (conjointement avec Ray Rasch et Larry Russell), pour Les Feux de la Rampe[473]. Il est également nommé dans les catégories du meilleur acteur, du meilleur film et du meilleur scénario pour Le Dictateur, ainsi que dans celle du meilleur scénario pour Monsieur Verdoux[484].

Six des films de Chaplin ont été sélectionnés pour être préservés dans le National Film Registry de la Bibliothèque du Congrès américaine : L'Émigrant (), Le Kid (), La Ruée vers l'or (), Les Lumières de la ville (), Les Temps modernes () et Le Dictateur ()[485].

Postérité

Photographie en pied de Charlot souriant
Chaplin dans son rôle de Charlot en .

En , le critique Andrew Sarris écrivit que Chaplin est « sans doute le plus grand artiste que le cinéma ait créé, certainement son interprète le plus extraordinaire et probablement encore son icône la plus universelle »[486]. Il est décrit par le British Film Institute comme « une figure tutélaire de la culture mondiale »[487], et le magazine Time le lista parmi les 100 personnes les plus importantes du XXe siècle pour « les rires [qu'il a apportés] à des millions de personnes » et parce qu'il a « plus ou moins inventé la célébrité mondiale et aidé à transformer une industrie en un art »[488].

L'historien du cinéma Christian Hansmeyer a noté que l'image de Charlot fait partie de l'histoire culturelle[489] ; selon Simon Louvish, ce personnage est connu même dans les endroits où ses films n'ont jamais été projetés[490]. Le critique Richard Schickel suggère que les films de Chaplin avec Charlot présentent « les expressions comiques de l'esprit humain les plus éloquentes et les plus riches » de l'histoire du cinéma[491]. Les objets associés au personnage continuent de fasciner le public et en 2006, un chapeau melon et une canne en bambou ayant appartenu à Chaplin sont achetés 140 000 dollars lors d'une vente aux enchères à Los Angeles[492].

En tant que réalisateur, Chaplin est considéré comme un pionnier et l'une des figures les plus influentes du début du XXe siècle[493],[494],[489],[486]. L'historien du cinéma Mark Cousins a écrit que Chaplin « a changé non seulement l'imagerie du cinéma mais également sa sociologie et sa grammaire » et avance qu'il joua un rôle important dans l'établissement de la comédie en tant que genre, parallèlement à ce qu'avait fait D. W. Griffith pour le drame[495]. Il est le premier à populariser les longs-métrages comiques et à ralentir le rythme de l'action pour y ajouter de la finesse et du pathos[496],[497]. Pour Robinson, les innovations de Chaplin sont « rapidement assimilées et deviennent les pratiques de base de la réalisation cinématographique »[498]. Federico Fellini (qui définit Chaplin comme « une sorte d'Adam duquel nous sommes tous issus »[394]), Jacques Tati (« sans lui, je n'aurais jamais fait un film »[394]), René Clair (« il a inspiré pratiquement tous les réalisateurs »[393]), Michael Powell[499], Billy Wilder[500] et Richard Attenborough[501] figurent parmi les réalisateurs ayant affirmé avoir été influencés par Chaplin.

Chaplin inspire également les poètes avant-gardistes du XXe siècle[502], mais aussi de futurs comédiens, comme Marcel Marceau, qui a indiqué s'être décidé à devenir mime après l'avoir vu[497], ou Raj Kapoor, qui base son jeu sur celui de Charlot[500]. Mark Cousins a également identifié le style comique de Chaplin chez les personnages français de Monsieur Hulot et italien de Totò[500], sans oublier qu'il a également influencé des personnages de dessin animé comme Félix le Chat[503] ou Mickey Mouse[504]. En tant que membre fondateur de la United Artists, Chaplin a un rôle important dans le développement de l'industrie cinématographique. Gerald Mast a noté que même si cette société n'a jamais rivalisé avec la MGM ou la Paramount, l'idée que des réalisateurs puissent produire leurs propres films était « très en avance sur son temps »[505].

À l'occasion de l'exposition universelle de Bruxelles, en , un jury international de 117 critiques a établi un classement des meilleurs films de tous les temps : La Ruée vers l'or () est classé deuxième derrière Le Cuirassé Potemkine de Sergueï Eisenstein () et devant Le Voleur de bicyclette de Vittorio De Sica (). Plusieurs des films de Chaplin restent encore aujourd'hui considérés comme parmi les plus grands jamais réalisés. Le palmarès 2012 de la revue britannique Sight and Sound, mené auprès de critiques de cinéma sur les meilleurs films de l'histoire, liste respectivement Les Lumières de la ville, Les Temps modernes, Le Dictateur et La Ruée vers l'or aux 50e, 63e, 144e et 154e places[506] ; la même étude réalisée auprès de réalisateurs situe Les Temps modernes à la 22e place, Les Lumières de la ville à la 30e et La Ruée vers l'or à la 91e[507]. En 2007, l'American Film Institute nomme Les Lumières de la ville le 11e plus grand film américain de tous les temps, tandis que La Ruée vers l'or et Les Temps modernes figurent dans le top 100[508].

Hommages

Statue en bronze de Charlot dans un parc devant un cinéma
Statue de Chaplin réalisée en par John Doubleday et vue sur la place Leicester à Londres (maintenant installée sur Leicester Place, face au Prince Charles Cinema (en), quelques pas plus loin).
Stèle en bronze dans le Parc Charlie Chaplin
Stèle de bronze réalisée par le sculpteur Frédéric Müller installée dans le Parc Chaplin à Corsier-sur-Vevey non loin du Manoir de Ban où vécut l'artiste avec sa famille.

En avril 2016, le manoir de Ban à Corsier-sur-Vevey en Suisse, où il a passé les vingt-cinq dernières années de son existence, est devenu un musée consacré à sa vie et son œuvre. Le musée, appelé « Chaplin's World »[509], est le fruit d'un partenariat entre la Compagnie des Alpes (CDA), Genii Capital et Chaplin Museum Development (CMD)[510]. La commune de Corsier-sur-Vevey a donné son nom à un parc et une stèle y rappelle la mémoire de l'illustre résident.

La ville voisine de Vevey a nommé en son honneur un square[511] sur le quai Perdonnet, au bord du lac Léman, et y a édifié en une statue de Chaplin, œuvre du sculpteur britannique John Doubleday[512]. Au nord de la ville, à quelques centaines de mètres du Manoir de Ban, deux immeubles de 14 étages ont été décorés de fresques évoquant la carrière de l'artiste[513].

La ville irlandaise de Waterville, où Chaplin passa plusieurs étés en famille dans les années , accueille chaque année depuis 2011 le Charlie Chaplin Comedy Film Festival destiné à honorer l'héritage du comédien et à découvrir de nouveaux talents[514].

Parmi les autres hommages, une planète mineure, (3623) Chaplin, a été nommée en son honneur en par l'astronome soviétique Lioudmila Karatchkina[515] et de très nombreux pays ont émis des timbres portant son effigie[516].

L'héritage de Chaplin est géré par l'Association Chaplin, fondée par plusieurs de ses enfants, et qui possède les droits d'auteur sur son image, son nom et sur la plupart des films réalisés après [517]. La Cinémathèque de Bologne, en Italie, abrite les principales archives de l'Association, dont des images, des manuscrits et des lettres[518]. Plus de 10 000 photographies sur sa vie et sa carrière sont également entreposées au Musée de l'Élysée à Lausanne, en Suisse[519]. Au Royaume-Uni, le Cinema Museum au sud de Londres est considéré comme « la chose la plus proche d'un musée Chaplin que la Grande-Bretagne possède » par la famille de Charlie Chaplin[520]. La British Film Institute a fondé la Charles Chaplin Research Foundation, qui a organisé la première conférence internationale sur le cinéaste à Londres, en juillet 2005[521].

Chaplin a fait l'objet d'un film biographique réalisé par Richard Attenborough, Chaplin, en  ; il y est personnifié par Robert Downey Jr., qui est nommé à l'Oscar du meilleur acteur et remporta le BAFTA du meilleur acteur[522]. Il est également joué par Eddie Izzard dans le film Un parfum de meurtre (2001)[523]. Une série télévisée sur l'enfance de Chaplin, Young Charlie Chaplin, est diffusée par PBS en et est nommée pour l'Emmy Award de meilleur programme pour enfants[524].

Le film La Rançon de la gloire de Xavier Beauvois, sorti en 2014 avec Benoît Poelvoorde et Roschdy Zem, s'inspire très librement du vol de la dépouille de Charlie Chaplin en [525]. Bernard Swysen raconte sa vie en bande dessinée intitulée Charlie Chaplin, les étoiles de l’histoire, dessinée par Bruno Bazile et parue en [526]. En 2021, François Aymé et Yves Jeuland réalisent le documentaire Charlie Chaplin, le génie de la liberté[527].

En 2023, il apparait brièvement, sous les traits de Joe Sheridan, dans le film français L'Abbé Pierre : Une vie de combats de Frédéric Tellier.

Notes et références

Notes

  1. Prononciation en anglais britannique retranscrite selon la norme API.
  2. Hannah tombe malade en et est admise à l'hôpital. Le comité de Southwark estime qu'il est nécessaire d'envoyer les enfants dans une workhouse « du fait de l'absence de leur père et de l'indigence et de la maladie de leur mère »[19].
  3. Selon Chaplin, Hannah est huée et le responsable l'a envoyé sur scène pour la remplacer après qu'il le voit dans les coulisses. Il se souvient que sa prestation avait été appréciée et accueillie par des applaudissements et des rires[32],[33].
  4. La troupe continue à se produire jusqu'en mais la date exacte du départ de Chaplin est inconnue ; l'historien A. J. Marriot estime que cela s'est passé en [36].
  5. Robinson note que « cela n'est pas parfaitement vrai : le personnage met un an ou plus pour atteindre sa pleine envergure et même après, ce qui fait sa principale force, il continue d'évoluer tout au long de sa carrière[78] ».
  6. Dans ses mémoires, Lita Grey avance que beaucoup de ses plaintes sont « de façon habile et choquante exagérées et déformées » par ses avocats[190].
  7. Chaplin écrit par la suite qu'il n'aurait pas fait ce film s'il avait connu l'ampleur des exactions nazies : « Si j'avais connu les horreurs des camps de concentration nazis, je n'aurais pas réalisé Le Dictateur ; je n'aurais pas pu me moquer de la folie meurtrière des nazis[254] ».
  8. Dès le début de sa célébrité, des rumeurs avancent que Chaplin est juif. Aucune preuve en ce sens n'a jamais été apportée et lorsqu'un journaliste lui demande en 1915 si c'est vrai, il répond : « Je n'ai pas cette chance »[259].
  9. Par exemple, en 1927, les frères Tharaud avaient présenté sa judéité comme quelque chose d'admis par tout le monde ; n'avaient-ils pas écrit dans leur Petite histoire des Juifs : « Charlie Chaplin est Juif, et tous les traits de son humour portent la marque juive. Rappelez-vous La Ruée vers l'or, ce film si divertissant par lui-même, mais qui devient tout à fait admirable si l'on y voit ce qu'il est à mon sens (que Chaplin l'ait voulu ou non), un grand souvenir du ghetto »[260].
  10. En , Barry entre de nuit par effraction dans la résidence de Chaplin avec un pistolet et menace de se suicider tout en lui pointant son arme dessus. Chaplin parvient à se saisir de son arme au matin mais elle fait à nouveau irruption dans sa maison plus tard dans le mois. Elle est ensuite arrêtée pour divagation en alors qu'elle erre droguée aux barbituriques dans les rues de Beverly Hills[272].
  11. Selon le procureur, Chaplin a violé la loi lorsqu'il a payé le voyage de Barry à New York en alors qu'il visite également la ville. Les deux reconnaissent s'être rencontrés et Barry affirme qu'ils ont eu des relations sexuelles[274]. Chaplin avance cependant qu'ils n'ont plus été intimes après [275].
  12. Le FBI s'est intéressé à Chaplin bien avant les années et la première mention de son nom dans ses documents date de . J. Edgar Hoover demande la création d'un dossier spécial en mais le bureau de Los Angeles ne commence ses enquêtes qu'au printemps suivant[311]. Le FBI reçoit également l'aide du MI5 britannique en particulier pour enquêter sur les allégations avançant qu'il est en fait né en Europe de l'Est. Le MI5 ne trouve aucune preuve de son implication dans le parti communiste[312].
  13. En , Chaplin demande à Pablo Picasso d'organiser une manifestation devant l'ambassade américaine à Paris pour protester contre l'expulsion d'Hanns Eisler et en décembre, il signe une pétition pour l'abandon de la procédure. En , il soutient la campagne malheureuse du candidat progressiste Henry Wallace ; l'année suivante, il défend l'organisation de deux conférences pacifistes et proteste contre les émeutes de Peekskill[323].
  14. L'octroi de cette distinction est déjà proposé en et mais le bureau des Affaires étrangères et du Commonwealth s'y est opposé en raison de ses opinions politiques et de sa vie privée. Il craignait que cela n'affecte la réputation du système de distinctions britannique et n'endommage les relations avec les États-Unis[391].
  15. Même si le film est présenté en 1952, il ne reste qu'une semaine à l'affiche à Los Angeles en raison de son boycott. Il ne remplit donc pas les critères pour une nomination avant sa réédition en 1972[477].

Références

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  7. Une enquête de du MI5 ne parvient pas à trouver un quelconque document sur la naissance de Chaplin[6]. Son biographe David Robinson indique qu'il n'est pas étonnant que ses parents n'aient pas fait officialiser sa naissance : « Il était facile, en particulier pour les artistes de music-hall constamment en déplacement d'une ville à l'autre, de reporter cela à plus tard et de finir d'oublier ces formalités, à une époque où les pénalités n'étaient ni strictes ni appliquées efficacement[5]. »
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Bibliographie

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