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Living Theatre

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Judith Malina jouant Maudie dans Maudie and Jane (2008)

Le Living Theatre est une troupe de théâtre expérimental créée en 1947 à New York. Ses fondateurs sont Julian Beck (1925-1985), scénographe et dramaturge et Judith Malina (1926), metteur en scène. A travers ses œuvres à caractère performatif, politique et social, le Living a révolutionné l'art théâtral et a eu une influence importante sur le théâtre des années 60.

Histoire du Living Theatre

Julian est né en 1925 à New-York, de parents enseignants. Il se dirige tout d’abord vers la peinture expressionniste mais le travail collectif du théâtre l’intéresse davantage. En 1943, il rencontre Judith Malina, d'origine allemande, étudiante à la News School’s Dramatics Workshop d’Erwin Piscator. C’est ensemble qu’ils décident de fonder le Living Theatre en 1947. Ils concrétisent ainsi leurs idéaux artistiques et politiques communs. Le Living a connu trois évolutions majeures jusqu'à sa dissolution dans les années 70.


  • Poésie dramatique(1951-1954)

A partir de 1951, le Living Théâtre s'établit dans sa première salle, le Cherry Lane à New York. C'est dans ce lieu que la troupe associe le théâtre à la poésie en montant des textes de Paul Goodman, Bertolt Brecht, Federico Garcia Lorca, Allen Ginsberg. Leurs créations s'opposent radicalement au théâtre de Broadway, proche d'un jeu réaliste et psychologique. L'utilisation de la poésie permet au Living de libérer le language théâtral traditionnel. Ils se dirigent vers un théâtre vivant où la parole retrouve ses valeurs et sa force. C'est en découvrant Tonight We Improvise de Pirandello que le Living s'oriente vers de nouvelles perspectives.


  • Métathéâtre (1955-1959)

La conception du métathéâtre découvert par la troupe new-yorkaise, dans les oeuvres de Pirandello, devient alors une préoccupation. A travers trois spectacles, Tonight We Improvise, The Connection et Many Loves, le Living s'interroge sur le rapport entre la fiction et la réalité, le théâtre et la vie. Ce sont des sujets de réflexions qui les amènent à penser à la signification même du théâtre et à la manière de représenter. Dans The Connection, une pièce à scandale, la troupe mêle acteurs et vrais drogués sur scène, créant une confusion pour le spectateur, entre la fiction et la réalité. Après cette expérience, les comédiens se détournent du métathéâtre le jugeant malhonnête à l'égard du public. Ils choisissent de ne plus opposer le théâtre à la vie mais d'associer l'art à la vie.


  • Théâtre engagé (1959-1970)

Au début des années 60, en réaction au contexte politique des Etats-Unis et face à la guerre du Vietnam, le Living radicalise ses idées anarchistes et pacifistes. Puis, à la découverte d’Artaud, la troupe choisit d’associer le corporel à l’intellect. C’est avec le spectacle The Brig qu’ils mettent en pratique les théories d’Artaud. Les acteurs adoptant les principes du "Théâtre de la cruauté", ils rendent compte de la violence d’un milieu carcéral. Optant pour des sujets de plus en plus politisés et dénonciateurs, ils sont expulsés de leur théâtre. Ils décident donc de s’exiler en Europe où ils s’orientent vers la performance et le happening et privilégient les messages révolutionnaires à la forme dramatique.




"L'effet Living"

Le Living est venu pour la première fois en Europe au début des années 60, mais c'est seulement à partir de 1967 que "l'effet Living" apparaît. En France, le Living a eu un impact considérable, notamment lors de sa venue au festival d' Avignon en 1968. Le Living a apporté une nouvelle esthétique théâtrale francaise et a révolutionné la conception du jeu de l'acteur, du spectateur et de l'espace scénique.

A partir du Living, la notion d'acteur a évolué tant au niveau professionnel que social. Ils ont ouverts la voix a d'autres formes de jeu. Ainsi sur scène, à la manière d'Artaud, de nombreux acteurs redonnent vie aux gestes, aux corps, aux cris que les mots leur avaient enlevé. Dans le spectacle Antigone, les corps sont libérés, les acteurs lâchent des hurlements, l'acteur se libère de tout comportement social. Le Living avait pour objectif de "revendiquer et de faire sortir du théâtre" et de mettre ainsi en valeur l'identité de l'acteur. Ce théâtre revendique aussi la forme du groupe et le style de vie communautaire d'un théâtre vivant. Pendant plusieurs années, la notion des Groupes ont dominé le théâtre, les acteurs ne formaient plus des compagnies mais des collectifs, des coopératives d'artistes. Il y a donc eu dans les années 60, en Europe, grâce au Living, un réel mouvement théâtral. L'acteur possède ainsi un double rôle, à la fois professionnel en tant que comédiens sur scène et social car il est ancré dans une vie communautaire au quotidien.

La notion des coulisses s'est aussi transformée avec le Living. Lors de leurs spectacles, le spectateur a la possibilité de devenir acteur du spectacle et de choisir le rôle de "spectateur participant". Un nouveau public émerge dans les années 70, ainsi le public se divise et peut se convertir en professeur. Une communion se créée entres les comédiens et les spectateurs, la scène et la salle et le spectacle se construit avec le spectateur et non plus pour le spectateur. Avec le Living, la liberté du spectatorat apparaît, le public a le choix d'agir ou de regarder. Par cette fission, l'espace scénique est lui-même modifié, déconstruit et permet un véritable échange entre les comédiens et le public. Dans le spectacle, Paradise Nowpar exemple, le public est sans cesse invité a venir rejoindre les acteurs sur scène pour dénoncer ou communier.

Lors du 28ème festival d'Avignon, le Living invité est programmé pour trois pièces au Cloître des Célestins, Antigone sur un texte de Brecht, Small Mysteries, Paradise Now deux créations de la troupe. Lors de la représentation de Paradise Now, le 24 Juillet, Julian Beck incite le théâtre à "sortir de sa prison" pour déboucher dans la rue. A la suite du spectacle, un défilé se poursuit dans les rues d'Avignon, aux cris de "le théâtre est dans la rue". Le lendemain, le maire, à la suite de plaintes, prend la décision de demander au Living de remplacer Paradise Now par une des deux autres pièces de leur répertoire. Le 28 Juillet, à la suite d'une rencontre entre le maire, Beck et Malina, le Living annonce son retrait du festival. Ils refusent de jouer et refusent le jeu du festival, du théâtre public, de la société des loisirs. Ainsi, ils montrent qu'ils souhaitent un théâtre gratuit et accessible à tous. Les militants spectateurs ont transformé Paradise Now en un événement politique et le Living, par leur pratique de l'art a secoué l'imaginaire social des jeunes français. Porteurs d'espoirs utopiques, le Living incarne toute une génération, celle qui veut se liberer des conventions bourgeoises qui régissent le système.


Productions principales

Bibliographie

  • BECK Julian, Theandric, Julian Beck Last Notebook. Traduction française de Fanette et Albert Vander, Théandrique ou la possibilité de l'utopie, L'Harmattan, 1998.
  • BECK Julian, The Life of the Theatre. Traduction française de Fanette et Albert Vander, La Vie du théâtre, Gallimard, NRF, 1978.
  • BIET Christian, NEVEUX Olivier, Une histoire du spectacle militant ; Théâtre et cinéma militants (1966-1981), L’entretemps, 2007.
  • BINER Pierre, Le Living Theatre. Le théâtre sans légende, La cité, 1968.
  • Les voies de la creation théâtrale, tome 1, Grotowski Barba Living theatre, Open Theatre, V. Garcia et Arrabal, éd. CNRS, 2003.
  • FAIVRE D’ARCIER Bernard, Festival d’Avignon, mon histoire, Actes Sud, Paris, 2007.
  • GIACCHÈ Piergiorgio, « L’effet Living ; la vision du théâtre d’Artaud par les « Balinais » de New York », in Avant-garde américaine et l’Europe ; II. Impact, Revue Théâtre/Public N° 191, 2008.
  • GORDON Mel, « Comment le Living Theatre a fait un contre-sens sur les théories d’Artaud et a réintroduit celles-ci en Europe », in L’avant-garde américaine et l’Europe, Théâtre/ Public N° 190, 2008.
  • CLEBEL Jean-Jacques, Living Theatre, Entretiens avec Julian Beck et Judith Malina, Belfond, Paris, 1969.
  • LOYER Emmanuelle, DE BAECQUE Antoine, Histoire du festival d’Avignon, Gallimard, Paris, 2007.
  • SCHECHNER Richard, Performance ; Expérimentation et théorie du théâtre aux USA, éd. Théâtrales, 2008.
  • VENDEVILLE Stéphanette, Le Living Theatre, de la toile à la scène 1945-1985, L’Harmattan, 2008.


Liens externes

Article sur le Living, site de la presse anarchiste [1]