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Les « Ô » en Espagne

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La fête de l'« Ô », fête de l'expectation, ou fête de l'Attente de l'Enfantement de la Sainte Vierge, était une festivité espagnole célébrée le 17 et 18 décembre, dont l'origine remonte au dixième Concile de Tolède en 656. Son nom provient des grandes antiennes « Ô » de l'Avent.

Origine

La conversion du roi Récarède (Muñoz Degrain, Senate Palace, Madrid)
La couronne du roi wisigoth Réceswinthe comportant suspendues les lettres du mot latin « REX », roi.

Récarède, héritier du royaume wisigoth et roi de 586 à 601, fut converti au catholicisme en 587 par Léandre de Séville, et il imposa cette religion à tous ses sujets au cours du IIIe concile de Tolède de 589[1],[2].

La fête de l'Attente tire son origine du dixième concile de Tolède qui eut lieu peu après, en 656 : pour éviter que l'Annonciation (25 mars) ne tombe pendant le Carême, les évêques décident de la déplacer huit jours avant Noël[3]. Selon la légende, ce concile est convoqué par Saint Ildefonse, après une apparition de Marie qui lui donna une chasuble blanche (miracle de l'« imposition de la chasuble »), en remerciement pour son livre sur la virginité perpétuelle de Marie.

Eugène Caxés, Imposition de la Chasuble à saint Ildefonse, Musée du Prado

On donnait à la dernière semaine de l'Avent le nom de Hebdomada de Exceptato, par corruption de expectatio pendant laquelle se faisait la neuvaine des O[4]. L'Église de Milan célébrait déjà, au sixième et dernier dimanche de l'Avent, l'office et la fête de l’Annonciation de la Vierge, et donnait à la dernière semaine de ce temps le nom de Hebdomada de Exceptatio (du latin : Expectatio, Attente). La première antienne débutait en ce jour, de la fête de l'Annonciation le 17 ou le , qui fut reportée à une autre date et remplacée par la fête de l'Attente et de l'Espérance.

Cette fête était appelée « Notre-Dame de l'Ô », ou la « Fête de l’Ô », en référence aux grandes Antiennes. Pendant les huit jours de l'octave de Noël était célébrée une messe du matin solennelle à laquelle toutes les femmes enceintes assistaient, quels que soient leur rang et leur condition[3].

L'expression était souvent : « In festivitate Marie Virginis que dicitur de la O  ».

Diffusion

Selon D. Trautner et T. Schnitzler un fait historique intéressant pourrait avoir causé leur diffusion : en 799 le pape Léon III ayant subi une défaite à la suite d'une attaque sarrasine s'est enfui à Paderborn, en Allemagne, se mit sous la protection de Charlemagne. L'an 800 correspond exactement à la lettre oméga[Quoi ?]. En 846, les Sarrasins sont aux portes de Rome, et occupent la banlieue de San Pietro. De fait les antiennes se répandirent à l'époque d'Alcuin et de Charlemagne au VIIIe siècle et on leur a de ce fait parfois attribué la paternité d'Alcuin et non une origine espagnole. La bataille de Roncevaux et les gestes médiévales (Geste de Guillaume d'Orange) correspondrait à l'époque de leur diffusion sous cette forme grégorienne liturgique. Il s'agit d'une coïncidence historique puisque la lettre Oméga est incontestablement un vocatif mais on put y voir un signe invitant à leur diffusion à l'aube du VIIIe siècle[pas clair].

La Couronne des Antiennes O

Elles furent répandues sous le nom de « Couronne des Antiennes Ô » [5] par Simon de Rojas et l'Ordre des Trinitaires [6] en Espagne (de la Rédemption des Captifs) ainsi que la fête de l'Expectation (de l'Attente ou de l'Espérance)[7], instituée par Ildefonse de Tolède. Cette dévotion s'étendit de l'Espagne au Portugal puis en Amérique latine, ainsi que la grande fête de la Expectación de Nuestra Señora. Une congrégation leur fut dédiée au Pérou en la « Chapelle Notre-Dame de l'O » de Saint Pierre et Paul de Lima sous l'influence des Jésuites, la Congrégation « Mariana de Nuestra Señora de la « O ».

Antiphonaire dominicain

L'antienne ô Clavis David (Ô Clef de la cité de David ... venez, faites sortir du cachot le prisonnier établi dans les ténèbres et la nuit de la mort) ainsi que cinq autres (ad redimendum, liberandum, salvandum nos ) correspondait exactement à la mission des Trinitaires de la rédemption des captifs c'est-à-dire le rachat et la délivrance des prisonniers en pays d'Islam[8], du rachat des esclaves chrétiens enfermés dans d' obscures geôles barbaresques, cachots souterrains appelés matamores, «  sombres cachots où gémissent tant d'innocents opprimés »[9].O Oriens splendeur de la lumière éternelle et soleil de justice : Viens, Seigneur, illuminer ceux qui habitent les ténèbres et l’ombre de la mort. »

Le jour de la mort du fondateur de cet ordre, Jean de Matha, et donc de sa fête religieuse et liturgique, tombait précisément, le . De nos jours, au Guatemala, une église trinitaire Notre-Dame du Remède récite encore la couronne des Ô.


Articles connexes

Notes et références

  1. Isidore de Tolède, Histoire des Goths.
  2. http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/Wisigoths/149968et http://jalladeauj.fr/claveyrolaswisimoz/styled/index.html.
  3. a et b Dom Guéranger 17 décembre, Fête de l'Expectation de l'enfantement de la Sainte Vierge [lire en ligne]
  4. Prosper Guéranger, Avent liturgique, Avent liturgique
  5. Couronne des antiennes "o" - Trinitaire
  6. Sánchez, Agustín-(O.SS.T.)- Antífonas para Adviento y el propio de los santos, oficio y misa para la Inmaculada Concepción
  7. Carlos Varona, Mª C de., « Una propuesta devocional femenina en el Madrid de comienzos del siglo XVII. Simón de Rojas y la Virgen de la Expectación , La imagen religiosa en la monarquía hispánica. Usos y espacios», Casa Velázquez, Madrid, 2008, pp.83-99.
  8. cf. Mohammed El Jetti, « Tétouan, place de rachat des captifs aux XVIe et XVIIe siècles », Cahiers de la Méditerranée [En ligne], 87 | 2013, mis en ligne le 15 juin 2014, consulté le 15 novembre 2015. URL : http://cdlm.revues.org/7207
  9. PP. Comelin et Lafaye, Voyage pour la rédemption des captifs aux royaumes d'Alger et de Tunis, 1720, page 300