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Hôtel de préfecture du Val-d'Oise

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Hôtel de préfecture du Val-d'Oise
L'hôtel de préfecture de Cergy et le parc François-Mitterrand, en 2016.
Présentation
Architecte
Construction
Occupant
Préfecture du Val-d'Oise (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Usage
Hôtel de préfecture (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Localisation
Région
Département
Commune
Accès et transport
Gare
Coordonnées
Carte

L'hôtel de préfecture du Val-d'Oise est un bâtiment édifié à la fin des années dans la ville nouvelle de Cergy-Pontoise pour accueillir les services préfectoraux du Val-d'Oise, l'un des départements qui viennent alors d'être créés en Île-de-France.

Cas unique en France métropolitaine, il est situé sur le territoire de la commune de Cergy, alors que le chef-lieu du département est de jure la commune limitrophe de Pontoise.

La construction de cet édifice fait suite à la création du département du Val-d'Oise, dans le cadre de la réorganisation de la région parisienne. Promulguée en , cette création ne devient effective que le  ; durant l'intervalle, un préfet délégué est nommé en la personne d'André Chadeau.

Dans un premier temps, ses services préfectoraux occupent des préfabriqués à Pontoise (commune choisie comme chef-lieu du département en ), sur un terrain que le conseil général de Seine-et-Oise a acheté pour y construire une école normale d'instituteurs[1].

Pour remplacer ces locaux provisoires, Paul Delouvrier, alors délégué général au district de la région de Paris, se voit proposer plusieurs édifices par Adolphe Chauvin, sénateur de Seine-et-Oise et maire de Pontoise, parmi lesquels l'abbaye de Maubuisson à Saint-Ouen-l'Aumône, et le château de Marcouville (d) dans la vieille-ville de Pontoise[2],[3],[4].

Carte
  • P : préfecture
  • C : château de Marcouville
  • A : abbaye de Maubuisson
avec les limites communales de Cergy (à l'Ouest) et Pontoise (à l'Est) et le tracé de la boucle de l'Oise.


préfecture
L'emplacement de la préfecture a été choisi par Paul Delouvrier au cours d'une reconnaissance par hélicoptère.
préfecture
Détail de la vue aérienne ci-dessus.

Delouvrier, qui n'est pas satisfait de ces propositions, décide de bâtir un nouvel édifice, dont il définit l'emplacement au cours d'une reconnaissance par hélicoptère[2]. Il choisit un site occupé par des champs de betteraves, dans une boucle de l'Oise, à égale distance de la vieille-ville de Pontoise et du village de Cergy[5]. Ce choix, acte fondateur transcrivant territorialement un projet politique[6], résulte d'une vision audacieuse consistant à bâtir d'abord la préfecture afin que le reste suive, commerces, services, logements[7]. La construction de la préfecture est ainsi le premier chantier de la ville nouvelle de Cergy-Pontoise[8].

La préfecture est bâtie sur les plans de l'architecte Henry Bernard (assisté de Robert Decosse et Pierre Mougin), et décoré par Joseph-André Motte, avec des sculptures de François Stahly[9].

Bernard présente les études préliminaires au préfet Chadeau en [10]. Mais, à partir du , les agriculteurs de Cergy occupent le terrain destiné à la préfecture afin d'empêcher sa construction, car ils refusent d'être expropriés de leurs terres pour laisser la place à la ville nouvelle. Ils sont évacués le [3] pour permettre le début des travaux. Mais devant l'échec des négociations sur le montant des indemnisations, ils réitèrent leur action en en interrompant le chantier, entraînant l'intervention des CRS[3],[11]. Le bâtiment est finalement inauguré le [12] par le ministre de l'Intérieur de l'époque, Raymond Marcellin[3] (une plaque commémore cette inauguration[a]).

L'hôtel de préfecture donne ensuite son nom au quartier qui se construit autour de lui, Cergy-Préfecture[b], ainsi qu'à la gare de Cergy-Préfecture, ouverte en .

Le parc de la préfecture est créé en par le paysagiste Allain Provost[c]. Il reçoit par la suite le nom de François Mitterrand, ancien président de la République française, et bénéficie d'une rénovation[13] entre [14] et [15].

Architecture

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Description

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Le bâtiment utilise l'encorbellement de manière à former une pyramide renversée, le tout posé sur un socle vitré[16]. L'ensemble mesure 20 mètres de haut, sur six étages, et occupe au sol un carré de 60 mètres de côté[17], pour un total de 27 600 m2 de plancher[18]. Fait de béton précontraint, d'aspect poli, ses fenêtres ont un châssis d'aluminium[17].

L'hôtel de ville de Boston en forme de pyramide renversée, dans un rendu (en) du début des années 1960, quelques années avant la proposition d'Henry Bernard pour la préfecture du Val-d'Oise.
L'hôtel de ville de Boston en forme de pyramide renversée, dans un rendu (en) du début des années , quelques années avant la proposition d'Henry Bernard pour la préfecture du Val-d'Oise.

Le motif de la pyramide inversée est semblable à l'hôtel de ville de Boston[19],[20],[21],[22], quoique la référence ne semble pas revendiquée par l'architecte[5].

Le travail de l'architecte Henry Bernard répond à la demande d'un « témoignage d'architecture contemporaine » formulée par le ministère de la Culture (dirigé à l'époque par André Malraux), chargé de la maîtrise d'ouvrage[19].

Bernard résume en ces termes sa volonté de l'ouvrir sur l'extérieur : « plutôt que de faire la préfecture au fond d'une place, j'ai tenté de faire une place au milieu de la préfecture »[23] ; il souhaite en faire une « maison de verre », qui est « transparente et accessible en permanence »[d].

Pourtant, Ionel Schein commente ainsi son œuvre dans Paris construit : « L'ensemble des préfectures construites ou actuellement en construction gardent, toutes, une fidélité, un attachement à la notion napoléonienne de représentativité et de « gardiennage » de l'ordre public assumée par le haut fonctionnaire, maître des lieux. Faire une préfecture en forme de pyramide posée sur sa pointe, est-ce une prouesse idéologique ? Est-ce un renversement des valeurs ? Non, pas ici : bien au contraire. L'architecture est ici contemporaine du temps historique de sa construction. Toute autre interprétation est vaine. »[24]. D'autres auteurs soulignent la parenté de la forme pyramidale avec les pyramides d'Égypte et le pouvoir pharaonique[25]. Et même si la référence n'est probablement pas délibérée, il reste la volonté d'imposer une forme clairement identifiable[26]. D'autres enfin, voient dans le travail de Bernard un « style pompier » et une « architecture-cendrier » en référence à la forme de l'édifice[20].

Quoi qu'il en soit, l'architecture du bâtiment, diversement reçue, n'a pas vraiment permis de rassembler les habitants, la ville se développant autour de plusieurs pôles sur des modèles urbains distincts[6].

Lors de la Biennale d'architecture de Venise en , Rem Koolhaas présente la préfecture parmi d'autres bâtiments publics d'Europe, dans son exposition intitulée Public Works: Architecture by Civil Servants[27].

Œuvres d'art

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Plusieurs œuvres d'art entourent la préfecture :

Titre Auteur Localisation Notes Installation Coordonnées géographiques Photo
Le Retour du marché Joseph Erhardy Parvis de la préfecture 49° 02′ 08″ N, 2° 04′ 40″ E Joseph Erhardy, Le Retour du marché
Don Quichotte[28] Charles Gir Parc de la préfecture 49° 02′ 05″ N, 2° 04′ 40″ E Charles Gir, Don Quichotte
E. Stephens Parc de la préfecture Monument aux morts de la Seconde Guerre mondiale représentant une flamme en gré rose. 49° 02′ 06″ N, 2° 04′ 38″ E E. Stephens, Monument aux morts

Plusieurs tournages ont eu lieu sur le site de la préfecture.

Ainsi Éric Rohmer, qui qualifie la préfecture de « chose à l'envers »[29], tourne L'Ami de mon amie en dans le quartier ; le film s'ouvre sur le parvis du bâtiment[30].

Dans le film I… comme Icare, réalisé par Henri Verneuil en , la préfecture tient lieu de palais du gouvernement pour l'État fictif dans lequel se déroule l'action[31],[32],[33].

En , pour son documentaire Je ne sais pas si c'est tout le monde, le chanteur Vincent Delerm filme plusieurs scènes à Cergy, notamment sur le parvis de la préfecture et dans le parc François-Mitterrand[34]. En , le parvis de la préfecture est l'un des deux décors apparaissant dans le clip de Twins Phoenix reprenant la chanson Je suis un homme de Zazie[35],[36].

Références

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  1. Hirsch 2000, p. 54.
  2. a et b Hirsch 2000, p. 34.
  3. a b c et d Vincent Girard, C'était la ville nouvelle : Récit de la fondation de Cergy-Pontoise, Paris, Somogy, , 143 p. (ISBN 2-85056-617-9), p. 21.
  4. Bernard Hirsch, Institut Paul-Delouvrier et Programme d'histoire et d'évaluation des villes nouvelles françaises, L'aménagement de la région parisienne,  : Le témoignage de Paul Delouvrier accompagné par un entretien avec Michel Debré, Paris, Presses de l'École nationale des ponts et chaussées, , 220 p. (ISBN 2-85978-374-1), p. 105.
  5. a et b Noyer-Duplaix et Philippe 2018.
  6. a et b Alain Charre, Ateliers de maîtrise d'œuvre urbaine de Cergy-Pontoise, Maîtrise d'œuvre urbaine : La théorie voilée, Sprimont, Mardaga, , 180 p. (ISBN 2-87009-832-4), p. 39.
  7. (en) Beth S. Epstein, Collective Terms : Race, Culture, and Community in a State-Planned City in France, New York, Berghahn, coll. « Berghahn Monographs in French Studies » (no 10), , 190 p. (ISBN 978-0-85745-084-5), p. 44–45.
  8. Gilles Plum, « Inventaire des préfectures et sous-préfectures », Monuments historiques, no 178,‎ , p. 117–133 (133).
  9. Jacques Lucan, Architecture en France,  : Histoire et théories, Paris, Le Moniteur, coll. « Architextes » (no 11), , 375 p. (ISBN 2-281-19146-X), p. 211.
  10. « Préfecture du Val-d'Oise », Annales de l'Institut technique du bâtiment et des travaux publics, vol. 22, no 258,‎ .
  11. Caroline de Saint-Pierre, La fabrication plurielle de la ville : Décideurs et citadins à Cergy-Pontoise, , Paris, Créaphis, , 311 p. (ISBN 2-913610-12-9), p. 35.
  12. « Cergy : la préfecture du Val-d'Oise a 45 ans ! », Le Parisien, .
  13. « La rénovation du parc François Mitterrand », Communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise, (version du sur Internet Archive).
  14. Sarah Nafti, « Le parc de la préfecture fait peau neuve », Le Parisien, .
  15. Julia Legendre, « Une rénovation à 5 M€ pour le parc de la préfecture », Le Parisien, .
  16. Joseph Abram (sous la dir. de Gérard Monnier), L'architecture moderne en France de à nos jours, vol. 2 : Du chaos à la croissance, , Paris, A. et J. Picard, coll. « Librairie de l'architecture et de la ville », , 327 p. (ISBN 2-7084-0556-X), p. 201.
  17. a et b Alice Morgaine, « Architecture : Le grand chambardement des préfectures », L'Express, no 842,‎ 7–13 août 1967, p. 31.
  18. Dominique Amouroux, Marco Crettol et Jean-Pierre Monnet, Guide d'architecture contemporaine en France, Paris, L'Architecture d'aujourd'hui, Technic-Union, , 407 p., p. 358, notice no 442.
  19. a et b de Saint-Pierre 2002, p. 48.
  20. a et b Hirsch 2000, p. 86.
  21. Christian Dupavillon, « Architecture officielle : La façade des institutions », L'Architecture d'aujourd'hui, no 208,‎ , p. 41–46 (45).
  22. Cergy-Pontoise : Vingt ans d'aménagement de la ville, (exposition organisée par l'Institut français d'architecture, préfecture du Val-d'Oise, Cergy-Pontoise,  – ), Paris, Éditions Moniteur Images, , 143 p. (ISBN 2-281-14021-0), p. 85.
  23. Jean-Yves Andrieux et Marie Lavin (pistes pédagogiques) (préf. Jean-François Sirinelli), L'architecture de la République : Les lieux de pouvoir dans l'espace public en France, , Paris, SCÉRÉN-CNDP, coll. « Patrimoine références », , 301 p. (ISBN 978-2-240-02631-6 et 2-240-02631-6), p. 184.
  24. Cité dans Louis Valensi, « Paris Construit ou d'une exposition qui l'est insuffisamment », L'Information d'histoire de l'art, vol. 16, no 5,‎ novembre–décembre 1971, p. 229.
  25. Marcel Cornu, Conversations avec Bobigny, Paris, Messidor, , 189 p. (ISBN 2-209-06126-1).
  26. Bertrand Lemoine, « Les préfectures contemporaines », Monuments historiques, no 178,‎ , p. 32–37 (36).
  27. (en) Bernd Nicolai, « New Monumentalism in Contemporary Architecture », Anglia (en), vol. 131, nos 2–3,‎ , p. 297–313 (300–301) (DOI 10.1515/anglia-2013-0038).
  28. Marie Persidat, « Du village du Perchay au roi d’Espagne… découvrez l’incroyable histoire du Don Quichotte de Cergy », Le Parisien, .
  29. Antoine de Baecque, « Architecture-fiction », Libération, .
  30. Françoise Puaux, Architecture, décor et cinéma, Condé-sur-Noireau, Charles Corlet, et Paris, Télérama, coll. « Cinémaction » (no 75), 1995, 216 p. (ISBN 2-85480-879-7), p. 184.
  31. Éric Bureau, « Le président d'« I... comme Icare » a été assassiné à Cergy », Le Parisien, .
  32. Jacques Bayle et Marie-Claire Gautier, « Tournage du film de Verneuil à Cergy-Pontoise », FR3 Paris, , sur le site de l'INA.
  33. Marc Lemonier, Guide des lieux cultes du cinéma en France, Paris, Horay, coll. « Guide Horay », , 423 p. (ISBN 2-7058-0421-8), p. 209 et 228.
  34. « Vincent Delerm : Je ne sais pas si c'est tout le monde,  », sur Val d'Oise Terre de cinéma.
  35. « Twins Phoenix : Je suis un homme,  », sur Val d'Oise Terre de cinéma.
  36. « Twins Phoenix feat. Mood - Je suis un homme (zazie cover) », sur YouTube, .

Pour l'inventaire général du patrimoine culturel :

  1. Laurent Kruszyk, « Plaque commémorant l'inauguration de la préfecture de Cergy, le par Raymond Marcellin, ministre de l'Intérieur », IVR11_20159500016NUC4A, , illustration de IA95000410.
  2. Sophie Cueille et Léo Noyer-Duplaix (service de l'inventaire d'Île-de-France), « Quartier de Cergy-Préfecture », dossier d'œuvre architecture, inventaire topographique, notice no IA95000404, sur inventaire.iledefrance.fr, Conseil régional d'Île-de-France, .
  3. Corinne Meynial et Pascale Hermann (IAURIF), « Parc de la préfecture », jardins remarquables, documentation préalable, notice no IA95000046, sur pop.culture.gouv.fr, base Mérimée, ministère de la Culture, .
  4. Sophie Cueille, Léo Noyer-Duplaix et Emmanuelle Philippe (service de l'inventaire d'Île-de-France), « Préfecture du Val-d'Oise », dossier d'œuvre architecture, inventaire topographique, notice no IA95000410, sur inventaire.iledefrance.fr, Conseil régional d'Île-de-France, .

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Bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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