DENARIUS. | BALMINETTE. |
OSCAR. | MADAME ANTIOCHE. |
LA FORÊT. |
Je n’ai jamais aimé de femme. C’est ma force.
Bois, je ne grave point de nom sur votre écorce.
Je sens que je deviens loup. Ce progrès me plaît.
C’est bien. Quand il contient un loup, l’homme est complet.
— Il pleut encore un peu.
A vidé dans les champs tout l’écrin de la pluie.
L’orage, avec l’essaim des nuages pourprés,
S’enfuit et laisse pleins d’émeraudes les prés ;
La luzerne, fouillis où méditent les lièvres,
Montre plus de joyaux que le quai des Orfèvres ;
La mûre sur la ronce est un rubis vermeil ;
Les brins de folle avoine, agités au soleil,
Deviennent, sous le vent qui passe par bouffées,
Grappes de diamants pour l’oreille des fées.
C’est beau. — Mais que la vie est triste ! — Ô vert séjour,
Bois, c’est dit, je m’envole, et je casse l’amour,
Fil que la femme attache à la patte de l’âme.
Je mets mon avenir en liberté. Je blâme
Le bon Dieu d’avoir fait l’homme de deux morceaux
Dont l’un est une femme.
La pluie a cessé. — Dieu ! que la vie est morose !
Où trouver l’idéal ? Ô vide du cœur !
Rose !
Flatteur !
Un baiser.
Prends.
Je t’aime, ô lys !
Coureur !
Un baiser.
Prends.
Le cœur est un viscère. Aimer ! sotte aventure.
L’homme est fait pour rêver au fond de la nature ;
Contempler l’infini dans les cieux transparents,
Voilà tout le destin de l’homme.
Un baiser.
Prends.
C’est le printemps qui vient, ce frère de l’aurore ;
C’est la saison qui rit, sœur de l’heure qui dore ;
C’est l’instant où verdit le sillon nourricier,
Où, sonore et gonflé des fontes du glacier,
L’Arveyron bleu s’accouple au flot jaune de l’Arve,
Où mai sort de l’hiver et le sphinx de sa larve ;
Bonheur ! Soleil ! Les maux et les froids sont finis ;
L’azur est dans le ciel, l’amour est dans les nids ;
L’amour trouble les yeux de vierge des gazelles ;
Oiseaux, mêlez vos chants ; âmes, mêlez vos ailes ;
Gloire à Dieu !
et secouant ses ailes.
Dehors, tous !