« Guerre de tranchées » : différence entre les versions

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Les [[Fossé (infrastructure)|fossés]] entourant le [[camp romain]], ou les [[Douve (fossé)|douves]] contournant le [[château fort]], peuvent être considérés comme des sortes d'ancêtres pour les tranchées des guerres modernes.
[[File:AlesiaFortifications.JPG|vignette|Reconstitution des fortifications romaines lors du [[siège d'Alésia]].]]
Au {{s-|XVII|e}}, [[Sébastien Le Prestre de Vauban|Vauban]] [[Siège (militaire)#Le si.C3.A8ge .C3.A0 l.E2.80.99.C3.A9poque moderne|révolutionne]] la prise des places fortes en faisant construire des réseaux de tranchées autour de la citadelle. Dans ce cas, la tranchée n'a pas une vocation défensive mais offensive.
 
En 1669, Vauban tire les leçons du [[siège de Candie]], port crétois assiégé et pris par les [[Empire ottoman|Ottomans]] utilisant des tranchées parallèles dirigées vers les murs, parachevées par des actions simultanées de sape et de mine. Vauban rédige à cette occasion un ''Mémoire pour servir d'instruction dans la conduite des sièges'' (1672), aussitôt mis en application dans la [[guerre de Hollande]] (1672-1678)<ref name=":8">{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Anne Blanchard|titre=Vauban|lieu=Paris|éditeur=[[Librairie Arthème Fayard|Fayard]]|année=2007|pages totales=686|passage=164-167 et 181-185.|éditeur=Fayard|date=2007|isbn=978-2-213-63410-4|numéro chapitre=VII|titre chapitre=De la conduite des sièges}}</ref>.
 
En faisant appel à la fois « à la raison et à l'expérience », Vauban propose la création d'un régiment d'ingénieurs ou « régiment de la Tranchée », composé de compagnies d'ouvriers et de mineurs, dirigées par des ingénieurs. C'est la préfiguration de l'arme du [[Génie militaire|Génie]] qui sera créée en 1791<ref name=":8" />.
 
Vauban applique ses idées de façon magistrale lors du [[siège de Maastricht (1673)]]. Il fait creuser des séries de tranchées concentriques autour de la ville. PuisEnsuite, il les recroise à angle droit par des tranchées dirigées contre la place forte, mais en zig-zagzigzag, pour éviter les tirs par enfilade. Aux intersections, il établit des places d'armes pour l'artillerie et les troupes d'intervention. La ville est prise en deux semaines<ref name=":8" />.
 
L'emploi de retranchements enterrés fait alors partie intégrante de la [[poliorcétique]] et les élites militaires ne dédaignent pas l'employer : le roi de Suède [[Charles XII]] est tué lors de l'inspection d'une tranchée de siège face à Fredriksten<ref>{{Article|langue=en|titre=Charles XII of Sweden|périodique=Wikipedia|date=2017-11-14|lire en ligne=https://en.wikipedia.org/w/index.php?title=Charles_XII_of_Sweden&oldid=810334978|consulté le=2017-11-17refsou}}</ref>. Néanmoins, leur usage demeure exceptionnel lors d'une [[bataille]] en terrain ouvert ; il est mentionné lors de la [[Guerre de Succession d'Espagne]], où en 1706, les Français enterrent certaines positions à [[Bataille de Ramillies|Ramillies]]<ref name=":0">{{Ouvrage|langue=fr|langue originale=en|auteur1=John Keegan|traducteur=Jean-François Sené|titre=La Guerre de Sécession|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin|Perrin]]|collection=Pour l'histoire|année=2011|pages totales=504|passage=456.|isbn=978-2-262-03249-4|isbn2=978-0-091-79483-5}}</ref>.
 
Un réseau élaboré de tranchées et de bunkers a été employé avec succès par les [[Maoris (Nouvelle-Zélande)|Maoris]] dès les années 1840 dans leurs ''[[Pa (Maori)|pa]]'' pour se protéger des armes à feu britanniques lors des [[guerres maories]]<ref>{{Lien web|langue=en |url=http://www.doc.govt.nz/about-doc/news/media-releases/2008/early-maori-military-engineering-skills-to-be-honoured-by-new-zealand-professional-engineers/ |titre=Early Maori military engineering skills to be honoured by New Zealand Professional Engineers |site=[[Ministère de la Conservation|New Zealand Department of Conservation]] |consulté le =21 décembre 2010.}}.</ref>. Les pertes britanniques à la {{lien|langue=en|trad=Battle of Ohaeawai|texte=bataille d'Ohaeawai}} en 1845 se montèrent à 45 %, prouvant qu'une puissance de feu supérieure ne suffisait pas pour venir à bout des défenseurs d'un système de tranchées<ref>{{Lien web|langue=en |url=http://www.historyorb.com/nz/ohaeawai.shtml |titre=The Battle for Kawiti's Ohaeawai Pa|site=www.historyorb.com |consulté le =21 décembre 2010.}}.</ref>.
 
La guerre de tranchée fut par la suite employée à une plus grande échelle lors de la [[guerre de Crimée]] (surtout avec le [[siège de Sébastopol (1854-1855)|siège de Sébastopol]]), la [[guerre civilede américaineSécession]] (où les retranchements, même durant les batailles, sont de plus en plus systématiquement utilisés par la troupe sur des dizaines de kilomètres, sans ordre supérieur et en creusant souvent à l'aide d'ustensiles de cuisine<ref name=":0" />), la [[guerre russo-japonaise]] et la [[Seconde Guerre des Boers]]. L'accroissement de la puissance de feu et de la [[Portée (balistique)|portée]] des fusils (et plus encore avec les [[Mitrailleuse|armes automatiques]]) empêchent alors les déplacements tactiques des unités sur le champ de bataille et les obligent à s'enterrer pour se soustraire au feu ennemi. Cela engendre des positions statiques où les troupes peuvent tenir le terrain à une relative proximité des lignes adverses. Outre l'utilisation des armes individuelles et de l'artillerie en retrait, l'adjonction de défense ([[Cheval de frise (barrière)|chevaux de frise]], barbelés) gêne l'assaut ennemi et entraine une [[Guerre de positions|guerre de position]] où les deux belligérants se font face, sans parvenir à obtenir la décision.
 
== Vue d'ensemble ==
[[Fichier:Cheshire Regiment trench Somme 1916.jpg|thumb|right|Tranchée de la {{lien|Prince of Wales' Division}} à Ovillers-la-Boisselle, lors de la [[bataille de la Somme]] en juillet 1916. Elle est étayée par des [[clayonnage]]s qui retiennent le talus, et des [[Étaiement (construction)|étais]] de mines. Une sentinelle monte la garde tandis que les autres soldats dorment. Photographie d'{{lien|lang=en|trad=Ernest Brooks (photographer)|fr=Ernest Brooks (photographe)|texte=Ernest Brooks}}.]]
« Guerre de tranchée » est devenu un quasi-synonyme des combats de la [[Première Guerre mondiale]] lorsqu'elle fut employée sur tous les fronts européens et en particulier sur le [[Front de l'Ouest (Première Guerre mondiale)|Front de l'Ouest]]. À partir d'{{date-|octobre 1914}} et jusqu'aux dernières semaines de la guerre, le front se solidifia en une série de lignes de tranchées lorsqu'il devint clair que toute offensive d'infanterie serait anéantie par l'artillerie et les mitrailleuses adverses.
 
La guerre de tranchées est devenue un puissant symbole de l'inutilité de la guerre<ref name="g4">{{Harvsp|Griffith|1996|p=4}}.</ref>. Ses images de jeunes hommes escaladant le parapet de la tranchée pour affronter un maelström de feu menant à une mort certaine ont marqué les esprits. Les batailles de la [[bataille de la Somme|Somme]] et de [[Bataille de Verdun|Verdun]] sont des exemples parfaits de cette guerre d'attrition. La guerre de tranchée est également associée à des massacres inutiles dans des conditions épouvantables de braves soldats envoyés à la mort par des officiers incompétents ; ceux-ci ne réalisaient pas la nouveauté de cette guerre et continuaient de croire que la volonté supérieure de l'attaquant pourrait submerger les armes et le moral inférieur du défenseur<ref>Ellis, {{p.|80–87}}.</ref>. Les troupes britanniques et du [[Commonwealth]] sont parfois désignées comme des « lions commandés par des ânes »<ref>{{Harvsp|Griffith|1996|p=5-6}}.</ref>.
 
=== Les premières tranchées ===
Cédric Mas considère que les premières tranchées apparaissent à l'époque qui voit un développement considérable de l'artillerie, soit au début du {{s-|XVI}}<ref>{{Lien web |langue=fr |prénom=Cédric |nom=Mas |titre=Ukraine : les risques d’une guerre des tranchées |url=https://www.mediapart.fr/journal/international/101222/ukraine-les-risques-d-une-guerre-des-tranchees |site=Mediapart |consulté le=2022-12-12}}.</ref>. C'est notamment le cas lors de la [[bataille de Ramillies]] (1706) et de [[Bataille de Malplaquet|celle de Malplaquet]] quelques années plus tard. L'auteur note qu'avec l'invention et le perfectionnement des mitrailleuses<ref>Hernandez, S. R. (2019). ''Une guerre de papier: la presse basque antifasciste dans les années trente''. Presses universitaires de Rennes.</ref>, les tranchées sont également bien présentes à la fin de la [[guerre de Sécession]].
 
=== Mise en œuvre durant la Première Guerre mondiale ===
[[Fichier:Lancashire Fusiliers trench Beaumont Hamel 1916.jpg|thumb|Soldats du [[Royal Regiment of Fusiliers|Régiment royal de fusiliers]] dans une tranchée près de [[Beaumont-Hamel]] dans la Somme en 1916. Photographie d'{{lien|lang=en|trad=Ernest Brooks (photographer)|fr=Ernest Brooks (photographe)|texte=Ernest Brooks}}.]]
Bien que la technologie ait radicalement changé la nature de la guerre en 1914, les armées n'avaient pas anticipé les conséquences de ce changement. Les armées françaises et allemandes adoptèrent deux [[tactique militaire|tactiques militaires]] radicalement différentes. Les Français privilégiaient l'attaque surprise menée rapidement et soutenue par le canon rapide de 75 déployé parmi l'infanterie. Les Allemands misèrent sur la puissance de feu, investissant largement dans les [[obusier]]s et les mitrailleuses. Les Britanniques manquaient de tactique cohérente car les officiers rejetaient la théorie en faveur de l'expérience<ref>Bidwell & Graham {{p.|14–19}}.</ref>.
[[Fichier:French trench battle.jpg|thumb|Tranchée française dans le nord-est de la France.]]
 
L'attaque frontale des tranchées entraînait des pertes colossales, attaquer par le flanc était donc une solution préférable. À la suite de la [[Bataille de la Marne (1914)|Première bataille de la Marne]], les deux armées tentèrent vainement d'attaquer le flanc des défenses adverses dans ce qui sera nommé la [[course à la mer]]. Un réseau parallèle de tranchées s'établit alors de la [[Mer du Nord]] à la [[Suisse]]. Cette situation de blocage dura jusqu'à l'[[Bataille de la Marne (1918)|offensive Michael]] au printemps 1918. Les deux armées étant de forces égales, les assauts frontaux étant la, seule solution pour sortir de l'impasse, provoquèrent des pertes monstrueuses. Les batailles durant des mois ne furent pas rares mais aucune ne permit de débloquer la situation.
 
Les premières tranchées étaient simples. Elles manquaient de solidité et en accord avec les doctrines d'avant-guerre, elles étaient remplies de soldats côte à côte, ce qui menait à de lourdes pertes du fait des tirs d'artillerie. Cependant, la longueur du front à défendre fit que les tranchées ne furent rapidement tenues que par une poignée d'hommes. L'importance des [[fil de fer barbelé|barbelés]] fut vite reconnue et chaque nuit, les soldats sortaient de la tranchée pour les réparer<ref>Griffith (2004), {{p.|10–11}}.</ref>.
 
Les premières tranchées se transformèrent rapidement en un réseau de plus en plus complexe pouvant résister à la fois aux bombardements d'artillerie et aux assauts de l'infanterie. Les abris enterrés devinrent la priorité<ref>Griffith (2004), {{p.|11}}.</ref>. L'espace entre les tranchées connu sous le nom de [[no man's land]] dépendait du champ de bataille. Sur le Front de l'Ouest, il mesurait souvent entre 90 et {{Unité|200|mètres}} de large mais il pouvait se réduire à une vingtaine de mètres comme lors de la [[bataille de la crête de Vimy]]. Sur le [[Front de l'Est (Première Guerre mondiale)|front de l'Est]] et au Moyen-Orient, les fronts étaient si étendus que la guerre de tranchée telle qu'elle exista sur le front de l'Ouest n'eut pas lieu.
 
Dans les [[Alpes]], la guerre de tranchée se livra sur les flancs à pic des montagnes jusqu'à parfois {{unité|3900|mètres}} d'altitude. L'[[Ortles]] possédait une position d'artillerie sur son sommet à proximité de la ligne de front. Les réseaux de tranchées devaient s'adapter au terrain difficile et au climat extrême. Des tranchées furent même construites dans les glaciers de [[Marmolada]] et d'[[Adamello-Presanella]].
 
=== Les réseaux de tranchées ===
Très tôt dans la guerre, la doctrine défensive britannique recommandait un réseau de tranchées composé de trois lignes parallèles reliées par des tranchées de communication. Les points où les tranchées de communication intersectaient les lignes principales étaient d'une importance vitale et étaient bien protégés. La première ligne de tranchée estétait la ligne la plus exposée car c'était la première que devaient franchir les fantassins ennemis, elle était donc bien pourvue en postes de tir et possédait quelques abris sommaires. Environ {{Unité|70|mètres}} à l'arrière, la tranchée de seconde ligne servait de repli en cas de bombardement de la tranchée de première ligne ou de zone de rassemblement lors d'une offensive. On y trouvait des abris plus ou moins profonds et des stations médicales. Il existait parfois une troisième ligne de tranchée (tranchée de réserve) située à 150 voire {{unité|2000|mètres}} de la première ligne. Cette ligne servait de chemin de ravitaillement et de zone de stockage pour les munitions, les provisions et le matériel. Les soldats pouvaient également y prendre un peu de repos.
 
[[Fichier:Aerial view Loos-Hulluch trench system July 1917.jpg|thumb|Vue aérienne du réseau de tranchée près de Loos, juillet 1917. Les tranchées allemandes sont en bas et à droite et les tranchées britanniques sont sur la gauche.]]
À l'arrière du système de tranchée, on pouvait trouver un second réseau de tranchéetranchées partiellement préparé, prêt à être occupé en cas de retraite. Les Allemands construisaient souvent de multiples systèmes de tranchées. En 1916, sur le front de la [[Somme (fleuve)|Somme]], ils disposaient de deux systèmes de tranchées distants d'un kilomètre et d'un troisième réseau partiellement construit un autre kilomètre à l'arrière. Cette redondance rendait une percée décisive quasiment impossible.
 
Les Allemands, qui avaient basé leurs connaissances sur les études de la [[guerre russo-japonaise]]<ref name="Keegan, p. 179">Keegan, {{p.|179}}.</ref>, élevèrent la construction de tranchées au rang de science. Ils construisaient des abris ventilés en béton armé à plusieurs mètres sous terre ainsi que des points d'appuis très fortifiés. Ils étaient plus enclins que leurs adversaires à réaliser une retraite stratégique vers des positions mieux préparées. Ils furent également les premiers à appliquer le concept de défense en profondeur avec une ligne de front large d'une centaine de mètres et composés d'une série de [[redoute (fortification)|redoutes]] au lieu d'une tranchée continue. Chaque redoute pouvait protéger ses voisines et, tandis que l'infanterie avançait, elle s'exposait à des tirs en enfilade.
 
Les Britanniques adoptèrent finalement une approche similaire mais elle n'était que partiellement réalisée lorsque les Allemands lancèrent leur offensive au printemps 1918 et fut complètement inefficace. La France, par contraste, comptait sur l'artillerie et les réserves, pas sur le retranchement. Les [[fil de fer barbelé|fils barbelés]] placés en ceintures de {{Unité|15|mètres}} de large différaient également. Les fils allemands étaient plus épais que les fils britanniques et les premiers outils de découpage britanniques conçus pour les fils fins furent inefficaces contre les fils allemands<ref name="Canada's Army, p. 79">''Canada's Army'', {{p.|79}}.</ref>.
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Les tranchées étaient cependant très différentes selon les circonstances. Lors de la bataille, elles se réduisaient souvent à de simples fosses mais certaines tranchées pouvaient recevoir des abris souterrains bétonnés ou des toits de terre.
 
[[Fichier:Periscope rifle Gallipoli 1915.jpg|thumb|left|Soldat australien utilisant un fusil à périscope, Gallipoli 1915.]]
Pour permettre au soldat de voir à l'extérieur de la tranchée sans s'exposer, des créneaux étaient réalisés à l'aide de sacs de sable. Ils étaient parfois renforcés à l'aide d'une plaque de métal. Une autre méthode était l'utilisation de [[périscope]]s. Lors de la [[Bataille des Dardanelles|bataille de Gallipoli]], les troupes de l'[[Corps d'armée australien et néo-zélandais|ANZAC]] développèrent un fusil à périscope permettant de tirer sans s'exposer au-dessus du parapet.
 
Il y avait trois méthodes pour creuser une tranchée :
* Un homme se tenait sur la surface et creusait la tranchée. Cette méthode était la plus efficace car plusieurs hommes pouvaient creuser simultanément. Cependant, les soldats étaient complètement exposés aux tirs ennemis, ; cette méthode était donc utilisée la nuit ou à l'arrière du front.
* On creusait une extension de la tranchée en creusant l'extrémité de la tranchée. Les hommes n'étaient pas exposés mais seuls un homme ou deux pouvaient travailler simultanément.
* La troisième méthode s'apparente à la seconde sauf qu'un « toit » de terre était maintenu jusqu'au dernier moment. Les soldats creusaient donc un tunnel.
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Selon le manuel de construction britannique, il fallait 6 heures à {{nombre|450|hommes}} pour construire une tranchée de {{Unité|250|mètres}}. Celle-ci nécessitait un entretien constant pour empêcher sa détérioration du fait du climat ou des obus.
 
[[Fichier:Breastwork trench at Armentieres 1916.jpg|thumb|Tranchée en "« épaulement" », [[Armentières]], 1916.]]
Le champ de bataille des [[Flandre (Belgique)|Flandres]] présentait de grands problèmes de construction pour les tranchées du fait de la proximité de la [[nappe phréatique]] qui se trouvait parfois à moins de deux mètres de la surface, signifiant que toute tranchée serait rapidement inondée. De plus, les obus détruisaient les chenaux aménagés pour drainer le terrain. Par conséquent, de nombreuses tranchées étaient construites au-dessus du niveau du sol. Au départ, les tranchées disposaient de parapet et de parados construits avec des sacs de sable mais par la suite, le parados fut retiré pour permettre à la seconde ligne de tirer sur la première si celle-ci était prise.
 
=== Géographie des tranchées ===
La nature statique et souterraine de la guerre de tranchée provoqua le développement d'une forme particulière de [[géographie]]. Un avantage critique pouvait être obtenu en occupant les hauteurs, les collines prenaient donc une grande importance. Un grand nombre de collines étaient tellement insignifiantes qu'elles n'avaient aucun nom jusqu'à ce que le front ne s'en approche. Certaines cotescôtes étaient nommées d'après leur altitude comme lors de la [[bataille de la colline 60]]. Une ferme, un moulin, une carrière ou un bosquet d'arbres pouvaient devenir l'objet d'une lutte acharnée simplement parce qu'il s'agissait de l'élément le plus visible. Cependant, il ne fallait pas longtemps à l'artillerie pour le détruire et il devenait un simple nom sur une carte.
 
== La vie dans les tranchées ==
=== Organisation militaire ===
Le temps passé au front par un soldat était généralement bref, d'un jour à deux semaines, avant d'être relevé. Le {{31e}} bataillon australien passa {{nombre|53|jours}} en première ligne à [[Villers-Bretonneux]], mais cette durée était rare. Le {{10e}} bataillon canadien eut des tours d'une durée moyenne de six jours en 1915 et 1916<ref>[http://calgaryhighlanders.com/history/10th/history/1915.htm 1915 history].</ref>.
[[Fichier:Studying French.jpg|thumb|« Étudier le français dans les tranchées », paru dans ''The Literary Digest'' du 20 octobre 1917.]]
Au niveau individuel, le temps de déploiement d'un soldat britannique se divisait ainsi :
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Même en première ligne, un bataillon typique n'engageait le combat qu'une poignée de fois dans l'année que ce soit de manière offensive ou défensive. Le nombre de combats était plus élevé pour les unités « d'élite ».
 
Certains secteurs du front connurent une faible activité tout au long de la guerre, rendant la vie dans les tranchées relativement facile. Lorsque le [[Corps d'armée australien et néo-zélandais|{{1er}} corps ANZAC]] arriva pour la première fois en France en avril 1916 après l'évacuation de Gallipoli, ils furent redéployés dans un secteur relativement calme près d'[[Armentières]] pour l'« acclimatation ». D'autres secteurs connaissaient une activité militaire sans répit. Sur le Front de l'ouest, [[Ypres]] était réputée comme étant infernale, en particulier dans les saillants les plus exposés. Cependant, la guerre de tranchées, même dans les secteurs les plus calmes, n'était pas une sinécure et les pertes dues aux gaz, aux [[Tireur embusqué|tireurs d'élite]] et à l'artillerie étaient quotidiennes. Durant les six premiers mois de 1916, avant le déclenchement de la [[bataille de la Somme]], les britanniquesBritanniques ne furent pas impliqués dans des opérations majeures mais les pertes s'élevèrent malgré tout à {{nombre|107776|hommes}}. Environ un homme sur deux est revenu vivant et non blessé des tranchées{{référence à confirmer}}<ref>https://www.youtube.com/watch?v=NpH5I6EA1t0 Jay Winter Lecture- Sites of Mourning.</ref>.
[[File:German bunker with bed Somme 1916 IWM Q 1384.jpg|thumb|Dans les [[casemate]]s, les soldats dorment sur des paillassons ou des matelas fins, dans de vrais lits pour les officiers{{ref nec}}.]]
Les témoignages d'époque, comme l'observation des photographies d'archives laissent penser que les tranchées allemandes étaient plus complexes, plus profondes, plus sophistiquées, incluant des réservoirs d'eau, l'électricité, des cuisines et parfois des aménagements de confort (tapis, miroirs, photos sur les murs)<ref>Cowley, Robert. ''« The Unreal City »''. MHQ: The Quarterly Journal of Military History. 6, #2, 1994: 12-16.</ref>{{,}}<ref>Mottram, RH ''Journey to the Western Front: Twenty Years After''. London: G. Bell & Son, Ltd., 1936: 4.</ref>. Les Alliés privilégiant l'offensive établissaient en effet des tranchées qu'ils pensaient éphémères (faites de terre et de planches flanquées de tôle, de rondins ou de paniers de bois tressé remplis de terre et de sacs de sable, avec des abris de pierre sèche ou en bois) alors que les Allemands, plus sur la défensive et qui se battaient sur le sol ennemi, construisaient des tranchées renforcées par du béton armé, avec des parois pavées<ref>{{Ouvrage|titre=Larousse de la Grande Guerre|éditeur=Larousse|année=2007|passage=84.|isbn=}}</ref>.
 
Un secteur du front était alloué à un [[corps d'armée]] comprenant généralement trois [[division (militaire)|divisions]]. Deux divisions occupaient le front et la troisième était en repos à l'arrière. Cette répartition du devoir continuait à l'intérieur de la hiérarchie militaire. Ainsi, à l'intérieur de chaque division, deux [[brigade]]s d'[[infanterie]] tenaient le front et la troisième était en repos. De même pour les [[bataillon]]s, les [[compagnie (militaire)|compagnies]] et les [[Peloton (militaire)|pelotons]]. Plus ce roulement descendait bas dans la hiérarchie, plus les soldats tournaient entre le front et la réserve.
 
Durant le jour, les tireurs et les observateurs d'artillerie rendaient chaque mouvement périlleux ce qui rendait les tranchées assez calmes. Par conséquent, les tranchées s'activaient la nuit, lorsque l'obscurité autorisait le déplacement des troupes et du matériel, la maintenance ou l'expansion des réseaux de barbelés et les reconnaissances des défenses ennemies. Les sentinelles tentaient de repérer les patrouilles adverses et de détecter les signes avant-coureurs d'une attaque.
 
Initiés par le [[Princess Patricia's Canadian Light Infantry]] en {{date-|février 1915}}<ref name="CanadasArmyp82">''Canada's Army'', {{p.|82}}.</ref>, les {{lien|lang=en|trad=Trench raiding|fr=raids dans les tranchées}} étaient menés pour capturer des soldats ennemis et des documents secrets et les transférer aux services de renseignement. Ces raids devinrent partie intégrante de la politique britannique pour maintenir l'esprit offensif des troupes et accroître le stress chez l'adversaire<ref name="CanadasArmyp82"/>. Cependant, une fois la surprise passée, les raids devinrent moins efficaces et à partir de 1916, ils étaient soigneusement planifiés et impliquaient une coopération de l'infanterie et de l'artillerie.
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=== Vie quotidienne ===
[[Fichier:Barbier français tranchées.jpg|thumb|275px|Un barbier dans une tranchée française.]]
Dans les tranchées de première ligne, les hommes ne peuvent se déshabiller, ils ne se lavent pas, et ne se déchaussent que très rarement. Cela n'est possible que dans les zones de repos<ref name=":7">{{Harvsp|Alain Larcan|2009|p=505-506.}}</ref>.
 
La salubrité des tranchées est prioritairement assurée par l'entretien des [[feuillées]]. Dans les tranchées françaises, elles sont situées au bout d'un boyau de dérivation. Une feuillée est une fosse de 2 m de profondeur, 5 à 6 m de longueur, et large d'un mètre ; elle est recouverte d'une planche percée d'orifices. Le contenu de la fosse est arrosé plusieurs fois par jour avec de la [[Chaux (matière)|chaux]]. Les hommes peuvent aussi déféquer dans des tinettes . Le contenu de tinette est ensuite mélangé à un combustible pour être versé dans un four incinérateur fixe ou monté sur roues<ref>{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=502-503.}}</ref>.
 
La lutte contre les rats se fait par l'utilisation de [[chien ratier|chiens ratiers]] et l'augmentation de la prime pour la présentation d'une queue de rat de 1 à 5 [[Sou|sous]]<ref name=":5">{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=158-159.}}</ref>.
 
L'approvisionnement en eau est assurée par des puits creusés par le [[Génie militaire|Génie]], ou à partir de réservoirs. L'eau est rendue potable par la [[Eau de Javel|javellisation]] puis, en 1916, par la [[verdunisation]]<ref name=":5" />.
 
Dans l'armée française, la [[Ration alimentaire de l'armée française|ration alimentaire]] est faite de pain ordinaire, viande fraîche (conservée par la glace), charcuterie, conserve de viande (« singe »), légumes secs (riz, lentilles) et frais (choux, pommes de terre...terre…). Il y a également distribution de confiture, de marmelade, de café. La ration de vin est d'un demi-litre par jour<ref name=":6">{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=509-512.}}</ref>.
[[Fichier:French 87th Regiment Cote 34 Verdun 1916.jpg|thumb|Tranchée française de la côte 304, [[bataille de Verdun|Verdun, 1916]].]]
Les cuisines roulantes sont constituées de [[Marmite (ustensile)|marmites]] et de fours à rôtir. Les rations sont versées dans des récipients et distribuées dans les tranchées par les « hommes de soupe ». Elles arrivent souvent froides et mêlées de terre et de boue, cela dans les périodes calmes. Car sous les bombardements, qui peuvent durer plusieurs jours sans discontinuer, les hommes souffrent de la faim et de la soif<ref name=":6" />.
 
<blockquote>Caporal Léon Brunéa, {{67e}} Régiment d'Infanterie : « Il faut vous dire que moi et les copains, on avait bu de notre urine avec un peu de sucre, sucé les racines d'arbres, sucé le jus sale d'une boite de conserve abandonnée sur le parapet par les boches. ». Soldat Marcel Pic, 143{{e}} Régiment d'Infanterie, sous un bombardement de cinq jours et cinq nuits : « Nous étions écrasés par les obus. Personne ne bougeait ; on attendait la mort, avec la soif, la faim et dix centimètres d'épaisseur de mouches que nous avions dessus. Nous avions assez de travail, avec le bout de la baïonnette, pour rejeter les morceaux de cadavres qui nous recouvraient chaque fois qu'un obus tombait tout près. »<ref>citésCités par {{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=197.}}</ref>. </blockquote>
 
Un concert organisé à l'occasion du [[centenaire de l'armistice de 1918]] par l'association Paroles et musiques dans le [[Temple protestant de La Force|temple protestant]] [[John Bost]] à [[La Force (Dordogne)|La Force]] en [[Dordogne (département)|Dordogne]] a permis d'aborder un aspect de la vie quotidienne des [[poilu]]s lors de la [[Première Guerre mondiale|Grande Guerre]]. Pierre Hamel, [[premier violon]] à l'[[Orchestre Colonne]] de Paris, a joué d'un instrument peu commun : un [[violon]] en métal utilisé par les soldats dans les tranchées pour se distraire. Fabriqué par un [[Luthier|maître-luthier]] de [[Mirecourt]] avec des bidons de [[margarine]] et des plaques de métal assemblées et soudées, le violon possède un système de chevilles qui fait qu'il peut être accordé et qu'on peut en jouer, même s'il est plus lourd et si le son est un peu métallique. C'est un instrument dont il n'existe que cinq ou six exemplaires connus<ref>{{Article|url=https://www.francebleu.fr/infos/societe/video-un-concert-a-la-force-en-dordogne-avec-un-violon-fabrique-pour-les-soldats-dans-les-tranchees-1541974494|titre=Un concert à La Force, en Dordogne, avec un violon fabriqué pour les soldats dans les tranchées|auteur=Emeline Ferry|date=12 novembre 2018|périodique=[[France Bleu Périgord]] et [[France Bleu]]}}.</ref>.
 
{{Article détaillé|Artisanat de tranchée}}
 
== La mort dans les tranchées ==
L'intensité de la Première Guerre mondiale fut telle que 10 % des soldats furent tués, contre 4,5 % lors de la [[Seconde Guerre mondiale]]. Le niveau de pertes atteignit 56 %, en additionnant les morts et les blessés. À cause de la boue, des rats, des [[Pou de corps|poux de corps]], des mouches, des excréments, de la proximité des cadavres des amis et ennemis qui avaient agonisé parfois durant des jours à quelques mètres des tranchées, l'air vicié des abris ou pollué par les gaz chimiques, la fumée et les vapeurs émises par les armes et munitions, les incendies, etc..., la (sur)vie dans les tranchées de 1914-1918 était particulièrement difficile et cela a provoqué de nombreuses [[séquelle de guerre|séquelles psychologiques et sanitaires]] pour les soldats de la « Grande Guerre ».
 
Des blessures relativement légères pouvaient provoquer la mort si elles s'infectaient ou si la [[gangrène]] s'installait. Les éclats d'obus multipliaient les risques d'infection en souillant la plaie. Le [[Effet de souffle|souffle]] des explosions provoquait souvent des [[Traumatisme crânien#Commotion cérébrale|traumatismes]]. De plus, le bombardement incessant et la peur d'être mutilé pouvaient induire chez certains soldats des troubles psychologiques alors qualifiés d'[[obusite]] mais que l'on assimile aujourd'hui au [[trouble de stress post-traumatique]].
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Comme dans beaucoup d'autres guerres, les maladies prélevèrent un lourd tribut parmi les soldats. Les conditions [[Assainissement|sanitaires]] dans les tranchées étaient mauvaises, d'où les cas de [[dysenterie]], de [[typhus]] et de [[choléra]]. De nombreux soldats souffraient des maladies véhiculées par les [[parasitisme|parasites]] comme les [[pou]]x. L'autre danger était l'hypothermie car les températures pouvaient descendre bien en dessous de zéro durant l'hiver.
 
Une étude statistique sur {{Nombre|30000 blessures}} ou affections prises en charge par le [[Royal Army Medical Corps]] révèle que 8,7 % des traitements concernèrent la fièvre quintane (dite « des tranchées »), due aux poux, 7,9 % pour inflammations des [[Tissu conjonctif|tissus conjonctifs]] ([[Tendinite|tendinites]] causées par de mauvaises chaussures), un fort taux de 7,6 % de [[Infection sexuellement transmissible|maladies vénériennes]] sans doute dues à la fréquentation des [[Bordel militaire de campagne|bordels militaires]] ou indépendants. 6,8 % de ces blessés britanniques souffraient du pied de tranchée. Moins nombreuses furent les atteintes non-léthales causées par les obus (4,9 %), les balles (4,7 %) ou les gaz (4 %)<ref>{{Article |titre=Une étude britannique classe les maladies des tranchées |périodique=Guerres & Histoire |numéro=22 |date=décembre 2014 |issn=2115-967X |pages=14 |commentaire=D'après le site ''forces-war-records.co.uk'' .}}</ref>.
 
=== Pathologies des tranchées ===
Des maladies spécifiques, jusqu'alors non ou peu connues, dites « pathologies de tranchées » sont distinguées au cours du premier conflit mondial. Outre la [[fièvre des tranchées]] et le [[pied de tranchée]], ont été décrits<ref>{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=467-476.}}</ref> :
 
* [[constipationConstipation]] des tranchées, survenant surtout en hiver, attribuée à la ration de viande, de légumes secs, de riz et de vin rouge, et au stationnement prolongé. On préconisa les plantes sauvages, les fruits secs, et l'exercice physique. ;
* [[Néphrite (médecine)|néphritesNéphrites]] des tranchées, surtout durant l'{{nobr|été 1916}} dans des secteurs particuliers du front. Plusieurs formes sont décrites, pouvant correspondre à différentes affections : infections à [[Streptococcus pyogenes|streptocoque A]], [[leptospirose]], [[Fièvre hémorragique avec syndrome rénal|infection à Hantavirus]]...… ;
* mainMain de tranchée, observée en février de 1917, posant les mêmes problèmes que le pied de tranchée. ;
* rhumatismeRhumatisme de tranchée, observé en {{nobr|avril 1915}} chez les soldats en position prolongée, accroupie ou assise, en tranchée humide. ;
* [[héméralopieHéméralopie]] des tranchées, affaiblissement anormal de la vision au moment du crépuscule (cécité nocturne). Les médecins d'alors cherchaient à détecter une [[Simulation de maladie|simulation]], il s'agissait peut-être d'un déficit en [[vitamine A]].
 
=== Structures et fonctionnement sanitaire ===
Les tranchées constituent le premier échelon de structures sanitaires organisées pour le ramassage, le rassemblement et l'évacuation des blessés. Les relais de blessés sont des installations rudimentaires (abri de branchage ou toile de tente) à moins de {{unité|800|m}} de la ligne de feu, situéssituées dans un trou d'obus ou au bout d'une tranchée. Ils sont tenus par des infirmiers ou des brancardiers expérimentés, disposant seulement de pansements individuels et de [[teinture d'iode]]<ref name=":1">{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=128-132.}}</ref>.
 
==== Relèvement et évacuation ====
[[Fichier:Stretcher bearers Passchendaele August 1917.jpg|thumb|Brancardiers, Passchendaele, août 1917.]]
Les brancardiers, au nombre de sept par compagnie, sont formés pour opérer par équipes de 2 à 5. Sous un bombardement, ils doivent ramper dans la tranchée pour atteindre les hommes touchés, ; lors d'une attaque, ils suivent la dernière vague d'assaut. Le relèvement des blessés dans le ''[[no man's land]]'' ne se fait que de nuit, en rampant, et à l'[[Ouïe (sens)|ouïe]], en se guidant sur les plaintes et gémissements des blessés<ref>{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=203-206.}}</ref>.
{|width="180px" align="right" style="clear:both; text-align:left; border:1px solid #99b3ff; background-color:#fff8dc;margin-left:25px;margin-bottom:20px;"
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* HOE 2, Hôpital secondaire : {{unité|100|à=200|km}}, 2500 lits.
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Du relais, les blessés sont transportés vers le poste de secours de bataillon ou de régiment, situé à 1 ou {{unité|1.5|km}} de la tranchée de première ligne, au niveau de la troisième ligne (dite « tranchée de repli », la deuxième étant la « tranchée de soutien »), et reliésreliées entre elles par des boyaux directs ou enchevêtrés. Il est estimé que le brancardage dans {{unité|500|m}} de tranchées à parcourir représente la fatigue d'un brancardage de 2 km parcourus à l'air libre. La tactique employée fut d'établir des équipes tous les {{unité|500|m}} et d'établir des relais<ref>{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=214-218.}}</ref>{{,}}<ref>{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=228.}}</ref>.
 
Ces postes de secours sont des abris de rondins recouvert de pierres et surtout de terre. En terrain accidenté, ils sont creusés à flanc de coteau, et sur terrain plat, en [[galerie (mine)|galerie de mine]] à {{unité|5|m}} au-dessous du sol (escalier de 15 à 20 marches)<ref name=":1" />. Tenus par un ou des médecins auxiliaires, ils n'admettent au maximum que quelques dizaines de blessés, le plus souvent moins d'une dizaine, les premiers soins d'urgence y sont pratiqués ([[hémostase]] et nettoyage de plaies, pansements et contention de fractures…)<ref name=":2">{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=256.}}</ref>.
 
À l'échelle du poste de secours divisionnaire, le rôle du médecin divisionnaire est de contrôler les évacuations en adaptant les réseaux selon les circonstances, de contrôler l'état des blessés, vérifier les pansements et assurer la mise en état pour une évacuation<ref name=":2" />. Du poste de secours, les blessés sont amenés par ambulance dite « nourricière » vers des antennes chirurgicales mobiles (par exemple une [[Ambulance chirurgicale automobile|autochir]]) situées à {{unité|12|ou=15|km}} de la ligne de feu<ref name=":1" />.
 
==== Triage médical ====
En cas d'afflux important de blessés, le [[Triage médical|triage]] consiste à classer un blessé selon sa gravité et en fonction des moyens disponibles, pour assurer un ordre de priorité. Au début de la guerre, un premier triage au niveau des postes de secours distinguait les blessés capables de marcher, de rester assis, ou restant couchés. Puis le triage est devenu en lui-même un système distinct indépendant, plus sophistiqué, avec un personnel spécialisé de médecins-trieurs. Par exemple, les blessés sont catégorisés en inopérables et moribonds, blessés graves que l'on peut opérer d'urgence dans un centre proche, moyens et légers à évacuer vers des hôpitaux secondaires, éclopés à diriger vers un dépôt. Chaque blessé est doté d'une fiche-dossier le catégorisant<ref name=":3">{{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=253-256}}.</ref>.
 
Le principe d'un bon triage est qu'il doit se faire en un lieu adéquat avec le personnel nécessaire afin que le débit de triage ne soit jamais inférieur au débit d'arrivée des blessés. Un centre de triage au niveau d'un corps d'armée pouvait recevoir jusqu'à {{nombre|1000|blessés}} par jour pendant une semaine. Au-delà, le triage devient impossible<ref name=":3" />.
 
Témoignage de [[Louis Pasteur Vallery-Radot]], alors médecin auxiliaire (étudiant en médecine), d'un poste de secours de bataillon près de [[Nécropole nationale de Notre-Dame-de-Lorette|Lorette]], en 1915<ref>cité par {{Harvsp|Alain Larcan|2008|p=223.}}</ref> :<blockquote>« Odeur de sang, partout du sang, du sang noir et de la boue, du sang rouge qui coule (...) Toujours, on en apporte, des vivants, des morts. On en apporte qui sont morts avant que j'ai fini de les panser. Les vivants, on les emporte ; les morts, on les emporte. Toujours on en apporte des vivants, des morts. On les apporte, on les emporte. Barbes sanglantes, faces ouvertes, yeux arrachés qui pendent, crânes béants, membres tordus, broyés, déchiquetés, toutes les entrailles sortent ; du sang noir partout ».</blockquote>
 
=== Cadavres ===
Enterrer les morts entre les lignes était un luxe qu'aucun des deux camps ne pouvait s'offrir en raison du feu ennemi. Les cadavres dans le ''no man's land'' y restaient jusqu'à ce que le front se déplace et étaient souvent rendus méconnaissables. Pour atténuer les odeurs, on projetait de nuit du [[chlorure de chaux]], et on arrosait les cadavres de divers produits (solutions de [[Méthanal|formol]], de [[Cresyl|crésyl]], de [[chlorure de zinc]], de [[Sulfate de fer(II)|sulfate de fer]]...) à distance, avec des pompes ou des lances<ref name=":7" />.
 
Environ {{unité|700000|combattants}} n'ont pas été retrouvés, soit qu'ils aient littéralement été désintégrés par les explosions, soit qu'ils aient été enfouis par les retombées de terres soulevées par les obus. Le front était également jonché de dizaines de milliers de cadavres d'animaux (chevaux, mulets, baudets, vaches...vaches…). Des squelettes continuent d'être retrouvés lors du labourslabour des champs ou lors de travaux.
 
=== Bilan ===
La guerre de tranchées apparait toutefois moins meurtrière que la guerre de mouvement. Alors que {{Nombre|165000|}} soldats français sont tués ou portés disparus en août puis autant en {{date-|septembre 1914}}, le nombre tombe à {{Nombre|60000|}} en octobre. En 1915, année d'offensives meurtrières, les pertes sont de {{Nombre|40000|}} par mois. Elles sont de {{Nombre|30000|}} en 1916, année de Verdun et de la Somme, et descendent à {{Nombre|15000|}} en 1917, avant de remonter à la fin du conflit avec la reprise de la guerre de mouvement ({{Nombre|30000|}} mensuelles), des chiffres moindres que les [[Bataille de France#Les pertes et leurs conséquences pour la suite de la guerre|pertes françaises lors de la bataille de France en 1940]]. La tranchée, c'est bien là son rôle, protège ainsi {{incise|relativement}} les soldats au contact de l'ennemi. Ce sont les conditions de vie horribles, les lieux de combat fixes où s'accumulent morts et bombardements, la guerre industrielle dans son ensemble, qui marquèrent les esprits, {{Citation|qui transforment rétrospectivement en enfer ce qui était, en réalité, un abri}}<ref>{{Article|auteur1=Michel Goya|titre=50 idées reçues sur la Grande Guerre|sous-titre=Les combattants - La guerre de tranchées, la plus meurtrière et la plus horrible|périodique=[[Guerres & Histoire]]|numéro=18|éditeur=Mondadori|date=avril 2014|issn=2115-967X|pages=54}}.</ref>.
 
À de nombreuses reprises durant la guerre, principalement au début, des trêves plus ou moins officielles furent organisées pour que les blessés puissent être sortis du ''no man's land'' et que les morts soient enterrés. Généralement, les officiers supérieurs ne toléraient aucun relâchement de l'offensive pour des raisons humanitaires et ordonnaient aux soldats de tirer sur les brancardiers et les infirmiers. Des cas de [[Trêve de Noël|trêves]] plus avancées ont eu lieu principalement lors de {{nobr|Noël 1914}}. L'esprit de ces trêves est décrite dans le film ''[[Joyeux Noël (film, 2005)|Joyeux Noël]]''.
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{{Section à sourcer|date=avril 2022}}
=== Armes légères ===
Le [[infanterie|fantassin]] de base disposait de quatre armes pour la guerre de tranchées : le [[fusil (arme)|fusil]], la [[Baïonnette (arme)|baïonnette]], les [[Arme de poing|armes de poing]] et la [[grenade (arme)|grenade]]. La munition standard de l'armée britannique était le [[.303 British]], utilisée par le [[Lee-Enfield Mark III|Lee-Enfield]]. Le [[corps canadien]] utilisait largement le [[Ross Mark III]] réputé pour sa précision. Cependant, il se révéla peu fiable dans les conditions de combat et s'enrayait souvent, il fut donc remplacé par le Lee-Enfield. L'armée française employait le fusil [[Lebel modèle 1886|Lebel]] qui, bien que robuste et fiable, était long à recharger et était moins performant que les fusils des autres nationalités. Ses performances tenaient essentiellement à celles de l'excellent [[8 mm Lebel]]. Pour pallier la faible vitesse de rechargement, l'armée adopta le fusil [[Fusils et mousquetons Berthier|Berthier 07-15]] qui corrigeait les défauts du Lebel. Il était cependant peu apprécié du fait de la faible taille du chargeur (3 balles contre 10 pour le Lebel) et fut essentiellement distribué aux [[troupes coloniales]]. La Russie employait le fusil [[Mosin-Nagant]] mais du fait de la faiblesse de son industrie, elle dut en commander aux arsenaux américains et britanniques. Le fusil standard de l'armée américaine était le [[Springfield M1903]] mais les soldats de l'[[American Expeditionary Force]] déployés dans des unités alliées employaient le fusil de ces unités, à savoir le Lebel ou le Lee-Enfield. Les soldats italiens utilisaient le fusil [[Carcano (fusil)|Carcano]].
 
L'équivalent allemand était le [[Gewehr 98]] fabriqué par [[Mauser]] et chambré avec la cartouche [[7,92 × 57 mm|{{unité|7.92|mm}} Mauser]]. Ce fusil était puissant et fiable mais peu adapté au tir rapide. L'Autriche-Hongrie utilisait le fusil [[Fusil Mannlicher M1895|M95]] qui, bien que précis, s'enrayait facilement. L'Empire Ottoman utilisait généralement des anciens fusils allemands. Dans l'ensemble, les fusils de la Première Guerre mondiale n'étaient pas adaptés au combat de tranchées. Conçus pour être précis à longue portée, ils étaient de grande taille et par conséquent peu pratiques lors des combats rapprochés.
 
La [[Baïonnette (arme)|baïonnette]] offrait la possibilité de se battre au corps à corps, en employant le fusil comme une lance. La baïonnette était plus sûre par rapport au tir lors des mêlées car on risquait moins de toucher un allié. Les statistiques britanniques rapportent que seulsseules 0,3 % des blessures étaient causées par les baïonnettes. Celle-ci était également utilisée pour achever les soldats ennemis blessés pour économiser les munitions. Les baïonnettes faisaient environ {{Unité|30|cm}} ce qui rendait sonleur usage difficile dans les tranchées étroites. Certains types de baïonnettes distribués parmi les modèles basiques, comportaient un côté dentelé en forme de scie. Cette particularité destinée aux travaux du bois, si elle n'était, certes, pas profitable à ceux qui se faisaient transpercer (blessures moins nettes), l'était encore moins pour leurs malheureux possesseurs ; en effet, plus d'un eut le nez coupé ou fut sévèrement mutilé après avoir été pris en possession de ce type d'arme.
 
[[Fichier:Chateauwood.jpg|thumb|Bois du Château de [[Hooge (Belgique)|Hooge]], [[Ypres]], 1917.]]
De nombreux soldats préféraient utiliser un [[couteau de combat]] ou un outil de tranchée comme une pioche ou une pelle dont les bords étaient aiguisés plutôt que l'encombrante baïonnette. Comme les troupes étaient mal équipées pour la guerre de tranchées, des armes improvisées apparurent comme des [[Masse d'arme|masses d'armes]] ou les [[Poing américain|poings américains]].
 
Introduits par les soldats américains, les [[fusil à pompe|fusils à pompe]] étaient une arme formidable pour le combat rapproché. Elle était tellement efficace que l'Allemagne protesta officiellement contre son usage le {{date-|14 septembre 1918}}, déclarant que {{citation|tout soldat capturé en possession de telles armes risquerait sa vie}}, ; cette menace ne fut apparemment jamais appliquée. Les militaires américains conçurent des modèles spécialement modifiés pour le combat appelés ''{{lang|en|trench guns}}'' comme le [[Winchester M1897|Winchester M97]]. Certains soldats de l'armée britannique employaient des [[Fusil à canon scié|fusils à canon scié]] lors des raids dans les tranchées adverses. Bien que réprouvée par la hiérarchie, cette pratique ne fut jamais sanctionnée.
 
La grenade à main devint l'une des armes principales de la guerre de tranchées. Les deux camps mirent rapidement en place des unités spécialisées dans son usage. La grenade permettait au soldat d'engager l'ennemi sans s'exposer et ne nécessitait pas une grande précision pour tuer ou blesser l'adversaire. Les Allemands et les Turcs étaient bien pourvus en grenades dont la fameuse [[Grenade modèle 24|Stielhandgranate]] dès le début de la guerre, contrairement aux Britanniques qui avaient cessé de l'utiliser depuis les années 1870. Les soldats durent donc improviser en fabriquant des grenades artisanales comme la {{lien|lang=en|Jam tin grenade|texte=Jam Tin Grenade}}. À la fin 1915, la [[Mills Bomb]] devint la grenade standard de l'armée britannique.
 
=== Chars de combat ===
{{Article détaillé|Histoire du char de combat}}
Les [[char d'assaut|chars]] furent introduits par les britanniquesBritanniques pour briser l'impasse de la guerre de tranchées. Cependant, ils se révélèrent très peu fiables et peu efficaces du fait de leur petit nombre et des mauvaises préparations tactiques. Les premiers chars avaient des difficultés à traverser le terrain rendu chaotique par les tirs d'artillerie. À la fin de la guerre, les meilleures tactiques permirent aux chars de mettre fin à la guerre de positions et de relancer la guerre de mouvement.
 
=== Mitrailleuses ===
{{Article détaillé|mitrailleuse}}
[[Fichier:Vickers machine gun in the Battle of Passchendaele - September 1917.jpg|thumb|[[Mitrailleuse Vickers|Mitrailleuse lourde Vickers]].]]
Les allemands s'équipèrent de mitrailleuses dès 1904, lorsque seize unités furent équipées de ''{{lang|de|Maschinengewehr}}''. Les mitrailleurs étaient l'élite de l'infanterie allemande et étaient attachés aux bataillons de ''{{lang|de|Jäger}}'' ([[infanterie légère]]). En 1914, les Britanniques disposaient de deux [[mitrailleuse Vickers|mitrailleuses lourdes Vickers]] par bataillon, les Allemands en avaient six et les Russes huit<ref>{{article |langue=en|nom=Jordan |prénom=Jonathan W. | titre=Weaponry: Hiram Maxim's machine gun probably claimed more lives than any other weapon ever made | journal=Military History | date=November 1, 2002 |volume=19 |numéro=4 |pages=16 |ISSN=0889-7328}}.</ref>. Après 1915, la ''{{lang|de|[[Maschinengewehr 08]]}}'' devint le standard de l'armée allemande. À [[Péninsule de Gallipoli|Gallipoli]] et en [[Palestine (région)|Palestine]], des artilleurs allemands les utilisaient pour le compte des Ottomans. En France, la mitrailleuse [[Saint-Étienne modèle 1907]] fut remplacée à partir de 1917 par la [[Mitrailleuse Hotchkiss modèle 1914|Hotchkiss modèle 1914]].
 
Le haut-commandement britannique était moins enthousiaste par rapport aux mitrailleuses, considérées comme une arme de triche et encourageant un combat défensif. Le maréchal [[Douglas Haig]] déclara en 1915 : {{citation|la mitrailleuse est une arme très surfaite ; deux par bataillon est plus que suffisant}} <ref>Texte Original : ''{{citation|The machine gun is a much overrated weapon; two per battalion is more than sufficient.}}''</ref>{{,}}<ref>{{lien brisé|consulté le=2013-03-26|url=http://history.enotes.com/peoples-chronology/year-1916}} .</ref>.}} En 1915, le corps des mitrailleuses fut créé pour entrainer les artilleurs. Les unités reçurent également les premières mitrailleuses légères ou [[fusil-mitrailleur|fusils mitrailleurs]] comme le [[Chauchat]] français ou le [[Lewis Mark I]] britannique.
 
Les mitrailleuses lourdes étaient employées de manière scientifique avec des champs de tir calculés. Elles étaient manipulées par des équipes comprenant jusqu'à huit hommes pour les déplacer, les entretenir et les ravitailler en munitions. Cela rendait ces armes difficiles à utiliser pour l'offensive, ce qui contribua à l'impasse sur le front.
 
=== Mortiers ===
[[Fichier:French86mmCompressedAirTrenchMortarNYT17Feb1918.jpg|thumb|Soldats français manipulant un mortier de tranchée à air comprimé de {{unité|86|millimètres}}.]]
Les [[Mortier (arme)|mortiers]], utilisés pour envoyer un obus quasiment à la verticale, furent largement utilisés dans la guerre de tranchéetranchées pour harceler les tranchées voisines, pour couper les barbelés et détruire les bunkers adverses. En 1914, les Britanniques utilisèrent un total de 545 obus de mortiers ; en 1916, ce furent {{formatnum:6500000}}. De la même manière pour, les obusiers qui tirèrent {{formatnum:1000}} obus en 1914 et {{formatnum:4500000}} en 1916. La principale [[artillerie de tranchée]] britannique était le mortier Stokes, relativement léger et facile à utiliser. Pour tirer, l'obus était simplement lâché dans le tube et le propulseur était mis à feu lorsqu'il touchait le fond du tube. Les Allemands utilisaient une grande variété de mortiers de différentes tailles depuis des lance-grenades jusqu'aux mortiers lourds pouvant tirer des « torpilles aériennes » contenant {{Unité|90|kg}} d'explosifs à une distance de {{Unité|900|mètres}} en passant par les ''[[Minenwerfer]]''. Cependant, le vol du projectile était relativement lent, ce qui permettait aux soldats de s'abriter. De leur côté, les troupes françaises développèrent dès le début du retranchement des [[Crapouillot|crapouillots]], certains artisanaux, d'autres des réutilisations de mortiers du siècle précédent. Fut aussi créé le [[Mortier de 58 mm T N°2|mortier de tranchée de {{unité|58|mm}}]].
 
=== Artillerie ===
L'[[artillerie]] domina les champs de bataillesbataille de la guerre de tranchéetranchées. Une attaque d'infanterie était rarement couronnée de succès si elle était menée au-delà de la portée de l'artillerie. En plus de bombarder les tranchées adverses, l'artillerie pouvait être utilisée pour des [[Tir de barrage|tirs de barrage]] précédant l'infanterie ou pour réaliser des tirs de contre-batterie pour détruire les canons ennemis. Les obus étaient souvent des obus à fragmentation ou hautement explosifs puis, par la suite, ils furent chargés de gaz. Les britanniquesBritanniques expérimentèrent des [[Munition incendiaire|munitions incendiaires]] composéscomposées de [[thermite]]. Cependant, de nombreuses armées connurent des problèmes d'approvisionnement en munitions durant les premières années de la guerre du fait de la sous-estimation de son usage au cours des combats intensifs. En effet, la production ne produisait parfois que 10 % des munitions tirées.
[[Fichier:15in howitzer Menin Rd 5 October 1917.jpg|thumb|Chargement d'un obusier de {{Unité|400|mm}}.]]
 
Les pièces d'artillerie étaient de deux types : les [[canon (artillerie)|canons]] et les [[obusier]]s. Les obus tirés par les canons ont une trajectoire presque horizontale tandis que ceux des obusiers suivent une trajectoire presque verticale avant de plonger vers le sol. Les obusiers de {{Unité|400|mm}} n'étaient pas rares et pouvaient tirer jusqu'à {{Unité|10|km}}. Une innovation capitale de cette période fut le frein hydraulique qui permettait de tirer rapidement sans avoir à réaligner le canon.
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=== Gaz ===
{{Article détaillé|Gaz de combat de la Première Guerre mondiale}}
Les premiers gaz étaient utilisés sous la forme de nuages dérivants dépendants du vent pour aller dans la tranchée adverse. Les trois principaux gaz utilisés furent le [[chlore]], le [[phosgène]] et le [[gaz moutarde]]. Les [[gaz lacrymogène]]s furent également déployés au début de la guerre. Le [[chlore]] fut le premier à être utilisé en {{date-|avril 1915}}. C'était un gaz mortel mais il était facile de le repérer du fait de son odeur et de sa couleur. Le {{date-|19 décembre 1915}}, le [[phosgène]] fut déployé, bien plus difficile à repérer, ; c'était le gaz mortel le plus efficace et il provoquait la mort par asphyxie.
 
Cependant, le composé le plus efficace fut le [[gaz moutarde]] introduit par l'Allemagne en {{date-|juillet 1917}}. Il ne s'agissait pas d'un gaz mais plutôt d'un fluide visqueux. Il n'était pas aussi mortel que le phosgène mais n'avait pas besoin d'être inhalé pour provoquer de terribles brulures et restait actif pendant plusieurs jours. De plus, sa nature liquide le rendait utilisable sous la forme d'obus, ce qui permettait de se passer du vent pour disperser le gaz. Les gaz de combats n'ont pas tué beaucoup de soldats mais les blessés étaient nombreux et cette arme insidieuse rendit les conditions de vie déjà précaires des combattants encore plus difficiles.
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=== Lance-flammes ===
Le [[lance-flammes]] fut déployé par les deux camps mais sa faible portée et de sa vulnérabilité réduisirent son utilisation. Il était cependant une arme très efficace pour le « nettoyage de tranchée » et était une arme de choix pour les ''[[sturmtruppen]]''.
 
=== Casques ===
Durant les premiers mois de la guerre, aucun des belligérants n'utilisait de casques en acier. Les troupes allemandes utilisaient le traditionnel [[casque à pointe]] en cuir (casque à boule pour les artilleurs) et les Français, un simple [[képi]]. Ces couvre-chefs n'offraient aucune protection contre les armes modernes. Les pertes dues à des blessures à la tête furent très élevées. Conçu dans l'urgence, le [[casque Adrian]] équipa les soldats français dès l'été 1915 et fut par la suite adopté par la Belgique, l'Italie, la Russie et d'autres nations. Le [[casque Brodie]] britannique fut livré à la fin 1915. Contrairement au casque Adrian, il était constitué d'une unique plaque d'acier déformée. Plus large, il offrait une meilleure protection contre les éclats venant du haut mais protégeait moins le cou que le casque français. C'est le casque que choisit l'armée américaine lorsqu'elle entra en guerre, même si certaines unités utilisèrent le casque français. Le casque à pointe allemand ne fut remplacé par le ''[[Stahlhelm (casque)|Stahlhelm]]'' (casque d'acier) qu'en 1916. Plus lourd que les casques alliés, il offrait une meilleure protection. Les Austro-hongrois et les Ottomans utilisèrent des versions dérivées de ce casque.
 
=== Fils barbelés ===
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=== Aviation ===
{{Article détaillé|Aviation durant la Première Guerre mondiale}}
La première utilisation de l'aviation fut la reconnaissance et le guidage des tirs d'artillerie. Ces reconnaissances furent tellement efficaces qu'elles ont grandement participé à l'impasse de la guerre de positions<ref>"{{lang|en|Aces: A Story of the First World War}}", written by George Pearson, historical advisors Brereton Greenhous & Philip Markham, [[Office national du film du Canada|National Film Board of Canada]], 1993.</ref>. Le rôle de l'[[avion de chasse]] fut d'interdire le ciel aux avions ennemis pour obtenir la [[supériorité aérienne]]. Les positions retranchées interdirent en grande partie l'usage d'un projectile simple à gravité, les fléchettes d'aviation déversées en nombre sur les concentrations de troupes durant les premiers mois de la guerre. Les bombardements à la main ne pouvaient atteindre, ponctuellement, que des cibles précises et sans grand impact sur le déroulement d'une attaque. Le mitraillage des lignes était de plus gêné par les tranchées « en zig-zagzigzag ». deDe ce fait, le bombardement tactique ne fut que peu développé durant la Guerre de tranchées. Néanmoins, le commandement allemand testa l'assaut conjoint des troupes au sol avec l'aviation d'assaut contre des points fortifiés ou des blindés ; ces expérimentations seront surtout développées dans les tactiques de la [[Reichswehr|Reichwehr]], et mises en application lors de la ''[[Blitzkrieg]]''.
 
=== Équipements « moyenâgeux » ===
Un des aspects spectaculaires de la guerre de tranchées en 1914-1918 fut l'utilisation de matériels rappelant l'armement médiéval. Ce sont d'une part les armes offensives déjà mentionnées telles les masses d'arme utilisées pour le corps à corps<ref>Affiche [https://fr.adforum.com/award-organization/6650183/showcase/2015/ad/34508615 1914. Vingtième siècle. Début du Moyen Âge]. [[Musée de la Grande Guerre du pays de Meaux|Musée de la Grande Guerre]].</ref>, casse-tête et même [[Fléau d'armes|fléaux d'armes]]. Âge d'or de l'artillerie, la guerre de tranchées voit la réapparition des engins de jet mécanique, [[Baliste|balistes]] Blondel et [[arbalète]]s lance-grenades d'Imphy ({{nombre|800|exemplaires}})<ref>{{Lien web|titre=Lance Grenade de Tranchee|url=https://fr.scribd.com/document/167837793/Lance-Grenade-de-Tranchee|site=Scribd|consulté le=2017-11-19}}.</ref>, pour le tir au-delà du parapet<ref name=":4">{{Article|auteur1=Alexandre Thers|auteur2=Giuseppe Calo|titre=Retour vers le passé|sous-titre=la part médiévale de la Grande Guerre|périodique=Ligne de Front|numéro=53|date=janvier-février 2015|issn=1953-0544|pages=4}}
.</ref>. Outre les grenades délaissées depuis le {{S|XVIII}} réapparaissent le lance-flammes ignoré depuis le [[feu grégeois]] ou les « chars » depuis les [[Fort de chariots|chariots de guerre hussites]], voire les projets de [[Léonard de Vinci]] et prédécesseurs. La [[sape]] était aussi oubliée, hors la [[Bataille du Cratère]] en 1864, depuis plusieurs siècles.
 
D'autre part, de « nouvelles » protections des soldats s'inspirent de celles du [[Moyen Âge]] ou de la [[Renaissance]]. Les principaux casques des belligérants sont une réminiscence de modèles anciens : [[chapel de fer]] du [[Casque Brodie|Brodie]] anglais, [[cervelière]] française et [[bourguignotte]] du [[casque Adrian]], casque ''Gaede'' à nasal<ref>{{Lien web|titre=CALOTTE D'ACIER DANS LES VOSGES DU GROUPE D'ARMEES GAEDE|url=http://lagrandeguerre.cultureforum.net/t1157-calotte-d-acier-dans-les-vosges-du-groupe-d-armees-gaede|site=http://lagrandeguerre.cultureforum.net}}.</ref> et ''[[Stahlhelm (casque)|Stahlhelm]]'' allemands qui rappelle certaines [[Salade (casque)|salades]] de joute et visible sur des gravures d'[[Albrecht Dürer]]. Des ''armures de tranchée'' sont portées ponctuellement, en particulier par les soldats allemands (la cuirasse ''Sappenpanzer'' fut fabriquée en {{unité|500000|exemplaires}}<ref name=":4" /> !) ou les [[Reparti d'assalto|Arditi]] (dénommés aussi [[Compagnie de la Mort|Compagnies de la Mort]]<ref name="Arditi - Wikipedia">{{Article|langue=en|titre=Arditi|périodique=Wikipedia|date=2017-10-21|lire en ligne=https://en.wikipedia.org/w/index.php?title=Arditi&oldid=806398267|consulté le=2017-11-19}}</ref>) italiens<ref>{{Article|titre=Casque Farina des Arditi.|périodique=www.passionmilitaria.com|date=19 Novembre 2017|lire en ligne=http://www.passionmilitaria.com/t26257-casque-farina-des-arditi}}.</ref>, qui ont par ailleurs suivi un entrainement au [[combat rapproché]] inspiré de [[Fiore dei Liberi]] <ref name="Arditi - Wikipedia" />. Leur panoplie comprend les cuirasses « pare-balles » Daigre, [[Ansaldo]], Farina ou Fariselli, les casques Farina et protège-joues Lippman, et même des boucliers dans des ''Compagnie Scudate''. Les français testent entre- autres un protège-bras de fonte en forme d'[[Écu (bouclier)|écu]] et diverses cuirasses, les américains des visières additionnelles ajourées, ou des casques ''Deep salad'', ''[https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Prototype_Experimental_Helmet,_Model_2,_Worcester_Pressed_Steel,_1917_-_Higgins_Armory_Museum_-_DSC05455.JPG?uselang=fr Model 2]'' et ''Model 8'' à visière protégeant les yeux<ref name=":4" />. La [[Cotte de mailles annulaire|cotte de mailles]], inusitée depuis plus de trois siècles, est employée dans les masques de protection des équipages de chars d'assaut.
 
Paradoxalement, les dernières unités traditionnellement cuirassées, les [[Cuirassier|cuirassiers]], délaissent au même moment leur équipement séculaire (ainsi que leur monture). Ces résurgences illustrent combien la Grande Guerre marque une transition et la fin d'une ère, et « que de nombreuses formes de technologies anciennes ont survécu jusqu'à l'ère nucléaire » ([[Béatrice Heuser]])<ref name=":4" />{{,}}<ref>{{Article|langue=fr-FR|titre=Quand des soldats de la Grande Guerre redeviennent arbalétriers et piétons|périodique=Acier et tranchées|date=2015-10-02|lire en ligne=https://acierettranchees.wordpress.com/2015/10/02/quand-des-soldats-de-la-grande-guerre-redeviennent-arbaletriers-et-pietons/|consulté le=2018-01-07}}.</ref>.<gallery>
Fichier:Bundesarchiv Bild 183-R22888, Westfront, Flammenwerfer.jpg|Utilisation de lance-flammes statiques par l'armée allemande.
Fichier:Königstein fortress 068.JPG|''Minenwerfer'' et mitrailleuse portable allemands.
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== Sape ==
[[Fichier:Mine-explosion-1916.jpg|thumb|right|Explosion d'une mine, vue depuis un poste d'observation français. 1916.]]
La craie sèche de la [[Somme (département)|Somme]] était parfaitement adaptée au travail de [[Sape#Premi.C3.A8re Guerre mondiale|sape]] mais avec des pompes, il était possible de creuser dans la craie humide des [[Flandre (Belgique)|Flandres]]. Les équipes de tunneliers étaient généralement constituées de soldats qui étaient [[Mineur (métier)|mineurs]] dans la vie civile. Celles-ci creusaient des tunnels sous le ''no man's land'' jusqu'en dessous des tranchées adverses. Ces tunnels étaient remplis d'explosifs et leur explosion provoquait un large cratère. Cette explosion pouvait avoir deux objectifs, : d'une part, détruire la tranchée ennemie pour former une brèche mais; elled'autre pouvait égalementpart, former une tranchée prête à l'emploi à proximité de l'adversaire. Lorsqu'une mine explosait, les deux camps faisaient la course pour occuper et fortifier le cratère.
 
Si les mineurs détectaient un tunnel ennemi en progression, ils lançaient souvent la construction d'un autre tunnel appelé contre-mine ou « camouflet » destiné à être rempli d'explosifs pour détruire le tunnel adverse. Des raids nocturnes étaient également menés dont le seul objectif était la destruction des tunnels ennemis. Parfois, deux tunnels se croisaient, ce qui donnait lieu à des combats souterrains. Les britanniques firent exploser plusieurs mines le {{date-|1 juillet 1916}}, premier jour de la [[bataille de la Somme]]. Ainsi, la plus forte explosion eut lieu près de [[Beaumont-Hamel]], avec près de {{Unité|24|tonnes}} d'explosifs.
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== Stratégies et tactiques ==
[[Fichier:2010 04 23 Vieil Armand-Tranchée française et fortin allemand.jpg|thumb|Au premier plan se situe une tranchée française et, au fond, la "« Feste Dora" » dans les lignes allemandes. Une vingtaine de mètres à peine les séparent lors de la [[bataille du Hartmannswillerkopf]].]]
=== Stratégie ===
La stratégie fondamentale de la guerre de tranchéetranchées lors de la Première Guerre mondiale était de protéger sa position et d'essayer de réaliser une percée dans les lignes ennemies. Cela déboucha sur une guerre d'[[Attrition#Militaire|attrition]] et l'ambition d'anéantir l'ennemi en épuisant ses ressources humaines et économiques ne put pas se réaliser. Cela n'empêcha pas les états-majors de continuer cette stratégie d'annihilation. Le commandant en chef britannique [[Douglas Haig]] rechercha continuellement une percée qui pourrait être exploitée par la cavalerie. Cependant, les batailles de la Somme et de Flandres conçues pour cet objectif se transformèrent en bataille d'usure. De même pour l'armée allemande qui voulait « saigner l'armée française » en lançant la [[bataille de Verdun]] mais qui saigna tout autant l'attaquant que le défenseur.
 
=== Tactiques de la Première Guerre mondiale ===
[[Fichier:Periscope tranchée française.jpg|right|thumb|250px|Troupes françaises utilisant un [[périscope]], 1915.]]
L'image populaire de l'assaut consiste en une vague de soldats, baïonnette au canon, escaladant le parapet pour affronter le feu ennemi dans le ''no man's land''. Il s'agissait de la tactique standard au début de la guerre et les succès furent peu nombreux. Une tactique plus courante était l'attaque de nuit depuis un avant-poste, en ayant auparavant coupé les barbelés. En 1917, les Allemands innovèrent en développant des tactiques d'infiltration menées par les unités de [[Sturmtruppen]]. Ces petits groupes de soldats d'élite attaquaient les points vulnérables en évitant les points fortifiés et s'avançaient à l'arrière des tranchées adverses. Leur distance d'infiltration était limitée par leur capacité de communication et de ravitaillement.
 
L'artillerie jouait un rôle important dans l'attaque en tuant ou en démoralisant la garnison adverse et en détruisant ses défenses. La durée de ce bombardement initial pouvait varier de quelques minutes à plusieurs jours. Cependant, ce bombardement était souvent peu efficace contre les défenses ennemies et luileur indiquait la position de l'attaque. Celui en préparation de la [[bataille de la Somme]] dura huit jours mais ne réussit pas à détruire les abris profondément enterrés.
 
Une fois que les canons s'arrêtaient, les défenseurs avaient le temps de se remettre en position pour repousser l'adversaire. Le second rôle de l'artillerie était de protéger l'infanterie en mettant en place un tir de barrage en avant des soldats pour empêcher toute contre-attaque. À partir de 1916, cette méthode devint la règle et était plus destinée à empêcher l'ennemi de contre-attaquer que dequ'à détruire ses défenses.
 
Capturer l'objectif n'était que la première phase de la bataille car il fallait ensuite le conserver. L'attaquant devait ainsi apporter son équipement (pelles, pioches, sacs de sable...) pour renforcer la position. Les Allemands ont mis l'accent sur des contre-attaques immédiates destinées à regagner le terrain perdu. Cette stratégie leur a coûté très cher en 1917 quand les Britanniques ont commencé à limiter leurs avancées de manière à être en mesure de répondre aux contre-attaques. Une partie de l'artillerie britannique était positionnée juste derrière la ligne de départ et ne prenait pas part au bombardement initial, ce qui lui permettait de soutenir les troupes qui avançaient hors de portée des canons plus en arrière.
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== La Première Guerre mondiale : Sortir de l'impasse ==
 
Tout au long de la Première Guerre mondiale, les belligérants tâtonnèrent pour trouver une tactique pour sortir de l'impasse de la guerre de tranchées. Lorsque la Russie quitta le conflit en 1917, les Allemands purent rapatrier leurs unités du Front de l'Est et les former aux nouvelles tactiques dont celles des ''[[sturmtruppen]]''. Cette tactique impliquait des petits groupes de soldats attaquant par surprise les points faibles du dispositif adverse et privilégiait le commandement décentralisé au niveau des sections du fait de la difficulté pour les généraux de coordonner un grand plan de bataille. Ces tactiques d'infiltration prouvèrent leur efficacité lors de l'[[BatailleOpération de la Marne (1918)Michael|offensive Michael]] au printemps 1918.
 
Conçus pour associer la protection, la puissance de feu et la mobilité, les chars permirent de sortir de l'impasse. Les premières utilisations furent peu efficaces du fait de la fiabilité douteuse des véhicules mais l'effet sur le moral des soldats allemands fut considérable car le soldat de base ne disposait pas d'un armement anti-char. Lorsque les chars furent utilisés en grand nombre, ils permirent de briser les lignes allemandes et ne pouvaient pas facilement être délogés par l'infanterie.
 
Les Allemands, qui avaient négligésnégligé les chars pendant la Première Guerre mondiale, surent tirer les leçons de leurs échecs et firent de ceux-ci l'élément central de leur tactique de [[blitzkrieg]].
 
== Seconde Guerre mondiale ==
Les victoires rapides des Allemands pendant la [[Seconde Guerre mondiale]] montrèrent que les fortifications comme la [[ligne Maginot]] étaient inefficaces si elles pouvaient être contournées. Lors du [[Siège de Sébastopol (1941-1942)|siège de Sébastopol]], l'[[Armée rouge]] parvint à tenir un système de tranchées sur l'étroite péninsule pendant plusieurs mois contre l'intense bombardement allemand. Les alliés occidentaux brisèrent le soi-disant [[mur de l'Atlantique]] à l'aide d'une combinaison de débarquements amphibies, de bombardements navals, de [[parachutisme militaire|parachutages]] et d'attaqueattaques au sol. La combinaison de l'artillerie, de l'infanterie, du char et de l'aviation initiée par les Allemands fit que la guerre de tranchées ne pouvait plus avoir lieu comme ce fut le cas lors de la Première Guerre mondiale.
 
Cela ne signifie pas pour autant que le retranchement était devenu obsolète. Il s'agit encore d'un moyen de renforcer les obstacles naturels pour créer une ligne de défense. Par exemple, lors de la [[bataille de Stalingrad]], les soldats des deux camps creusèrent des tranchées au milieu des ruines. Pendant la [[bataille de Koursk]], les Soviétiques construisirent un important réseau de tranchées, plus élaboré que tous ceux construits dans cette guerre. Ce quiCeci permit aux Soviétiques de repousser les unités blindées allemandes avec une forte [[Canon antichar|artillerie anti-char]] aux Soviétiques de repousser les unités blindées allemandes<ref>Remson, Andrew and Anderson, Debbie. [http://www.geocities.com/armysappersforward/kursk.htm World War II Battle of Kursk: Mine/Countermine operations] 25 April 2000, (Prepared for U.S. Army Communications-Electronics Command, Night Vision and Electronic Sensors Directorate), Section "« {{lang|en|The Soviet defense system and minefields}}" ».</ref>.
 
Au début de la [[bataille de Berlin]], les Soviétiques traversèrent l'[[Oder]] et affrontèrent les troupes allemandes à {{Unité|50|km}} de Berlin lors de la [[bataille de Seelow]]. Les tranchées permirent aux Allemands, largement inférieurs en nombre, de résister au déluge d'obus soviétiques, et lorsque l'Armée rouge tenta de traverser le terrain marécageux, elle perdit de nombreux soldats avant de briser les défenses allemandes.
 
== La guerre de tranchées après 1945 ==
La guerre de tranchées a été rarement utilisée depuis la fin de la Première Guerre mondiale. La mobilité accrue des armées permettait de ne pas s'enfermer dans une guerre de positions. Cependant, elle réapparut lors des derniers combats de la [[guerre civile chinoise]], pendant la [[guerre de Corée]], la [[bataille de Diên Biên Phu]] et dans certains engagements de la [[guerre du Viêt Nam]]. Durant la guerre froide, les forces de l'[[OTAN]] s'entrainaient à combattre dans des tranchées.
 
Un autre exemple de guerre de tranchéetranchées fut la [[guerre Iran-Irak]], dans laquelle les deux pays possédaient de grandes armées de fantassins mais relativement peu de blindés, d'aviation ou d'entrainement pour les opérations combinées. Ce conflit est celui qui se rapproche le plus de la guerre de tranchéetranchées de la Première Guerre mondiale avec l'utilisation de [[gaz de combat]] et d'[[Charge militaire|assauts frontaux]]. La guerre dura {{nombre|8|ans}} sans qu'il n'y ait de vainqueur définitif.
 
Bien qu'il s'agissaitagît d'un [[siège (militaire)|siège]], on trouvait un vaste système de tranchées à l'intérieur et à l'extérieur de la ville de [[Sarajevo]], lors du [[Siège de Sarajevo|siège du même nom]] entre 1992 et 1996, qui était utilisé pour approvisionner le front et éviter les [[Tireur embusqué|tireurs embusqués]]. Les tranchées furent également un élément important du blocage de la [[guerre entre l'Érythrée et l'Éthiopie]] entre 1998 et 2000. Les frontières entre les [[Zone coréenne démilitarisée|deux Corées]] ou entre l'[[Inde]] et le [[Pakistan]] au [[Cachemire]] sont deux exemples de lignes de démarcations pouvant devenir les théâtres d'affrontementaffrontements à tout moment. Elles consistent en de vastes réseaux de tranchées entourés de millions de [[mine terrestre|mines]].
 
Pendant la [[Seconde guerre civile irakienne|seconde guerre civile irakienne (2013-2017)]], des [[Peshmerga|combattants kurdes]] creusent des tranchées dans le nord de l'Irak pour se protéger des [[Attentat-suicide|attaques suicides]] du [[État islamique (organisation)|groupe État islamique]] avec des [[Véhicule piégé|véhicules piégés]]<ref>{{Lien web |titre=À Kirkouk, une tactique du Moyen Âge pour se protéger des voitures piégées |url=https://www.lorientlejour.com/article/827177/a-kirkouk-une-tactique-du-moyen-age-pour-se-proteger-des-voitures-piegees.html |site=L'Orient-Le Jour |date=2013-08-08 |consulté le=2021-12-15}}.</ref>.
Bien qu'il s'agissait d'un [[siège (militaire)|siège]], on trouvait un vaste système de tranchées à l'intérieur et à l'extérieur de la ville de [[Sarajevo]] lors du [[Siège de Sarajevo|siège du même nom]] entre 1992 et 1996 qui était utilisé pour approvisionner le front et éviter les [[Tireur embusqué|tireurs embusqués]]. Les tranchées furent également un élément important du blocage de la [[guerre entre l'Érythrée et l'Éthiopie]] entre 1998 et 2000. Les frontières entre les [[Zone coréenne démilitarisée|deux Corées]] ou entre l'[[Inde]] et le [[Pakistan]] au [[Cachemire]] sont deux exemples de lignes de démarcations pouvant devenir les théâtres d'affrontement à tout moment. Elles consistent en de vastes réseaux de tranchées entourés de millions de [[mine terrestre|mines]].
 
Durant l'[[Invasion de l'Ukraine par la Russie depuis 2022|invasion de l'Ukraine par la Russie]], la [[bataille de Bakhmout]] voit l'apparition d'un réseau de tranchées autour de la ville assiégée autant par les forces ukrainiennes que russes<ref>{{Lien web |langue=en |prénom=Howard |nom=Altman |titre=Ukraine Situation Report: The Bloody Battle For Bakhmut |url=https://www.thedrive.com/the-war-zone/ukraine-situation-report-the-bloody-battle-for-bakhmut |site=The Drive |date=2022-11-28 |consulté le=2023-06-05}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |langue=en |prénom=Holly |nom=Ellyatt |titre=Trenches, mud and death: One Ukrainian battlefield looks like something out of World War I |url=https://www.cnbc.com/2022/11/30/trenches-endless-mud-and-death-the-battle-of-bakhmut.html |site=CNBC |date=2022-11-30 |consulté le=2023-06-05}}.</ref>.
Pendant la [[Seconde guerre civile irakienne|seconde guerre civile irakienne (2013-2017)]], des [[Peshmerga|combattants kurdes]] creusent des tranchées dans le nord de l'Irak pour se protéger des [[Attentat-suicide|attaques suicides]] du [[État islamique (organisation)|groupe État islamique]] avec des [[Véhicule piégé|véhicules piégés]]<ref>{{Lien web |titre=À Kirkouk, une tactique du Moyen Âge pour se protéger des voitures piégées |url=https://www.lorientlejour.com/article/827177/a-kirkouk-une-tactique-du-moyen-age-pour-se-proteger-des-voitures-piegees.html |site=L'Orient-Le Jour |date=2013-08-08 |consulté le=2021-12-15}}</ref>.
 
== Galerie d'images ==
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Fichier:Bastion du Mat, from the central bastion.jpg|Défenses lors du [[Siège de Sébastopol (1854-1855)|siège de Sébastopol]] (1854).
Fichier:Confederate Trenches. Fascine Trench Breastworks, Petersburg, Va. - NARA - 524792.tif|Tranchées confédérées lors de la Guerre Civile américaine.
Fichier:The photographic history of the Civil War - thousands of scenes photographed 1861-65, with text by many special authorities (1911) (14576321259).jpg|Soldats de l'Union (Guerre Civile américaine).
Fichier:Royal Naval Division trench.jpg|Exercice d'infanterie anglaise (British Royal Naval Division) sur l'île grecque de Lemnos lors de la bataille de [[Bataille des Dardanelles|Gallipoli]], 1915.
Fichier:Trencheswwi2.jpg|Tranchée anglaise sur le front Ouest, 1916.
Fichier:HindenbergHindenburg line bullecourtBullecourt.jpg|Tranchées françaises de Bullecourt.
Fichier:German trenches on the aisne.jpg|Tranchée allemande, parallèle à l'Aisne, 1917. Le risque d'inondation s'ajoute à ceux de la guerre.
Fichier:Bundesarchiv Bild 146-1976-076-29A, Westfront, ausgebauter Sprengtrichter.jpg|Entonnoir aménagé, sur le front Ouest (côté allemand).
Fichier:Bundesarchiv Bild 146-1976-076-20A, Frankreich, Armentiéres, Schlachtfeld.jpg|Tranchées de la bataille d'[[Armentières]].
Fichier:Grebbelinie.jpg|Tranchée reconstituée.
Fichier:Crapouillot de tranchée.png|Mortier du {{s-|XIX|e}} utilisé comme [[crapouillot]], en 1915.
Fichier:Entonnoir mine.png|Entonnoir dû à l'explosion d'une sape française.
Fichier:1917 ortler vorgipfelstellung 3850 m highest trench in history of first world war.jpg|Tranchées autrichiennes dans la neige des Alpes.
Fichier:A tank loaded with wooden bridging material ... stranded in a trench in the Hindenburg Line, Belley Wood, near Villeret.jpg|Tank anglais doté d'une fascine destinée à combler une tranchée.
Fichier:Battle of Moscow.jpg|Tranchée antichar creusée par les moscovites en 1941.
Fichier:Dien Bien Phu002.jpg|Tranchée française à [[Ðiện Biên Phủ]].
Fichier:101st Airborne Division - Vietnam 01.jpg|Tranchée sommaire américaine au Viêt- Nam.
Fichier:IranianAli TroopsKhamenei in(right) Forwardin Trenchestrench during Iran -Iraq Warwar.jpg|Troupes[[Ali irakiennesKhamenei]] dans unedroite), tranchéeactuel guide suprême de la Révolution islamique en Iran, pendant la [[guerre Iran-Irak]].
Fichier:Ali Khamenei (right) in trench during Iran-Iraq war.jpg|[[Ali Khamenei]] (à droite), actuel guide suprême de la Révolution islamique en Iran, pendant la [[guerre Iran-Irak]]
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== Voir aussi ==
=== Bibliographie ===
* {{Ouvrage|auteur1=Benoît Amez|titre=Dans les tranchées|éditeur=[[Publibook]]|année=2009|isbn=|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=AsIpqIzOCQ0C&printsec=frontcover}}
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Tony|nom1=Ashworth|titre=Trench warfare, 1914-1918|sous-titre=the live and let live system|lieu=Houndsmills, Basingstoke, Hampshire|éditeur=[[Macmillan Publishers|Macmillan]]|année=1980|pages totales=266|isbn=978-0-333-25766-1|oclc=464173191}}
* {{en}} Ashworth, Tony ''The Sociology of Trench Warfare'', British Journal of Sociology, 21 (1968), 407-20.
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Robert|nom1=Axelrod|préface=Richard Dawkins|titre=The evolution of cooperation|sous-titre=Revised Edition|lieu=New York|éditeur=[[Basic Books]]|année=2006|pages totales=264|isbn=978-0-465-00564-2|oclc=964719947}} [http://www.heretical.com/games/trenches.html See excerpts from the Chapter ''The Live-and-Let-Live System in Trench Warfare in World War I'']
* {{en}} Bidwell, Shelford, and Graham, Dominick, ''Fire-power — The British Army Weapons and Theory of War 1904–1945'', Pen & Sword Books, 2004
* {{en}} Canfield, Bruce N. ''Give Us More [[Shotguns]]!'' American Rifleman, May 2004.
* {{en}} Cole, James P. (Capt.) and Schoomaker, Oliver (Maj.) (2009). [https://www.amazon.com/Trench-Warfare-World-Military-Training/dp/1449553141 ''Trench Warfare: World War 1: Military Training''], {{ISBN|1449553141}}
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Trevor|nom1=Dupuy|lien auteur1=Trevor N. Dupuy|titre=The evolution of weapons and warfare|lieu=Indianapolis|éditeur=Bobbs-Merrill|année=1980|pages totales=350|isbn=978-0-672-52050-1|oclc=908786864}}.
* {{en}} Ellis, John, ''Eye-Deep in Hell — Life in the Trenches 1914–1918'', Fontana, 1977
* {{en}} Fitzsimmons, Bernard, general editor. (with Gunston, Bill, Hogg, Ian V., & Preston, Anthony). ''Encyclopedia of 20th Century Weapons and Warfare''. London: Phoebus Publishing Co, 1977. 24 volumes.
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Paddy|nom1=Griffith|titre=Battle Tactics of the Western Front — The British Army's Art of Attack 1916–18|lieu=New Haven|éditeur=[[Yale University Press]]|année=1996|pages totales=310|format livre=poche|isbn=978-0-300-06663-0|oclc=38239040|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=nhhlHGWCnzYC&printsec=frontcover}}
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Paddy|nom1=Griffith|titre=Fortifications of the Western Front 1914–18|lieu=Oxford|éditeur=Osprey|année=2004|numéro d'édition=1|format livre=poche|isbn=978-1-84176-760-4}}
* {{en}} Gudmundsson, B.I. ''Stormtroop Tactics : Innovation in the German Army, 1914–1918.'' (1989) [https://www.questia.com/PM.qst?a=o&d=15117879 Seeking Victory on the Western Front]
*{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Alain Larcan]]|auteur2=Jean-Jacques Ferrandis|titre=Le service de santé aux armées pendant la Première guerre mondiale|lieu=Paris|éditeur=LBM|dateannée=2008|pages totales=596|isbn=978-2-9153-4763-0}}
* {{Ouvrage|auteur1=Jean Nicot|titre=Les poilus ont la parole. Dans les tranchées|sous-titre=lettres du front, 1917-1918|éditeur=[[Éditions Complexe|Editions Complexe]]|année=2003|isbn=|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=OtHiQq8_x5UC&printsec=frontcover}}
* {{en}} Palazzo, A. ''Seeking Victory on the Western Front: The British Army and Chemical Warfare in World War I'' (2000).[https://www.questia.com/PM.qst?a=o&d=96747981 Seeking Victory on the Western Front - THE BRITISH ARMY AND CHEMICAL WARFARE IN WORLD WAR I]
* {{Ouvrage|auteur1=[[Odile Roynette]]|titre=Les mots des tranchées. L'invention d'une langue de guerre 1914-1919|éditeur=[[Armand Colin]]|année=2010|isbn=|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=tIEMFq9PEe8C&printsec=frontcover}}
* {{en}} [[Gary Sheffield (historian)|Sheffield, G. D.]] ''Leadership in the Trenches: Officer-Man Relations, Morale and Discipline in the [[British Army]] in the Era of the [[First World War]]'' (2000)
* Smith, L.V. ''Between Mutiny and Obedience. The Case of the French Fifth Infantry Division during World War I'' (1994)
* {{en}} [http://www.collectionscanada.ca/first-world-war/interviews/025015-1500-e.html Trench Warfare" in ''Oral Histories of the First World War: Veterans 1914–1918''. Library and Archives Canada.]
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Denis|nom1=Winter|titre=Death's men|sous-titre=soldiers of the Great War|lieu=London, England|éditeur=[[Penguin Books]]|année=1979|pages totales=283|isbn=978-0-14-016822-8|oclc=803734684}}
* {{article |langue=en|nom1=—— |année=1917 |mois=April |titre=What You See At The Front: A Picture Of THe Trenches And What Are Behind Them, Made By Detailed Maps, Diagrams, And Photographs |journal=[[World's Work|The World's Work: A History of Our Time]] |volume=XXXIII |pages=602–622 |url=https://books.google.com/?id=lPAMVa7esS4C&pg=PA602 |consulté le=2009-08-04 }}
 
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=== Liens externes ===
* [http://www.collectionscanada.ca/premiere-guerre-mondiale/entrevues/025015-1500-f.html « La guerre des tranchées » - ''Histoires orales de la Première Guerre mondiale : Les anciens combattants de 1914 à 1918''] à Bibliothèque et Archives Canada
* [http://www.crid1418.org/espace_pedagogique/lexique/LexiqueCRID1418.pdf Lexique des termes techniques de 14-18] sur le site du [[Collectif de recherche international et de débat sur la guerre de 1914-1918|CRID 14-18]], avec de nombreuxnombreuses explications sur l'aménagement et la vie aux tranchées
 
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