Pedro Castillo

enseignant, syndicaliste et homme politique péruvien
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 1 août 2021 à 08:44 et modifiée en dernier par Panam2014 (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.

José Pedro Castillo Terrones, né le à Puña (province de Chota, Pérou), est un syndicaliste et homme d'État péruvien, président de la République depuis le .

Pedro Castillo
Illustration.
Photographie de Pedro Castillo en tant que président du Pérou
Fonctions
Président de la République du Pérou
En fonction depuis le
(2 ans, 11 mois et 28 jours)
Élection 6 juin 2021
Vice-président Dina Boluarte
Président du Conseil Guido Bellido
Gouvernement Castillo
Prédécesseur Francisco Sagasti
Biographie
Nom de naissance José Pedro Castillo Terrones
Surnom El profe
Date de naissance (54 ans)
Lieu de naissance Puña (Chota, Pérou)
Nationalité Péruvienne
Parti politique PP (2002-2017)
Conjoint Lilia Paredes Navarro
Diplômé de Université César Vallejo
Profession Instituteur
Religion Catholicisme
Résidence Palais du gouvernement du Pérou

Signature de Pedro Castillo

Pedro Castillo
Présidents de la République du Pérou

Instituteur de profession, il est en 2017 l'un des meneurs d’une grève nationale d'enseignants qui dure près de trois mois.

Soutenu par le parti marxiste-léniniste Pérou libre, duquel il n'est pas membre, à l’élection présidentielle de 2021, il accède au second tour face à la populiste de droite Keiko Fujimori. À l’issue d'un scrutin très serré et après des semaines de recomptage des bulletins de vote, il est proclamé élu avec 50,1 % des suffrages exprimés.

Il affiche des positions de gauche radicale sur l'économie et la politique étrangère, tout en se montrant conservateur sur les sujets sociétaux.

Situation personnelle

Origines

José Pedro Castillo Terrones est issu d'une famille paysanne pauvre, avec deux parents illettrés[1]. Il est le troisième d'une famille de neuf enfants[2]. Il grandit dans un hameau près de Puña et doit marcher plusieurs kilomètres pour se rendre à l'école. Il travaille également aux champs avec ses parents durant son enfance[3].

Activité de rondero

Dans sa jeunesse, il est un « rondero », du nom des groupes d’autodéfense de paysans luttant contre le vol de bétail et la guérilla du Sentier lumineux au nord du pays[4].

Carrière professionnelle

À partir de 1995, il travaille comme instituteur à Puña. Il est titulaire d'une maîtrise en psychopédagogie de l'université César Vallejo[5].

Il est marié à Lilia Paredes Navarro, une enseignante également d'origine paysanne, et père de trois enfants[6],[7].

Engagement syndical

Dans sa région rurale

Alors qu'il enseigne dans l’une des régions les plus pauvres du Pérou, où ses élèves sont souvent sujets à la sous-nutrition, Pedro Castillo décide de s'engager dans la lutte syndicale pour que l'éducation en milieu rural soit mieux soutenue par les autorités[8].

Grève nationale de 2017

Il acquiert une notoriété nationale en 2017, lorsqu'il conduit une grève suivie pendant près de trois mois, avec un pic à plus de 200 000 enseignants pour obtenir une augmentation du budget de l'éducation[8]. Fragilisant le président de la République, le libéral Pedro Pablo Kuczynski, le mouvement obtient partiellement gain de cause, avec notamment des hausses de salaire[9],[10].

Ascension politique

Débuts au centre gauche

En 2002, Pedro Castillo se présente sous les couleurs du parti de centre gauche Pérou possible (PP) pour devenir maire d’Anguía, mais il est battu[11]. À partir de 2005, il est l’un des principaux militants de Pérou possible dans la région de Cajamarca ; il reste membre du parti jusqu’à sa dissolution en 2017, à la suite de mauvais résultats électoraux[12].

Élection présidentielle de 2021

Pedro Castillo est choisi par une assemblée nationale des représentants des professeurs pour être leur candidat à l'élection présidentielle de 2021[8]. Approché par plusieurs partis, il choisit en 2020 la formation de gauche radicale, marxiste-léniniste, Pérou libre (PL)[13]. Il n'est cependant pas membre du parti et affirme ne pas être marxiste[14].

Comme colistiers pour la vice-présidence, Pedro Castillo désigne Dina Boluarte et Vladimir Cerrón. Secrétaire général de Pérou libre, ce dernier est condamné en 2019 à quatre ans de prison pour corruption, une situation qui conduit à l'invalidation de sa candidature[15],[16]. Si Pedro Castillo essaie par la suite de s'en dissocier, l'influence de Cerrón et l'hypothèse de son entrée au gouvernement en cas de victoire reviennent régulièrement dans le débat[17],[18].

S'exprimant moins dans les médias que ses adversaires, Pedro Castillo fait campagne pour une réforme constitutionnelle, une restructuration du système des retraites et la nationalisation de l'industrie du gaz[18],[19],[20]. Son programme s'appuie sur trois thématiques principales : la santé, l'éducation et l'agriculture, qu'il compte renforcer pour stimuler le développement du pays[21].

 
Bulletin de vote du second tour de l'élection présidentielle ().

À la surprise générale, il arrive en tête du premier tour, avec 18,9 % des suffrages exprimés, réalisant ses meilleurs scores dans les régions rurales et pauvres[22],[23]. Outre son discours sur les inégalités sociales, il bénéficie d'une certaine image de probité puisqu'il fait partie des huit candidats (sur dix-huit) à n’être cité dans aucune affaire dans un pays où la corruption politique est importante[9],[24]. Sa candidature rencontre en revanche l'hostilité des milieux d'affaires et de la plupart des médias péruviens[13],[25].

 
Pedro Castillo, président élu, et Dina Boluarte, vice-présidente élue, avec Francisco Sagasti, chef de l’État sortant, et Violeta Bermúdez, présidente du Conseil des ministres sortante ().

Au second tour, il affronte la populiste de droite Keiko Fujimori, fille de l'ancien président autoritaire Alberto Fujimori, alors emprisonné pour crimes contre l'humanité et corruption. Alors que la monnaie nationale, le sol, tombe à un niveau historiquement bas face au dollar à quelques jours du second tour, le Financial Times indique que l'élite péruvienne s'inquiète de la perspective d'une victoire de Pedro Castillo et que les plus grandes fortunes cherchent à transférer leurs économies à l'étranger et à les convertir en dollars[26]. À l’issue de dix jours d’incertitudes et après comptabilisation de la totalité des bulletins par l’Organe national du processus électoral (ONPE), Pedro Castillo est donné vainqueur avec seulement 50,12 % des suffrages exprimés, soit 44 000 voix d’avance sur près de 19 millions de votants[27]. Les allégations de fraudes portées par ses adversaires de droite conduisent le Jury national électoral (JNE) à examiner les résultats. Les semaines qui suivent sont particulièrement tendues, alors que plusieurs centaines d'officiers à la retraite signent une lettre appelant l'armée à empêcher l'investiture de Pedro Castillo et que des manifestations anticommunistes émaillées de violence se succèdent[28]. Le , six semaines après le second tour et neuf jours avant l’investiture prévue du nouveau président, l’instance confirme les résultats ; Keiko Fujimori reconnaît alors sa défaite[29].

Jorge Luis Salas Arenas, président du Jury national électoral (JNE), remet les lettres de créance au président Pedro Castillo, à Lima, le 23 juillet 2021[30].

Président du Pérou

Investiture

 
Pedro Castillo le jour de son investiture.

Pedro Castillo succède à Francisco Sagasti le , jour du bicentenaire de l’indépendance du Pérou. Il est le premier chef d’État péruvien sans lien avec les élites économiques et politiques. Dans son discours d’investiture, il promet d’éradiquer la corruption et renouvelle sa promesse de mettre en place une nouvelle Constitution[31]. Il renonce au salaire présidentiel pour n'en garder que l'équivalent de son salaire d'instituteur[3]. Lors de son entrée en fonction, le Pérou est confronté à une très importante crise économique et est l'un des pays les plus atteints par la pandémie de Covid-19. Il devra composer avec un Parlement où les partis de droite détiennent plus des deux tiers des sièges[28].

Gouvernement

Le lendemain de son investiture, le , il annonce la nomination de Guido Bellido au poste de président du Conseil des ministres. Membre du Pérou libre, il est élu député du Congrès en avril 2021[32]. Le gouvernement est annoncé le soir même[33],[34].

Premières mesures

Prises de position

Questions économiques et sociales

Pedro Castillo est classé à gauche ou à l'extrême gauche sur l'économie et la politique étrangère. Il tient un discours socialiste et populiste, réclamant en particulier de fortes hausses des budgets de l'éducation et de la santé. Cependant, il s'engage à défendre les intérêts des entreprises privées péruviennes[24].

Sujets sociétaux

Catholique conservateur, il est considéré comme de droite sur les questions sociétales[35]. Pedro Castillo exprime son opposition à la légalisation de l'avortement, au mariage homosexuel, à l'euthanasie ainsi qu'à « l'approche de l'égalité des sexes » dans l’éducation[36] Il a l’habitude de citer des passages bibliques pour justifier son rejet de débattre sur ces sujets de société[37].

Il se prononce également pour le retrait du Pérou de la Convention américaine relative aux droits de l'homme afin de pouvoir rétablir la peine de mort dans le pays[38]. Il promet également de gracier Antauro Humala, un militaire ethnocacériste emprisonné à la suite d'un soulèvement armé conduit en 2005 pour renverser le pouvoir en place (Andahuaylazo) et pour lequel il est reconnu coupable du meurtre de policiers (quatre policiers et deux rebelles étant tués)[39].

Il propose aux Péruviens une expérience culturelle qui serait semblable à une révolution, avec des normes de consommation devant améliorer leurs « habitudes décentes » (buenas costumbres)[40][source insuffisante].

Hostile à l'immigration, il promet en 2021 d'expulser sans délai les migrants illégaux qui commettraient des crimes au Pérou[9],[41]. Il défend l'idée que la société civile doit pouvoir s'armer et appelle à étendre le modèle de « justice à la rondera » à tout le Pérou[4],[40]. Il propose également de transformer les prisons en ateliers dans lesquels les détenus travailleraient pour assumer leur entretien[42].

Institutions

Il propose de faire élire une Assemblée constituante pour remplacer la Constitution de 1993, héritée du régime d'Alberto Fujimori, le texte étant selon lui excessivement favorable à l'économie de marché[9],[43]. Il indique qu'il dissoudra la Cour constitutionnelle si celle-ci s’oppose à son projet de changement de Constitution[41].

Politique étrangère

Les analystes comparent parfois Pedro Castillo à Evo Morales, ancien président de la Bolivie[44]. Il considère que le régime dirigé par Nicolás Maduro au Venezuela constitue un gouvernement démocratique et non une dictature, et estime qu'il revient aux Vénézuéliens eux-mêmes de résoudre les problèmes de leur pays, sans ingérence étrangère ; ce soutien au régime de Maduro est minoritaire au sein de la gauche péruvienne[9],[45].

Relations avec le Movadef

Pendant la grève des enseignants de 2017, il est accusé par le ministre de l'Intérieur Carlos Basombrio d'être lié au Movadef (Mouvement pour l'amnistie et les droits fondamentaux), généralement considéré comme la branche politique du Sentier lumineux et comme terroriste par le gouvernement péruvien[46],[47]. Il participe en 2020 à des réunions virtuelles avec des membres de l'organisation pour évoquer son expérience syndicale[48]. Lui-même dément cependant avoir des liens avec le Movadef et indique avoir appartenu à une ronde paysanne visant à empêcher les incursions de la guérilla dans les villages[35],[43].

Voir aussi

Notes et références

  1. François Bougon, « Présidentielle : au Pérou, un maître d’école défie l’héritière de l’autocrate Fujimori », sur mediapart.fr, (consulté le ).
  2. (en) Franklin Briceño et Regina Garcia Cano, « Students’ struggles pushed Peru teacher to run for president », sur apnews.com, (consulté le ).
  3. a et b « Pérou: Pedro Castillo, un président novice et métis face à de nombreux défis », sur RFI,
  4. a et b Pablo Stefanoni, « Qui a peur de Pedro Castillo ? », sur alencontre.org, (consulté le ).
  5. (es) « Quién es Pedro Castillo, el candidato de izquierda y maestro de escuela que fue la sorpresa en las elecciones en Perú », sur infobae.com, (consulté le ).
  6. (es) « Pedro Castillo, un candidato sorpresa que canaliza el malestar de los pobres en Perú », sur larepublica.co, (consulté le ).
  7. (es) « Lilia Paredes Navarro, esposa Pedro Castillo, podría ser la primera dama de la nación », sur caretas.pe, (consulté le ).
  8. a b et c « Pérou : Pedro Castillo, de la campagne andine au second tour de la présidentielle », sur rfi.fr, (consulté le ).
  9. a b c d et e « Présidentielle au Pérou: le novice Pedro Castillo et l'expérimentée Keiko Fujimori », sur lexpress.fr, (consulté le ).
  10. (es) « Maestro rural Pedro Castillo, candidato sorpresa en Perú », sur prensa-latina.cu, (consulté le ).
  11. (es) « Elecciones 2021: Pedro Castillo, el dirigente magisterial que busca hacerse un lugar desde la izquierda », sur rpp.pe, (consulté le ).
  12. (es) « Elecciones 2021: Conoce a Pedro Castillo, candidato a la presidencia por Perú Libre », sur canaln.pe, (consulté le ).
  13. a et b « Pedro Castillo, un marxiste-léniniste aux portes du pouvoir au Pérou », sur lexpress.fr, (consulté le ).
  14. « Présidentielle au Pérou : l'instituteur Pedro Castillo, candidat des pauvres, peut-il l'emporter ? », sur francais.rt.com, (consulté le ).
  15. (es) « Vladimir Cerrón es condenado a 4 años y 8 meses de prisión efectiva », sur larepublica.pe, (consulté le ).
  16. (es) Ana Bazo Reisman, « Fact-checking: Pedro Castillo sobre la sentencia de Vladimir Cerrón, líder del partido Perú Libre », sur elcomercio.pe, (consulté le ).
  17. (es) René Zubieta Pacco, « Vladimir Cerrón organiza actividades finales de Castillo en la capital », sur elcomercio.pe, (consulté le ).
  18. a et b (en) Michael Stott, « Peru’s elite in panic at prospect of hard-left victory in presidential election », sur ft.com, (consulté le ).
  19. (es) « Maestro rural Pedro Castillo, candidato sorpresa en Perú », sur prensa-latina.cu, (consulté le ).
  20. (de) « Linksgerichteter Kandidat Pedro Castillo liegt überraschend vorn », sur tagesspiegel.de, (consulté le ).
  21. « Programme radical et débutant en politique: Pedro Castillo sera-t-il le futur président du Pérou ? », sur lalibre.be, (consulté le ).
  22. (es) Inés Santaeulalia, Jacqueline Fowks, « Perú se encamina a una lucha por la presidencia entre el radical Pedro Castillo y Keiko Fujimori », sur elpais.com, (consulté le ).
  23. (es) « Elecciones Generales y Parlamento Andino 2021 », sur eleccionesgenerales2021.pe (consulté le ).
  24. a et b (es) « Pedro Castillo: perfil del candidato presidencial de Perú Libre », sur larepublica.pe, (consulté le ).
  25. « Au Pérou, la droite fait bloc pour contrer le « communiste » Castillo », sur lemonde.fr, (consulté le ).
  26. https://www.ft.com/content/bddb1bec-1c26-43d7-b465-08ad035169b8
  27. (es) « Presentación de resultados - segunda elección presidencial 2021 », sur resultadossep.eleccionesgenerales2021.pe (consulté le ).
  28. a et b « Les immenses défis de Pedro Castillo, officiellement élu président du Pérou », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)
  29. « Au Pérou, Pedro Castillo proclamé vainqueur de la présidentielle », sur france24.com, (consulté le ).
  30. « Castillo recibe sus credenciales presidenciales luego de más de un mes de incertidumbre en Perú », sur France 24, (consulté le )
  31. « Pérou: Pedro Castillo investi promet un pays sans corruption et une nouvelle Constitution », sur rfi.fr, (consulté le ).
  32. « Pérou : Castillo nomme un ingénieur au poste de premier ministre », lefigaro.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  33. (es) « Así fue la juramentación del gabinete de Pedro Castillo », El Comercio,‎ (lire en ligne, consulté le )
  34. (es) « Presidente Castillo toma juramento a ministros de Estado », gob.pe,‎ (lire en ligne, consulté le )
  35. a et b (es) « Quién es Pedro Castillo, el líder de izquierda que puede llegar a la presidencia de Perú », sur semana.com, (consulté le ).
  36. (es) « Pedro Castillo está en contra del enfoque de género en el currículo escolar », sur gestion.pe, (consulté le ).
  37. « Pérou : qui est Pedro Castillo, "le premier président pauvre" du pays ? », sur RTBF Info, (consulté le )
  38. (en) « Castillo and Fujimori, rivals vying for Peru's presidency », sur france24.com, (consulté le ).
  39. (es) « Pedro Castillo asegura que indultará a Antauro Humala si es elegido presidente », sur gestion.pe, (consulté le ).
  40. a et b (en) Javier Puente, « Who is Peru’s Frontrunner Pedro Castillo? », sur nacla.org, (consulté le ).
  41. a et b « Le Pérou se lamente sur les résultats du premier tour de la présidentielle », sur franceculture.fr, (consulté le ).
  42. (es) « Pedro Castillo plantea convertir las cárceles en talleres donde los reos trabajen por su alimentación », sur gestion.pe, (consulté le ).
  43. a et b (es) « ¿Quién es Pedro Castillo? La gran sorpresa de la elección en Perú », sur pagina12.com.ar, (consulté le ).
  44. (es) « Evo Morales es el padrino del candidato Pedro Castillo », sur expreso.com.pe, (consulté le ).
  45. (es) « Pedro Castillo: "Venezuela no es una dictadura" », sur peruhoy.pe, (consulté le ).
  46. (es) « Pedro era el lobo (y casi nadie lo cree), por Carlos Basombrío », sur elcomercio.pe, (consulté le ).
  47. (es) « Castillo and Fujimori, rivals vying for Peru's presidency », sur batimes.com.ar, (consulté le ).
  48. (es) « Sendero organiza reuniones virtuales durante pandemia », sur peru21.pe, (consulté le ).

Articles connexes

Liens externes

Sur les autres projets Wikimedia :